Le Vaticanisme et M. Gladstone

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Le Vaticanisme et M. Gladstone
Revue des Deux Mondes, 3e périodetome 10 (p. 198-210).
LE VATICANISME
ET
M. GLADSTONE

I. The Vatican Decrees in their bearing on eivil allegiance, by the Right Hon. W. E. Glastone, 1875. — II. Vaticanism, an answer to replies and reproofs, by the Right Hon. W. E. Gladstone, 1875.

Nous vivons dans le moins dogmatique des siècles, et ceux qui s’applaudissent de la facilité avec laquelle les décisions du dernier concile ont été admises par les croyans devraient s’en inquiéter plus que s’en réjouir, car dans les soumissions trop faciles il entre presque toujours un peu d’indifférence. L’âge des cols raides et des scrupules opiniâtres est passé ; nous ne sommes plus au temps où la question de savoir si les cinq propositions étaient ou n’étaient pas dans Jansénius mettait la France en feu, au temps où d’héroïques religieuses étaient prêtes à tout sacrifier plutôt que de signer un formulaire que désapprouvait leur conscience. Quand les cordeliers déférèrent au pape Pie V soixante et seize propositions de Michel Baius, il se trouva dans la bulle de condamnation une virgule qui, mise à une place ou à une autre, aggravait ou adoucissait la sentence. L’université de Louvain députa auprès du saint-père pour savoir où il fallait mettre la virgule. La cour de Rome envoya pour toute réponse un exemplaire de la bulle où il n’y avait point de virgule. C’était le temps de la foi, rien n’est indifférent aux vrais croyans, ils estiment que les virgules sont des affaires de conséquence. Aujourd’hui on y regarde de moins près ; les consciences sont devenues plus faciles, plus débonnaires, elles sont disposées aux compromis. Aussi ne faut-il pas s’étonner que les décrets du Vatican de 1870 aient fini par être approuvés de ceux même qui les avaient combattus ; ils se sont rendus aux raisons qu’on leur donnait, ils n’ont gardé rancune que des mauvais procédés. Ceux qui conservaient des scrupules ont pris le parti de s’en taire, ou de n’en parler qu’a ces amis intimes à qui l’on dit tout, D’autres, plus nombreux, se sont soumis sans résistance, mais en se réservant le droit d’interprétation ; il n’est point de texte qu’on ne puisse amender par une glose heureuse. De nos jours, l’église est pleine d’hérétiques sans le savoir, dont le credo, est une cote mal taillée. On commente les paroles inspirées, on les subtilise, chacun les arrange à sa façon, et le monde continue d’aller comme devant, sans que personne ait le droit de se plaindre de personne. « Sa sainteté, lisait-on il y a quelques mois dans un journal anglais, a lancé dans le monde ses interdictions et ses anathèmes, et le monde en a tenu peu de compte. Les fidèles les ont reçus avec un respect conventionnel, après quoi ils se sont hâtés d’assurer à leurs amis protestans que les édits papaux ne peuvent modifier en rien la conduite d’aucun être humain. »

Toutefois, si les décrets du Vatican ont causé peu de dérangement dans les consciences ils ont eu des conséquences politiques d’une incontestable gravité, et les hommes d’état ont plus de peine à s’en accommoder que la communion des fidèles. En 1870, l’église a condamné définitivement la religion de Bossuet, les principes du gallicanisme et la déclaration de 1682, qui établissait que la papauté n’a aucune puissance ni directe ni indirecte sur les choses temporelles, et que ses décisions en matière de foi ne sont sûres qu’après que l’église les a acceptées. Par un effet rétroactif, les pères du concile qui ont proclamé l’infaillibilité du pape ont attribué le caractère d’articles de foi aux déclarations contenues dans l’Encyclique et dans le Syllabus de 1864, et nous sommes obligés de croire que le pape était inspiré d’en haut quand il a condamné tous les principes sur lesquels repose la société moderne. Nous devons croire également que le saint-siège a revendiqué jadis de pleine autorité le droit de s’ingérer dans les questions d’ordre civil ; nous devons tenir pour inspirée jusque la bulle Unam sanctam, qui statue que le pouvoir temporel est soumis au pouvoir spirituel, et que Rome à reçu du ciel la mission de citer les rois et les républiques à sa barre. L’ombre de Boniface VIII doit être fière de ce qui se passe en Angleterre ; — depuis trois mois, le royaume-uni s’occupe de cette bulle Unam sanctam autant que des progrès de la Russie dans l’Asie centrale, ou des dangers que peut courir l’indépendance de la Belgique. Il y a là de quoi consoler ce terrible homme des duretés de Philippe le Bel, des insultes de Nogaret et de la haine de Dante, qui s’est permis de lui assigner une place dans le troisième compartiment du huitième cercle de son enfer.

Les sages n’avaient pas attendu que le nouveau dogme fût promulgué pour signaler les difficultés dangereuses qu’il allait apporter dans les relations des gouvernemens avec l’église. Que de paroles sensées et fatidiques ont prononcées à ce sujet quelques-uns des prélats allemands dont là triste destinée excite aujourd’hui les sympathies de toute l’Europe ! « Ils sont tous excellens, disaient d’eux les infaillibilistes, mais ils ont perdu les grandes idées de l’église ; il leur faut deux mois de Rome, et tout le monde sera d’accord. » Deux mois de Rome n’ont pas changé leur cœur, mais leurs avertissemens ne furent point écoutés, ils ont dû céder au torrent, et ils portent la peine d’intempérances d’opinion qu’ils avaient réprouvées. Les modérés ont payé pour les téméraires et les clairvoyans pour les aveugles ; c’est la loi de ce monde.

À quoi sert la clairvoyance ? Le 9 avril 1869, le prince Hohenlohe, aujourd’hui ambassadeur d’Allemagne à Paris, alors président du ministère bavarois, avait adressé à tous les agens diplomatiques de la Bavière une circulaire par laquelle il expliquait que le dogme de l’infaillibilité avait une portée plus politique que religieuse, et qu’il était de l’intérêt des gouvernemens de se concerter pour adresser à Rome de communes représentations, ou tout au moins pour protester d’avance contre toute décision concernant les rapports de l’église et de l’état qui serait prise par le concile sans la participation des représentans du pouvoir séculier. Cette circulaire fait le plus grand honneur à la sagacité de celui qui l’a écrite et qui a toujours passé en Allemagne pour un esprit aussi judicieux que modéré. À quelqu’un qui le félicitait d’avoir attaché le grelot, le prince Hohenlohe répliqua modestement : « Hélas ! ce n’est qu’un grelot, et je voudrais avoir une cloche. » Son grelot d’alarme n’inquiéta personne. Le gouvernement italien estimait qu’il avait de bonnes raisons de ne pas s’occuper de la question. — « Nous autres Italiens, disait à ce propos un politique de Florence, nous sommes trop polis ou trop indifférens pour chicaner le pape sur l’idée qu’il se fait de lui-même. Au surplus notre principe est de permettre à l’église de dire tout ce qui lui plaît ; quand elle parle trop haut, nous plaçons sous le porche quelqu’un qui chante un autre air, et ainsi chacun s’amuse à sa façon. » À Vienne, on déclina péremptoirement l’invitation contenue dans la circulaire. L’Autriche a toujours été jalouse des initiatives que peut prendre la Bavière, et dans ce temps elle avait le désir d’être libérale chez elle, sans renoncer à faire bon ménage avec les ultramontains des états du sud de l’Allemagne, dont les sympathies pouvaient lui être utiles. Elle déclara qu’elle s’en remettait à ses évêques du soin de faire respecter par le concile les droits de l’état. La France répondit sur un ton plus cordial qu’elle remerciait, qu’elle prenait acte, qu’elle approuvait en principe, qu’elle mettrait la question à l’étude, mais que rien ne pressait. La Prusse s’en tint également à une réponse dilatoire ; l’empire n’était pas encore fait, elle ménageait la curie romaine. Son représentant à Rome, le comte d’Arnim, aussi peu avisé qu’il le fut plus tard à Paris, opinait qu’il ne fallait pas prendre au sérieux les inquiétudes du cabinet bavarois. Il est vrai que, plus tard, passant à Munich, il eut avec le prince Hohehlohe et le chanoine Döllinger des entretiens qui lui ouvrirent les yeux, et le 17 juin 1870 il annonçait dans un pro memoria prophétique que la promulgation du dogme de l’infaillibilité provoquerait une crise redoutable dans les pays dont les souverains sont protestans, que la réaction de la société politique contre les empiétemens de Rome serait si forte que des gouvernemens catholiques seraient obligés d’y prendre part, qu’on pouvait prévoir la longue vacance de plus d’un siège épiscopal, que les jésuites seraient expulsés d’Allemagne, que des mesures seraient prises contre les ordres et les congrégations religieuses, — prédictions véritables, mais trop tardives. À ce moment déjà, la partie était définitivement gagnée par ceux qu’un homme d’état anglais appelle « les prophètes voilés qui se tiennent derrière le trône. » Il était bien tard pour avertir les évêques de la minorité, qui n’avaient pas été soutenus en temps utile, qu’il ne s’agissait plus d’argumenter, « que toute la politique de la curie romaine avait été dès le début fondée sur l’intimidation, que, si l’opposition s’était servie de cette arme, si elle avait rendu attaque pour attaque, l’état-major italien, aurait peut-être, au grand dépit des fanatiques français et anglais, donné le signal de la retraite. » Les diplomates ont été mis au monde pour empêcher les malheurs, ils peuvent laisser aux historiens le soin de les expliquer.

Le danger que les gouvernemens n’ont pas su ou n’ont pas voulu prévenir n’était que trop réel ; l’événement l’a prouvé. La guerre entre l’état et l’église a éclaté dans deux pays, l’Allemagne et la Suisse, avec une violence vraiment déplorable. Elle vient d’éclater aussi en Angleterre ; mais, grâce à Dieu, ce n’est jusqu’aujourd’hui qu’une guerre de plume et d’écritoire, très vive, très acrimonieuse, très passionnée, très bruyante, provoquée par la publication d’une brochure que Rome a mise à l’index, et qui est intitulée des Décrets du Vatican dans leur rapport avec l’allégeance civile. Cette brochure était bien de nature à faire sensation ; elle était écrite et signée par un homme d’état dont la situation et l’autorité sont considérables ; A vrai dire, ses amis hésitent à le regarder comme un grand homme d’état, mais ses ennemis eux-mêmes le considèrent comme un financier de premier ordre et comme l’un des premiers orateurs de l’Angleterre. Ajoutons que sa brochure avait le caractère d’un manifeste, et qu’on s’est demandé avec inquiétude où l’auteur en voulait venir, quelles étaient ses intentions secrètes, à quelle nécessité pressante il avait obéi en prenant la plume. Ceux de ses adversaires à qui il convenait de ne pas s’inquiéter ont affirmé que M. Gladstone avait tout simplement cédé à un accès de mauvaise humeur, qu’il ne pouvait pardonner aux catholiques certaines conversions opérées dans sa famille. D’autres ont dit qu’il y avait en lui deux hommes, un chef de parti et un fellow d’Oxford ; et que le chef de parti, lorsqu’il était de loisir, empruntait la plume du fellow pour écrire des dissertations sur Homère ou sur la théologie. D’autres encore ont prétendu que M. Gladstone entretient des relations suivies avec Munich et le docteur Döllinger, et qu’il avait promis à ses amis d’Allemagne de saisir la première occasion pour provoquer dans le royaume-uni un schisme vieux-catholique. Si nous interrogeons M. Gladstone lui-même, il nous dira qu’il a entrepris une polémique qui n’était pas dans ses goûts, pour remplir un impérieux devoir de conscience, et nous n’avons pas de peine à l’en croire. Il n’a pu se mettre en règle avec sa conscience sans encourir les reproches de son parti, dont il compromettait les intérêts en lui aliénant les voix des catholiques. Il a résigné son leadership, ses fonctions de chef de l’opposition dans la chambre des communes, et un tel sacrifice a dû lui coûter. Il peut se dire pour se consoler qu’aucun discours prononcé par lui au parlement comme leader du parti libéral n’aurait pu produire en Angleterre plus d’émotion que sa brochure théologico-politique, dont il s’est vendu près de 200,000 exemplaires. Les réponses ne se sont pas fait attendre, elles se sont multipliées à l’infini. Il a répliqué à son tour ; mais cette controverse n’a produit jusqu’à ce jour ni lois Falk, ni aucune mesure de rigueur, elle n’a causé l’emprisonnement de personne. M. Gladstone considère la doctrine de l’infaillibilité comme dangereuse pour l’état, il a signalé le péril, c’est à l’opinion publique qu’il s’en remet du soin de le conjurer.

Bien que le catholicisme ait réussi à s’organiser fortement dans toute l’étendue du royaume-uni, bien qu’il y construise partout des monastères et des églises, des hôpitaux, des collèges et des écoles, bien que les jésuites s’y livrent en pleine liberté à une active propagande, qui a su se créer des centres d’action jusque dans l’armée et la marine, les catholiques ne constituent qu’un sixième de la population, et cette proportion ne tend pas à changer. Chaque année, dit-on, ils se renforcent d’un ou deux milliers de conversions opérées surtout dans les classes moyennes ; mais ce renfort est plus que compensé par l’accroissement rapide de la population protestante et par l’émigration irlandaise. Si le catholicisme anglais n’est pas assez puissant pour se faire craindre, il est assez habile pour désarmer par sa conduite les animosités dont il était autrefois l’objet. Il n’affecte point des allures sectaires, il ne fait pas bande à part, il s’accommode de toutes les libertés anglaises, et il en use à son avantage. Il a l’humeur concluante, il entre volontiers en communication avec l’hérésie, même avec la libre pensée, il n’anathématise personne, il interroge et il discute. On assure que M. Manning, archevêque de Westminster, est l’un des habitués les plus assidus du Metaphysical Club, qu’il y dîne souvent en compagnie du rationaliste et positiviste M. Spencer, et qu’il aime à conférer avec lui sur quelques points de haute métaphysique. Ceux qui connaissent M. Manning affirment que, s’il faisait partie d’une académie et que M. Spencer en devînt membre, il n’aurait garde de donner sa démission. On affirme aussi que, s’il siégeait au parlement, il ne se croirait point obligé d’employer son éloquence à convaincre tel écrivain de matérialisme, tel autre d’athéisme, et à condamner les professeurs d’Oxford sur ce qu’ils ont dit et même sur ce qu’ils n’ont pas dit. M. Manning n’estime point que le rôle de dénonciateur soit le plus beau que puisse remplir un évêque, et on prétend, chose plus étonnante encore, que, lorsqu’il cite ses adversaires, il se croit tenu de ne point tronquer leur pensée. Les principaux chefs du catholicisme en Angleterre sont de vrais gentlemen, dont les procédés ne sentent pas la sacristie, et ils se sont appliqués avec succès à dissiper les préjugés haineux du vieil esprit anglais contre Rome. Aussi ne pouvait-on craindre que la brochure ou le manifeste de M. Gladstone fût le signal d’une persécution contre l’église. Ceux qui ont paru éprouver cette crainte ont cédé à des appréhensions irréfléchies, sans compter qu’il est quelquefois utile de paraître avoir peur. M. Gladstone ne demandait point leur tête, ni un seul de leurs cheveux ; il se proposait seulement de contrarier les efforts souvent heureux de leur propagande en posant à son pays cette question : « Depuis la promulgation des décrets du Vatican, est-il possible de concilier la soumission que réclame un pape infaillible avec l’allégeance que tout Anglais doit à sa reine ? En un mot est-il possible d’être à la fois un bon Anglais et un bon catholique ? »

Assurément cet indiscret questionneur ne pouvait être soupçonné d’une malveillance systématique et hargneuse à l’égard du catholicisme. « Profondément attaché à ma propre communion religieuse, nous dit-il lui-même, à l’église de ma naissance et de mon pays, je n’ai jamais ressenti pour elle une affection exclusive ou insulaire ; mais je l’ai regardée avec gratitude comme cette portion de la grande famille des rachetés dans laquelle une place m’a été assignée, et je n’ai jamais cessé de porter un vif intérêt à toutes les autres tribus de cette famille, quels que fussent leur nom et leur étendue, leurs perfections ou leurs imperfections. » Il ajoute qu’il a toujours souhaité que les bons élémens prévalussent sur les mauvais dans cette grande communion latine qui comprend près d’une moitié de la chrétienté, dans cette église qui a donné au monde des Thomas A Kempis et des Thomas Morus, des Érasme et des Pascal, dans cette église à laquelle, dit-il, « appartiennent quelques-uns d’entre nous, dont personne ne peut nier qu’ils ne soient aussi humbles, aussi charitables, aussi portés au renoncement et à l’abaissement volontaire, en un mot aussi évangéliques que peut l’être le plus évangélique des protestans. » Au surplus on sait que les sympathies de M. Gladstone sont pour la haute église, c’est-à-dire pour cette partie de l’église anglicane qui confine au catholicisme par l’importance qu’elle donne à la tradition, par le caractère de réalité qu’elle attache aux sacremens, par la pompe des cérémonies et du culte. M. Gladstone a pris part jadis à cette fameuse insurrection mystique dont le signal fut donné par l’université d’Oxford et qui tourna au profit de Rome. En ce temps, l’église anglicane laissa tomber de sa royale couronne quelques perles de grand prix, des mains habiles les ramassèrent. M. Gladstone n’est pas de ceux qui poussent jusqu’au bout les aventures de leur esprit ; — il demeura dans le bercail, ainsi que M. Pusey, dont la conversion a été longtemps espérée et ne s’est jamais accomplie, ce qui faisait dire au pape que le docteur Pusey était comme la cloche qui appelle les fidèles à la messe et qui n’y va pas elle-même. M. Gladstone, lui non plus, ne va pas à la messe, mais il n’a ni haine ni préjugés contre ceux qui y vont. Il n’a pu voir sans affliction la sainte apostasie du docteur Newman ; il ne laisse pas de porter à cet ami de son jeune âge une affection qui va jusqu’à la tendresse, un respect qui touche à la vénération. Il le regrette, il le pleure, il s’écrie :

Quis desiderio sit pudor aut modus
Tam cari capitis ?

On ne peut croire non plus que les principes politiques de M. Gladstone et son attachement pour une religion d’état le rendent intolérant à l’égard des communions indépendantes. A l’exemple des Canning et des Peel, il a commencé par le torysme, et insensiblement il est devenu libéral à la façon anglaise. Il ne s’est pas laissé gagner par cet enthousiasme qu’inspirent en France les formules générales et les convictions abstraites ; il a pris conseil des circonstances, de son bon sens, de son esprit d’opportunité. Les situations ont modifié ses principes, et il n’a pas rougi de changer ; il s’est dit apparemment, comme l’un de ses compatriotes, « qu’il n’y a que Dieu et les imbéciles qui ne changent pas. » — « Jadis, écrivait naguère un théologien catholique, l’état avait une conscience, George III avait une conscience ; mais, à côté de lui, à la tête des affaires, il y avait d’autres hommes qui, eux aussi, avaient une conscience, et si le roi ne pouvait rien faire sans ses conseillers, ses conseillers ne pouvaient rien faire d’accord avec lui dès qu’une question religieuse était soumise à leurs délibérations… Sans contredit, il serait mieux que l’état eût une conscience ; mais que faire lorsqu’on matière religieuse il en a une demi-douzaine, ou une vingtaine, ou plusieurs centaines, toutes très différentes les unes des autres ? » Le seul parti à prendre est de déclarer que l’état renonce à dogmatiser, qu’il s’attachera désormais à séculariser la loi, et que, neutre en religion, il accordera la liberté à toutes les confessions, sous réserve de ses droits et des intérêts de la paix publique. C’est par suite de ce raisonnement qu’un ancien tory tel que M. Gladstone est devenu le chaud partisan de la liberté religieuse.

On peut affirmer qu’aucun homme d’état anglais n’a rendu de plus grands services aux catholiques ; on peut affirmer aussi que les catholiques l’ont mal payé de son zèle. Après avoir bravé le déplaisir des tories et des ultras anglicans en abolissant l’église officielle d’Irlande, M. Gladstone s’était proposé de transformer l’université protestante de Dublin en université mixte, et de permettre au catholicisme d’y planter sa tente et d’y déployer son drapeau. Cet acte de générosité n’a point été agréé par la curie romaine, à qui les institutions d’enseignement mixte ont toujours été suspectes. On y respire un air trop libre, les doctrines s’y relâchent, on y court le risque de devenir tolérant, d’apprendre à respecter ses adversaires en les voyant de près et de contracter des amitiés qui à la longue agissent sur les opinions. Rome s’est émue, Rome a parlé, et les prélats catholiques d’Irlande ont réussi par l’influence qu’ils exerçaient sur un certain nombre de membres irlandais du parlement à faire rejeter en février 1873 le bill proposé par M. Gladstone et par suite à renverser son ministère. Il est assez naturel que ce grave incident lui ait fait faire des réflexions, que cette intervention de Rome dans les délibérations du parlement anglais l’ait confirmé dans les craintes que lui avaient inspirées l’Encyclique, le Syllabus et les décrets du Vatican. Il s’est rappelé que dans toutes les transactions qui sont intervenues entre le gouvernement anglais et l’église romaine et qui ont amené l’émancipation civile et politique des catholiques de la Grande-Bretagne, ceux-ci avaient fait la profession la plus explicite de gallicanisme, qu’en 1789 241 prêtres, y compris les vicaires apostoliques, avaient protesté par un acte public que les catholiques anglais n’admettaient point l’infaillibilité du pape, et ne reconnaissaient à aucun pouvoir ecclésiastique le droit de s’immiscer dans aucune question touchant à la constitution, à l’indépendance, aux lois et au gouvernement du royaume. Il s’est souvenu d’une adresse pastorale parue en 1826, laquelle déclarait que l’infaillibilité du pape n’est point un article de foi pour les catholiques ; il s’est souvenu d’un catéchisme employé jusque dans ces dernières années à Maynooth, et dans lequel il est dit que les fidèles peuvent nier en sûreté de conscience que le pape, même parlant ex cathedra, soit infaillible. M. Gladstone en a conclu que le dernier concile avait opéré une révolution dans l’église, que cette église n’était plus celle avec qui Pitt et sir Robert Peel avaient traité, que désormais elle était inféodée « à ce système plus politique que religieux qu’on appelle en Allemagne le vaticanisme, » que le vaticanisme supprime tout contrôle, toute discussion et la liberté du consentement, que l’épiscopat a été gravement atteint dans sa dignité et dans son pouvoir, qu’il n’est plus comme par le passé en possession d’exercer une sorte d’arbitrage officieux entre Rome et les gouvernemens, qu’il est devenu l’instrument docile d’une volonté étrangère et souveraine, que les décrets du Vatican ont consacré la prétention du saint-siège de prononcer en maître sur toutes les questions qui intéressent le bonheur éternel des hommes, qu’il est très difficile de définir ce qui intéresse ou ce qui n’intéresse pas le bonheur éternel, que le pape se réserve le droit de faire seul cette définition, que partant sa compétence est illimitée, que, selon toute apparence, il interviendra de plus en plus dans les affaires temporelles, et qu’il était urgent de rendre les catholiques de la Grande-Bretagne attentifs à cette probabilité et de leur proposer le cas de conscience que voici : si demain le pape déclarait nulle et sans effet une loi passée dans le parlement anglais, comme il a déclaré nulles et sans effet les lois ecclésiastiques votées par le parlement prussien, comment vous y prendriez-vous pour concilier l’obéissance que vous lui devez avec vos devoirs de citoyens anglais ? Si demain le saint-père, en vertu de la bulle Unam sanctam, déposait la reine d’Angleterre, quelle conduite tiendriez-vous ? et n’êtes-vous pas forcés de reconnaître que désormais votre loyauté politique est à la merci d’une puissance étrangère ?

Laïques et gens d’église, tous les catholiques marquans du royaume-uni se sont crus obligés de répondre à cette question pressante, et ils ont déclaré à l’envi qu’ils la tenaient pour une insulte, que leur loyauté politique était au-dessus de tout soupçon, que tous ils se sentaient capables d’être à la fois de bons Anglais et de bons catholiques. A la vérité M. Gladstone n’avait jamais mis en suspicion leur loyauté, il avait voulu seulement les rendre attentifs aux conflits de conscience auxquels on s’expose par des engagemens contradictoires. Il était convaincu que « les fiers léopards » leur étaient plus chers que la logique, il ne leur avait pas fait l’injure de douter de leur patriotisme et de leur inconséquence. Leur réponse avait prouvé que si le gallicanisme ancien, comme l’écrivait un jour le père Lacordaire au comte de Montalembert, « est une vieillerie qui n’a plus que le souffle et à peine, le gallicanisme instinctif, qui consiste à redouter un pouvoir qu’on lui présente sans limites et comme s’étendant par tout l’univers sur 200 millions d’individus, est un gallicanisme très vivant et très redoutable, parce qu’il est fondé sur un instinct naturel et même chrétien. » Mais il n’a pas suffi aux catholiques du royaume-uni de protester qu’ils étaient de bons citoyens ; ils ont tâché d’établir qu’il n’y a aucune contradiction entre l’obéissance qu’ils doivent au souverain pontife et le serment d’allégeance qu’ils prêtent à leur reine. Les deux grands docteurs de la communion anglo-romaine ont l’un et l’autre entrepris cette démonstration. Le malheur est que l’archevêque de Westminster et M. Newman ne s’accordent ni dans leurs prémisses, ni dans leurs conclusions, — et comment s’accorderaient-ils ? L’un a contribué plus que personne à la proclamation du dogme de l’infaillibilité, « et après avoir été à la peine il a été à l’honneur. » L’autre s’est soumis ; mais on prétend que depuis ce jour ses épanchemens intimes respirent je ne sais quoi qui ressemble à la tristesse d’un prisonnier.

M. Manning possède le génie de l’argumentation. Il a la parole en main, c’est un ready debater, et nous comprenons sans peine que M. Spencer prenne plaisir à causer métaphysique avec lui. M. Manning pose sans sourciller des principes effrayans, et après avoir épouvanté son auditoire il lui démontre qu’à l’application ces principes formidables sont parfaitement inoffensifs. Sa dialectique souple et hardie fait des tours d’adresse pareils à ceux de ces jongleurs japonais qui brandissent des épées, les lancent en l’air et les reçoivent avec aisance sans jamais se blesser. On croirait, à les regarder faire, que ces épées ne tueraient pas une mouche ; mais les mouches ont peut-être quelque intérêt à ce que l’expérience ne se fasse pas. M. Manning admet dans toute sa rigueur la bulle Unam sanctam. Il tient que, dans tout ce qui concerne le bonheur éternel des hommes, l’église représentée par son chef a le droit de juger et de contraindre, qu’elle a un pouvoir de juridiction sur les princes qui transgressent la loi divine ; mais il se hâte d’ajouter que l’exercice de ce pouvoir dépend de certaines conditions morales et matérielles, que c’est affaire de circonstances, qu’on n’a pas à craindre que Rome abuse ou mésuse de son autorité. Il reconnaît au saint-siège, sans réserve comme sans difficulté, le droit de déposer les rois, mais il se porte garant que le pape Pie IX n’en usera pas pour déposer la reine Victoria[1]. Pourquoi cela ? parce que la reine d’Angleterre est une hérétique, et que le souverain pontife ne fait sentir le poids de son autorité qu’à ceux qui ont fait vœu d’être siens. Il est vrai que le saint-père a rappelé dernièrement dans une lettre célèbre à l’empereur Guillaume que sa juridiction s’étend jusque sur les hérétiques qui ont été baptisés ; mais, bien que l’église étende sa juridiction sur tous les baptisés, M. Manning nous assure que l’hérésie de vieille date, l’hérésie invétérée, l’hérésie dûment constatée, protège les têtes royales contre les foudres du Vatican, de telle sorte que, si la déposition des empereurs Henri IV et Frédéric II fut un acte juste et légal, la déposition de la reine Victoria serait un acte illégal et injuste. Au dire de gens bien informés, il ne serait pas impossible que l’archevêque de Westminster montât quelque jour sur le trône pontifical. La reine Victoria pourra voir sans déplaisir et sans inquiétude son élection ; ce sera au roi d’Espagne, au roi d’Italie, à l’empereur d’Autriche, à tous les princes qui n’ont pas l’avantage d’être hérétiques, de prendre leurs mesures pour mettre leur couronne en sûreté.

Cette couronne ne serait pas en péril, si, contre toute apparence, la succession de saint Pierre était un jour dévolue à cet humble oratorien qu’on appelle le docteur John Henry Newman. Ce grand théologien est de la race des méditatifs, de la famille des A Kempis ; il n’aime pas la guerre, il ne la fait qu’à regret, elle contriste sa belle âme et son cœur miséricordieux ; il s’exhale de tout ce qu’il écrit, même de ses ouvrages polémiques, comme un parfum de grâce et de charité. Il avait prévu avec tristesse que les décrets du Vatican allumeraient partout la discorde ; il s’est résigné au fait accompli, mais il a employé la douce subtilité de son esprit, singulier mélange de finesse et de candeur, à en atténuer les conséquences, à les réduire à leur minimum, ce qui lui a valu le titre de grand docteur en minimisme. Plein de respect pour l’autorité pontificale, ce minimiste n’admet pas cependant que tout ce qui se passe à Rome soit bon, juste et saint. Il se plaint qu’au pied du rocher de saint Pierre « il y ait beaucoup de malaria. » Il se plaint aussi qu’il y ait dans l’église un trop grand nombre « d’adulateurs et de sycophantes, » et il se défie de ces gens-là. La religion est pour lui une sorte de torysme ou de loyauté spirituelle ; mais il refuse au saint-père lui-même le droit d’entreprendre sur sa conscience : — « Si j’étais obligé, nous dit-il, de mêler la religion aux toasts qu’on porte après les repas, je boirais au pape si vous le voulez, mais d’abord à la conscience, et le pape ne viendrait qu’après[2]. » M. Newman ne considère pas comme un texte sacré le Syllabus, lequel n’est pour lui qu’un index raisonné d’erreurs, rédigé par l’ordre du vicaire de Jésus-Christ, mais n’émanant pas directement de lui. Il estime que l’infaillibilité du successeur de saint Pierre ne se manifeste que lorsqu’il parle ex cathedra, et qu’il faut tant de conditions pour qu’il parle véritablement ex cathedra, que ce cas est infiniment rare. Il ajoute que le souverain pontife n’est infaillible ni dans ses lois, ni dans ses commandemens, ni dans son administration, ni dans sa politique, et qu’il serait permis de lui résister, s’il s’avisait de troubler l’état, d’où l’on peut conclure que le pape est sujet à l’erreur lorsqu’il décrète contre les gouvernemens, lorsqu’il ordonne aux évêques allemands d’aller en prison plutôt que d’obéir aux lois Falk, lorsqu’il affirme que la possession d’un domaine en Italie ou d’un simple jardin est nécessaire à son indépendance spirituelle, lorsqu’il excite les nations étrangères à intervenir dans les affaires italiennes, ou lorsqu’il interdit aux évêques d’Irlande de se prêter à l’établissement d’une université mixte à Dublin.

À ce compte, comme on l’a remarqué, « la papauté infaillible n’est plus qu’une abstraction sublime, une entité métaphysique, perpétuellement occupée à s’admirer elle-même, mais incapable d’intervenir, si ce n’est nominalement, dans les affaires de ce monde sublunaire[3]. » Plût au ciel qu’il y eût aujourd’hui en Europe et en Amérique beaucoup de minimistes instruits à l’école du docteur Newman ! La paix de l’église et de l’état serait assurée ; mais on peut se demander si les accommodemens qu’il prêche avec une éloquence pleine d’onction sont en faveur à la cour de Rome. Il n’a pas été désavoué ni condamné, ce serait un acte bien grave que de désavouer le docteur Newman ; — qu’en penserait l’église anglo-romaine, où son nom est en honneur, où son autorité est considérable ? Déclarer que le docteur Newman n’est pas catholique serait condamner bien des gens à ne plus l’être. On peut remarquer toutefois que M. Manning a été promu aux premières dignités de l’église, qu’il a reçu le chapeau, et que selon toute vraisemblance M. Newman mourra docteur et simple oratorien. On peut remarquer aussi que son dernier écrit ne lui a valu aucune de ces lettres de félicitation et d’encouragement dont Rome est prodigue pour ceux qu’elle aime ; — est-il sûr que nul adulateur, que nul sycophante n’en ait jamais reçu ?

Non, rien ne prouve que le minimisme soit en bonne odeur à Rome, rien ne prouve que « les prophètes voilés qui se tiennent derrière le trône » interprètent de la même manière que le docteur Newman les décrets du Vatican. Tout porte à croire au contraire qu’ils comptent se servir de ces décrets comme d’une arme de guerre, et qu’en les promulguant ils ont moins consulté le besoin des consciences que les intérêts de leur politique. Avant cette promulgation, manquait-il quelque chose à l’autorité dogmatique de l’église ? Assurément non. A-t-on voulu que le pape fût infaillible pour lui donner la liberté de compléter le Credo en proclamant de nouveaux articles de foi ? Il n’y a pas d’apparence, on sait à Rome qu’en fait de dogmes les consciences ont toute leur charge ; mais beaucoup de gens se permettaient de douter que Rome eût le droit d’intervenir dans les affaires politiques des états, et c’est ce doute impie et gallican qui a été condamné en 1870. Les prophètes voilés se sont promis d’écraser la tête du serpent ; le serpent, c’est la révolution, et la révolution, c’est tout gouvernement qui entend rester maître dans sa maison, qui n’admet pas que l’église soit un état dans l’état, un empire dans l’empire, et qui se croit autorisé à établir sans la consulter le mariage civil ou à proclamer la liberté de conscience dans un pays où la majorité est catholique. En 1855, le pape Pie IX a déclaré nulle et sans effet la loi piémontaise qui retirait aux ordres monastiques la personnalité civile, et il a excommunié quiconque avait pris part à la rédaction de cette loi. La même année, il a déclaré nuls et sans effet différens actes du gouvernement espagnol, y compris quelques mesures de tolérance à l’égard des cultes non-catholiques. Il a depuis condamné pour des crimes du même genre le gouvernement autrichien, le gouvernement mexicain, le gouvernement de la Nouvelle-Grenade, le gouvernement du Brésil. La majorité infaillibiliste du concile du Vatican a voulu donner aux anathèmes politiques du saint-père le caractère de décrets divins, et, lorsqu’au mois de février de cette année le pape Pie IX a déclaré nulles et non avenues les lois ecclésiastiques votées par le parlement prussien, M. de Bismarck était tenu de savoir que c’était bien Dieu qui lui parlait ; mais M. de Bismarck a sa dogmatique particulière, et les anathèmes ne l’affectent que lorsqu’ils se présentent à lui un pistolet au poing.

Il est possible que M. Gladstone, comme le lui a reproché l’archevêque de Westminster, ait commis quelques erreurs en matière de droit canonique, ou qu’il n’ait pas spécifié suffisamment ce qu’il faut entendre par un décret ex cathedra, qu’il n’ait pas distingué assez nettement l’assistentia et l’inspiratio ; assurément il ne s’est pas trompé en avançant que le dernier concile n’a pas fait une œuvre de paix et qu’on peut lui imputer en partie l’état de crise confessionnelle où se trouvent aujourd’hui l’Allemagne et la Suisse. Il aurait du ajouter que cette crise aiguë est de nature à consterner les libéraux, qui ne voient pas ce que la liberté et la religion peuvent y gagner. Les gouvernemens ont le droit de se défendre, mais il est difficile de se défendre longtemps sans devenir agressif. On a pensé à Berlin qu’il serait dangereux pour la paix publique que les conducteurs spirituels d’un bon tiers des Prussiens se permissent de professer les principes de Boniface VIII, et devinssent les complices d’une conjuration contre l’indépendance de l’état. Le gouvernement s’est cru autorisé à demander quelques garanties au clergé et à ceux qui l’instruisent. Sa première résolution fut d’obliger les jeunes gens qui se destinent à la prêtrise à faire leurs études de théologie dans les facultés catholiques des universités, et de ne donner une cure et un traitement qu’à ceux qui auraient passé un examen satisfaisant de minimisme. Les violentes résistances qu’a rencontrées son projet lui ont fait perdre son sang-froid ; il est entré dans la voie des rigueurs et des maladresses, il a oublié l’axiome médical : in morbis chronicis tempus et patientia. Les libéraux ne sauraient approuver quelques-uns de ses procédés ; mais s’ils représentaient à M. de Bismarck qu’il est inutile de faire des lois ecclésiastiques, et qu’au lieu de se défendre contre Rome, il suffit de raisonner avec elle pour l’amener à un accord pacifique, il pourrait leur répondre qu’il n’est pas facile à la prudence humaine de converser avec la sagesse divine, qu’elles ne parlent pas la même langue, qu’elles ont peine à s’entendre, — et il pourrait citer le mot de Voltaire, « qu’il ne faut pas s’aviser de dire à un homme les défauts de sa maîtresse, ni à un plaideur le faible de sa cause, ni des raisons à un inspiré. »


  1. The Vatican Decress, by Henry Edward, archbishop of Westminster, 1875, p. 85 et suivantes.
  2. A Letter addressed to his Grace the duke of Norfolk, by John Henry Newman of the Oratory, 1875, p. 74.
  3. Results of the Expostulation of the Right Hon. W. E. Gladstone, by Umbra Oxoniensis, 1875, p. 45.