Les Heures claires, 1896/5

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chez l’Éditeur Edm. Deman (p. 15-16).


Chaque heure, où je pense à ta bonté

Si simplement profonde,
Je me confonds en prières vers toi.

Je suis venu si tard
Vers la douceur de ton regard
Et de si loin, vers tes deux mains tendues,

Tranquillement, par à travers les étendues !
J’avais en moi tant de rouille tenace

Qui me rongeait, à dents rapaces,
La confiance ;

J’étais si lourd, j’étais si las,
J’étais si vieux de méfiance,
J’étais si lourd, j’étais si las
Du vain chemin de tous mes pas.

Je méritais si peu la merveilleuse joie
De voir tes pieds illuminer ma voie,
Que j’en reste tremblant encore et presqu’en pleurs,

Et humble, à tout jamais, en face du bonheur.