Le godmiché royal/00
AVIS DE L’ÉDITEUR.
Fatigué des patrouilles & des factions que j’avois faites, & me trouvant, à trois heures du matin, ſur la terraſſe des tuilleries, ne voyant & n’entendant perſonne, la frayeur s’empara de moi, & je me cachai auſſi bien que je pus dans ma guérite. Le ſommeil vint me tranquilliſer ; mais ce ne fut pas pour long-temps. J’entendis une voix qui me dit bien diſtinctement : Pourquoi portes-tu un habit que ton courage ne te permet pas d’avoir, au lieu de reſter dans ta boutique à faire vivre ta femme & tes enfans ? prends ce manuſcrit : vas l’imprimer, & le diſtribue dans toutes les villes, & penſe que ſi, ſous vingt-quatre heures, le public n’eſt point inſtruit des faits contenus dans ce cahier, et que tu aies encore l’uniforme ſur le corps, tu ſeras pendu : la peur qui m’avoit endormi me fit tomber le nez contre terre ; j’appellai au ſecours, perſonne ne vint ; comme il pleuvoit à verſe, je me relevai pour me mettre à l’abri. Quelle fut ma ſurpriſe de trouver le manuſcrit, que je m’empreſſe de vous faire paſſer, de crainte d’être pendu ! je vous engage, mes chers citoyens, à quitter vos uniformes, ſi vous n’avez pas plus de courage que moi : ſi vous conteſtez la validité de ce manuſcrit je ne pourrai pas vous en donner les preuves ; vous ſavez comme il m’a été remis, je m’en lave les mains.