Les Médailles d’argile/Via

La bibliothèque libre.
Les Médailles d’argileSociété du Mercure de France (p. 37).
◄  la fileuse
chrysilla  ►

VIA


Puisque la terre est noire et le fleuve d’argent
Et que la rose meurt sous les griffes du vent
Qui l’effeuille dans l’ombre où saigne, goutte à goutte
Le parfum de son âme et l’odeur de sa pourpre,
Pars. Le sel d’une larme a séché sur ta joue.
Le clair fleuve d’argent sanglote bas et noue
Des îles d’osier vert et de jaunes roseaux
En corbeilles de fleurs entre les pleurs des eaux,
Car l’onde a fui toujours et n’est pas revenue.
La rose merveilleuse et la blanche statue,
L’une s’effrite en poudre et l’autre coule en sang !
Baise la double bouche éphémère, ô Passant !
La nuit doit être longue avant l’aurore fraîche ;
Le vent amer est fait d’épines et de flèches,
Va ! mais la route est dure et le chemin est long.
La ronce griffe ; le serpent mord au talon,
Et puisqu'il faut partir, au moins, et jusqu’au jour,
Demande au souvenir et demande à l’amour,
Pour que ton pas se guide à ta main étoilée,
La lampe inépuisable et la sandale ailée.