Les Classes sociales au point de vue de l’évolution zoologique/Avant-propos

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Les Classes sociales au point de vue de l’évolution zoologique
Avant-propos
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AVANT-PROPOS





C’est chose commune que faire la critique de notre société, soit au point de vue des institutions politiques soit au point de vue du système économique. On a envisagé aussi l’influence que pourrait avoir une révolution sociale sur l’évolution ultérieure de la philosophie, de l’art, des sciences. Des poètes comme William Morris, des romanciers comme Wells, des sociologues comme Bellamy et Spence[1], ont tenté l’exploration des temps futurs, en attendant — ce qui viendra — que les lois de l’histoire étant formulées tout comme celles de la chimie et de la mécanique, on puisse prédire approximativement, bien à l’avance, les grands mouvements de l’humanité, tout comme on prédit les phénomènes célestes.

Mais il est un point qu’on n’a pas, croyons-nous, étudié jusqu’ici : c’est l’influence d’une révolution vraiment sociale — c’est-à-dire profonde et non superficielle comme les révolutions politiques — sur l’évolution zoologique de l’espèce humaine.

Les sciences naturelles nous montrent, malgré la Bible, la parenté de l’homme et des autres animaux, issus d’un même arbre zoologique dont la souche a donné naissance à des branches, puis à des rameaux de plus en plus diversifiés sous l’influence du temps et des milieux.

N’est-il pas logique d’en conclure que cette loi d’évolution, vérifiée dans le passé, doit continuer à se vérifier dans l’avenir, à moins que, de nouveaux facteurs surgissant, elle ne soit retardée ou annulée par une autre loi dominante ?

Les révolutions sociales sont un de ces nouveaux facteurs. Détruisant les barrières de castes et de races, elles soufflent comme un cyclone terrible mais salutaire ; elles mêlent et refondent les individus comme des molécules chimiques au fond d’un creuset. Sans elles, les groupements humains finiraient par former non plus seulement des castes et des classes étrangères ou hostiles les unes aux autres mais de véritables espèces zoologiques aussi différentes que celles du singe et de l’ours.




  1. J. C. Spence. L’Œuvre de civilisation ou l’Angleterre au XXe siècle (trad. par Naquet et Mossé).