Les épis (LeMay)/1

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Les épisLa Cie J.-Alfred Guay (p. 5).
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AU LECTEUR



Dans les sillons béants, les jardins, les buissons,
Au hasard j’ai semé. Mon front pâle ruisselle.
Ma tâche va finir. J’ai dépensé mon zèle
À calmer des chagrins au rythme des chansons.

Sur le flot blond des champs, au réveil des moissons,
Se penche l’ouvrier ; et la faux étincelle.
Ah ! qui sait le secret qu’un lendemain recèle ?…
Sur mes épis fauchés il passe des frissons.

Épis frêles perdus dans les touffes de l’herbe,
J’ai voulu les lier pour en faire une gerbe,
Mais le soleil d’automne a-t-il doré leur grain ?

Et je voudrais aussi les broyer sous la meule…
Pour l’âme au souffle ardent qu’un sort jaloux esseule,
Peut-être seraient-ils l’humble morceau de pain.


P. L.