Les Carnets de la vicomtesse de Malartic

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Texte établi par transcription Yvan Reverdy ; annotations "P.G.",  (p. 1-16).


Les Carnets de la vicomtesse de Malartic



La vicomtesse de Malartic, née Marie Thérèse Borot de Bresse de Préfontaine[1] avait épousé le 7 octobre 1867 le vicomte Marie Henry Raymond Maxime de Maurès de Malartic[2].

Ils eurent trois enfants : Jehan né en 1868[3], Édith née en 1869[4] et Robert[5] né en 1871 mort à vingt-deux ans.

Pendant un séjour que je viens de faire à l’abbaye de Hautecombe, j’ai pu consulter les « carnets[6]» dans lesquels madame de Malartic avait pris l’habitude de relater ses souvenirs. Carnets que son fils aîné Don Jehan de Maurès de Malartic a laissés à l’abbaye où il est mort sous l’habit des Bénédictins en 1947[7].

Ces carnets, dont voici un extrait, m’avaient été signalés par le marquis de Puylaroque. Ils avaient été utilisés par le marquis de Cambolas dans son intéressant article sur « Les châtelains de Castelnau d’Estrétefonds au XIXe siècle » paru en septembre 1983 dans la revue Archistra.

Je les remercie de m’avoir signalé ces carnets qui, par le style choisi et la spontanéité d’une jeune femme, sont un enchantement pour le lecteur.


Notes (d’Yvan Reverdy, complétées par P.G.) :
  1. Née à Soissons (Aisne) le 16 juin 1846. À son mariage, son père est juge au Tribunal civil de Chaumont (Haute-Marne).
  2. Le vicomte Henry de Maurès de Malartic est l’arrière petit-fils du grand oncle du comte Louis de Reversat de Marsac (1837-1870) chez qui elle se rend.
  3. Marie Jehan né à Chaumont le 24 juillet 1868.
  4. Marie Édith Jeanne est née le 23 juin 1869, 11 mois après son frère, également à Chaumont. Dans l’acte de naissance, son père, Henry de Maurès de Malartic, y est mentionné chef de Bataillon de la garde nationale mobile.
  5. Robert Pierre Marie, mentionné ici, est né le 15 juin 1871 à Dijon 3 rue Longepierre. La vicomtesse devait être tout au début de sa grossesse à son départ pour Marsac.
  6. Les carnets de la vicomtesse de Malartic sont actuellement aux archives du monastère de l'abbaye Notre-Dame de Ganagobie, Cote IX B 50, Carnet manuscrit "Voyages" d’où sont extraites les vingt-neuf pages débutant par "En route pour Marsac."
  7. Il s’était marié à Paris (6ème) le 24 avril 1900 avec Marthe Claire Félicité GUYERDET. Ancien officier démissionnaire, reprend du service, à 46 ans, dès la déclaration de la guerre en 1914 comme Lieutenant au 3e Régiment de Chasseurs d’Afrique. « Il fait vaillamment son devoir et fut blessé le 7 octobre 1915 à Massiges en Champagne ce qui lui valut la Croix de Guerre ».
Première page du manuscrit
Première page du manuscrit


En route pour Marsac


Un beau jour je trouvais, à prix d’or, une voiture pour me conduire à Chagny avec les bébés[1], la nourrice et une femme de chambre.

Aux avant-postes je n’eus pas trop de difficultés, grâce au laisser-passer du général prussien[2]. On me fit bien des questions, on retourna bien mon papier, mais avec une certaine politesse. À Beaune, pendant que les chevaux soufflaient, les fortes têtes du cru entourèrent ma voiture ; on demandait des nouvelles : où étaient les Prussiens ? etc… Je dus, debout sur le marchepied de la portière ouverte, calmer la foule et lui donner l’assurance que l’ennemi installé à Dijon n’avait pas encore dépassé la ville.

La petite bonne femme que j’étais alors, s’amusait du rôle de crieur public qu’elle adoptait pour rassurer les esprits.

Avant d’arriver à Chagny j’aperçus des francs-tireurs couchés dans les fossés ; ils levèrent la tête en voyant une voiture, puis un corps se dressa, faisant signe d’arrêter. On avait tiré sur leur groupe et des balles avaient troué leurs manteaux. Je rassurai également ses hommes leur disant que je venais de croiser un peloton de gendarmes français et redis encore que les Allemands n’avaient pas dépassé Dijon. Les bons Francs-tireurs, contents avec cela, purent continuer leur route autrement qu’à quatre pattes dans les fossés et les trop vifs gendarmes tirer encore ailleurs, sur des ennemis imaginaires (ils tapent généralement toujours à gauche ces braves gendarmes). Le cocher de la voiture a trouvé, en effet, une balle sur le caisson. J’avais bien entendu un petit bruit sec mais je croyais que c’était un caillou… Braves gens ! Ils ont fait coup double, le manteau du franc-tireur et le caisson d’une voiture ! C’est là un fait d’armes qu’ils vont conter à Beaune et ils croiront avoir bien mérité de la Patrie.
« Une profonde tranchée coupait la route de Chagny. » (Couverture du manuscrit)

À cent mètres de la gare une grande et profonde tranchée barre la route. La voiture ne peut aller plus loin.

Des feux de bivouac sont tout près, il fait presque nuit. Les silhouettes éclairées des soldats se détachent sur l’horizon du ciel rouge d’un merveilleux soleil couchant.

Je ne sais quel parti prendre pour transporter les malles à la gare. Le cocher dépose les bagages… faire plus n’est pas dans le programme… pourquoi y a-t-il une tranchée ? C’est la faute de la guerre….

Je grimpe le talus qui borde la route ; là, je me trouve dans le camp du bivouac, je m’approche d’un feu. Les hommes accueillent mes bébés, leur font chauffer à la flamme leurs menottes roses, la soirée est froide, une belle soirée d’automne[3]. Je conte aux bons troupiers, que je suis la femme d’un de leurs chefs, que ne pouvant être auprès de lui, je pars bien loin et qu’il serait gentil, à eux, d’aider à descendre mes malles et à les porter en gare.

Aussitôt, ils s’envolent gaiement, on fait le transbordement et les braves me souhaitent bon voyage quand je leur donne quelques pièces de monnaie… Que sont-ils devenus ?… Belle armée de 70 ! écrasée par le nombre… mal dirigée par de glorieux généraux, trop vieux, malades qui n’avaient pas su en faire de jeunes à leur moule pour les remplacer, mais que de beaux dévouements, que d’actions héroïques souvent ignorées ! Vaincue, l’armée française l’a été, Oui ; mais avec l’admiration de toute l’Europe et même de celle de son plus grand ennemi, qui du haut de la colline d’où il contemplait la bataille n’a pu s’empêcher de s’écrier : « Ah ! les braves gens ! » (les cuirassiers de Reichshoffen).

Vaincus de 70, vous aurez une belle page dans l’histoire quand les haines politiques seront éteintes !


La gare de Chagny est là, bondée de troupes. On ne peut circuler sur le quai. Je fraye un passage à mes enfants, portés par les femmes.

Ces masses d’hommes armés nous regardent curieusement.

Je crois que je suis la seule de mon espèce, pas une femme ne se serait aventurée dans cette cohue de baïonnettes.

D’un groupe d’officiers s’en détache un. Il vient à moi : « Madame, me dit-il en se découvrant, il y a plus de 45 mille hommes à Chagny ; vous êtes, sans doute, étrangère au pays et si vous voulez y passer la nuit vous ne trouveriez pas un lit, pas un morceau de pain. Le dernier train va partir dans quelques minutes, car tout le matériel se replie, si vous ne le prenez pas… je ne sais ce qui vous arrivera ici ».

Je remercie l’officier et me hâte. En passant devant ce qui avait été le buffet la nounou essaye de demander un morceau de pain. « Eh ! une nounou qui réclame le merle blanc, répond un loustic. Du pain ! Rotchild, avec tous ses millions, n’en aurait pas ». Une tablette de chocolat, restant dans mon sac, Jeannot s’en contente pour son dîner, sa sœur a le sein de sa nourrice.


À 11 heures du soir nous étions au Creusot. Impossible d’aller plus loin.

Sur le seuil de la gare pas de voiture, pas un gamin, pas une lumière, une nuit d’encre et je n’étais jamais venue au Creusot.

Le seul homme qui fût encore dans cette gare (allant être abandonnée) me dit d’aller tout droit, que je trouverai la ville. Je mis les deux femmes derrière moi portant les deux enfants, en leur recommandant de tenir le bord de ma pelisse de fourrure. Puis je marchais devant elles, les bras étendus pour que les bébés ne soient pas cognés par les arbres de la route, je m’étais rendu compte que le chemin devait être bordé d’arbres. Enfin une lumière lointaine me guida puis la ville, un hôtel, une chambre !

Mais le lendemain les malles étaient perdues… On me dit que dans la journée des fourgons contenant des outils, un reste de matériel, pourraient encore arriver et rapporter ces malles oubliées à Chagny.

Elles furent rendues et le soir nous étions à Moulin.

Il fallait changer de voie et prendre d’autres billets. Je plaçai les deux femmes dans un coin, les bébés étant protégés par les murs et me lançai dans la mêlée à l’assaut du guichet. Il fallait jouer des coudes, je n’avançais pas : quand un vieux galonné cria aux autres : « Laissez donc passer la petite demoiselle, elle voudrait son billet ». Grâce à lui, la petite demoiselle, qui ne l’était plus, fut servie et revenant prendre ses bébés, on les hissa dans des wagons de troupiers. Il n’y avait qu’eux, 1e 2e 3e classes, tout était semblable. Toute la nuit nous roulâmes, mais, dans la matinée du lendemain, je longeais les lumineuses plaines de la Garonne, éclairées d’un joli soleil. À Castelsarrasin, je trouvai une voiture et trois heures après, j’apercevais sur sa montagne élevée le château de Marsac, vieille citadelle grise, un nid d’aigles…


Arrivée à Marsac


Des fenêtres, on avait vu une voiture. On se demandait : Qui passe là ? une voiture ? des malles ? des gens fuyant les Prussiens ?

Mais quand le véhicule tourna, prenant la montée du château, l’intérêt redoubla… Il n’y a pas tous les jours pareille distraction à Marsac ; aussi tout le monde était rassemblé à la porte, sur le perron, pour voir le phénomène qui, sans doute, allait sortir de l’équipage mystérieux.

J’avais pu à travers le luxe brésilien de mon premier voyage, étudier le caractère méridional[4], aussi je cherchai à me mettre au diapason. Alors, devant cette famille qui m’était à peu près inconnue, je bondis de la voiture et criait bien haut : « Bonjour cousin[5], voulez-vous de moi ? » (J’avais bien écrit, mais la lettre arriva huit jours après moi. Je n’en avais mis que trois pour faire le voyage.) J’eus un succès bœuf ; vingt bras se tendirent, me portèrent plutôt… « Eh, c’est la femme d’Henry. Elle a vu les Prussiens… Eh ! c’est les petits d’Henry. Oh ! les pôvres, comme ils sont noirs ». De fait les robes de piqué blanc en partant de Dijon avaient singulièrement changé de couleur dans les trois jours de voyage. On m’installa dans une grande chambre, deux autres à côté pour les bébés et les bonnes.

Le château ne devait pas avoir été touché depuis les guerres avec les Albigeois… Les portes ne joignaient pas ; l’air y passait et avec tout le bras d’une personne ; aussi, dans les grands vestibules et corridors, quand soufflait le vent d’Autan, c’étaient des tourbillons, des mugissements superbes, terribles, s’entrechoquant d’un bout à l’autre de la vieille demeure… Mais la bonne tante Félicité[6] était là, pour me dorloter, comme à Castelnau-d’Estrétefonds, lors de mon premier voyage dans le midi, aussitôt mon mariage[7]. Ici, pas de luxe comme à Castelnau, quelques vieux meubles égarés dans les coins, le reste ressemblait fort à une ferme bien cossue… Le lendemain matin, dans le grand salon tout simple il me semblait que je l’avais déjà habité, tant il y avait de bonhomie dans l’accueil que je recevais d’une famille pour laquelle j’étais une inconnue presque. Et Louis de Marsac me disait avec son terrible accent et sa franchise de méridional : « Cousine, vous gagnez à être connue, nous n’avions fait que vous apercevoir à Castelnau, chez Francisca la Brésilienne[8] qui faisait tant de façons…[9] Il me semblait que vous deviez en faire autant et nous disions : Ça, c’est une femme du Nord, elle se croit plus que nous, je ne sais vraiment pas où ce pauvre Henry a été pêcher cette pimbêche… Et je trouve maintenant que vous êtes rudement gentille ». Un peu plus il me faisait une déclaration amoureuse, et je n’étais arrivée que de la veille ! Jugez un peu…

Ce qu’il y avait d’admirable ici, c’était l’hospitalité généreuse, sans compter qu’on y recevait. Nous étions douze à quinze à table. M. et Mme de Marsac[10], leurs enfants, Mme de Belleud leur mère, la tante Félicité de Puylaroque, le curé[11] (de siècle en siècle ils y prenaient tous leurs repas, les curés de Marsac). Puis un vieux M. de Voisin[12] (fort riche), il n’avait pas quitté le château depuis sa jeunesse, s’y faisait héberger. Enfin un réfugié espagnol dont personne, je crois, ne connaissait l’origine. Il avait été recueilli et restait l’hôte de la maison depuis les guerres d’Espagne. J’en oublie… Il y avait encore Albert de Belleud, frère d’Hélène de Marsac… etc. Dans les cuisines, tout le village venait y manger à tour de rôle. Et on vivait largement sur les propriétés sans avoir besoin d’une pièce de cent sous en poche (comme dans le bon vieux temps).

Louis de Marsac avait un frère[13] ayant une autre propriété ici près[14] et une sœur Mme d’Aurelle de Paladines[15], logée au bas du château dans une sorte de pavillon ou petit castel. Quand elle ne venait pas dîner avec son mari[16], elle montait toujours pour la veillée.


Vie au château et visite royale


Je restai plus de cinq mois à Marsac, je me faisais à cette vie campagnarde. Tous les jours les mêmes choses devant les yeux, les mêmes paroles étaient échangées. Après le déjeuner très copieux (des foies gras, tous les jours pendant la saison, ou des carcasses d’oies confites, c’était exquis et on mange ferme ici), on prenait le café au salon, autour d’une grande table ronde.

Le vieux monsieur de Voisin s’étendait alors dans son grand fauteuil Voltaire et commençait sa petite histoire.

Il y avait deux ou trois versions différentes qui préludaient ainsi : « Après la bataille de Wagram[17] où j’ai été blessé… » ou bien encore : « Du temps de Mme de Marsac[18], la mère… » Au bout de huit jours je les savais toutes par cœur les petites histoires et pouvais souffler le mot qui quelque fois ne venait pas.

Un jour, le vieillard ajouta à sa narration que bien peu de personnes auraient été dignes de dénouer les cordons de souliers de Mme de Marsac la mère. Je demandais des détails que tante Félicité me conta tout bas. L’histoire pourrait commencer ainsi :

« Il était une fois, un roi et une reine, ou mieux encore des princes et des princesses qui étaient venus se promener dans le midi de la France. Ils avaient parmi leur suite une grande jeune fille dont on ne connaissait pas l’origine, paraît-il. La duchesse d’Angoulême, car elle était nommée, désirait marier cette jeune personne à un gentilhomme de ce pays, pour l’éloigner de la cour où sa naissance, trop illustre peut-être, devait rester inconnue. Pourquoi les de Marsac furent-ils choisis ? L’histoire ne le dit pas.

Mais un beau jour, les deux frères de Marsac[19] et leur ami de Voisin s’agenouillèrent tous trois[20] devant la jeune princesse (si princesse il y avait) et lui dirent : « Choisissez ». Elle choisit le plus [âgé] qui d’ailleurs était un homme bon et fort bien élevé (marquis de Reversat de Marsac) et vint s’établir au château. Les deux évincés l’y suivirent aussi, pour lui servir de chambellans sans doute, obéir à ses ordres… Ces trois hommes lui consacrèrent leurs trois vies. Chose singulière, tous trois connurent l’origine singulière de cette femme et jamais le secret ne fut divulgué. Même les enfants ne surent jamais qui était leur mère. »


Madame de Marsac


Madame de Marsac fut très intelligente et encore plus autoritaire. Elle commença par s’occuper des propriétés, fermiers et métayers. La fortune était en assez piètre état ; elle la doubla, la tripla par une sévère et bonne administration, sans apporter d’ailleurs aucun luxe au château.

Sa réputation de femme supérieure se propageait dans les campagnes. De plusieurs lieues à la ronde, les paysans, s’ils avaient un procès, venaient consulter la « Dame de Marsac ». Elle dirigeait le spirituel en même temps que le temporel s’étant érigée chef du parti janséniste.

En comparant le château à un nid d’aigles, je me trompais étrangement, j’aurais dû dire le repaire du jansénisme.

Le duel religieux, entre cette femme et l’évêque de Toulouse, restera légendaire ; on en parlait encore dans la région. Elle exerçait les fonctions, s’arrogeait les pouvoirs d’évêque et de Pape. Quand, par exemple, le curé allait se retirer du salon, après le dîner, elle l’arrêtait d’un geste : « Curé, demain vous monterez en chaire et vous ordonnerez un jeûne général ». Le pauvre curé était embarrassé, hésitant, mais la volonté souveraine était là. Il dînait et déjeunait avec Elle chaque jour… Et le jeûne était annoncé quitte à se débrouiller avec l’autre évêque, le vrai, celui de Toulouse… Et il restait encore quelque chose des doctrines jansénistes dans cette famille, malgré la soumission de la grande Mme de Marsac, prononcée enfin peu de temps avant sa mort[21].

Le soir, à la veillée, Louis de Marsac se promenait alors, de long en large dans le grand salon. C’était, souvent, le moment choisi pour déblatérer contre la papauté ! Le Pape ! mais c’était l’ennemi de la religion, le péril sur lequel on devait fondre. Et Mme d’Aurelle[22] d’ajouter : « Oui, le Pape fait encore beaucoup de mal à la religion ». Elle avait puisé cela aux doctrines de sa mère, en même temps que le lait de sa nourrice ; il en restait donc quelque chose.

Ces veillées restent pour moi légendaires. Les promenades de long en large de M. de Marsac, ses péroraisons méridionales avec son terrible accent du Sud-Ouest, pendant que les femmes et moi tirions des points à nos tapisseries. M. de Voisin ouvrait un œil pour dire un mot de sa bataille de Wagram et le curé ne disant rien.

D’ailleurs, les questions politiques, religieuses ou autres étaient peu approfondies à Marsac. Les enfants avaient été singulièrement élevés. N’admettant pas une supériorité autour d’elle, Mme de Marsac[23] retira ses fils d’une institution de Toulouse où ils auraient été élevés selon leur rang. S’apercevant qu’ils étaient intelligents et deviendraient ses égaux elle les laissa à la campagne où ils menaient un peu la vie des paysans peu cultivés. On sentait en eux la race. Ils étaient grands, fort bien tournés, mais l’écorce était rude, l’éducation de notre monde manquait. Ce n’était pas gentilshommes-campagnards qu’on pouvait les appeler, mais plutôt gentilshommes-paysans.


La guerre de 1870, vue de Marsac


Nous étions mal renseignés sur les événements de la guerre. Les journaux qu’on recevait de la région méridionale se contredisaient souvent et étaient mal renseignés.

Pendant ce terrible hiver je ne reçus que trois lettres d’Henry. De mes parents j’avais plus de nouvelles. Dijon était moins avancé dans les lignes prussiennes. On se battait aussi autour de Dijon (témoin la bataille de Nuits[24]), mais à intervalles inégaux, j[e n]’avais donc plus de chance de recevoir des lettres.

Un soir, sur la table du salon, un journal était devant moi. Je lisais machinalement le récit d’un combat et m’aperçus qu’il avait eu lieu près de Langres. Je lus au bas de l’entre-filet que le commandant du régiment de la Haute-Marne avait été tué ! Je ne fis pas un mouvement, mais cherchai à me rendre compte de cet article mal interprété ou tronqué. La traduction semblait indiquer qu’il était question du chef et il y avait quatre commandants dans le régiment. Je fus triste et sombre le restant de la soirée, sans mot dire.

À mon coucher, la bonne tante Félicité, qui venait toujours me dorloter, me demanda pourquoi j’avais l’air si malheureux. Je lui contai l’article de la feuille de chou du cru. Elle fut navrée, mais surtout ce qui la désolait c’était de n’avoir pas supprimé le journal afin qu’il ne puisse me tomber sous la main, comme on avait fait, paraît-il, la veille pour des journaux à mon adresse, que la famille avait brûlés, afin que je ne les lusse pas (cette assemblée de famille décrétant de jeter les journaux au feu pour qu’ils ne parviennent pas au destinataire ?). Alors je bondis : « Vous deviez penser, ma tante, que si mon mari n’est plus, c’est à moi à le savoir la première et je n’admets pas, qu’ici, on supprime ma correspondance. Les femmes de votre pays sont donc des guenilles… ». La pauvre, bonne et excellente tante était navrée.

Le lendemain je recevais une lettre d’Henry (l’une des trois arrivées). Il me faisait le récit du combat de Longeon[25] de la mort du comte de Regel, tué d’une balle en pleine poitrine ; il avait presque reçu la mort à la place d’Henry qui devait faire cette sortie. Le général ayant besoin de lui ailleurs, M. de Regel avait eu l’ordre de prendre le commandement au dernier moment. C’était un homme charmant, nous connaissions toute sa famille.

Quant aux journaux, je le sus après la guerre, c’étaient mes parents qui me les envoyaient afin que je lusse le combat de Longeon, les opérations autour de Langres, etc…


Après ce petit incident, la vie calme et unie de Marsac reprit son cours ; mais la fièvre des nouvelles hantait notre montagne ; Louis de Marsac allait quelquefois à Toulouse. Un soir qu’il en revenait tard, il ouvrit la porte du salon d’un geste théâtral, resta debout dans l’encadrement de cette porte, comme une statue de l’antique et quand tous les yeux furent fixés sur lui, il laissa tomber ces paroles : « Paris est débloqué ! ». À côté de ce geste, de cette intonation, Talma, Rachel n’avaient jamais existé. On n’est pas de Gascogne pour rien… Hélas ! Une heure après, la grande nouvelle n’était qu’un vulgaire canard.

La bataille de Coulomier[26] (Général d’Aurelle de Paladines) eut quelque écho ici. Le neveu du vainqueur faisait partie de la famille et son petit-fils était le fils de Louis de Marsac qui l’avait eu d’un premier mariage avec la fille du général. C’était un garçon d’une dizaine d’années tandis que ceux de Mlle de Belleud étaient des bébés.


Épidémie de variole et ses conséquences


Un autre soir[27], Marsac revint encore de Toulouse avec une quinzaine de soldats. C’étaient de pauvres malades, estropiés, hors-services. On les confiait à des propriétaires généreux pour tâcher de les refaire à l’air de la campagne.

Marsac en avait empilé tout ce que pouvait contenir son grand break et nous les amenait. Ils avaient eu les pieds gelés ces malheureux ou entamés et blessés.

On allait les voir presque chaque jour, leur apportant onguents, pommades, élixir et le reste. Ils étaient à bon râtelier pour retrouver la santé. Mais l’un d’entre eux apportait le germe de la petite vérole noire et mourait en deux jours. Courageusement, Marsac ensevelissait le soldat avec l’aide d’un vieux domestique. Personne ne se souciait de toucher le malheureux.

Peu de jours après, Marsac s’alitait. Mal soigné par un mauvais médecin de campagne, les boutons ne purent sortir, le mal rentra avec le délire. Une nuit[28] il passa. Minuit sonnait, je venais de quitter la chambre du mourant où j’étais avec tante Félicité et Hélène de Marsac.

Ce fut un malheur pour cette famille. Je vois encore la tristesse sur tous les visages, la cérémonie funèbre, les longues files de métayers et de paysans. C’était une providence pour le pays, que ce bon de Marsac.

Et puis la vie de tous les jours reprit, mais le chef manquait et dans la suite tout devait se désagréger ici et aller à sa ruine.


Madame d’Aurelle prit la vérole ; elle fut bénigne, j’allai voir la malade. Tout en m’apercevant, elle me cria : « Ne me touchez pas, vous n’avez pas même de gants ». Je l’assurai que je n’attachais pas d’importance à cela. Quand on a peur d’une maladie ou d’un danger l’affronter est courageux mais lorsqu’on n’a pas l’idée de ce danger il n’y a aucun mérite à le braver.

On ne faisait pas attention aux microbes, comme à présent, et puis je ne croyais pas non plus que mon cher mari pût être blessé. Je pensais à lui chaque jour, mais sans trop de tristesse et je crois que je souffris un peu moins que d’autres, dans ces longs mois de tourments pour tous.

Des jours, des semaines passèrent puis on décréta qu’il fallait se faire vacciner. J’avais observé par ce temps d’épidémie, que les personnes se faisant vacciner étaient atteintes de la maladie quinze jours après. On disait à cela qu’elle était plus bénigne et que l’on risquait moins d’y rester. Mais en supprimant le vaccin on pouvait y échapper. D’autre part, je m’étais laissé raconter qu’une femme dans ma position (je portais le petit Robert[29]) ne prenait pas de maladies. Je ne sais si cela est vrai ; mais comme j’avais une superbe santé, je n’avais nulle envie de m’inoculer quoique ce soit. Je restai donc bien ignorée ce jour là, dans un coin du salon, observant cette pléiade humaine présentant ses bras à l’opérateur (le médecin de campagne qui, par ignorance, avait laissé mourir ce pauvre Marsac). Il y en avait de jolis (des bras) et de laids. Mes deux femmes se laissaient vacciner ; puis arrivaient les domestiques, les métayers tenant leurs petites filles par la main. C’était amusant cette randonnée, chacun s’empressant pour prendre son tour comme à une distribution de prix.

Une voix clame dans le tourbillon : « Et Marie Thérèse, où est-elle ? ». Moi : « Elle est ici, mais comme j’ai été vaccinée à ma naissance je trouve que cela suffit et je m’abstiens ». Cela est de l’enfantillage. On m’entoure. Emmanuel[30], frère de ce pauvre Marsac (il était venu pour la circonstance), me saisit par le bras. Je me dégage vivement, indignée. « Si vous vous mettez quinze pour me déshabiller, évidemment, vous serez les plus forts, mais je vous déclare que le premier qui me touche, je saute par cette fenêtre ». La chute n’aurait pas été mince, le château étant à cent-cinquante pieds du sol.

Le vide se fit aussitôt autour de moi et je retournai m’asseoir dans mon petit coin obscur ; mais le soir ils disaient entre eux, ces bons cousins : « Elle en a un de ces caractères, la femme d’Henry. Eh ! le pôvre, il ne doit pas en mener large avec elle ». Le brave Marsac n’était plus là pour clamer que j’étais rudement gentille !

Avec tante Félicité j’allai à Montauban, revoir la tante religieuse, puis diner chez la femme du député d’alors, à Toulouse chez les de Cambolas, les de Bermond, etc… Enfin à Castelnau pendant une dizaine de jours, le marquis et la marquise de Cambolas étaient au Brésil, il n’y avait au château que l’oncle et la tante de Puylaroque[31] et un petit bébé[32] blanc et rose, baigné chaque jour d’eau de , élevé dans du coton comme les enfants qui ont des parents âgés. Il [y] avait deux ans, aussitôt après mon mariage[33] nous étions venus assister à celui de l’oncle[34] et je ne me doutais pas que ce petit enfant, orphelin quelques années plus tard[35], serait nôtre, élevé avec mes enfants. Et à Dijon, ailleurs encore, resterait légendaire sous le sobriquet de « Popo[36] ». (c’était sa sœur, erreur de date)


Retour à Dijon


Des bruits d’armistice couraient. L’Allemagne comme la France était épuisée. J’attendais avec impatience le moment du retour auprès des miens. Aussitôt la signature de cet armistice[37], je voulais partir, tenter le voyage. J’étais jeune, l’aventure, la difficulté me plaisaient ; je voulais les tenter le plus tôt possible.

Je dis adieu à cette famille en deuil, qui m’avait offert une si cordiale hospitalité. Je puis dire adieu car je ne revins pas dans le midi. D’autres épreuves m’attendaient, sans doute, ailleurs, telle est la vie…


Ce retour fut peut être plus fatiguant, plus désagréable que le voyage d’arrivée. Le pays, la France entière, était désorganisé (pour peu de temps du reste, les ressorts étaient solides, elle se remonta vite, retrouvant force et richesse au grand étonnement de l’Allemagne).

Mais les gens qu’on trouvait alors dans les trains me semblaient avoir le cerveau dérangé ; ils parlaient déjà de la revanche, de projets extraordinaires, avec une exaltation extrême. J’écoutais un peu ahurie. Je sais bien que je venais de subir une séquestration de plusieurs mois ; j’étais comme l’oiseau sorti de sa cage ; il ne sait où se poser et s’étonne de tout.

Les troupes encombraient les trains et les gares. C’était autrement désagréable qu’à l’automne. Au lieu de ces braves gens à figures honnêtes et polies, portant mes malles, caressant mes bébés aux lueurs des feux de bivouac, j’avais sous les yeux de pauvres hères débraillés, hâves, maigres. Ils faisaient pitié, plus de tenue, se traînant à peine et cherchant le soutien dans la boisson.

À mon premier voyage, pas un ivrogne, aujourd’hui il n’y avait que cela.

Obligée de coucher à Aurillac y arrivant le soir, je montai dans un omnibus d’hôtel ; les enfants étaient devant moi sur les genoux de leurs bonnes. Un monsieur se plaça à côté d’elles et un jeune soldat, complètement ivre paraît-il, parvint à s’asseoir de mon côté. Je n’y avais fait aucune attention, lui tournant le dos, le coude appuyé sur le vasistas ouvert, je respirais l’air doux de cette soirée de printemps. Nous avions roulé tout le jour.

Je pensais à Henry dont je me rapprochais enfin. Comment allais-je le trouver ? et où était-il ? Je ne le savais même pas… Puis… Ma famille que j’allais revoir après sans doute bien des ennuis et cette terrible occupation prussienne… Hélas ! (nous en avions pour deux ans, à conserver dans Dijon les casques pointus). Je pensais aussi à l’état de la France et des esprits que je trouvais exaltés. Mais la nounou me tire par ma pelisse : « Madame, madame… c’est l’ivrogne… il prend madame par la taille ». Je me retourne… Jamais je n’avais eu l’idée de figure d’ivrogne, rose, poupin et bête, si près de la mienne. Il me regardait avec des yeux humides en m’appelant sa petite… je ne sais plus quoi ; sans doute le nom de sa payse. Ce visage souriant, jeune et béat, contrastant avec les sujets plutôt tristes qui occupaient ma pensée, me fit un si drôle d’effet que je partis d’un immense éclat de rire. Le monsieur d’en face, me regarda étonné, mais aussitôt, se levant fort poliment, il m’offrit sa place : « Vous êtes bien mal ici, Madame, veuillez prendre la mienne ». Je remerciai l’homme bien élevé dans l’espoir que mon éclat de rire ne l’avait pas trop scandalisé.


Le lendemain matin, à la gare c’était bien autre chose. Il y en avait une nuée de ces malheureux ; ils obstruaient la porte ; l’un d’eux poursuivait ma grande nounou ; mais elle était une gaillarde. Elle roula le soldat par les deux coudes, le mit sur une banquette disant à un employé de le faire monter dans son train car il n’en était pas capable et ennuierait tout le monde. Quel voyage !!


Un soir on atteignit Beaune. Les hôtels n’y fourmillent pas et tout une armée de Prussiens y était installée. Il fallait y coucher. Ni chemin de fer, ni voiture, mais un coucou, une sorte de caricolo, datant du déluge, partirait peut-être le lendemain pour Dijon. Il fallait toutefois retenir ses places ! Quant à trouver un gîte, inutile.

Fatiguée d’avoir erré aux quatre coins de la petite ville, j’étais venue m’échouer sur un banc de pierre d’une place, d’un cours… je crois. Je n’avais plus qu’une idée : passer la nuit sur ce banc. On y coucherait voilà tout.

Devant moi passaient des officiers prussiens, raides, gourmés, gonflés de morgue ; ils faisaient claquer sabres et éperons. Ils me rappelaient ces grands échassiers lourds et empesés. Leurs grandes bottes bien étroites exagéraient encore cette ressemblance. L’officier prussien cherche et veut être élégant, sa mise cherche aussi l’effet, mais ces silhouettes carrées se retournant tout d’une pièce, n’ont aucune grâce du moins à mes yeux. Je les regardais d’ailleurs, ce jour-là, sans les voir, ces êtres d’orgueil…

Une jeune femme passa, simplement habillée (elle me fit l’effet d’une ouvrière bien mise), elle regarda le groupe misérable que nous composions sur ce banc : « Oh ! les jolis bébés… Madame est sans doute étrangère et ne peut trouver de chambres. À Beaune les Prussiens ont tout pris. Je ne suis qu’une ouvrière mais si Madame voulait venir dans mon logement, il est propre et elle pourrait s’y reposer, elle et ses bébés, pour cette nuit. » — « Oh ! bien volontiers. » et reprise d’un peu de courage, je suivis la gentille inconnue. Chez elle, une grande chambre convenable, un bon lit me fut offert, une sorte de canapé fut arrangé pour le lit des enfants. Les deux femmes se casèrent je ne sais où. On mit le couvert sur la table et je me reposai dans un grand fauteuil, pendant qu’on allait dans un restaurant chercher quelque chose à manger.

Ceci était un autre problème. Je crois qu’il fut très mince le dîner ! J’ai souvenir d’arêtes de poisson en sauce sur mon assiette, mais je crois qu’il n’y avait à peu près rien à côté. C’était le cas de dire : « À la guerre comme à la guerre ».

La nuit passa, la matinée aussi. Puis des heures furent traînées dans ce coucou cahotant aux deux haridelles efflanquées ! La guerre avait tout pris.


Enfin, à 8 heures du soir on nous déposa place de Florimond. J’étais à Dijon !

Nous ne fîmes qu’un saut pour aller à l’hôtel de la rue Jusserrin et à mon gai carillon de toutes les cloches, je vis Henry descendre le grand escalier.

Parti de Langres le matin à cheval, pour avoir de mes nouvelles, il espérait un peu me trouver. Il me porta presque au salon de mes parents où mes bébés firent une entrée sensationnelle. Marguerite[38] ne parlait pas avant son départ et tous deux gentiment s’écriaient : « Bonjour.r.rrr, bonné.é.é mamé.é.é ».

De saisissement, toute la famille demeura muette de stupeur… Grands Dieux ! d’où viennent-ils ? pour avoir pris un pareil accent !



  1. La guerre de 1870 vient de commencer, le commandant Henry de Malartic est parti pour Langres avec son régiment. Voir note 3 et 4 dans l’avant-propos. La Vicomtesse quitte Dijon,… La famille résidait encore à Chaumont à la naissance de Marie Édith le 23 juin 1869. La famille ne devait résider que depuis peu à Dijon, probablement août-septembre 1869, au 3 rue Longepierre où la vicomtesse accouchera de son troisième enfant, Robert, le 15 juin 1871, au retour de son périple dans le midi. En tenant compte de la date de cette naissance son départ n’a pu avoir lieu que dans l’intervalle des 9 mois précédents donc pas avant le 15 septembre 1870. Probablement fin septembre.… pour se réfugier dans le midi chez ses cousins de Marsac,… Cousins par alliance, voir note 2 dans l’avant-propos.… avec ses deux enfants, Jehan né en 1868 et Édith née en 1869.
  2. Il fallait un laisser-passer de l’autorité occupante.
  3. Confirmerait la date probable de départ de la note 1 de la page 2 : fin septembre 1870, après les défaites des batailles de Reichshoffen (6 août), Saint-Privat (18 août) qui entraîne le siège de Metz, Sedan (2 septembre) avec la capitulation de Napoléon III, et enfin le siège de Paris depuis le 18 septembre.
  4. La vicomtesse de Malartic fait allusion à son séjour au château de Castelnau d’Estrétefonds, à 20 km au nord de Toulouse, chez ses cousins de Cambolas En fait, encore les cousins de son mari, la famille d’Hippolyte de Cambolas. Les parents d’Hippolyte : Alexandre de Cambolas (1783-1858) et Eugénie de Vignes de Puylaroque (1794-<1854) et les grands-parents maternels d’Henri de Maurès de Malartic : Philippe de Vignes de Puylaroque (1793-1853) et Élisabeth de Cambolas (1789-1852) étaient frères et sœurs. Les Maurès de Malartic, jeunes mariés, s’y rendirent pour la réception somptueuse donnée dans le château, après le mariage d’Hippolyte de Cambolas avec Francisca de Souza de Resende, une brésilienne de haute noblesse le 15 juin 1865 à Paris (8e), donc probablement vers le 17 juin 1868, alors que la vicomtesse, jeune mariée, attendait son premier enfant, né le 24 juillet. (voir : « Les châtelains de Castelnau d’Estrétefonds au XIXe siècle », par le marquis de Cambolas, dans « Archistra » septembre 1983.)
  5. Louis de Reversat de Marsac (1837-1870), à 33ans, reçoit la vicomtesse ; son père, Victor de Marsac, est décédé au printemps, le 22 avril, à 85 ans. Sa grand-mère paternelle est Françoise de Vignes de Puylaroque (1750-1830), sœur de l’arrière-grand-père (François Régis de Vignes de Puylaroque) du mari de la vicomtesse.
  6. Félicité de Vignes de Puylaroque, fille de Philippe de Vignes, 6e marquis de Puylaroque et de Élisabeth de Cambolas — morte célibataire en 1882. Marie Antoinette Félicité Charlotte de Vignes de Puylaroque est la tante maternelle d’Henri de Maurès de Malartic, le mari de la vicomtesse. Elle résidait au château de Marsac où elle est décédée le 29 novembre 1881. Née le 6 octobre 1824, elle avait alors 46 ans.
  7. Ce mariage eut lieu le 7 octobre 1867 à Chaumont. “ aussitôt mon mariage ” pourrait laisser entendre que ce voyage s’effectuât encore à l’automne 1867 ou au printemps 1868.
  8. Francisca de Souza de Rezende, fille du marquis de Vanenca, Grand de l’Empire, épouse de Hippolyte Victor comte de Cambolas, marquis de Palarin. Voir note 1 p.5.
  9. Voir le luxe de la réception sur le site mentionné dans la note 3 de l’avant-propos.
  10. Henry de Reversat de Marsac (33 ans), comte de Marsac depuis la mort de son père Victor au printemps. De sa première femme, décédée le 2 février 1861, il eut un garçon, Léon Victor (10 ans) et de sa deuxième femme, Hélène de Saint Jean de Belleud (29 ans) : deux enfants, Eugène (4 ans) et Jeanne (2 ans).
  11. Pierre Labat, 75 ans.
  12. Marie Jean Pierre Armand de Voisins-Lavernière (1788-1878), 82 ans.
  13. Emmanuel Marie Joseph de Reversat de Marsac, né le 20.3.1842 à Marsac, juge de paix à Lavit. Marié le 26.10.1864 à Marsac avec Jeanne Marie Louise Saint-Côme. Le couple avait alors deux filles de 5 et 2 ans et attendait un troisième enfant pour décembre. Ils habitaient depuis peu le château de Poupas situé à 3 km au nord de Marsac.
  14. à Poupas, à trois kilomètres au nord de Marsac
  15. Marie Françoise Perpétue de Reversat de Marsac, née le 8 juin 1845, épousa Louis Adolphe d’Aurelle de Paladines le 6 février 1865 à Marsac. Ils n’eurent pas d’enfant.
  16. Son mari, neveu du général Louis Jean-Baptiste d’Aurelle de Paladines, était maire de Marsac. Il semble déjà souffrir d’une maladie qui l’emportera un an après, le 21 novembre 1871, à l’âge de 31 ans.
  17. 5-6 juillet 1809. Armand de Voisin avait alors 21 ans.
  18. Marie Françoise Bénédicte Sainte Croix La Croix, épouse de Reversat de Marsac, décédée le 22 février 1863 au château de Marsac, à 56 ans.
  19. Victor né le 25 septembre 1784, Eugène le 25.10.1785.
  20. Ces trois prétendants étaient déjà bien avancés en âge : l’aîné, Victor, 51 ans ; son frère, Eugène, 50 ans et leur ami, Armand de Voisin, 47 ans. Pourtant, à 28 ans, elle choisit le plus âgé qui lui survécut sept ans.
  21. Marie Françoise Bénédicte Sainte Croix La Croix, épouse de Victor de Reversat de Marsac, décéda le 22 février 1863 à Marsac.
  22. Voir notes 3 & 4 p. 7. Elle était la cadette des quatre enfants de la famille comtale de Marsac-Sainte Croix. Elle resta jusqu’à sa mort, fidèle au Jansénisme, comme dernière solitaire de Port-Royal.
  23. Née Françoise Bénédicte Sainte Croix La Croix, la mère de Louis de Marsac.
  24. Nuits-Saint-Georges où se déroula le 18 décembre 1870 la seconde Bataille de Dijon.
  25. Longeau à 12 km au sud de Langres, fut le lieu d’âpres combats entre Français et Prussiens le 16 décembre 1870.
  26. Bataille de Coulmiers (Loiret) du 9 novembre 1870.
  27. L’épisode se situe entre la bataille de Longeau (16 décembre) et quelques jours avant le 26 décembre puisque Louis de Marsac décède le 27 à 6 h du matin. Probablement autour du 22.
  28. Le 27 décembre à 6 heures du matin. Louis de Marsac avait 33 ans.
  29. Il naîtra le 15 juin à Dijon.
  30. Emmanuel Marie Joseph de Reversat de Marsac (1842-1890), Juge de paix à Lavit, demeurant au château de Poupas.
  31. L’oncle était le frère de la mère du vicomte de Malartic : Marie Raymond Louis Antoine de Vignes de Puylaroque (1828-1887), ingénieur civil, maire de Castelnau d’Estrétefonds en 1872. Il avait épousé, à 39 ans, le 18 janvier 1868 à Castelnau, Marie Alexandrine Henriette Julie Élisabeth de Cambolas (1829-1887) âgée de 38 ans.
  32. Il s’agit de leur premier enfant, Marie Eugénie Antoinette Lydie, née le 2 décembre 1869 au château, et qui n’avait alors guère plus d’un an.
  33. Rappel : 7 octobre 1867 à Chaumont.
  34. Hippolyte de Cambolas, marquis de Palarin, ayant épousé la brésilienne Francisca de Souza.
  35. L’année de ses quinze ans, il perd sa mère le 19 janvier 1887 et son père neuf mois plus tard le 10 octobre.
  36. Comme le fait remarquer, entre parenthèse, le colonel Reverdy, ce bébé dont parle la vicomtesse ne peut être que leur fille aînée. « Popo » est le sobriquet tout naturel de leur second enfant Hippolyte.
    Jean François Hippolyte Gaston, est né le 7 février 1872 au château de Castelnau-d’Estrétefonds, fils de Marie Raymond Louis Antoine de Vignes de Puylaroque (1828-1887) et de Marie Alexandrine Henriette Julie Élisabeth de Cambolas (1829-1887). Le vicomte Henri de Malartic et Hippolyte sont cousins germains avec un écart de 32 ans ! La famille du vicomte accueille en 1887, Hippolyte orphelin de quinze dans leur hôtel à Dijon. Quatre ans plus tard, il entre à Polytechnique. Diplômé de l’École Polytechnique (X 1891), il fera une belle carrière militaire : Médaille coloniale avec agrafe Madagascar (1899), Officier de l’Ordre d’Anjouan (21 avril 1902), Chevalier de l’Ordre du Dragon de l’Annam (22 février 1908), Officier de la Légion d’Honneur (4 janvier 1917), Croix de guerre 1914-1918 avec palme, Commandeur de la Légion d’Honneur (21 décembre 1926) Général de Brigade (1829). 36 ans de services dans l’Artillerie des Troupes coloniales à Madagascar, Indochine française (Vietnam) et Maroc ; 18 campagnes, 2 blessures, 1 citation.
    Il se marie avec Agathe Fanny Henriette Delpit le 30 juin 1914 à Reims et auront quatre garçons et trois filles. Décède à 65 ans, le 2 février 1938.
  37. 26 janvier 1871
  38. Marguerite ? Édith avait-elle un second prénom qui était plus communément employé ? Je ne sais. En fait, le deuxième enfant de la vicomtesse, selon son acte de naissance, se prénommait Marie Édith Jeanne et n’avait pas encore deux ans au moment de leur retour. Robert, son troisième enfant qu’elle attendait, naîtra le 15 juin 1871. Aurait-elle écrit Marie Édith dans son carnet d’une manière un peu rapide qui pouvait prêter à confusion à la lecture ? Plutôt que Marie-Édith aurait-on préféré l’appeler Marguerite qui sonne mieux ? On ne sait mais il est sûr qu’il s’agit bien d’elle. En 1891, selon le recensement, elle a 20 ans et vit seule avec ses parents au 19 rue Jeannin.