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Les Avadânas, contes et apologues indiens/61

La bibliothèque libre.
Traduction par Stanislas Julien.
Paris B. Duprat (1p. 212-214).


LXI

LE PAUVRE ET LES ROGNURES DE VILS MÉTAUX.

(De ceux qui se donnent de l’importance.)


Çârîpouttra dit un jour au Bouddha : « Si un pauvre, mourant de faim et de froid, trouvait une pierre précieuse grosse comme le mont Soumêrou, n’aurait-il pas un grand sujet de joie ?

— Sans aucun doute, répondit le Bouddha.

— Je suis allé dans tel couvent, reprit Çâripouttra, et j’ai entendu exposer les principes profonds des Avivarttins[1]. Voilà pourquoi je ne me sens pas de joie.

— Vous avez raison, lui dit le Bouddha. Cependant je vous proposerai une similitude. Supposons un maître de maison, un grand Grihapati, qui fait consister son trésor dans la possession de l’or pur et des perles. Il balaye des rognures de cuivre, de fer, de plomb et d’étain, et les jette dehors au milieu des ordures. En ce moment, un homme, pauvre et dépourvu de tout, les recueille précieusement et les emporte en disant : « J’ai trouvé en abondance les « choses précieuses du Grihapati ! »

— Sont-ce là, demanda le Bouddha, les choses précieuses du maître de maison ?

— Aucunement, répondit Çâripouttra.

— Eh bien ! reprit le Bouddha, ce que vous avez entendu de si magnifique ressemble à la trouvaille du pauvre ! »

(Extrait de l’ouvrage intitulé : Khieou-tsa-pi-ju-king, de l’ancien Livre des mélanges de similitudes.)
  1. Ceux qui ne doivent pas revenir, c’est-à-dire renaître dans le monde. Ce mot, qui est synonyme de Anâgamins, désigne ceux qui sont arrivés au troisième degré de la sanctification ; le quatrième et le dernier est la dignité d’Arhat.