Les Avadânas, contes et apologues indiens/59

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Traduction par Stanislas Julien.
Paris B. Duprat (1p. 207-208).


LIX

L’HOMME AVEUGLÉ PAR LE DÉSIR DE LA VENGEANCE.

(De ceux qui s’oublient eux-mêmes.)


Il y avait un homme qui était irrité contre un autre ; il était accablé de tristesse et son cœur ne connaissait plus la joie. Quelqu’un lui dit : « D’où vient cette sombre tristesse ?

— Il y a un homme qui m’a calomnié, répondit-il, et je ne suis pas assez fort pour me venger. Je ne sais comment faire pour user de représailles ; voilà l’unique cause de ma douleur. »

Quelqu’un lui dit : « Ce n’est que par les paroles magiques appelées Vidyâdhâran’i que vous pourrez lui nuire. Seulement, si, par hasard, le malheur ne l’atteint pas, il retombera sur vous-même. »

À ces mots, il fut rempli de joie et s’écria : « Je désire uniquement que vous me donniez vos instructions. Quand même je devrais me nuire à moi-même, je veux jouir de l’espoir de le blesser à mort. »

(Extrait de l’ouvrage intitulé : Pe-yu-king, ou du Livre des cent comparaisons, partie II.)