Les Médailles d’argile/Odelette 2

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Les Médailles d’argileSociété du Mercure de France (p. 186-187).
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ODELETTE


J’aurais pu dire mon Amour
Tout haut
Dans le grand jour
Ardent et chaud
Du bel été d’or roux qui l’exalte et l’enivre
Et le dresse debout avec un rire
À tout écho !

J’aurais pu dire :
Mon Amour est heureux, voyez
Son manteau de pourpre qui traîne
Jusqu’à ses pieds !
Ses mains sont pleines
De roses qu’il effeuille et qui parfument l’air ;
Le ciel est clair
Sur sa maison de marbre tiède

Et blanc et veiné comme une chair
Douce aux lèvres…

Mais non,
Je l’ai vêtu de bure et de laine ;
Son manteau traîne
Sur ses talons ;
Il passe en souriant à peine
Et quand il chante, c’est si bas
Que l’on ne se retourne pas
Pour cueillir sa chanson éclose
Dans le soir qu’elle a parfumé ;
Il n’a ni jardin, ni maison,
Et il fait semblant d’être pauvre
Pour mieux cacher qu’il est aimé.