Les Contes drolatiques/III/Épilogue

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Les Contes drolatiquesGarnier frères (p. 613-615).



ÉPILOGUE


Ha ! folle mignonne, toy qui es enchargiée d’esgayer la maison, tu has esté, maulgré mille deffenses iteratifves, te vautrer dedans ce bourbier de mélancholie, où tu has ià pesché Berthe, et reviens, cheveulx desnouez, comme fille qui ha forcé ung party de lansquenets ! Où sont tes iolies esguilles d’or à grelots, tes fleurs filigranées en phantaisies arabesques ? où has-tu laissé ta marotte incarnadine, aornée de bobans prétieux, qui couste ung minot de perles ? Pourquoy guaster par des larmes pernicieuses tes yeulx noirs, si plaisans quand y petille le sel d’ung conte, que les papes te pardonnent tes dires à l’ombre de tes rires, sentent leur ame prinse entre l’ivoire de tes dents, ont leur cueur tiré par la fine rose que darde ta langue, et trocqueroyent leur pantophle contre ung cent des soubrires qui broyent sur tes lèvres le vermillon du bon sang ? Garse rieuse, si tu veulx demourer tousiours fresche et ieune, ne ploure iamais plus. Songe à chevaulchier les mousches sans brides, à brider avecques de belles nuées tes chimères caméléonesques, à métamorphoser les réalitez vifves en figures vestues d’iris, caparassonnées de resves cramoisis, emmanchiées d’aësles pers à yeulx de perdrix. Par le Corps et le Sang, par l’Encensoir et le Sceau, par le Livre et l’Espée, par la Guenille et l’Or, par le Son et la Couleur, si tu retournes en ce bouge d’élégies où les eunuques raccollent des laiderons pour des sultans imbéciles, ie te mauldis, ie te trentemille, ie te fais ieusner de miesvreries et d’amour, ie te…

Brouf ! La vécy à cheval sur ung rays de soleil en compaignie d’ung Dixain qui s’esclaffe en météores aëriformes. Elle se ioue dedans leurs prismes, en courant si dru, si hault, si hardy, si à contre-sens, à contre-fil, à contre-tout, que besoing est de la cognoistre de longues plumes pour suyvre sa queue de syrène aux facettes d’argent, laquelle frétille emmy les artifices de ces rires nouveaulx. Vray Dieu ! elle s’y est ruée comme ung cent d’escholiers dans une haye pleine de murons, au desbotter des vespres. Au diable le magister ! le Dixain est parachevé. Foing du travail ! à moy, compaignons !


FIN