Le parfait mareschal/36

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Gervais Clouzier, 1680 (1 / 2, pp. 98-101).
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L’Emorragie est une perte de sang par le nez ou par la bouche, causée par une abondance de sang, parmy lequel il s’est glissé quelque liqueur pleine d’esprits & de sel, qui l’aura fait bouillir & fermenter, en sorte que les Vaisseaux destinez à le contenir n’en seront pas capables, ainsi il se rompra quelque veine qui fournira ce sang que l’on voit sortir par le nez du Cheval, cette liqueur a esté poussée dans le sang par un excez de chaleur causée par les fatigues extraordinaires dans les grandes chaleurs ; La cause peut venir aussi lorsque le sang est échauffé & subtil, soit par la nourriture precedente donnée en trop grande abondance, ou qui péche dans sa qualité, ou des fatigues qui le font Page:Solleysel - Parfait mareschal - 5è éd., 1680 - tome 1.djvu/113 Page:Solleysel - Parfait mareschal - 5è éd., 1680 - tome 1.djvu/114 Chap.
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tre canon, on souffle abondamment de cette poudre dans les nazeaux du Cheval qui saigne, & bien tost apres le sang s’arreste.

La mesme poudre est admirable aux Hommes qui sont sujets à seigner du nez, il n’y a qu’à porter de cette poudre dans une tabatiere, & en prendre comme du tabac par le nez, d’abord le sang s’arreste. J’en ay souvent veu l’expérience, & la poudre ne sent que l’herbe séche ; quelque délicat se récriera qu’il aymeroit mieux mourir que de prendre de cette poudre. Je consens qu’il n’en prenne point, & ne trouve pas mauvais qu’il n’approuve pas un remede si vilain, mais s’il en prend sans le sçavoir ? & de plus, qui asseurera ce Monsieur le délicat que son Apoticaire ne luy a pas fait avaller quelque chose de plus mauvais, qui peut-estre l’aura guery de quelque maladie de contrebande ? Mais comme je suis complaisant, je mettray icy un remede pour l’émorragie des Chevaux, qui peut servir pour les hommes : Prenez si vous pouvez, ou achetez un lièvre pris, & tué au mois de Mars, écorchez-le, & sans le larder, mettez-le en estat d’estre mis à la broche, sans pourtant l’embrocher, faites-le sécher au four en sorte que toute la chair se puisse réduire en poudre, souflez de cette poudre dans les nazeaux du Cheval en abondance, elle arrestera le sang qui sort par le nez, comme aussi celuy des playes : voila un remede tres-facile & tres-bon, & qui ne sent point la fiante d’asne.

Celuy-cy est encor tres-bon, & on peut le preparer commodément en tout temps. Prenez écorce de grenade seche, vitriol romain, & alun, de chacun quatre onces, mettez le tout en poudre, & le mélez, & vous en servez au besoin : ce remede arreste le sang par tout le corps : cette poudre se conserve long-temps en sa bonté, elle est excellente pour arrester le sang de toutes sortes de blessure.