Le parfait mareschal/64

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Gervais Clouzier, 1680 (1 / 2, pp. 167-169).
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IL y a des Chevaux qui ont esté nerfs-ferus, & mal pansez, la douleur a esté ostée en sorte que le Cheval ne boitte plus, mais les humeurs qui se sont amassées sur la partie ne sont pas dissipées, il y reste une enflure qui durcir, de maniere qu’il semble qu’on n’y puisse apporter d’autre remede que le feu : j’ay veu neantmoins en une pareille occasion que le remede suivant a guery le mal : Prenez un littron de Farine de lin, & autant de farine de féves, trois demy-septiers de bonne eau de vie de la plus forte, délayez ces Farines avec l’eau de vie, cuisez-la à petit feu, en mouvant sans cesse pour en faire comme de la bouillie, & y adjoûtez une livre de miel commun, & faites encor cuire le tout sur un feu moderé, remuant bien exactement : lors que la composition sera liée, vous la retirerez du feu, & mélerez parmy une demie livre de graisse de Mulet, si vous en pouvez avoir, & au deffaut, de la graisse de Cheval autant, demélez bien le tout ensemble, ce qui sera assez aisé, car la graisse s’y fond facilement.

Il faut couper tout le poil sur l’enflure, frotter extrêmement la partie avec bon esprit de vin, sans le faire chauffer, puis charger l’endroit avec la composition susdite, & appliquer de la filasse par dessus, & une enveloppe de toile qu’il faut coudre, ce qui fera moins de mal que si on lioit avec la ligature ; la couture serre bien plus également & avec moins de douleur pour la jambe ; laissez l’appareil deux jours, puis l’ayant levé bassinez encor d’esprit de vin, & appliquez le remede cy-dessus tous les jours, dans cinq ou six applications le Cheval pourra guerir & la jambe desenfler : ce qui est un assez bel effet, avec peu de peine, & de dépense.

Pour les enflures des jambes si endurcies, que les remedes ordinaires n’y font rien.

Souvent les maux des jambes de devant sont si envieillis, & les Page:Solleysel - Parfait mareschal - 5è éd., 1680 - tome 1.djvu/182 Chap.
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trois heures, & remettez de la lie lors qu’à force de bouillir elle diminue, puis ôtez du feu, & adjoûtez à toute la composition, huile de lin, de lys, & de vers, de chacun six onces, & une livre de therebentine commune, du miel deux livres, mélez bien le tout ensemble, pendant que la composition est chaude, & en frotter les jambes du Cheval le plus chaud qu’il le pourra souffrir, pendant quinze jours.

Si un reste de fourbure qui est tombé sur les pieds, les a rendu douloureux, ce qui fait que le Cheval en marchant sur le dur, n’appuye que sur le talon, il faut avec ce remede pratiquer celuy des pieds décrit au Chapitre ⅭⅬⅤ. immediatement avant le Chapitre de la galle.

Le précèdent Remède composé plus méthodiquement.

Il faut ôter le chaudron du feu lors que les chiens & les herbes sont pouries à force de cuire, le laisser un peu refroidir sans y méler les huiles ny le reste, puis ayant bien remué tout ce qui est dans le chaudron, pilez-le peu à peu dans un grand mortier, & passez ce qui est pilé au travers un tamis de crin renversé assez gros, afin d’avoir la poulpe du tout ; ayant passé au travers le tamis ce qui peut passer, il faut jetter le marc qui n’a peu passer & remettre dans un pot avec la lie qui a resté dans le chaudron tout ce qui est passé par le tamis, & faire cuire, adjoûtant le miel & la therebentine, puis les trois sortes d’huiles, jusqu’à ce que toute la lie soie consommée, alors ôtez vostre remede du feu, & l’appliquez chaudement autour des jambes comme un cataplasme avec de la filasse, & une enveloppe, & liez avec des lizieres de drap assez larges, faisant la ligature pour retenir les remedes sans trop presser, ou bien cousez l’enveloppe sans ligature.

Chaque fois que vous débanderez la jambe, il la faut frotter avec de l’esprit de vin, puis appliquer la composition chaude sur la vieille, ce remede restablira les jambes ruinées d’un Cheval, s’il est jeune.