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Le diabolisme en France/II

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Traduction par Wikisource.
George Redway (p. 22-41).

CHAPITRE II

LE MASQUE DE LA FRANC-MAÇONNERIE


Identifier le culte de Lucifer avec l’adoration pure et simple du diable n’est pas à première vue, comme nous l’avons vu, un procédé tout à fait juste, mais c’est en même temps inévitable. Comme nous l’avons déjà observé, la source de toutes nos connaissances concernant le diabolisme moderne se trouve au sein de l’Église catholique ; toute cette littérature est écrite du point de vue de cette église et a été créée uniquement dans son intérêt. Une partie de ces ouvrages ont été mis en avant avec les marques spéciales de la haute approbation ecclésiastique, et pour certains cette garantie manque, mais le même esprit façonne l’ensemble. Il est important d’insister sur ce point pour de nombreuses raisons qui apparaîtront à la fin de notre enquête et pour une en particulier qui nous intéresse à présent. Il est impossible pour l’Église catholique de faire autrement que de considérer le culte de Lucifer comme identique à celui de Satan, car, selon son enseignement inébranlable, le nom de Lucifer est un équivalent de Satan et, de plus, le culte luciférien est tellement antichrétien qu’aucune forme de christianisme ne pourrait faire autrement que de le considérer comme un culte des ténèbres et du mal. Si, par conséquent, l’adoration d’un principe du bien sous ce nom honteux peut, sous l’un de ses aspects, être simplement une erreur de jugement et non un culte du diable, mis à part d’autres faits qui détruisent cette considération, nous devons tous convenir que du point de vue de l’orthodoxie chrétienne et catholique, le luciférien est un diaboliste, mais pas dans le sens du sataniste.

La doctrine luciférienne a été décrite de façon concise par Huysmans comme une sorte de christianisme inversé, un catholicisme « à rebours ». Il s’agit en fait du renouveau d’une vieille hérésie fondée sur ce que nous avons été habitués à considérer comme une erreur philosophique ; en un mot, c’est un système manichéen ayant une orientation anti-chrétienne, car tout en affirmant l’existence de deux principes divins égaux, Adonaï et Lucifer, il considère ce dernier comme le dieu de la lumière et du bien, tandis que l’Adonaï chrétien est le prince des ténèbres et le véritable Satan. Il ressort de l’état actuel du monde que le pouvoir est du côté du principe du mal et que la divinité bienfaisante est désavantagée. Adonaï règne certes, comme le croit le chrétien, mais il est l’auteur de la misère humaine ; Jésus est le Christ d’Adonaï, mais il est le messager du malheur, de la souffrance et du faux renoncement, menant finalement à la destruction lorsque le Deus maledictus cessera de triompher. Les adorateurs de Lucifer ont pris parti pour la cause de l’humanité et pour leur propre cause, avec cet improbable principe du bien ; ils coopèrent avec lui pour assurer son triomphe et lui-même communique avec eux pour les encourager et les fortifier ; ils œuvrent à préparer son royaume et lui-même promet de susciter parmi eux un sauveur, qui est l’Antichrist, leur chef et roi à venir.

Telle est la doctrine de Lucifer selon le témoignage de transfuges de son culte ; ce n’est pas un enseignement qui, a priori, semblerait devoir s’adresser à un grand nombre d’adeptes, mais la société qui s’occupe de sa propagation se diffuserait dans le monde entier et serait représentée dans toutes les grandes villes. C’est ce que Mr Huysmans mentionne comme une organisation dont l’existence est démontrée et une preuve certaine du satanisme moderne, à savoir l’Ordre Palladique. Après avoir globalement défini les principes, nous passerons ensuite à son histoire présumée. Il faut admettre qu’il est difficile de situer la question de telle sorte qu’elle puisse constituer un sujet de recherche tolérable pour les lecteurs en Angleterre. Le mystère du diabolisme moderne et du culte de Lucifer fait partie du mystère de la franc-maçonnerie tel qu’interprété par un mouvement antimaçonnique actuellement à l’œuvre en France. La magie noire, dont nous entendons tant parler, implique un nouvel aspect de la vieille croisade catholique contre la fraternité de l’équerre et du compas, et par la question de Lucifer on entend la découverte présumée d’un culte diabolique chez les francs-maçons.

Nous connaissons tous maintenant le fait historique que l’Église catholique est hostile à la franc-maçonnerie depuis longtemps, que les papes ont condamné l’ordre et excommunié ses initiés. Eu égard à la position de la fraternité ici en Angleterre, la plupart d’entre nous se sont contentés d’en déduire qu’après l’âge mûr, l’Église est en train de revenir à l’enfance ; certains, cependant, ont conclu qu’il y avait peut-être autre chose dans la franc-maçonnerie continentale que ce qui paraît à l’œil anglais, et c’est ici que l’Église se présente elle-même pour assurer qu’en dehors de l’Angleterre, la fraternité est un foyer de propagande politique, responsable des révolutions les plus désastreuses qui ont troublé le monde moderne ; que c’est en réalité, comme l’explique Robison, un complot contre les têtes couronnées ; et qu’il est à l’heure actuelle l’ennemi le plus puissant et le plus secret qui lui fait échec.

Il est maintenant affirmé que derrière la franc-maçonnerie d’aujourd’hui, ici en Angleterre, se présentant comme une société philanthropique, elle se dit politique ou non sur le continent, mais déniant partout tout lien avec une propagande religieuse — il est affirmé qu’il existe une autre franc-maçonnerie, dont le franc-maçon ordinaire ne sait rien, dirigeant secrètement l’ordre et dévouée au culte de Lucifer. Cette organisation, qui a vu le jour ces dernières années, recrute en grande partie, mais pas exclusivement, dans la franc-maçonnerie ; elle a l’œil sur le puissant appareil maçonnique et, selon les témoignages qui ont été apportés, elle a obtenu le contrôle total de toute la fraternité. Elle a dirigé la matière première de l’hostilité maçonnique contre l’Église catholique ; comme elle est antichrétienne en religion, elle est révolutionnaire en politique ; et encore une fois, elle s’appelle l’Ordre Palladique.

Cette accusation extrêmement grave et importante, ainsi que ses aspects secondaires, mérite peut-être d’autant plus notre attention que, mis à part le diabolisme actuel, qui est en soi assez paralysant pour arrêter la discussion, elle est en contradiction avec tout ce que nous savons ou croyons concernant la constitution maçonnique. Laissez-moi résumer brièvement ces points. 1° La franc-maçonnerie possède une direction centrale secrète — ce que la Fraternité a fermement démenti. 2° Elle a une mission religieuse et une propagande doctrinale — ce qui a été également invariablement démenti. 3° Elle a des objectifs politiques — ce qui est généralement nié. 4° Elle a un enseignement transcendantal — qui est généralement démenti et 5° elle s’intéresse largement aux pratiques et phénomènes surnaturels — ce qui serait absolument démenti si la question avait été sérieusement soulevée jusqu’à ce jour. 6° Elle initie des femmes — ce qui, sauf de manière très secondaire, occasionnelle et insignifiante, est totalement et en tout temps démenti. Ce dernier point est intégré à notre enquête car le Palladium est un ordre androgyne.

Or, beaucoup de personnes qui ne font pas partie des rangs de la fraternité savent assez bien que les Grandes Loges de tous les pays sont supposées être autonomes et qu’il n’y a pas eu auparavant de mise en doute de ce fait ; que, du moins en apparence, il n’existe aucune institution centrale de la franc-maçonnerie à laquelle elles sont tenues de répondre. Les loges sont chacune affiliée à une seule Grande Loge devant laquelle elles sont responsables, mais les Grandes Loges elles-mêmes sont indépendantes et ne rendent compte à personne. On sait aussi que le système maçonnique anglais diffère de celui de la France, que le rite français a toujours occupé une position quelque peu hétérodoxe et que, depuis que le Grand Orient a effacé le Grand Architecte de l’Univers, pour ainsi dire, de son symbolisme, la communication officielle a été suspendue par la Grande Loge d’Angleterre. On sait en outre qu’en dehors des systèmes maçonniques reconnus, de nombreux rites sont apparus, qui ne sont maçonniques que dans la mesure où leur point de départ est le grade de Maître. On peut citer comme exemple le rite oriental suprême de Memphis et de Misraïm. En Angleterre, les réunions de loges de ces rites ne se sont jamais déroulées dans la grande institution centrale de Freemasons Hall ; en France, le Grand Orient a toujours interdit à ses membres de participer au système de Memphis. Tenir la franc-maçonnerie pour responsable d’irrégularités ou d’abus pouvant occasionnellement provenir de ces développements fantastiques issus de l’institution-mère, serait à peu près aussi juste et raisonnable que de mettre en cause l’Église catholique pour les corruptions qui existent dans les hérésies qui se sont séparées d’elle.

Ayant établi ces points à la lumière du résultat de notre enquête, voyons maintenant comment une autorité suprême, souvent appelée par les accusateurs Franc-Maçonnerie Universelle, se serait développée. À ce sujet, non seulement les informations les plus complètes, mais les seuls récits formels sont fournis par les derniers témoins, de sorte que le récit suivant, sans être une traduction, repose exclusivement sur les ouvrages de Domenico Margiotta et du Dr Bataille.

Le 20 mai 1737, l’Ordre du Palladium, ou Conseil Souverain de la Sagesse, est constitué en France. Celui-ci, à la manière des lodges androgynes naissant alors, initie les femmes sous le titre de Compagnes de Pénélope. Le rituel de cet ordre a été publié par Ragon, l’archéologue de la franc-maçonnerie, de sorte qu’il ne peut y avoir aucun doute sur son existence. Dans le même temps, autant que je sache, il y a peu de documents pour établir son histoire. D’une manière qui reste totalement intraçable, cet ordre aurait été lié par plus que son nom au légendaire Palladium des Templiers, bien connu sous le nom de Baphomet. En tout état de cause, il n’a pas réussi à se répandre et il n’est pas certain que le Palladium Nouveau et Réformé, autre ordre androgyne, qui nous intéressera tout à l’heure, soit une métamorphose ou une reconstruction de l’institution originelle, mais un lien quelconque est affirmé. Pendant plus de soixante ans, on n’entend guère parler du légendaire Palladium, mais en 1801, l’israélite Isaac Long aurait emporté le véritable Baphomet des Templiers et le crâne du Grand Maître, Jacques de Molay, de Paris à Charleston, aux États-Unis, avant de participer à la reconstruction du rite écossais de la perfection et d’Hérodom sous le nom de rite écossais ancien et accepté, qui connut ensuite une grande expansion, et il est dit que la loge du trente-troisième degré du Suprême Conseil de Charleston était la mère de tous les autres, et est donc, dans ce rite, le premier Suprême Conseil du monde entier.

Huit ans plus tard, le 29 décembre 1809, un homme d’une grande importance pour l’histoire de la franc-maçonnerie naquit dans la ville de Boston. Albert Pike était issu de parents d’un milieu modeste, qui cependant, se débattirent de leurs difficultés et purent l’envoyer au Harvard College où il obtint son diplôme, sortant avec sa maîtrise en 1829. Il commença sa carrière en tant que maître d’école, il mena une vie romantique et errante, son amour des terres inconnues l’amena à explorer les montagnes Rocheuses, alors très mal connues. En 1833, il s’installa dans l’Arkansas et, se consacrant au journalisme, il fonda l’Arkansas Advocate dans lequel ses contributions, à la fois en prose, mais surtout en vers, lui valurent une réputation littéraire. L’admission de l’Arkansas dans la confédération des États-Unis est en partie le résultat de ses efforts et, à partir de cette période, il commença à être une figure politique, devenant également le greffier de la Cour suprême de cet État. Un an après la guerre de sécession, dans laquelle il prit une part active, Pike se rendit à Memphis dans le Tennessee, où il continua dans le droit et la littérature, fondant le Memphis Appeal, qu’il vendit en 1868, avant de déménager à Washington. Son histoire ultérieure porte exclusivement sur ses inépuisables travaux maçonniques.

C’est à Little Rock, en Arkansas, qu’Albert Pike fut initié et, dix ans plus tard, c’est-à-dire en 1859, il fut élu Souverain Commandeur Grand Maître du Suprême Conseil de Charleston. Doté de capacités d’organisation extraordinaires, il devint un homme d’une grande influence dans le rite écossais ancien et accepté, ainsi qu’une haute autorité dans le domaine des rituels, des antiquités, de l’histoire et de la littérature de la franc-maçonnerie. Sous sa direction, le rite écossais s’est étendu et est devenu dominant. Ainsi, quand on dit que le patriote italien Mazzini a projeté la centralisation de la franc-maçonnerie des hauts grades, il ne trouva personne dans toute la fraternité de plus apte par sa position et son influence à collaborer avec lui. De cette alliance secrète naquit le 20 septembre 1870, c’est-à-dire le même jour où les troupes italiennes entrèrent dans la ville éternelle, un rite suprême et une organisation centrale de la franc-maçonnerie universelle des haut grades, l’acte de création étant signé par le Grand Maître américain et le libérateur italien, les deux fondateurs se partagèrent aussi le pouvoir. Un Suprême Directoire Dogmatique fut créé à Charleston, avec à sa tête Pike, sous le titre de Souverain Pontife de la franc-maçonnerie universelle. Mazzini prit le pouvoir exécutif suprême, avec Rome pour centre, sous le titre de Chef Souverain de l’action politique.

Si nous revenons maintenant aux déclarations selon lesquelles le véritable Baphomet des Templiers et le crâne de Jacques de Molay avaient été conservés à Charleston pendant soixante-dix ans, et qu’Albert Pike était le grand maître du Suprême Conseil du rite écossais ancien et accepté de cette ville, nous comprendrons pourquoi la nouvelle institution s’appelait rite palladique nouveau réformé ou Palladium réformé. Par la suite, cinq grands directoires centraux ont été établis : Washington pour l’Amérique du Nord, Montevideo pour l’Amérique du Sud, Naples pour l’Europe, Calcutta pour l’Orient, et Port-Louis sur l’île Maurice pour l’Afrique. Un Directoire Administratif Universel et Souverain fut établi à Berlin après la mort de Mazzini. Grâce à cette organisation astucieuse, Albert Pike aurait tenu toute la franc-maçonnerie dans le creux de sa main, au moyen d’un double appareil : le Palladium et le rite écossais. Pendant le reste de sa vie, et il vécut très longtemps, il œuvra inlassablement pour ces deux causes et l’organisation qu’il administra est omniprésente dans le monde.

Quatre hommes sont cités comme coadjuteurs dans son propre pays : son vieil ami Gallatin Mackey, d’honorable mémoire chez lez francs-maçons ; un écossais nommé Longfellow, que certains écrivains français ont ridiculement confondu avec le poète ; un dénommé Holbrook, dont on ne sait presque rien ; et enfin, Phileas Walder, originaire de Suisse et ancien ministre luthérien, qui aurait ensuite été un mormon mais, en tout état de cause, à l’époque en question, il était un spirite bien connu, un étudiant zélé de l’occultisme, tout comme Holbrook et Longfellow, et, qui plus est, un ami personnel et disciple du grand mage français Éliphas Lévi. Albert Pike était lui-même un occultiste, je ne peux dire si c’est de sa propre initiative ou sous l’influence de ses amis sus-cités. Mlle Diana Vaughan, qui est l’un des témoins transfuges, affirme que c’était chez lui une passion précoce et dévorante. Quoi qu’il en soit, le Palladium Nouveau et Réformé était très distinctement séparé de toute autre forme de franc-maçonnerie, et même du rite écossais ; c’est-à-dire qu’aucun initié, même du plus haut grade, n’avait, en tant que tel, le droit ou l’occasion d’entrer dans l’ordre occulte, lequel, dans le même temps, recrutait principalement, comme il a déjà été dit, dans les grades ordinaires les plus élevés, mais les destinataires de la nouvelle lumière se sont tus dès l’instant où elle a été communiquée. Or, c’est exclusivement dans l’ordre palladique qu’Albert Pike et ses confidents propageaient la religion transcendantale, telle qu’elle aurait été comprise. En d’autres termes, alors que le rite écossais continuait à spéculer, le Palladium se livrait à la magie et réussissait si bien qu’il établit une communication permanente entre Charleston et le monde invisible. Les témoignages ne semblent indiquer ni quand ni pourquoi Albert Pike et ses collaborateurs ont transféré leur allégeance du Dieu des sages à Lucifer. L’Église catholique considère toute magie comme une forme de diabolisme et ne fait ni ne tolère aucune distinction mystique entre les sections noire et blanche de la pratique transcendantale, mais la spécificité du culte palladique est si clairement définie dans les dépositions qu’il ne peut pas être considéré comme une simple doctrine magique déformée par des préjugés. Il ne correspond à aucune des écoles d’enseignement occulte existantes, et c’est soit un véritable système fondé par Pike, soit une invention délibérée et malveillante. Les phénomènes thaumaturgiques qui y sont présentés sont d’un type extrêmement perfectionné, comme par exemple la présence réelle et physique de Lucifer à des intervalles réguliers et fréquents.

Quand Mazzini mourut, il indiqua à Albert Pike un successeur éventuel en la persone d’Adriano Lemmi, qui devint par la suite chef du Directoire Exécutif, et qui, au bout de nombreuses années, le pontife de la franc-maçonnerie luciférienne lui-même passa à la vie supérieure de feu, qui est l’équivalent palladique de la béatitude, et dans la paix et la joie de Lucifer, le souverain pontificat lui-même, après avoir reposé pendant une courte période sur des épaules incompétentes en la personne d’Albert George Mackey, fut transféré à l’Italien ; le siège du Directoire Dogmatique fut déplacé à Rome ; une scission dans la secte s’ensuivit, inspirée par une dame initiée, connue depuis sous le nom de Diana Vaughan, et c’est à elle que nous devons la plupart des révélations. De plus, avec la mort d’Albert Pike, le culte de Lucifer aurait subi une importante transformation. Selon lui, le concept de Satan était une fiction blasphématoire, conçue par des prêtres adonaïtes pour obscurcir le véritable lustre de l’ange de l’étoile du matin ; mais cette vue représentait, dit-on, plutôt l’opinion personnelle du pontife maçonnique, qu’il imposait par sa forte personnalité aux loges qu’il contrôlait et propageait par l’enseignement de ses rituels. Les plus perspicaces parmi ses disciples considéraient cela comme un signe de faiblesse de leur grand vieillard et pendant sa vie, le culte de Satan pur et simple, c’est-à-dire du culte du diable, l’adoration du principe du mal présenté comme mauvais, était pratiqué discrètement dans de nombreux centres palladiques. Après sa mort, le satanisme aurait jeté le masque et Adriano Lemmi lui-même est décrit comme un sataniste déclaré.

Or, je pense bien interpréter le sentiment de mes lecteurs en reconnaissant que, lorsque l’autorité d’une grande église a été mise en œuvre pour écraser une grande institution par des accusations qui la discréditent très sérieusement — et qui la représentent d’une manière diamétralement opposée à son apparence extérieure — nous ne devons en aucun cas prendre l’accusation à la légère ; nous devons nous rappeler la position élevée et les nombreuses sources de connaissance que possède un tel accusateur ; nous devons au moins accorder à cet accusateur une audience impartiale et complète ; dans une affaire si importante, on ne peut se permettre de préjuger sur la base de considérations de probabilité a priori, de déductions de nos connaissances antérieures, et encore moins de l’opinion des tiers ; nous devons être prêts, si nécessaire, à admettre que nous avons été trompés de manière flagrante ; et si l’existence de la maçonnerie palladique peut être prouvée comme un fait incontestable, nous devons assurément faire honneur à la démonstration et reconnaître avec gratitude que l’Église a rendu service à l’humanité en dévoilant le véritable caractère d’une institution qui a pouvoir sur un grand nombre de personnes bien intentionnées au sein de ses propres rangs, qui sont certes ignorantes du mal auquel elles prêtent leur soutien. Par ailleurs, le même esprit de libéralité et de justice exigera que la démonstration en question soit complète ; à l’appui de si terribles accusations, seules des preuves de première qualité peuvent évidemment être admises.

Dans les chapitres qui suivent, je présenterai successivement les dépositions de chaque témoin qui a quelque chose à nous dire sur le palladisme, à la fois ceux qui le connaissant personnellement et ceux qui le connaissent indirectement. Dans la mesure du possible, chaque témoignage sera évalué au fur et à mesure de notre progression ; les témoignages peu convaincants ou non pertinents seront rejetés, tandis que ce qui est important sera reporté au résumé final. Dans deux cas seulement, on jugera nécessaire de réserver la critique à un chapitre spécial et séparé.