Les Îles des navigateurs

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LES ÎLES DES NAVIGATEURS

Les îles Samoa, ou des Navigateurs, forment un des archipels les plus intéressants des parages qui avoisinent le port d’Apia, en Océanie ; elles ont, dans ces derniers temps, attiré l’attention des Américains et des Allemands et commencent à jouer un rôle assez important dans le commerce général des pays civilisés. La Gazette d’Augsbourg publie une correspondance curieuse, envoyée d’Apia, sur la description des îles des Navigateurs, et sur les mœurs de leurs habitants, dont le nombre s’élève environ à 60 000 âmes. Les renseignements fournis par la feuille allemande ont été traduits dans le Journal officiel, auquel nous empruntons quelques documents du plus haut intérêt.

Sous les rapports physique et intellectuel, les insulaires des îles Samoa sont supérieurs à ceux des autres archipels, bien qu’ils n’aient pas renoncé à toute velléité de cannibalisme. Le sol y est d’une fertilité extraordinaire. Cependant jusqu’ici les seuls articles d’exportation ont été l’huile de noix de coco, la racine d’arrow, le caoutchouc, la fève de ricin, le gingembre, le café, le tarro, la racine de yam, le fruit de l’arbre à pain et le coton. On y pourrait planter du riz et du sucre ; mais la population est trop indolente, et il faudrait, pour augmenter la production, des émigrants européens apportant leurs bras et leurs capitaux.

Pendant les quatre dernières années, une guerre sanglante a régné entre les différentes îles, chacune prétendant à la suprématie. On a enfin conclu la paix, et il en est sorti une espèce de république fédérale, sous l’administration temporaire d’un président résidant à Apia. Habitués de longue date au maniement de la massue, de l’arc et de la lance, les indigènes ne sont pas encore très-familiers avec les armes à feu, bien que ces dernières se trouvent dans presque toutes les mains. Dans la chaleur du combat, ils se ruent les uns sur les autres, et frappent avec la crosse, ne commençant à tirer que lorsqu’ils sont derrière leurs remparts. Le tomahawk des Indiens d’Amérique joue aussi son rôle.

Après une bataille, les femmes se rendent dans le camp ennemi pour réclamer les têtes coupées. Dans l’accomplissement de cette mission, elles sont tenues pour sacrées, et nul n’oserait porter la main sur elles. D’ailleurs, elles sont l’objet de plus de respect que chez d’autres tribus sauvages ; elles ne travaillent pas comme chez les Indiens ; ce sont les hommes qui font les ouvrages les plus durs. La polygamie leur est inconnue ; cependant, le mariage n’y est soumis à aucune formalité. Quand un garçon et une fille se conviennent, ils s’unissent, jurant de marcher ensemble dans la vie, et ce lien est considéré comme légal.

Le teint des indigènes est d’un sombre olivâtre ; mais les enfants nés de blancs et de femmes du pays ont le teint beaucoup plus clair, avec une peau transparente.

Dans l’absence d’une loi écrite, les chefs des différentes tribus se sont adressés récemment à quelques consuls étrangers pour leur demander leur concours dans la rédaction d’un code.