Le Vigneron dans sa vigne/Murmures

La bibliothèque libre.
Le Vigneron dans sa vigneMercure de France. (p. 232-235).



MURMURES


La bêche. — Fac et spera.

La pioche. — Tu dit toujours ça, mais moi aussi.


Les fleurs. — Fera-t-il soleil aujourd’hui ?

Le tournesol. — Oui, si je veux.

L’arrosoir. — Pardon, si je veux, il pleuvra.


Le rosier. — Oh ! quel vent !

Le tuteur. — Je suis là.


La framboise. — Pourquoi les roses ont-elles des épines ? Ça ne se mange pas une rose.

La carpe du vivier. — Bien dit ! C’est parce qu’on me mange que je pique, moi, avec mes arêtes.

Le chardon. — Oui, mais trop tard.


La rose. — Me trouves-tu belle ?

Le frelon. — Il faudrait voir les dessous.

La rose. — Entre.


Le pinson. — Je trouve l’hirondelle stupide : elle croit qu’une cheminée, c’est un arbre.

La chauve-souris. — Et on a beau dire, de nous deux c’est elle qui vole le plus mal ; en plein jour, elle ne fait que se tromper de chemin. Si elle volait la nuit, comme moi, elle se tuerait à chaque instant.


Le mur. — Je ne sais quel frisson me passe sur le dos.

Le lézard. — C’est moi.


L’abeille. — Du courage ! Tout le monde me dit que je travaille bien. J’espère, à la fin du mois, passer chef de rayon.

Les violettes. — Tiens ! nous sommes toutes officiers d’académie.

Les violettes blanches. — C’est une raison de plus pour être modestes, mes sœurs.

Le poireau. — Est-ce que, moi, je me vante ?


L’asperge. — Mon petit doigt me dit tout.


L’épinard. — C’est moi qui suis l’oseille.

L’oseille. — Mais non, c’est moi.


La pomme de terre. — Je crois que je viens de faire mes petits.


Le pommier (à son voisin d’en face). — C’est ta poire, ta poire, ta poire,… c’est ta poire que je voudrais produire.


Le geai. — Toujours en noir, vilain merle.

Le merle. — Monsieur le préfet, je n’ai que ça à me mettre.

L’échalote. — Oh que ça sent mauvais !

L’ail. — Je parie que c’est encore l’œillet.

La pie. — Cacacacaca…

La grenouille. — Qu’est-ce qu’elle dit ?

La pie. — Je chante.

La grenouille. — Couac.


Les deux pigeons. — Viens mon grrros, viens mon grrros, viens mon grrros…


La taupe. — Taisez-vous donc là-haut ! On ne s’entend plus travailler.


L’araignée. — Au nom de la loi, j’appose mes scellés.


Les moutons. — Mée… Mée… Mée…

Le chien de berger. — Il n’y a pas de mais.