Les Aventures de Til Ulespiègle/C

La bibliothèque libre.
Anonyme
Traduction par Pierre Jannet.
À l’enseigne du pot cassécoll. Scripta Manent, n°44 (p. 229-230).
Appendice

CHAPITRE C.


Comment Ulespiègle se fit berger à Brunswick.



Ulespiègle étant à Brunswick, et voyant que tous les employés du prince étaient à leur aise, se demandait comment il pourrait s’y prendre lui-même pour devenir riche. Il pria le prince de lui confier pour quelques années la garde de ses troupeaux, ajoutant qu’il ne demandait pas de gages. Le prince la lui accorda pour dix ans. Se voyant à la tête de troupeaux considérables, il écrivit à une ville du pays qu’il avait entendu dire qu’elle avait de bons pâturages, et qu’il se proposait d’y amener les troupeaux du prince. Les bourgeois eurent peur qu’il ne ruinât leurs pâturages, de sorte qu’il ne leur resterait rien pour leurs propres bestiaux, et ils lui envoyèrent vingt florins pour l’empêcher de venir. Ulespiègle se dit que son affaire allait bien : il écrivit à une autre ville, qui lui envoya aussi de l’argent, et ainsi de suite ; si bien que, peu de temps après, il était bien vêtu et pourvu d’argent. Le prince lui demanda comment il s’y était pris. Ulespiègle lui répondit : « Gracieux seigneur, voici l’explication : il n’y a d’emploi si petit qui ne rapporte quelque chose. » D’autres prétendent qu’il répondit : « Il n’y a pas d’emploi si petit que le diable n’y ait part. »