Le Phare
LE PHARE
hœbus, de mauvais poil, se couche.
Droit sur l’écueil :
S’allume le grand borgne louche,
Clignant de l’œil.
Debout, Priape d’ouragan,
En vain le lèche
La lame de rut écumant…
— Il tient sa mèche.
Il se mâte et rit de sa rage,
Bandant à bloc ;
Fier bout de chandelle sauvage
Plantée au roc !
— En vain, sur sa tête chenue,
D’amont, d’aval,
Caracole et s’abat la nue,
Comme un cheval…
— Il tient le lampion au naufrage,
Tout en rêvant,
Casse la mer, crève l’orage
Siffle le vent,
Ronfle et vibre comme une trompe,
— Diapason
D’Éole — Il se peut bien qu’il rompe,
Mais plier — non. —
Sait-il son Musset : À la brune
Il est jauni
Et pose juste pour la lune
Comme un grand I.
… Là, gît debout une vestale
— C’est l’allumoir —
Vierge et martyre (sexe mâle)
— C’est l’éteignoir. —
Comme un lézard à l’eau-de-vie
Dans un bocal,
Il tirebouchonne sa vie
Dans ce fanal.
Est-il philosophe ou poète ?…
— Il n’en sait rien —
Lunatique ou simplement bête ?…
— Ça se vaut bien —
Demandez-lui donc s’il chérit
Sa solitude ?
— S’il parle, il répondra qu’il vit…
Par habitude.
................
— Oh ! que je voudrais là, Madame,
Tous deux !… — veux-tu ? —
Vivre, dent pour œil, corps pour âme !…
— Rêve pointu. —
Vous percheriez dans la lanterne :
Je monterais…
— Et moi : ci-gît, dans la citerne…
— Tu descendrais —
Dans le boyau de l’édifice
Nous promenant,
Et, dans le feu — sans artifice —
Nous rencontrant.
Joli ramonage… et bizarre,
Du haut en bas !
— Entre nous… l’érection du phare
N’y tiendrait pas…