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Leibniz-en.francais-Gerhardt.Math.1a7.djvu/Mémoire sur le Calcul différentiel

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(et ses correspondants)
Sentiment de Leibniz sur son Calcul différentiel[1]
Texte établi par C.I. Gerhardt (GM5p. 350).


XXIII.
MÉMOIRE DE MR. G. G. LEIBNIZ TOUCHANT SON SENTIMENT SUR LE CALCUL DIFFÉRENTIEL.[1]

Un des Journaux de Trévoux contient quelque méthode de Mr. Jacques Bernoulli, et y mêle des réflexions sur le calcul des différences, où j’ai tant de part. L’Auteur de ces réflexions semble trouver le chemin par l’infini et l’infini de l’infini pas assez sûr et trop éloigné de la méthode des Anciens. Mais il aura la bonté de considérer que si les découvertes sont considérables, la nouveauté de la méthode en relève plutôt la beauté. À l’égard de la sûreté du chemin, le livre de Mr. le Marquis de l’Hospital lui pourra donner satisfaction. J’ajouterai même à ce que cet illustre Mathématicien en a dit, qu’on n’a pas besoin de prendre l’infini ici à la rigueur, mais seulement comme lorsqu’on dit dans l’optique, que les rayons du Soleil viennent d’un point infiniment éloigné, et ainsi sont estimés parallèles. Et quand il y a plusieurs degrés d’infini ou infiniment petits, c’est comme le globe de la Terre est estimé un point à l’égard de la distance des fixes, et une boule que nous manions est encore un point en comparaison du semidiamétre du globe de la Terre, de sorte que la distance des fixes est un infiniment infini ou infini de l’infini par rapport au diamétre de la boule. Car au lieu de l’infini ou de l’infiniment petit, on prend des quantités aussi grandes et aussi petites qu’il faut pour que l’erreur soit moindre que l’erreur donnée, de sorte qu’on ne diffère du stile d’Archimède que dans les expressions, qui sont plus directes dans nôtre méthode et plus conformes à l’art d’inventer.

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  1. Journal de Trévoux an. 1701.