Le Triomphe dv cvl/Texte entier

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s. n. (p. 3-12).

LE
TRIOMPHE
DV CVL.


PHILIS ie ſuis deſſous vos Loix,
Et ſans remede à cette fois,
Mon ame eſt voſtre priſonniere :
Mais ſans iuſtice & ſans raiſon
Vous m’auez pris par le derriere,
N’eſt ce pas vne trahiſon.


Ie m’eſtois gardé de vos yeux,
Et ce viſage radieux,

Qui peut faire paſlir le noſtre,
Contre moy n’ayant point d’appas,
Vous m’en auez fait voir vn autre
De qui ie ne me gardois pas.


D’abord il ſe fit mon Vainqueur ;
Ses attraits percerent mon cœur,
Ma liberté ſe vid rauie,
Et le meſchant en cét eſtat,
s’eſtoit caché toute ſa vie
Pour faire cét aſſaſſinat.


Il eſt vray que ie fus ſurpris.
Le feu paſſa dans mes eſprits,
Et mon cœur autrefois ſuperbe.
Humble ſe rendit à l’amour,
En voyant voſtre Cul ſur l’herbe
Faire honte aux rayons du iour.


Le soleil confus dans les Cieux,
En le voyant ſi radieux,
Penſa retourner en arriere :
Son feu ne ſeruant plus de rien :
Car ayant veu voſtre derriere,
Il n’oſa plus monſtrer le ſien.


En deſcouurant tant de beautez,
Les Siluains furent enchantez,
Et Zephire voyant encore
D’autre appas que vous auez,
Meſme en la preſence de Flore,
vous baiſa ce que vous ſçauez.


La Roſe la Reine des Fleurs,
Perdit ſes plus viues couleurs,
De crainte l’Oeillet deuint bleſme.
Et Narciſſe alors conuaincu,
Oublia l’amour de luy-meſme,
En ſe mirant dans voſtre Cul.


Auſſi rien n’eſt ſi precieux,
Et la clairté de vos beaux yeux,
Voſtre teint que iamais ne change,
Et le reſte de vos appas
Ne meritent point de loüange,
Qu’alors qu’il ne ſe monſtre pas.


On m a dit qu’il a des défauts,
Qui me cauſeront mille maux :
Car il eſt farouche à merueille.
Il eſt dur comme vn diament,
Il eſt ſans yeux & ſans oreilles,
Et ne parle que rarement.


Mais ie l’ayme, & veux que mes Vers
Par tous les coins de l’Vniuers
En faſſent viure la memoire,
Et ne veux ſonger deſormais
Qu’à chanter dignement la gloire
Du plus beau Cul qui fut iamais.


Philis, cachez bien ſes appas,
Les Mortels ne dureroient pas,
Si les Beautez eſtoient ſans voiles,
Et les Dieux qui regnent deſſus nous,
Aſſis là haut ſur les Eſtoiles,
Ont vn moins beau ſiege que vous.

FIN.

AV
PLVS BEAV
CVL
DE MA CONNOISSANCE.



IE iure, ô beauté qui m’engage,
Que ton derrière m’a vaincu.
I’aimerois mieux baiſer ton CVL
Qu’Hélène au plus beau du viſage.
Cette Grecque pleine d’appas
Par qui le bon Roy Ménélas
Se vit coëffé comme une huppe,
Encore qu’on la vante ſi bien,
Ne porta iamais ſous ſa iupe
Vn CVL ſi ioli que le tien.


CONtemplez le deſtin de mon cœur qui ne VIT
Que par l’heureux eſpoir de poſſéder le voſtre ;
En liſant ce quatrin, pour ſauoir ce qu’il dit,
Prenons du premier vers, vous VN bout & moi L’AVTRE.

Sglv. Mar. 1795