Les Avadânas, contes et apologues indiens/95

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Traduction par Stanislas Julien.
Paris B. Duprat (2p. 70-72).


XCV

LE ROI ET L’ÉLÉPHANT.

(Mieux vaut douceur que violence.)


Jadis, un homme avait pris à la chasse un grand éléphant. Il l’attacha avec une chaîne de fer et l’amena au roi Prasênadjit. Celui-ci le fit enfermer dans une salle brillante et le laissa enchaîné. Non-seulement il ne lui donnait pas à manger, mais il le maltraitait avec cruauté. À la même époque, les gens du roi équipèrent[1] une troupe d’éléphants furieux et les armèrent pour le combat[2]. Au moment d’attaquer l’ennemi, ces éléphants belliqueux poussent ensemble le même cri. L’éléphant enchaîné, ayant appris que les ennemis avaient envahi les frontières du royaume, éprouva un sentiment de colère. Il rompit ses liens et brisa à coups de pieds le brillant palais qui lui servait de prison. Il s’élança impétueusement de l’est à l’ouest, et marcha dans les rangs de l’ennemi.

Le roi Prasênadjit fut vaincu et se repentit trop tard d’avoir maltraité le grand éléphant, et de ne pas avoir su se l’attacher.

(Extrait de l’ouvrage intitulé : Tchou-yao-king.)
  1. Voyez les Mémoires de Hiouen-thsang, sur les contrées occidentales, t. II, p. 150.
  2. Dans le royaume de Gândhâra, dit l’histoire des Wei postérieurs, il y a 700 éléphants de guerre, qui sont conduits par dix-huit hommes montés chacun sur un éléphant. Ces hommes sont armés d’une lance ; tous les éléphants portent une lance tranchante attachée à leur trompe. (Youen-kien-louï-han, livre CDXXX.)