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Les Pleurs/Ne viens pas trop tard !

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Pour les autres éditions de ce texte, voir Ne viens pas trop tard.

Les PleursMadame Goullet, libraire (p. 73-77).

NE VIENS PAS TROP TARD !

À tout ce qu’elle entend, de vous seule occupée,
De chaque bruit lointain mon oreille frappée,
Écoute, et croit souvent reconnaître vos pas ;
Je m’élance, je cours, et vous ne venez pas !

— ANDRÉ CHÉNIER. —

Combien le feu tient douce compagnie
Au prisonnier, dans les longs soirs d’hiver !

— BÉRANGER. —

XIV.

Sais-tu qu’une part de ma vie
Me manque et retourne vers toi ?
Où la tienne languit sans moi,
Dis, sais-tu qu’elle t’a suivie ?
Pour qui te voit, béni soit Dieu !
Pour qui te perd, bonheur, adieu !


Quand de ta demeure isolée
Tu franchis lentement le seuil,
De moi si ta vie est en deuil,
Crois-tu la mienne consolée ?
Pour qui te voit, béni soit Dieu !
Pour qui te perd, bonheur, adieu !

Le soir, quand ton foyer s’allume.
Dans ses ondoyantes lueurs
Vois-tu, comme à travers des pleurs,
Que mon ame ainsi se consume ?
Pour qui te voit, béni soit Dieu !
Pour qui te perd, bonheur, adieu !

Si quelque étincelle plus vive
Échappe au flambeau vacillant,
Comprends-tu l’avis consolant,
Que vers toi ce message arrive ?
Pour qui te voit, béni soit Dieu !
Pour qui te perd, bonheur, adieu !

Le voilà : c’est mon ame entière ;
Accueille-la d’un doux regard ;

Viens aussi… ne viens pas trop tard,
Rendre le jour à ma paupière.
Pour qui te voit, béni soit Dieu !
Pour qui te perd, bonheur, adieu !