Le corbeau, chanson lithuanienne

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Le corbeau
1851

3

LE CORBEAU

Chanson lithuanienne

Un sombre oiseau rapporte, en hâte,
D’un combat meurtrier,
La pâture aux petits qu’il gâte;
Son bec est un charnier...

Produit odieux de sa chasse,
Le sinistre corbeau
Tient un doigt, tout sanglant, qu’embrasse
Encore un bel anneau...


— « Quel vent t’amène, oiseau funeste,
Dans ton lugubre essor?...
A quel corps pris-tu l’affreux reste,
Orné d’un anneau d’or?...»

— «Je viens des grands bois, curieuse,
Où meurent des héros
Pour une cause malheureuse...
Où le sang coule à flots...

«On enterre dans la campagne
Des centaines de corps.
En larmes, plus d’une compagne
Cherche, parmi les morts,

«Son époux chéri... Bien des mères
Pleurent leurs fils aimés...
De tous lieux, des loups sanguinaires
Accourent affamés...»

Soudain, la pauvre jeune fille
Pousse un cri déchirant,
Et fixe, sur l’anneau qui brille,
Son regard pénétrant...


— «O ciel ! C’est la bague, dit-elle,
Donnée à mon promis!...
J’ai perdu mon amant fidèle,
Mort pour notre pays!»