Le Sorcier (Gilkin)

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La NuitLibrairie Fischbacher (Collection des poètes français de l’étranger) (p. 139-140).




LE SORCIER



Pour punir de lâches injures
Et venger d’un monde cruel
Le sang royal de mes blessures,
Selon grimoire et rituel

Au chaudron qui bout sur la flamme,
Cuisez, cervelles des hiboux,
Pomme épineuse, jusquiame,
Et vous, génitoires des loups !

Cuisez, chanvre vert, mandragore,
Cantharides, cœur de crapaud,
Flux menstruel de vieille gore,
Graisse d’enfant et sp… chaud.

Ma main experte vous arrose
D’un sang frais de chauve-souris.
Cuisez ! Puis voici du vin rose,
Du cumin et de l’ambre gris.

Ah ! vous boirez le filtre immonde,
Vous, vierges vibrantes d’orgueil,
Vous, fiers enfants, joyaux du monde,
Qui ferez sa honte et son deuil !

Vous boirez le vertige obscène,
L’élixir des ruts monstrueux,
Le sang du stupre et de la haine
Et des grands viols incestueux !

Et le soir, sous la cheminée,
Vous oindrez votre douce chair,
Nue et splendidement damnée,
De l’onguent qui mène à l’enfer.

Triple Hécate ! Mes mains amères
Servent mes courroux triomphants.
Gorgo ! Mormo ! Bombo ! les pères
Seront punis dans leurs enfants !