Le fort et le château Saint-Louis (Québec)/00

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Texte établi par Librairie Beauchemin, Limitée (p. 5-8).


PRÉFACE


L’ouvrage que nous donnons aujourd’hui en troisième édition contient l’histoire d’un monument dont le nom revient souvent dans les récits de notre vie nationale. Plus que cela, il contient, ainsi qu’on l’a écrit, une sorte de trophée où sont réunis un grand nombre de faits parmi les plus remarquables qui se soient produits dans la colonie du Canada depuis sa fondation.

Le fort Saint-Louis de Québec, construit, puis successivement reconstruit, restauré et agrandi par Champlain, Montmagny, Frontenac et Craig, a été le centre de l’autorité royale, française et anglaise, pendant plus de deux siècles, et cette circonstance a permis à l’auteur de ce volume de rappeler les événements historiques et anecdotiques les plus brillants de cette période, — événements se rattachant par quelque lien à l’histoire même de l’ancienne forteresse et de ses dépendances.

Cette monographie fait défiler sous nos yeux, comme dans un tableau de vues animées, une procession d’illustrations canadiennes où figurent les gouverneurs, les gouvernantes — comme on disait sous l’ancien régime, — les seigneurs féodaux, les hommes d’armes, les missionnaires, les fondatrices d’établissements religieux. Elle nous fait assister à la naissance et aux premiers développements de la nation canadienne, et réveille le souvenir de


Tout ce monde de gloire où vivaient nos aïeux.


On y entend aussi l’écho de batailles lointaines, livrées dans les deux mondes, et la répercussion des événements tragiques où sombra l’antique monarchie française. L’auteur suit même les anciens habitants du château Saint-Louis après leur disparition de la scène canadienne, et il nous fait retrouver, à Paris, à Muides, à Denonville et ailleurs, des personnages nés ou ayant vécu à Québec, aux Trois-Rivières, à Montréal.

On trouve encore dans ces pages l’opinion d’éminents jurisconsultes anglais sur le droit absolu des catholiques canadiens à l’exercice de leur religion, — question discutée au château Saint-Louis, en 1811, entre le grand évêque Plessis et le gouverneur James-Henry Craig.

Monsieur Ernest Gagnon raconte également, dans cet ouvrage, l’histoire du château Haldimand, dépendance de château Saint-Louis, construit sous le régime anglais pour y donner des réceptions officielles, et il nous fait assister à des fêtes où était conviée l’élégante société québecquoise de la fin du dix-huitième siècle et du commencement du dix-neuvième.

Le temps des grands coups d’épée est passé ; on inaugure au château ce que l’auteur appelle la politique des réceptions ; aux sonneries de clairons de l’ancien régime ont succédé les effluves mélodieuses d’une salle de bal. Puis arrivent l’incendie du château Saint-Louis, le 23 janvier 1834, l’inoubliable catastrophe du feu du théâtre, le 12 juin 1846, puis des transformations, corollaires de changements politiques, et enfin la démolition de tout ce qui restait des dépendances du château Saint-Louis pour faire place à l’hôtel somptueux appelé Château Frontenac.

Après avoir décrit l’extérieur de ce dernier édifice, M. Gagnon ajoute : « Arrêtons-nous ici ; ne pénétrons pas dans ce palais du confort moderne. Ce serait trop nous éloigner du but de cette étude, qui est de parler de ce qui n’est plus… »

Tel est l’ouvrage dont nous donnons aujourd’hui une nouvelle édition. Nous espérons que celle-ci sera favorablement accueillie du public, en ce moment surtout où, à l’occasion du troisième centenaire de la fondation de Québec, tous les cœurs comme toutes les intelligences sont tournés vers le passé.


Les Éditeurs.


Montréal, 3 juillet 1908.