Les Médailles d’argile/La Promenade

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Les Médailles d’argileSociété du Mercure de France (p. 58).

LA PROMENADE


Je te donne cette heure ; elle est à toi. Va-t’en.
Vis-la silencieuse et vis-la solitaire,
Et, pour un jour entier, sois à toi tout entière
Sans plus t’inquiéter de l’ombre où je t’attends.

Sois libre. Mon pas lourd, hélas ! a trop souvent
Retardé ta jeunesse où tu marches légère
Dans le double sourire et la double lumière
de ce matin joyeux et de ton clair printemps.

Ce dur arbre tordu qui ressemble à ma vie
Abritera mon doute et ma mélancolie ;
C’est là que j’attendrai venir le soir, heureux

Si le vent, pitoyable à mon songe morose,
Des fleurs que tu cueillis, hélas ! loin de mes yeux,
M’apporte le parfum et te laisse la rose.