Les Quatre Évangiles (Crampon 1864)/Marc/11

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Traduction par Augustin Crampon.
Tolra et Haton (p. 220-223).
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saint Marc


CHAPITRE XI


ENTRÉE DE JÉSUS-CHRIST DANS JÉRUSALEM (Matth., xxi, 1 sv. ; Luc, xix, 29 sv.). — FIGUIER STÉRILE (ibid.). — VENDEURS CHASSÉS DU TEMPLE (ibid.). — PUISSANCE DE LA FOI (ibid.). — JÉSUS CONFOND LES PHARISIENS (Matth. xxi, 23 sv. ; Luc, xx, 1 sv.).


1 Lorsqu’ils approchèrent de Jérusalem et de Béthanie[1], près de la montagne des Oliviers, Jésus envoya deux de ses disciples, et leur dit : Allez au village qui est devant vous[2], et, sitôt que vous y serez entrés, vous trouverez un ânon attaché, sur lequel nul homme ne s’est encore assis : détachez-le et me l'amenez. Et si quelqu’un vous dit : Que faites-vous ? répondez : Le Seigneur en a besoin ; et aussitôt il le laissera aller[3]. Et, s’en étant allés, ils trouvèrent l’ânon dehors, devant la porte, entre deux chemins, et ils le détachèrent. Quelques-uns de ceux qui étaient là leur dirent : Que faites-vous, de détacher cet ânon ? Ils répondirent comme Jésus leur avait commandé, et ces gens les laissèrent l’emmener. Et ils conduisirent l’ànon à Jésus, et ils mirent dessus leurs manteaux, et il s’assit dessus. Un grand nombre étendaient leurs vêtements le long de la route ; d’autres coupaient des branches d’arbres et en jonchaient le chemin. Et ceux qui marchaient devant, et ceux qui suivaient, criaient : Hosanna ! Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur ! Béni soit le règne de David notre père, qui va commencer[4] ! Hosanna au plus haut des cieux ! Et il entra à Jérusalem, dans le temple ; et ayant observé toutes choses, comme déjà l’heure était avancée, il s’en alla à Béthanie avec les Douze[5].

12 Le lendemain, comme ils sortaient de Béthanie, il eut faim. Et, voyant de loin un figuier qui avait des feuilles, il s’avança pour voir s’il n’y trouverait pas quelque fruit ; mais après s’en être approché, il n’y trouva que des feuilles ; car ce n’était pas le temps des figues[6]. Et il dit au figuier : Que jamais nul ne mange plus de ton fruit[7] ! Ce que ses disciples entendirent.

15 Ils vinrent ensuite à Jérusalem. Et, étant entré dans le temple, il commença à chasser ceux qui vendaient et achetaient dans le temple, et il renversa les tables des banquiers, et les sièges de ceux qui vendaient des colombes, et il ne souffrait pas que personne transportât aucun objet par le temple. Et il les enseignait, disant : N’est-il pas écrit : « Ma maison sera appelée une maison de prière pour les nations[8] ? » Mais vous, vous en avez fait une caverne de voleurs. Ce qu’ayant entendu[9], les Princes des prêtres et les Scribes cherchaient comment ils le feraient périr ; car ils le craignaient, parce que tout le peuple admirait sa doctrine. Le soir étant venu, il sortit de la ville[10].

20 Le lendemain matin, en passant[11], ils virent le figuier desséché jusqu’à la racine. Et Pierre, se ressouvenant, lui dit : Maître, voilà que le figuier que vous avez maudit a séché. Jésus leur répondit : Ayez 23. foi en Dieu. En vérité, je vous le dis, quiconque dira à cette montagne : Lève-toi, et te jette dans la mer, et n’hésitera point dans son cœur, mais croira que tout ce qu’il aura dit doit se faire, cela lui sera fait. C’est pourquoi, je vous le dis, tout ce que vous demanderez dans la prière, croyez que vous l’obtiendrez, et il vous sera accordé. Et lorsque vous serez debout pour prier[12], si vous avez quelque chose contre quelqu’un, remettez-le lui, afin que votre Père qui est dans les cieux vous remette aussi vos péchés. Que si vous ne remettez point aux autres, votre Père qui est dans les cieux ne vous remettra pas non plus vos péchés.

27 Ils vinrent de nouveau à Jérusalem. Et comme il marchait dans le temple, les Princes des prêtres, les Scribes et les Anciens s’approchèrent de lui, et lui dirent : Par quelle autorité faites-vous ces choses ? Qui vous a donné puissance pour les faire ? Jésus leur répondit : Je vous ferai, moi aussi, une question ; répondez-moi, et je vous dirai par quelle puissance je fais ces choses. Le baptême de Jean était-il du ciel ou des hommes ? Répondez-moi. Mais ils faisaient en eux-mêmes cette réflexion : Si nous répondons : Du ciel, il nous dira : Pourquoi donc n’y avez-vous pas cru[13] ? Si nous répondons : Des hommes, nous avons à craindre le peuple ; car tous tenaient Jean pour un véritable prophète. Ils répondirent donc à Jésus : Nous ne savons. Et moi, dit Jésus, je ne vous dirai pas non plus par quelle autorité je fais ces choses.

  1. En grec. De Jérusalem à Bethphagé, de Béthanie. Bethphagé était situé entre Jérusalem et Béthanie. — Parti de Jéricho, le 11 mars, Jésus arriva à Béthanie le 12, et fit son entrée à Jérusalem le 13, un dimanche.
  2. Bethphagé.
  3. Le Seigneur ou le Maître, c’est Jésus. On voit quelle était la vénération du peuple pour le Sauveur.
  4. Les Juifs se figuraient que Jésus, le Messie, allait restaurer la royauté israélite, et commencer un règne glorieux comme celui de David.
  5. Ne s’agirait-il pas ici d’une sorte d’inspection faite avec autorité par le Messie qui venait d’entrer en triomphe dans Jérusalem, et qui aurait, vu l’heure avancée, remis au lendemain la correction des abus ? Voy. vers. 15.
  6. Les figues, en Judée, n’ont une certaine grosseur que vers la fin d’avril, et ceci se passait le lundi 14 mars.
  7. Voy. Matth. xxi, 19, note.
  8. Isaïe, lvi, 7 ; Jérém. vii, 11.
  9. Les paroles de Notre-Seigneur étaient pour eux un reproche indirect de leur négligence à sauvegarder la sainteté du temple.
  10. Pour aller passer la nuit à Béthanie.
  11. Le lendemain, mardi, en revenant à Jérusalem. C’est à ce jour qu’il faut rapporter Matth. xxi, 20-22.
  12. Liaison : Il faut, en outre, pour être exaucé, pardonner au prochain ses offenses. « On obtient tout ce qu’on demande, dit Bossuet, si on le demande avec un cœur plein de foi en Dieu, et en paix avec les hommes. »
  13. Comp. Jean, i, 7.