Le missel de Barbechat

La bibliothèque libre.
Eugène Prost (p. --20).


LE


MISSEL DE BARBECHAT


par


Léopold DELISLE
Membre de l’Institut.




(Extrait des Bréviaires et Missels de Bretagne,
par M. l’abbé F. Duine.)




RENNES
IMPRIMERIE EUGÈNE PROST
rue Leperdit, 4.

1906


L’ancien missel de barbechat

Barbechat est une petite paroisse du canton du Loroux-Bottereau, dans l’arrondissement de Nantes. Sainte Marie-Madeleine est la patronne du lieu.

Dans son Inventaire sommaire des Archives départementales, antérieures à 1790, Loire-Inférieure (t. V, série E supplément, Nantes, 1892, p. 348-349), M. Léon Maitre a signalé un missel du xiie siècle, « missel de l’église de la Madeleine de Barbechat, écrit en caractères gothiques, avec notes musicales sans portée, orné de deux miniatures. » Les autres miniatures auraient été volées, quelques années auparavant, pendant une exposition de Nantes ? Aussi bien, ce livre, entré récemment à la Bibliothèque Nationale, a subi nombre d’aventures fort instructives. M. Léopold Delisle les a racontées dans une lettre piquante, que M. Joseph Angot, le destinataire, a bien voulu me confier :

Lettre de M. Léopold Delisle, membre de l’Institut, administrateur général honoraire de la Bibliothèque Nationale, à M. Joseph Angot, en réponse à une lettre du 5 août 1905 :

Paris, rue de Lille, 21,
8 août 1905.

Monsieur,

Votre lettre m’arrive à Chantilly, et c’est de là que je réponds à la lettre que vous m’avez fait l’honneur de m’adresser le 5 de ce mois. Voici ce que, loin de mes livres et de mes papiers, je puis vous dire de l’arrivée à la Bibliothèque Nationale du manuscrit qui vous intéresse.

Au mois de mai 1904, un libraire de Munich, M. Jacques Rosenthal, avec lequel je suis en relations depuis longtemps, me communiqua un missel qu’il voulait vendre et qui lui semblait intéresser tout particulièrement la France. Un simple coup d’œil suffit pour me laisser entrevoir que c’était un livre très curieux, à la fois comme œuvre d’art et comme document historique. Ayant demandé quelle somme on en demandait, je fus effrayé du prix qu’on espérait en tirer. Je fis observer que ce prix était excessif et qu’il n’était guère en rapport avec l’état délabré du volume, ni surtout avec les ressources dont disposait la Bibliothèque. M. Rosenthal insista et m’offrit de laisser le volume entre mes mains pour que je pusse en apprécier toute la valeur. J’acceptai la proposition, et craignant que le volume fût bientôt perdu pour la France, je pris tout ce qui pouvait servir à une description détaillée. J’étais d’ailleurs fort intrigué de savoir comment ce volume, de très chétive apparence, avait pris le chemin de Munich. C’est ainsi que j’ai recueilli à la hâte les matériaux d’une notice qui est restée inédite et que je pourrai vous envoyer prochainement de Paris.

Après avoir eu le manuscrit deux jours entre mes mains, je le rendis au libraire, en exprimant le regret de ne pouvoir pas l’acquérir, et je poursuivis mes recherches pour en découvrir l’origine. J’avais acquis la preuve qu’il devait venir des confins du Poitou ou de la Bretagne, et qu’il avait été très anciennement à l’usage du prieuré de Barbechat, dépendance de l’abbaye de Fontevrault. Ne trouvant rien par moi-même, j’écrivis à plusieurs de mes amis pour leur demander s’ils ne savaient rien sur le sort des livres liturgiques de Barbechat. L’un d’eux me renvoya au volume de l’Inventaire des Archives de la Loire-Inférieure qui renferme l’indication des parties anciennes des archives des communes de ce département. C’est là que je trouvai, avec une cote de classement dans un dépôt d’archives, une notice qui me sembla répondre au manuscrit communiqué par M. Rosenthal. Je priai un de mes amis d’aller, dans une promenade, visiter Barbechat et feuilleter l’ancien missel qui devait s’y trouver. Peu de jours après, je recevais une lettre qui avait été adressée à mon ami et lui conseillait de ne pas se déranger : le missel n’offrait aucun intérêt, et d’ailleurs les pages qui auraient pu fournir des renseignements historiques n’étaient plus lisibles, par suite de l’emploi des réactifs auxquels on avait eu recours pour en faciliter le déchiffrement. Cette particularité acheva de me démontrer l’identité du missel de M. Rosenthal et du manuscrit décrit dans l’inventaire de la Loire-Inférieure. J’avais eu, en effet, beaucoup de peine à déterminer le contenu de plusieurs pages de ce manuscrit, sur lesquelles les réactifs avaient laissé des traces faciles à reconnaître.

J’en étais là quand je reçus de M. Rosenthal une lettre dans laquelle il m’annonçait la prochaine mise en vente du Missel ; il m’en prévenait d’avance, suivant l’habitude qu’il avait contractée et dont je lui ai toujours su gré.

En le remerciant de cette gracieuse attention, et en regrettant de ne pouvoir pas faire l’acquisition, j’ajoutais que, si le manuscrit paraissait sur le marché français, je me croirais obligé de le faire saisir, comme indûment sorti d’un dépôt public, ainsi que l’atteste la mention contenue dans un inventaire officiel. M. Rosenthal s’empressa de me répondre avec indignation qu’il ne voulait pas être soupçonné un instant de détenir un objet appartenant à un établissement public. Il m’annonçait le renvoi du missel et m’autorisait à en disposer à mon gré. Le surlendemain, la poste m’apportait le missel.

J’adressai immédiatement mes remerciements à M. Rosenthal, avec mes félicitations pour la délicatesse avec laquelle il avait agi. Je lui disais que, s’il me faisait savoir comment il s’était procuré le volume, je réussirais probablement à lui faire rembourser le prix de son acquisition. Il me répondit en me donnant le nom du libraire parisien qui lui avait vendu le missel et en m’indiquant la somme qu’il avait dû débourser. J’invitai le libraire à passer à mon cabinet : il avait deviné le motif de l’invitation. Sans que je lui eusse dit un mot, il me déclara qu’il venait de rembourser M. Rosenthal, et, sans que j’eusse à le presser, il me nomma la dame qui lui avait présenté le livre et à qui il avait soldé le montant de l’acquisition : la somme avait servi à payer des travaux que la fabrique avait fait exécuter dans l’église de Barbechat.

Rassuré sur l’issue de l’affaire, je me gardai bien de renvoyer le volume à Barbechat, où il passait pour dépourvu d’intérêt et illisible. Il me sembla de toute justice qu’il fût attribué à la Bibliothèque Nationale, par l’intervention de laquelle le détournement avait été découvert et le volume sauvé du danger de passer à l’étranger. Le Directeur de l’Enseignement supérieur, dans les attributions duquel sont les bibliothèques et les archives, partagea mon avis, et, comme l’affaire touchait aussi au service des archives, j’en avisai le Directeur des Archives, qui me répondit en me félicitant du résultat de l’opération.

Me permettez-vous d’ajouter un détail ? Par commisération pour les paroissiens de Barbechat, qui ne savaient comment se procurer la somme réclamée par le libraire à qui le missel avait été vendu, j’ai cru devoir tirer de ma bourse personnelle la somme à laquelle il avait, jusqu’à un certain point, droit de prétendre.

La quittance et toutes les pièces du dossier sont au secrétariat de la Bibliothèque Nationale.

Tout cela s’est passé quelques semaines avant la publication du décret qui m’a relevé de mes fonctions d’administrateur de la Bibliothèque Nationale. Puisse mon successeur n’avoir pas l’occasion d’éprouver les soucis que m’a causés la recherche de l’origine du missel et des moyens de l’empêcher de passer à l’étranger, ce que je considérais comme un devoir de ma charge !

Telle est l’histoire du danger que le missel de Barbechat a couru, et du sauvetage que la Bibliothèque Nationale a opéré. Puisque vous tenez à faire connaître les vicissitudes par lesquelles ce livre a passé dans ces derniers mois, vous pouvez faire usage, sous ma responsabilité, des renseignements contenus dans ma lettre. Dès que j’aurai mis la main sur la notice du fameux missel, je vous l’enverrai, et vous pourrez la publier, si vous n’y trouvez pas trop de traces de la sénilité que certains journaux ont invoquée pour justifier mon renvoi de la Bibliothèque Nationale. Je dis certains journaux ; je n’oublierai jamais, en effet, les regrets qui ont été publiquement exprimés à cette occasion, en France aussi bien qu’à l’étranger.

Croyez-moi bien, Monsieur, votre dévoué

L. Delisle.
Description du Missel[1].

M. Jacques Rosenthal, de Munich, m’ayant très gracieusement communiqué, au printemps de l’année 1904, un ancien missel français, dont les futures destinées m’étaient inconnues, j’ai cru bon d’en prendre une description sommaire et d’en copier le calendrier, qui n’est point dépourvu d’intérêt.

Volume de 176 feuillets, y compris la garde de la fin. Hauteur des feuillets, 350 millimètres ; largeur, 230. Écriture de la seconde moitié du xiie siècle, antérieure, selon toute apparence, à la canonisation de saint Thomas de Cantorbéry[2], qui n’est point mentionné dans le calendrier. Les grands E onciaux ne sont point fermés ; il y a des e cédillés.

L’exécution du livre a été très soignée. Les initiales ont été correctement enluminées, parfois avec une véritable élégance. Il y faut signaler deux grandes peintures à pleine page : sur le fol. 102, les images de saint Pierre et de saint Jean ; sur le fol. 102 vo, l’image du Père Éternel.

Les introït, graduels, offertoires et communions sont notés en neumes.

Le missel est ainsi divisé :

Fol. 1-98 : Propre du temps ;
Fol. 99-101 : Calendrier.
Fol. 102-104 : Préface et Canon.
Fol. 105-152 : Propre des saints.
Fol. 152-175 : Commun et messes diverses.

Le manuscrit présente des lacunes assez considérables, qui existaient déjà au xviiie siècle quand il a été folioté. Il y manque :

1o Les feuillets du commencement qui contenaient les messes du propre du temps, jusqu’à la septuagésime, dont l’introït Circumdederunt est sur la seconde colonne de la première page ;

2o Plusieurs feuillets dans le propre du temps, entre les fol. 59 et 60, entre les fol. 62 et 63 ;

3o Plusieurs feuillets du cahier consacré aux préfaces et au canon de la messe ; il n’en subsiste que trois, cotés 102-104.

4o Plusieurs feuillets au commencement du propre des saints ;

5o Après le feuillet 121, les feuillets qui contenaient les messes des fêtes comprises entre le 8 juin et le 4 juillet.

Plusieurs feuillets ont beaucoup souffert par suite de l’action de réactifs employés pour faciliter le déchiffrement.

L’origine du missel n’est guère difficile à déterminer. Il a été fait pour une église du Poitou. Les particularités suivantes le démontrent surabondamment :

1o Dans les litanies du Samedi saint (fol. 59), il y a seulement ces trois invocations de pontifes : « Ylarii, Martialis, Martine, » et ces trois invocations de confesseurs : « Bénédicte, Maure, Maxenti. »

2o Dans la section des messes diverses, en dehors du Propre suivant l’ordre de l’année liturgique, on trouve, au fol. 164, l’office intitulé : « Commemoratio sancti Hylarii. »

3o Le calendrier, dont le texte complet sera reproduit un peu plus loin, mentionne les fêtes suivantes :

1 février. Leoni confessoris.
31 mai. Porcharii abbatis.
1 juin. Jovini abbatis.
26 juin. Maxencii confessoris.
1 juillet. Eparcii presbyteri.
16 juillet. Generosi abbatis.
13 août, Radegundis virginis[3].
14 décembre. Fortunati.

Les fêtes de deux saints du diocèse de Nantes ont été ajoutées après coup :

17 juin. Similiani confessoris.
10 octobre. Clari, episcopi Nannetensis.

Primitivement le Missel a pu être destiné à un monastère ou à un chapitre ; mais dès le xiiie siècle il servait à une église paroissiale, comme l’attestent plusieurs notes ajoutées sur les fol. 98 vo, 100 vo, 102 et 103 vo.

Nous avons donc ici le missel de l’église de la Madeleine de Barbechat, et la façon dont le nom de Marie Madeleine est inscrit dans le calendrier (le mot MARIE en lettres capitales) prouve que le livre a été dès l’origine destiné à l’église de Barbechat.

Barbechat est aujourd’hui un simple village du département de la Loire-Inférieure, dont l’église est marquée sur la carte de Cassini au Nord-Est de Nantes, un peu au Midi de la Loire. C’était le siège d’un prieuré de Sainte-Radegonde, qui, dans les temps modernes, dépendait de l’abbaye de Saint-Sulpice de Rennes.

Sur deux pages du cahier réservé au texte des préfaces et du canon, on a ajouté en marge les noms de différents bienfaiteurs qui étaient particulièrement compris dans les intentions du célébrant. Voici quelques-uns de ces noms :

Sur le fol. 102 :

Matheus Halegrin. Bona filia, uxor ejus.
Relicta Laurencio li Bedeau.
Heredes de Barbechat.
Dame Aenor de La Riverie.

Sur le fol. 103 vo :

Rivallen archidiaconus.
Daniel cappellanus.
Herveus cappellanus.
Andreas Brito.
Andreas vicecomes.

Petronilla vicecomitissa.
Guillermus Infans.
Amaurri Crespin.
Thebaut, filius ejus.
Davi de Rays.
Petrus Boscher.
Davi Seibran.
Dulcia.
Guillermus de Barbechat.
Reginaudus Grahori.
Mengui de Vaus.
Laurencius capellanus.

Plusieurs de ces noms se retrouvent dans les mémoriaux inscrits sur les fol. 98 vo et 100 vo, relatifs à des fondations faites dans l’église à laquelle le missel était affecté :

Willelmus Potarst, quemdam quarterium cere. (Fol. 98 vo.)

Johannes Raboteau, II d. super quemdam (sic) minetam terre, quam dédit confiliole filie Johannis Raboteau in elemosina. (Ibid.)

Willelmus Girarst[4], dedit in elemosina ecclesie de Barbechat, s[cilicet] Beate Marie, tria prebendaria terre in feodo Radulfi Boisse, et VI d. ad ecclesiam reparandam, et VI d. confraternitati dicte ecclesie, et IIII d. capellano dicte ecclesie, super dotem uxoris sue, et II denarios super terram suam de Aleeria, quam tenet uxor Giraldi Torti pedis. (Ibid.)

Heredes de Barbechat, III d., ad luminare ecclesie. (Ibid.)

Matheus Halegrin et Bona filia, uxor ejus, dederunt Deo et Beate Marie Madalene duas libras cere ad luminare ejusdem ecclesie…, pro anniversariis suis faciendis… (Fol. 100 vo.)

Dans une de ces notes l’église est expressément dénommée : ecclesia de Barbechat, scilicet Beate Marie, et dans une autre Beata Maria Madalena.

Sur les marges des feuillets qui précèdent le Propre des saints, ont été copiées en caractères du xiiie siècle, deux pièces qui méritent d’être particulièrement signalées.

La première est l’épître farcie de la messe de saint Étienne. Je puis en donner le texte moins les dernières lignes de la fin[5].

Por amor Dé, vos prie, senor barons,
Séez vos toz, si orez la leçons
Pe seint Estene le glorious barons :
Cy conté l’a par bonne entencions,
Quar a cel jor reçut il pasions. (Fol. 103 vo.)
………
Laudabilis[6] miles et prepotens,
Quem visitavit ex altis Oriens
In hora mortis, qua fuit paciens,
Pulcre déclarât presens
Lectio Actuum apostolorum.

In diebus illis : Elegerunt septem levitas in ministerio, de quorum collegio Stephanus, plenus gratia et fortitudine Sancti Spiritus collata sibi divinitus, faciebat prodigia et signa magna in populo, scilicet hebraico non credenti Dei verbo. Surrexerunt autem quidam de sinagoga que apellatur Libertinorum, Cirenensium et Alexandrinorum et eorum qui erant a Cilicia et Asia, disputantes con Stephano, ore torvo, corde furibundo, et non poterant resistere sapiencie et Spiritui de Patre et Filio procedenti, qui loquebatur monitis salutaribus ; docebat eos Stephanus. Audientes autem hec dissecabantur cordibus suis, etmoti fellis turbine, stridebant dentibus in eum pre nimia invidia, vexati consciencia, inferentes convicia. Con autem esset Stephanus plenus Spiritu Sancto, subtili, dulci, acuto, intendens in celum, vidit gloriam Dei et Jhesum stantem a dextris, et ait : « Laudo celestis glorie regem, natum ex Virgine, nondum sum in certamine. Ecce video celos apertos et filium hominis stantem a dextris virtutis Dei, Patris inestimabilis et in sanctis mirabilis, per omnia possibilis. » Exclamantes autem voce magna continuerunt aures suas a fide sanctam (sic) rigidas, et impetum fecerunt unanimem in eum ; feroces et increduli, in accusando seduli contra Stephanum emuli, et eicientes eum virum sanctum et justum extra civitatem, lapidabant et ictibus oppositum occidebant jam Stephanum celos intrantem meritum, et testes deposuerunt vestimenta sua queque trahentes hoherosa secus pedes adolescentis necem sancti spectantis, qui vocabatur Saulus, qui hujus sancti precibus post hec victus, fidelibus datus est [apostolus] gentibus. Et lapidabant Stephanum, invocantem et dicentem pro cujus almo nomine [moriebatur] fuso sanguine : « Domine Jhesu, accipe spiritum meum migrantem a [corpore], ad ethera sublatum tua gratia. Positis autem genibus…[7]

Différentes versions de l’épître farcie de saint Étienne ont été l’objet d’un mémoire de mon cher confrère M. Paul Meyer, inséré dans le Bulletin historique et philologique du Comité des travaux historiques et scientifiques, 1887, p. 315-323.

Il suffit d’y renvoyer le lecteur.

La seconde pièce (fol. 105 vo) est une sorte de sermon, ou de leçon, en vers français, pour la fête de saint Jean l’évangéliste. Il consiste en onze strophes de cinq vers chacune. Le peu de temps que le manuscrit est resté à ma disposition ne m’a permis d’en copier que les quatre premières.

Aiez vos pez, senores, si ecotez :
Por De vo prie que noise ne facez.
Ores la leçon o bon cor entendez,
De sent Johan qui feste célébrez,
Qui et eu cel, en tere enorez.

Cil santé Johan fut Jhesu, ce sachez,
Gosin germans, e fut juene si privez,
To tens fut virges e plens de grante bontez :
Par ce fut plus que ces autres amez,
E en la corte Jhesu plus ennoret.

Quar ce trovon que, quant il acena
Le sous deciples, si lor amonesta
La soe morte, siconde luy ala,
Sor son pez s’endormit, quar De le commanda,
Tant par lot cher Jhesu e tant l’ama !

En apries autre amor li moutra,
Quar en la croez élevez (?) le lesa
A cil baron sa mère commanda,
A luy aie autresi li livra,
La virge au virge, la mère au fiz livra.

Comme exemple des traits insérés dans plusieurs messes, je citerai celui de la fête de la Purification (fol. 112 vo) :

TR. Diffusa est gracia in labiis tuis, propterea benedixit te Deus in eternum. Specie tua & pulcritudine tua ; intende, prospère procede et regna. Propter veritatem et mansuetudinem et justiciam, et deducet te mirabiliter dextera tua. Dilexisti justiciam et odisti iniquitatem, propterea unxit te Deus, deus tuus, oleo leticie. Audi, filia, et vide et inclina aurem tuam, et obliviscere populum tuum et domum patris tui. Et concupivit rex decorem tuum, quoniam ipse est dominus deus tuus et adorabunt eum. Adducentur régi virgines, post eam, proxime ejus, offerentur tibi.

V. Adducentur in leticia et exultacione, adducentur in templum regi domino.

Dans l’évangile de la Passion, on a marqué par la lettre C le texte du récitatif, par une croix les paroles du Christ et par la lettre S les paroles des autres personnages mis en scène.

Des notations analogues, mais avec des signes ou marques différentes, ont été remarquées dans plusieurs anciens missels ou évangéliaires. M. le chanoine Muller, aumônier de l’Hospice Condé à Chantilly, a, dans un des derniers Congrès des Sociétés savantes, appelé l’attention sur celles que renferme l’ancien texte des évangiles conservé au trésor de l’église de Noyon.

Au bas du fol. 102 vo a été ajoutée une oraison à saint Louis, en caractères d’une date assez voisine de l’année de la canonisation (1297) ; elle est devenue en partie illisible ; mais dans la première ligne on distingue nettement les mots : « rex Franchorum, exemplar justicie, lex et norma morum… »

P.-S. — J’ai reconnu depuis que le missel avait été décrit en 1892 par mon confrère M. Léon Maître, dans un volume de l’Inventaire des Archives de la Loire-Inférieure (t. V, p. 348), et qu’il était irrégulièrement sorti des Archives de Barbechat. J’en ai fait part au libraire, M. Jacques Rosenthal, qui, sans réclamer aucune indemnité, en a très généreusement fait don à la Bibliothèque Nationale, au mois de novembre 1904. Le manuscrit porte aujourd’hui le no 1890, dans le fonds latin des nouvelles acquisitions.


Calendrier du Missel de Barbechat.


Januarius.

1. Circumcisio Domini.
3. S. Genovefe v.
5. Simeonis conf.
6. Épiphania Domini.
7. S Nichomedis m.
13. Octabas Epiphanie. Ylarii. Remigii.
14. Felicis in Pincis.
15. Mauri abbatis.
16. Marcelli pape.
18. Prisce v.
20. Fabiani et Sebastiani.
21. Agnetis v.
22. Vincentii m.
25. Conversio S. Pauli. Prejecti.
27. Juliani episcopi Cenomanis[8]. XII lectiones.
28. Agnetis secundo.


Februarius.

1. Brigide v. Leoni conf.
2. Ypapanti Domini. Purificatio S. Marie.
3. Blasii m.
5. Agathe v.
10. Scolastice v.
14. Valentini presb.
16. Juliane v.
22. Cathedra S. Petri.
24. Mathie apostoli.


Marciis.

1. Albini ep.
7. Perpétue et Felicitatis.
12. Gregorii presbiteri.
21. Benedicti abbatis.
25. Annunciatio dominica.

Aprilis.

4. Ambrosii ep.
11. Leonis pape.
13. Eufemie v.
14 Tiburcii et Valeriani et Maximi.
22. Anniversarium defuncti Willelmi Girast. [XIIIe siècle].
23. Georgii m.
25. Marci evangeliste. Rog[atio].
31. Eutropii ep.


Maius.

1. Philipi et Jacobi.
3. Inventio S. Crucis. Alexandri, Eventi et Theodoli.
6. Johannis ante portam latinam.
9. Tran[s]latio S. Nicholai.
10. Gordiani et Epimachi. Maturini conf.
11. Manmerti ep. Maioli abb.
12. Nerei et Achillei et Pancracii.
13. Potenciane v.
20. Autregisili ep.
24. Donatiani et Rogatiani.
25. Urbani pape.
28. Germani ep.
29. S. Maximi conf.
31. Porcharii abb. Petronille v.


Junius.

1. Jovini abb.
2. Marcellini et Pétri m.
8. Medardi et Gildardi.
9. Primi et Feliciani m.
11. Barnabe ap.
12. Basilidis, Cirini, Naborii et Nazarii.
14. Basili ep.
15. Viti et Modesti m.
16. Cirici et Julite matris.
17. Similiani conf.
18. Marci et Marcelliani. Heuhervei (sic) conf.
19. Gervasii et Protasii.
23. Vigilia S, Johannis Baptiste.
24. Nativitas S. Johannis.
26. Johannis et Pauli m. Maxencii conf.
28. Vigilia Pétri et Pauli.
29. Nativitas apostolorum.
30. Marcialis.

Julius.

1. Eparcii presb.
2. Processi et Martiniani.
4. Translatio S. Martini.
6. Octave apostolorum.
10. Septem fratrum martirum.
11. Translactio (sic) S. Benedicti.
14. Cipriani m.
16. Generosi abbatis.
18. Arnulphi conf.
20. Margarite v.
21. Prasedis v.
22. MARIE[9] Magdalene.
23. Apollinaris m.
25. Jacobi ap. Christofori et Cucufati.
28. Pantaleonis, Sansoni[s] mr. episcopi.
29. Felicis, Simplicii, Faustini et Beatricis.
30. Abdon et Sennem.
31. Germani ep.


Augustus.

1. Vincula S. Pétri. Machabeorum.
2. Stephani ep.
3. Inventio Stephani, Gamalielis, Nicodemis atque Abibon.
6. Xisti m. Transfiguratio Domini.
7. Donati m.
8. Girici. [S]maraldi.
9. Vigilia s. Laurenti.
10 Laurenti m.
11. Tiburcii m.
13. Yppolitim. sociorumque ejus. Radegundis v.[10]
14. Eusebii presb. Vigilia s. Marie.
15. Assumpcio sancte Marie.
16. Arnulfi episcopi.
17. Octabas s. Laurentii.
18. Agapiti m.
19. Magni m.
20. Filiberti abb. et Maximi conf.
23. Timothei e t Simphoriani.
24. Bartholomei ap.
25. Sancti Ludovici régis Francie.
27. Ruphi mart.
28. Ermetis m. Augustini ep.
29. Decollatio s. Johannis Baptiste.
30. Felicis et Adaucti m.

September.

1. Prisci m. Egidii abb.
2. Antoni m.
7. Evurcii ep.
8. Nativitas S. MARIE. Adriani m.
9. Gorgonii m.
11. Pronti et Jacinti m.
12. Reverenti conf.
13. Maurili ep.
14. Exaltacio S. Crucis. Cornelii et Gipriani.
15. Nichodemis m.
16. Eufemie v.
17. Lamberti ep. m.
20. Vigilia Mathei ap.
21. Mathei ap.
22. Mauriscii (sic), cum sociis suis.
23. Florencii conf.
27. Cosme et Damiani.
29. Michaelis archangeli.
30. Hieronimi presb.


Octobris.

1. Germani, Remigii, Vedasti, episcoporum.
2. Leodegarii m.
6. Fidis v.
7. Marci pape. Marci et Apulei. Sergi et Bacchi.
7. Dionisii, Rustici et Eleuterii.
10. Clari, episcopi Nannetensis.
13. Geraldi conf.
14. Calisti pape et m.
16. Repetita S. Michaelis. Ambrosii. Magnobodi. Vitalis conf.
18. Luce evangeliste
21. Severini ep.
24. Ma[r]tini abbatis Virtavensis Oportune v.
25. Crispini et Crispiniani m.
27. Vigilia Symonis et Jude.
28. Simonis et Jude apostolorum.
31. Quintini m. Vigilia omnium sanctorum.


November.


1. Omnium sanctorum. Cesarii m.
2. Eustachii, cum sociis.
4. Amandi conf.
6. Leonardi conf.
8. Quatuor coronatorum.

9. Teodori m.
10. Vigilia.
11. Martini. Menne m.
13, Brisci ep.
15. Machuti ep.
17. Gregorii Turonensis.
22. Cecilie v.
23. Clementis.
24. Grisogoni m.
25. Katerine v.
29. Saturnini. Vigilia.
30. S. Andree ap.


December.

&. Crisanti, Mauri et Darie.
4. Benedicti ab.
6. Nicholai ep.
7. Octave S. Andrée. Vigilia.
8. Annunciatio b. Marie Virginis.
10. Iulalie (sic) v.
11. Damasii pape.
13. Lucie v.
14. Fortunati.
15. Maximini ab.
17. Lazarii ep. et m.
19. S. Felicitatis.
20. Anastasii ep.
21. Thome ap.
24. Vigilia.
25. Natalis Christi.
26. Stephani prothomartiris.
27. Johannis apostoli.
28. Innocentum.
31. Silvestri pape.

  1. J’ai sollicité de M. Léopold Delisle l’honneur de publier la lettre qui précède et la notice qui suit. Par un procédé, dont le lecteur appréciera la délicatesse et la générosité, M. Joseph Angot avait bien voulu me faire abandon de ces documents précieux.
    M. Joseph Angot est l’auteur d’une : Étude sommaire sur saint Martin de Vertou, suivie de quelques notes sur la paroisse de Vertou (in-8 de 70 p.. 1905 ; extrait de la Rev. de Bret.)
    F. Duine.
  2. Saint Thomas Becquet, mort en 1170, canonisé en 1173.
  3. Le manuscrit porte un v surmonté du signe abréviatif des lettres er ou ir. C’est ainsi que le mot virginis est figuré à beaucoup d’endroits du calendrier.
  4. L’anniversaire de « Willelmus Girarst » est marqué au 22 avril dans le calendrier du Missel.
  5. Cf. L. Maître, Inventaire des Archives de la Loire-Inférieure, E Supplément, p. 349.
  6. Ce qui suit est copié sur le fol. 104, et le texte est accompagné d’une notation en neumes.
  7. L’usure du parchemin rend illisibles les trois dernières lignes.
  8. Les articles imprimés en caractères italiques ont été ajoutés après coup dans le ms.
  9. Le nom Marie, écrit en lettres capitales, semble bien indiquer que sainte Marie-Madeleine était la patronne de l’église à laquelle le Missel était destiné.
  10. Cet article et les trois suivants ont été récrits sur un passage gratté.