Les Dieux antiques/Le Poséidon grec et le Neptune latin

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J. Rothschild, éditeur (p. 58-63).

Triton, fils de Poséidon.



LE POSÉIDON GREC ET LE NEPTUNE LATIN.


Poséidon. — Fils de Cronos et de Rhée, Poséidon est en conséquence frère de Zeus et de Hadès.

Quand fut tirée au sort la souveraineté des cieux, de la terre et des régions souterraines, celle de la mer échut en partage à Poséidon, qui prit un trident pour emblème de son pouvoir. Notez cependant que c’est comme ayant le contrôle des forces qui affectent les mouvements des eaux, plutôt que comme habitant lui-même les eaux, que Poséidon règne sur l’humide élément. Il y a un dieu dont la demeure réelle est la mer : Nérée (fig. 29), qui habite les profondeurs des flots, se trouvant vis-à-vis de Poséidon dans le même rapport qu’Hélios, habitant le soleil, vis-à-vis de Phoibos, seigneur de la lumière. La signification du nom de Poséidon, on ne la connaît pas d’une façon certaine. Mais les légendes offrent plus d’un Fig. 29. — Néréides, bas-relief.
trait propre à jeter quelque clarté sur cette appellation obscure. Poséidon, dans l’Iliade et dans l’Odyssée, est représenté comme égal à Zeus en dignité et inférieur à lui seulement en puissance. Il a le pouvoir de créer, car, suivant une histoire, il est l’auteur du cheval. Il s’appelle Gaiêochos, gardien de la terre, et Énésichos, qui ébranle le monde ; et en dernier lieu il dispute à Héré, Hélios et Athéné, la souveraineté de certaines cités grecques. D’où rien d’invraisemblable que ce nom ait originairement exprimé simplement l’idée de seigneurie ou de pouvoir, et ne soit pas sans quelque attache avec des mots tels que « potentat » et « despote », Héré, femme de Zeus, s’appelant aussi Potnia ou la puissante. Quelle conduite envers Zeus assigne-t-on à Poséidon ? On le représente généralement comme fidèle et soumis au souverain de l’Olympe ; mais une fois il complota (avons-nous dit plus haut), avec Héré et Pallas Athéné, la mise aux fers de Zeus, et fut déjoué par Thétis (fig. 30). Sur l’avertissement de cette dernière, Zeus plaça le Briarée aux cent bras près de son trône, pour effrayer les conspirateurs.

Les légendes de Poséidon diffèrent très-spécialement de celles de Zeus. Lui, Zeus, n’est jamais dépeint comme assujetti à la volonté d’autrui, ou forcé d’achever des Fig. 30. — Thétis, camée.
tâches serviles. Mais on fait bâtir à Poséidon, de concert avec Héraclès, les murs de Troie pour Laomédon ; tout comme Phoibos Apollo est contraint à se faire serviteur dans la maison d’Admète. La récompense promise à Poséidon en échange de ce service est le prix qui, d’ordinaire, manque à ces dieux et à ces héros de qui l’on dit, ainsi que du soleil, qu’ils se donnent du mal pour le bien de l’homme. Laomédon refusa de payer le salaire par lui offert, tout comme Achille eut à se plaindre de n’avoir de la guerre que les peines et point la récompense.

Conséquence de cette trahison : Poséidon fut du côté d’Agamemnon et de Ménélas quand ces guerriers vinrent à Troie tirer vengeance de Pâris. Rappelez-vous (je l’ai dit) à l’honneur de Poséidon qu’il créa le cheval. À Athènes, lors d’une dispute qu’il y eut entre Athéné et lui pour nommer la cité, Zeus décida qu’elle serait nommée d’après la déité qui ferait à l’humanité le plus beau don. Athéné produisit l’olivier, et Poséidon le cheval ; Fig. 31. — Poséidon avec Athéné, médaille.
Fig. 32. — Statue de Poséidon armé Trident.
et la victoire fut adjugée à Athéné, l’olive étant un signe de paix et de prospérité, et le cheval un emblème de guerre et de maux (fig. 31). Mais dans l’Iliade, Achille dit une tout autre histoire : il raconte que Poséidon créa le cheval en Thessalie, et donna les coursiers immortels Xanthos et Balios (le doré et le tacheté) à Pélée, père du héros.

Au nombre des faits qui se rattachent à ce dieu, on cite d’autres rivalités que celle qu’il eut avec Athéné : la légende est qu’il réclama la souveraineté de Corinthe contre Hélios (le soleil), de Naxos contre Dionysos, et d’Ægine contre Zeus lui-même. Trois contestations. Ce qui ressort de tels récits, le voici : originairement Poséidon fut regardé simplement comme régulateur ou roi (fig. 32), et son pouvoir, à mesure que vint le temps, se limita au contrôle de la mer.

La femme de Poséidon était Amphitrite (fig. 33), nom qui ne peut s’expliquer par aucun mot de la langue grecque ; mais dans les vieilles légendes hindoues nous trouvons une déité, Trita, qui règne sur l’air et l’eau. Ce nom Trita, que certains ont rattaché à celui d’Amphitrite, se montre encore visiblement dans Tritopator, une appellation des vents ; et dans Tritogeneia, épithète appliquée à Athéné, aussi bien que dans Triton, fils de Poséidon. Je le rencontre enfin dans les légendes d’un autre peuple que les Grecs et les Fig. 33. — Amphitrite et Poséidon, bas-relief.
Hindous : dans les vieilles histoires perses, le Trita ou Traitana de l’Inde réapparaît comme Thrætana, le tueur du serpent Zohak ; ce monstre répond au dragon Python tué par Phoibos, et à Fafnir tué par Sigurd.

Le palais de Poséidon était situé dans les eaux profondes, près d’Égée, aux rives de l’Eubée ; le dieu gardait là ses chevaux à crinières d’or, répondant aux Harits hindous ou chevaux étincelants du Soleil, qui le mènent avec des bonds puissants sur la mer. Fig. 34. — Buste de Poséidon ou Neptune.

Neptune. — Les Romains d’une époque avancée identifièrent leur Neptune avec le Poséidon grec (fig. 34) ; mais, par son caractère, le mythe latin répond plus particulièrement à Nérée. C’est le dieu qui habite sur les eaux, et son nom se rattache à un certain nombre de mots qui veulent dire se baigner ou nager.