Les Quarante Médaillons de l’Académie/38

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XXXVIII

M. ERNEST LEGOUVÉ

Tombe aux pieds de ce sexe à qui tu dois ta mère !


disait son père. Le fils a obéi. Il y est tombé. Il a écrit l’Histoire morale des femmes, se privant du sujet contraire, qui eût été plus gai, mais qui n’aurait pas eu le même succès… régulier. Les femmes l’ont relevé, l’ont trouvé charmant. Il a fait un Cours pour elles et sur elles, où elles sont venues s’attendrir et applaudir. Enfin, c’est leur homme


Et qui jure pour elles, quand elles ont besoin
Qu’on jure.


M. Ernest Legouvé est un abondant… trop abondant ! Il a produit des romans, Max, les Vieillards, Édith de Falsen ; des pièces de théâtre : Louise de Lignerolles, Bataille de dames, des poëmes, des traductions. On n’en finirait pas de nommer tout !


Je fais des médaillons et non des catalogues !


Toujours dévoué « au sexe auquel il doit sa mère, » toujours le serviteur passionné, mais moral de la femme isolée, autant que de la femme en masse, il fit Adrienne Lecouvreur pour mademoiselle Rachel, qui lui fit son succès. Il écrivit encore pour elle une Médée ; mais, comme mademoiselle Rachel ne la joua pas, la pièce est restée dans son néant… natif. Il écrivit aussi je ne sais quoi pour madame Ristori. M. Legouvé est un des plus brillants écrivains du Siècle, ce fier et magnifique journal ! Il y tartine sur l’Italie, qu’il compare à une femme… bien entendu ! Il s’est tourmenté beaucoup, en ces derniers temps, pour faire donner la croix d’honneur à mademoiselle Samson, — non ! — mais à M. Samson, qui n’est pas une femme cependant ! Il n’a pas encore réussi ; mais, en attendant qu’il réussisse, il le fera sûrement entrer à l’Académie, et il placera le fauteuil de M. Samson près du sien…