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Les Travaux d’Hercule, ou la rocambole de la fouterie/Texte entier

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PRÉFACE.


Accourez à ma voix, disciples de la volupté, lubriques sectateurs de ce fils de Bacchus si connu par ses débauches, et célébré tant de fois par ce caustique Bourguignon, dont les écrits immortaliseront à jamais et leur auteur et ceux qu’il a chantés.

Venez entendre les leçons du plaisir : je professe aujourd’hui le grand art de la fouterie ; j’enseigne les moyens de se procurer des jouissances factices au défaut des naturelles ; je donne des préceptes galans sur toutes les manières d’alambiquer le plaisir par les attouchemens, les frottemens, les titillations réitérées, et en général par tous les stimulans quelconques qui ont la vertu d’exciter, de provoquer les sens et de les réveiller de l’engourdissement où les tiennent la molesse et l’inaction.

Je forme des Hercules, des hommes extraordinaires enfin, en développant dans l’être organisé les facultés viriles de l’humaine nature.

Divin Piron, et toi sublime Grécourt, que ne puis-je à mon gré me rendre comme vous maître des cœurs, en captivant les oreilles par cette harmonieuse éloquence, cette diction élégante et persuasive qui vous valut tant d’admirateurs ! Mais si je n’ai pas la gloire de vous égaler, du moins aurai-je celle de marcher sur vos traces. Je vous suivrai dans la carrière immense que vous avez parcourue avec une célérité incroyable ; et si je viens à broncher dans une course aussi périlleuse, je n’en aurai pas moins le mérite de l’avoir entreprise.

La gloire d’une chûte aussi célèbre ne peut qu’ajouter à la réputation, et il n’est pas moins beau de succomber en voulant s’élever à une hauteur démesurée, que de planer dans une sphère étroite et limitée.

Il est beau qu’un mortel jusqu’au ciel s’élève ; il est même beau d’en tomber. (Opéra de Phaéton.)

Sexe charmant formé pour le plaisir, venez aussi profiter des leçons de la nouvelle doctrine que j’enseigne ; soyez les dignes appuis de mon école naissante ; soutenez-en l’édifice encore mal assuré, et aidez-moi à former un établissement dont les dieux mêmes puissent être jaloux.

L’homme, malgré les détracteurs du systême épicurien, fut créé pour les jouissances charnelles de la matière ; c’est dans le sein même de la concupiscence qu’il savoure à loisir les délices de la lubricité, et qu’il alimente, pour ainsi dire, les facultés grossières de son individu.

Tous les plaisirs qui n’émanent point des sens, ne sont que des jouissances imparfaites, inventées par l’impuissance pour tenir lieu de dédommagement aux jouissances réelles qu’on ne peut goûter que par intervalles.

C’est donc dans le rapprochement des deux sexes, dans la jonction étroite des parties de la matière, que consiste ce plaisir intact, cette jouissance inexprimable que l’on ne savoure bien qu’à proportion de la violence des tempéramens et de la conformité de chaleur dans les parties qui servent à la génération. C’est à l’instant où les ames paroissent se confondre par le rapprochement des corps, à l’instant même marqué pour l’entière explosion du chyle prolifique, que l’on ressent dans toutes les parties de la machine, cette commotion électrique de la jouissance qui se communique subitement par les fibres, et semble alors les rapprocher vers un centre commun de délices. C’est par la translation de la liqueur séminale dans le réceptacle de la matrice, par le mêlange des liqueurs hétérogènes, par la transmigration individuelle des parties intégrantes de la matière, que s’opère cette jouissance divine dont le créateur a rendu nos organes susceptibles.

Les petits-maîtres, ces pygmées en galanteries, et toutes ces femmes qui affectent la délicatesse du genre nerveux, vont sans doute se récrier sur des obligations pénibles ; j’avois prévu d’avance leurs objections ; et, pour toute réponse, je me contenterai de leur exposer que les plaisirs que je vais décrire ne sont pas faits pour eux ; qu’il faut, pour les goûter, une constitution mâle et vigoureuse ; que ce n’est point à des débiles et efféminés que j’offre mes opuscules en galanterie ; que c’est à des hommes sains et dispos, à des tempéramens de la bonne trempe, enfin à des hommes qui pussent remplir la tâche que le titre de mon ouvrage leur impose. Je veux moins démontrer les jouissances que l’on peut éprouver relativement à ses facultés, que celles que la nature dans toute son énergie, est susceptible de procurer à ceux chez qui elle n’est point altérée. Je veux enfin chercher le plaisir dans sa source, et non le saisir par ses ramifications.

L’auteur de la nature, en travaillant à nous faire éprouver des sensations voluptueuses, a voulu, pour la félicité de ses créatures, que le plaisir se trouvât le plus simplement possible, et qu’il ne consistât point dans ces recherches minutieuses qui prouvent plutôt l’ouvrage de l’art perfectionné que l’émanation directe de ses volontés. C’est pourquoi l’homme privé de toute instruction, qui n’a pour toute théorie que le seul instinct dont il est doué, sait, malgré son ignorance, trouver le voie du plaisir avec une femme aussi peu faite que lui aux exercices de ce genre. Tout le monde est d’accord que la nature suffit pour donner des leçons à l’être le plus insensible ; c’est un axiome si généralement reconnu, qu’il n’est pas nécessaire, pour démontrer son authenticité, de l’appuyer d’aucunes preuves.

Malgré le but que la nature s’est proposé, celui de n’en avoir qu’un, l’art, pour vaincre la monotonie inséparable attachée à cette seule manière de se reproduire, a trouvé différens moyens qui conduisent aux mêmes fins par des voies différentes ; et, bientôt rival de la nature, il a fait du plaisir un Prothée qui prend toutes les formes imaginables.

C’est à cette séduisante étude que je consacre ma plume. Puissent mes écrits plaire au beau sexe à qui je les dédie, et me valoir quelques droits à son indulgence !

Si je parois odieux à quelques personnes scrupuleuses, que me fait après tout leur estime ou leur improbation ? Je me ris de leur censure, et je dirai avec Piron :

Qu’on me méprise et me déteste,
Que m’importe ? mon vit me reste.
Je bande, je fouts, c’est assez.

Ode A Priape.



AUTRE PRÉFACE.

Et pourquoi n’écrirais-je point mes fredaines ainsi qu’un autre ? Sont-elles d’un ordre inférieur ? et n’ai-je pas donné mille preuves de vigueur et de talent dans mes exercices libertins ? Qu’en penses-tu toi, comtesse ? As-tu trouvé quelque athelète qui m’aie surpassé ? As-tu connu quelque ribaud qui portât le raffinement de la luxure aussi loin que moi ? J’ai foutu depuis la laveuse d’écuelles jusqu’à l’impératrice, et depuis la muzette des Champs-Elisées jusqu’à la pourpre. Oui, foutre de dieu, je veux faire l’historique de mes tours de force, dont ceux du fils Dalemene n’approchent point ; on peut couper la tête à un lézard, balayer une écurie immonde, raser un brigand désolateur, et arracher les cornes à un taureau percé de flèches, et en faire porter à vingt maris en un jour, enculer trois moines et un vieux prélat, faire un enfant à une chèvre, et dépuceler un coq d’inde, voilà des prouesses dignes de la postérité. Je veux donc les lui transmettre, et si personne ne veux les lire, personne peut aller se faire foutre ; je n’irois point lui demander pardon de l’irrégularité de mes principes, ni de grace pour celle de ma manière de peindre. Lorsqu’un livre m’ennuie, je m’en torche le trou du cul, et je dis, merde !




LES TRAVAUX
D’HERCULE.

L’ÉQUITATION.

Première manière.

Deux femmes et un homme composent ce voluptueux trio. Il faut, pour goûter le plaisir de ce grouppe charnel, que l’homme soit pourvu d’un membre d’une longueur démesurée.

Il prend une des femmes qui doit être debout, et lui passe par derrière sa verge entre les cuisses. L’autre femme présente le cul à la hauteur du mont-de-Venus de sa compagne, et notre Hercule lui passe l’instrument dans le postérieur. Il la saisit par les aines, et lui réitère les mouvemens les plus vigoureux ; sa bouche se trouve alors à la hauteur de celle de la femme qui est à califourchon sur le pivot scrutateur. Elle tourne voluptueusement la tête de son côté, et lui présente une bouche lascive dans laquelle il insinue sa langue. Il la gamahuche alors jusqu’au moment de l’éjaculation spermatique, qui, en inondant le cul de la femme courbée, vient réjaillir contre la motte de celle qui est debout.

Ce raffinement de volupté est une des situations les plus agréables. On en doit l’invention à Néron, ce déterminé roué qui avoit épuisé, sur le corps d’un nombre prodigieux de concubines, tous les moyens plus recherchés, pour se procurer des sensations délicates et nouvelles.


LES PORTEURS DE CHAISE.

Seconde manière.

Deux hommes également vigoureux et bien conformés, prennent une femme, l’un par les cuisses du côté du postérieur, en lui insinuant dans le lieu secret des plaisirs, l’instrument propagateur ; l’autre lui prend les bras, et la dulcinée élevant la tête, il lui met sa verge dans la bouche, alors la femme suspendue facilite, par un balancement cadencé et intermittent, que lui font prendre les deux hommes, l’explosion de la liqueur virile.

Cette attitude, sans avoir des inconvéniens de tant d’autres postures embarrassantes, procure, par le mouvement d’oscillation que l’on fait prendre à la femme, des titillations et des frottemens si pressans, que l’éjaculation des parties conjointes se fait avec une surabondance extraordinaire de fluide vivifiant.



LA FONTAINE DE JOUVENCE.

Troisième manière.

La femme s’assied sur un sopha, de manière à ce que sa bouche soit à la hauteur du membre de l’homme, pour qu’il puisse facilement lui mettre dans cette partie : alors il s’approche et lui insinue le docteur jusqu’à la perruque.

Dans cette position, les testicules (il faut les avoir un peu longues) doivent pendre assez bas, afin qu’elles puissent frotter légèrement la gorge de la Messaline, qui, pour hâter l’écoulement prolifique, a soin de les chatouiller d’une main, pendant que l’autre, dans laquelle elle a une verge irritative et coercitive, est occupée à flageller le grand fessier du Priape nouveau.

Cette manière est excellente pour les vieillards et les cacochymes, enfans de la débauche, par la vertu qu’elle a de ranimer les forces épuisées de tous ces êtres languissans.

Mesdames Pinotte, le Clerc, rue Tire-Boudin, Petit et le Grand, possèdent, pour les moyens factices qui ont quelqu’analogie avec cette méthode, des secrets approuvés par tous les docteurs sexagénaires de la faculté.

L’adresse des personnes nommées ci-dessus, se trouve dans la brochure intitulée : les Bordels de Paris, ouvrage nouveau.


LE TAPIS.

Quatrième manière.

Une femme se couche nonchalamment sur le dos, la bouche ouverte et les cuisses écartées. L’homme se met à genoux et l’enfile par l’endroit ordinaire. Une autre femme présente le cul à celle qui est étendue, et s’approche assez près du mâle pour qu’il puisse lui communiquer, par la bouche, des baisers lascifs, sans cependant s’éloigner trop de celle qui sert de tapis, afin qu’elle puisse à son tour gamahucher sa compagne, en lui glissant sa langue, tantôt dans sa matrice, tantôt au cul.


LA PIMONT-VIT-COUILLE.

Cinquième manière.

Deux hommes et douze femmes (le nombre n’en est pas fixé, pourvu toutefois qu’il soit pair) entremêlés, forment une chaîne de lubricité. Un des fouteurs encule une des femmes, et lui passant une de ses mains entre les cuisses, il lui branle le vagin avec l’index, pendant que la femme, à son tour, insinue dans cul de l’homme, qui est devant elle, un doigt vigoureux et mobile, et lui chatouille aussi l’anus, pendant que l’autre main est occupée à frapper sur le fessier de l’homme qui lui met son engin par derrière.

Tous les autres répètent la même attitude, et, pendant ce tems, un ménétrier joue différentes contredanses.

Les nymphes libertines battent la mesure sur le cul de leurs partenaires, et pour que le disciple d’Amphion ne soit point oisif, un enfant de chœur lui branle le vit avec une boëte à colle-à-fanne, ce qui forme, par le mouvement qui se communique à tous les convives, la danse de caractère la plus variée.

Cette invention, quoique d’une provinciale, joint au mérite de faire éprouver des sensations d’un nouveau genre, celui d’une originalité sans exemple. Je doute fort, malgré la prévention de nos parisiennes actives et éligibles, qu’il existe dans le répertoire de leurs galans forfaits, une posture qui puisse être mise en parallèle, avec celle de la Pimont-vit-couilles.

Il faut rendre justice à qui l’a méritée.


LES DEUX BOUTS.

Sixième manière.

Deux femmes se couchent sur le dos, à un pied de distance l’une de l’autre. L’homme s’agenouille entr’elles, et prend un téton de chaque main. Une autre femme se couche sous lui, la bouche placée perpendiculairement vis-à-vis l’orifice du fondement, et la langue dans le trou du cul. L’homme à son tour s’incline modestement jusqu’à la motte de la femme qui est sous lui, et lui rend le réciproque.

Pendant cette opération, les femmes secondaires qui sont à ses côtés, ont un doigt ou dans le vagin, et se branlent nonchalemment en frappant avec la main, qui n’est point encore occupée, les fesses du lubrique cavalier.

C’est ce que l’on appelle les deux bouts, ou la sensation des langues : positions bonnes à pratiquer avec l’homme qui n’a pas la dissenterie ou les hémorrhoïdes ; et la femme qui n’a pas ses écoulemens périodiques.

Apollon se servoit toujours de cette méthode, quand il alloit visiter les grâces.


RECUEIL AMUSANT

DE CONTES LIBRES.

Un homme d’une humeur gaillarde
Appella quelqu’un maquereau ;
Qui lui répliqua bien et beau ;
Que ton épouse est babillarde.



Un officier amoureux d’une belle,
Voyant son général qui la suivoit par-tout.
Lui dit : madame, ce général me fout.
Il me fout aussi, lui dit-elle.



Sept fois par jour au moins, le juste pêche,
Disoit en chaire un fils de Loyola.
Sept fois ! reprit une vieille pimbêche,
Est-il encore bien de ces justes là ?



Un vieux barbon voyoit maigrir sa femme,
Le médecin fut mandé promptement.
Vous êtes grosse : et de combien, madame ?
Hélas ! monsieur, d’une fois seulement,



Un gros gaillard, dit à sa demoiselle,
Où bien soupons, où faisons le déduit :

Celui des deux qui te plaira, dit-elle,
Mais le souper n’est pas encore cuit.



Sur un mince cristal, l’hiver conduit vos pas,
Le précipice est sous la glace,
Elle est de vos plaisirs la légère surface,
Glissés, mortels, n’appuyés pas.



Philis obstinément me… boude,
Pour lui avoir trop pris du… cu
Fouré mon doigt jusques au… coude,
Sans qu’elle s’en soit… appercu.



Qui pourroit voir l’impudique — Raucour
Baiser lascivement la bouche de… Sophie,
Seroit plus dégoûté de ce qu’on nomme amour,
Que s’il eut foutu… Rosalie.



En pleurant l’époux qu’elle perd,
Femme vous fait pitié. Quelle erreur est la vôtre,
Tel est un bâton de bois verd,
Qui brûle par un bout quand il pleure par l’autre.



De Pézénas un citoyen fidèle,
Disoit avoir, à jeune jouvencelle,
En une nuit donné dix fois l’assaut.
Alix l’oyoit : mon bon ange ! dit-elle,
Je voudrois bien avoir ce qu’il s’en faut.


Un peintre un jour s’accusoit à confesse,
Et sur son art rouloit l’entretien.
Quoi, vous peignez, disoit l’homme de bien,
D’après le nud ? bras, tétons, cuisse, fesse,
Le tout à choix : il n’est nul, même un saint,
Dont en ce cas, la chair ne fut rebelle.
J’ai, dit le peintre, un remède certain,
Je baise avant quatre fois mon modèle.



Deux jeunes gens, en amour gens d’élite,
Gageoient un jour à qui mieux le feroit ;
L’un le fit onze, et tout bas murmuroit ;
Mais l’autre en fit quatorze tout de suite,
Et dans l’instant se saisit de l’enjeu.
Le malheureux à certaine donzelle
Conta le cas : sainte vierge, dit-elle,
Est-il permis de perdre à si beau jeu.



Un moine ayant, (c’étoit un sous-prieur)
D’une nonain vérifié le sexe ;
Las d’encenser le temple antérieur,
Voulut aussi visiter son annèxe.
O vanité ! dit la none perplèxe,
Qu’en son état l’homme se connoit mal !
Que vers le bien sa route est circonflèxe,
Un sous-prieur ! trancher du cardinal.


Frère Frapart, hermite plein de suc,
Trouvant au lit une dame discrète,
Lui fit tourner l’anagrame de luc,
Et de droit fil, s’ouvrit la voie étroite.
Que faites-vous, s’écria la levrette ?
Ce n’est pas là, c’est plus bas vous dit-on :
Laissez, laissez, dit l’humble anachorette,
Ceci pour moi n’est encor que trop bon.



Un maître carme exploitant sœur Alix,
Avoit déjà défilé jusqu’à six :
Ah ! C’est assez : finissons, lui dit-elle,
On sonne au chœur, et l’office m’appelle.
Eh quoi, si vîte ! encor un pauvre avé,
Rien plus, ma sœur, et puis je me retire.
Qu’un avé soit : voyons, je vais le dire,
Ça faites donc : j’y joindrai le salvé.



La mariée, au saut du lit, jasoit
Sur l’instrument de la paix du ménage.
Et discourant du marié, disoit :
De son engin, neuf pouces sont l’aunage ;
Neuf tout en gros ! quelle honte à son âge,
Car entre nous, il a vingt ans et plus,
Et notre ânon, qui n’a pas davantage
Que dix huit mois, porte un grand tiers de plus.


Masqué du froc d’un enfant d’Elisée,
Damon pressoit sœur Alix, et d’abord
Par cet habit, la belle humanisée,
Avec Damon fut aisément d’accord.
Lui, pour l’honneur du froc fit maint efforts ;
Mais six exploits mirent bas le gendarme.
Quoi ! dit Alix, cet homme-ci s’endort,
Après six coups ! ah chien ! tu n’es pas carme.



Du jeu d’amour, un aimable tendron,
Sous un cagot, faisoit l’apprentissage.
Aisé n’étoit, j’en tais la raison,
De moissonner son tendre pucelage.
De crier donc, la belle faisoit rage,
Et ne prenoit nul plaisir à ce jeu.
Souffrez, souffrez, lui dit cet homme sage ;
Souffrez cela, pour l’amour du bon dieu.



Le fait, le droit, qui sur le formulaire,
Depuis long tems partagent les esprits ;
Faisoient grand bruit, et l’on traitoit l’affaire
Avec chaleur ; lorsque l’on fut surpris
De voir Ninon, terminer la querelle,
Et sur le champ trouver ce tour adroit.
Tant qu’il est droit, il n’est pas fait, dit-elle,
Quand il est fait, il cesse d’être droit.


Un cavalier, s’accusoit à confesse,
D’avoir, pendant toute une nuit,
Partagé le lit de l’hôtesse,
Où son bidet l’avoit conduit.
Combien fîtes-vous cette affaire,
Mon enfant, car il faut les compter :
Combien de fois ? oh ! oh ! mon père,
Je ne suis pas ici pour me vanter.



Un muscadin étoit fort amoureux,
Depuis six mois, de la jeune Angélique ;
Il étoit riche, et l’on souffroit ses vœux :
Mais à la fin, il faut bien qu’on s’explique.
Vint un beau jour, que le père lui dit :
Beaucoup d’honneur vous faites à ma fille,
Mais sur quel pied, demande la famille,
La voyez-vous ? moi ! sur le pied du lit.



Une novice accusoit son curé
A son prélat, d’avoir cueilli la rose ;
Avez-vous là, lui dit l’homme sacré,
Quelque témoin qui contre lui dépose ?
Ah ! monsieur, la cellule étoit close,
Et ne voulus crier, tant j’avois peur
De réveiller l’abbesse, qui repose
Toutes les nuits avec père Prieur.


Absens ont tort. Chez une toulousaine,
Verdac, long-tems fut domicilié ;
Verdac, partit seulement pour quinzaine.
Un autre vient, Verdac est oublié.
Verdac revient, ah perfide ! infidèle !
Traiter ainsi l’amant le plus constant.
Mon bon ami, gronde vîte, dit-elle,
Car entre nous, l’autre est là, qui m’attend.



Un fat vouloit qu’un peintre en faisant son portrait,
Copiat saint Jean, trait pour trait ;
Quoique lui-même il fut un très-laid personnage,
Mais à peine fût-il au milieu de l’ouvrage,
Que le peintre rempli d’un trop juste courroux,
Lui dit : monsieur, je ne puis passer outre,
Car de penser à faire un saint de vous,
C’est de saint Jean vouloir faire un jean-foutre.



Qui fait l’enfant, dans l’amoureux combat ?
Disoit Agnès, à sa dame prudente,
Est-ce celui qui sous l’autre s’ébat ?
Où bien l’agent qui dessus instrumente.
La dame, alors lui dit : pauvre innocente !
L’enfant se fait par ceux qui sont dessous.
Dieu soit béni ! repliqua sa servante,
J’en ai fait un à monsieur votre époux.


Un cordelier, prêchoit sur l’adultère,
Et s’échauffoit ; le moine en son harnois,
A démontrer par maint bon commentaire,
Que ce péché, blesse toutes les loix.
Oui, mes enfans, dit-il, haussant la tête,
J’aimerois mieux pour le bien de mon ame,
Avoir affaire à dix filles par mois,
Que de baiser en dix ans une femme.



Quoi ! faire cas, d’un plaisir qui ne dure,
Ah ! renoncez à celui de nature,
Disoit un jour, un dévot très-outré.
Le drôle auquel fut ainsi remontré,
Lui répliqua : vous savez mal conclure ;
Bon, pour celui qui pourroit se lasser,
Et s’étonneroit d’une seule aventure ;
Mais mon plaisir est de recommencer.



Un florentin voulant, d’après nature,
Peindre à plaisir, un saint Sébastien ;
Prit un blondin de gentille figure ;
Le mit tout nud, et le lia très-bien :
Mais ce faisant, un feu vénérien,
Saisit le peintre, il pousse, il se fait brêche,
Le saint cria : chut ! dit l’italien,
Ce n’est encor que la première flèche.


En rendez-vous, avec donzelle vive,
Pour consommer une affaire de cœur,
Paul excitoit sa nature tardive.
Lise, aussitôt, l’accuse de froideur ;
Mais lui, faignant un excès de roideur,
Pour gagner tems, mettoit de la salive,
Ce que voyant, la fillette naïve,
Lui dit : tu nous fais à tous deux trop d’honneur.



Un verd galand, se confessoit naguères,
D’avoir réduit maintes filles aux abois.
Et des garçons, dit le moine ? ah ! mon père !
Je ne suis homme à semblables exploits.
Tant mieux, mon fils ! poursuis si tu m’en crois,
Dit le pater, je t’en loue et pour cause.
Si ce malheur t’arrivoit une fois,
Tu ne voudrois jamais faire autre chose.



Au sexe encor, chère est la bien séance,
Jusqu’aux filles de cabaret,
Aucune ne se rend sans quelque résistance.
Un voyageur beau, jeune, adroit,
En suit une au grenier et veut lui faire fête.
Crois-tu de mon honneur que je prenne peu de soin ;
Lui dit-elle, en prenant un gros bouchon de foin,
Avance, avec ceci, je te casse la tête.


Du bon Guillot, le vit se roidissoit,
Et le poignoit si fort concupiscence,
Que dans un coin se manuélisoit.
Une femme curieuse s’avance,
Voyant jaillir le sperme délicieux,
Ah, quel malheur ! lui dit la bonne dame,
Un peu plutôt j’eusse empêché qu’aux cieux
N’eussiez, impie, escamoté cette ame.



Un cordelier faisoit l’œuvre de chair,
Et s’ébatoit en festoyant sa mie.
Son compagnon lui dit : frère très-cher,
Pourtant faut-il aller chanter complie.
Lors, le frater dit : parbleu je m’oublie ;
Sus, haut le cul, dépêchons-nous Gogo,
Je reviendrai si dieu me prête vie,
Dès que j’aurai chanté tantum ergo.



Avec scandale un peintre en son taudis,
Entretenoit gentille chérubine.
Vous, pour le sûr et votre concubine,
Dit frère Luc, de dieu serez maudits.
Epousez-vous : les anges ébaubis,
Fête en feront sur le céleste ceintre,
Epousons donc, puisqu’il faut, dit le peintre,
Etre cocu, pour gagner paradis.


Un révérend, à face guillerette,
Oyoit le cas d’un jeune débauché,
Qui s’accusa que gentille fillette,
Avoit la nuit entre ces bras couché :
Combien de fois c’est commis le péché ?
Trois fois sans plus, répond le camarade,
Comment trois fois ? dit le père fâché,
En une nuit ? vous étiez donc malade.



Cagliostro, grand charlatan,
Au prince enseignoit la magie ;
Ils n’étoient qu’eux deux seulement
Pour un tour de sorcellerie.
Les voilà trois. — Qui l’eut dit ?
De surprise ôtant sa calotte,
Le bon cardinal vit la Motte,
Et la Motte le vit.



Au jeu d’amour, une gente donzelle,
Voulut induire un cavalier romain.
L’ultramontain à son culte fidelle,
Le refusoit, et même avec dédain :
Quand pour lui plaire elle tourna soudain,
Ce qu’à Jupiter, Ganimede réserve.
Mais dans son goût, malgré l’offre affermi,
Me fourrer là, dit-il, dieu m’en préserve !
Je logerois trop près de l’ennemi.


Il étoit une fois un jeune prince grec,
Un ange pour l’esprit, pour la figure un singe ;
Il aimoit une belle, et la belle tout sec,
Lui refusoit de voir le dessous de son linge.
Le prince désolé se jette en bas d’un pont ;
Il y trouve une fée assise dessous l’arche,
Qui lui dit, en riant sur la rivière : marche,
Il en est au bordel qui te consoleront.



Au lit de mort, une vieille à confesse,
Qui cinquante ans sous l’homme travailla,
Au confesseur exigeroit sans cesse
Les doux plaisirs dont amour la combla.
Finissons, ne parlez plus de cela,
Songez à dieu : je le voudrois, dit-elle,
Mais j’ai toujours un bougre de vit là,
Même en mourant, qui me fout la cervelle.



Un jour, à certaine commère,
Alix, en montrant sa maison,
Disoit : vous le voyez, ma chère ;
Tout seroit de bonne façon,
Sans l’escalier, que le maçon
A fait trop roide, dont j’enrage.
N’êtes-vous pas de mon avis ?
Oui, dit l’autre : et c’est grand dommage
Que ce maçon n’ait fait les vits.


Pour la première fois la jeune Agnès aimoit.
Elle veut régaler Damis de son portrait ;
Elle grimpe au grenier d’un successeur d’Apelle
Qui, la trouvant si belle,
Croit, dans nos atteliers, voir le séjour des dieux,
Son ame tout entier a passé dans ses yeux ;
Il admire, il s’écrie ! ah la peste !
Qu’on va faire de vous un portrait séduisant :
Mais plaignez-moi, je peins l’histoire seulement ;
Ah, mon dieu ! dit Agnès, qui me peindra le reste.



Par un beau jour, d’une fête de vierge,
Blaise courut desservir sa Manon,
Accoutumée à recevoir son cierge,
A telle offrande nul ne répond, non.
Ce jour là plus ardant à l’ouvrage,
Le gars sautoit, tortilloit, faisoit rage,
Tant que la belle eut l’appréhension
D’oubli fatal, et dit au fort de l’aise
En roulant l’œil : prends bien garde, ami Blaise ;
Car aujourd’hui c’est la Conception.



Au rendez-vous, dès le matin donné,
Vint une belle, ivre du vin nocturne,
Dont le galant se trouvant étonné,
A la lancer point ne fut taciturne,

Morbleu ! dit-il, haussé sur son cothurne,
Ce n’est aimer que s’ennivrer ainsi…
Le trait est noir. Oh ! oh ! nous y voici,
Reprit la dame, et par le grand saint Jacques,
Vous semble-t-il, que nous sommes ici,
Venus tous deux, pour y faire nos pâques.



Rendez, disoit à la jeune Glicère,
Un de nos premiers sénateurs,
Les cent louis que mon neveu Valère
Vous a donné pour prix de vos faveurs :
Obéissez, ou craignez ma colère ;
Vous vous compromettez, monsieur le président,
Outre que Valère est fort riche,
Au théâtre forain où me vit cet amant,
Il a dû lire sur l’affiche,
Quand la toile est levée, on ne rend point l’argent.



Un cordelier, des plus officieux,
Sur ses genoux, branloit certaine abbesse,
Dont tôt après, le bon religieux,
En pamoison fit tomber la prêtresse.
En profitant du moment de foiblesse,
Il lui glissa son fringuant aiguillon ;
Tirez ceci, par saint Hilarion !
Dit la femelle, à quoi le bon apôtre

Lui répartit : pas tant d’émotion,
Prenez toujours, ce doigt-ci vaut bien l’autre.



Jeanneton, en la nuit première,
Son mari dessus elle étant,
Remuoit des mieux le derrière,
Et puis disoit en s’ébattant :
Mon doux ami que j’aime tant,
Fais-je pas bien de cette sorte ?
Le mari lors qui se transporte,
Lui répond : de courroux épris,
Oui ; mais que le grand diable emporte
Ceux qui vous en ont tant appris.



Vous répondrez, ô ! corrupteurs de filles,
Disoit en chair un docteur véhément.
Vous répondrez de toutes peccadilles,
Qu’elles feront avant le sacrement.
Punis serez au jour du jugement,
D’avoir au mal, femelle façonnée.
La jeune Alix, qu’un amant peu constant,
Depuis huit jours, avoit abandonnée,
S’écrie, bon ! j’en ferai tant et tant,
Que du fripon l’ame sera damnée.



Un vieux paillard, avoit un valet ingénu,
Qui, le matin lui passant sa chemise,

En présente une par méprise,
Qui ne lui couvroit pas le cu.
Mais André, voit donc ta bêtise,
Dit-il, ce linge appartient à mon fils ;
Avec le mien sans cesse tu le brouilles.
Mon vit, n’est pas couvert, vois. André répond :
Je vous jure, monsieur, qu’on ne voit pas le vit,
Mais d’un bon demi pied on voit passer les couilles.



Sur les genoux de son aimable femme,
Un menuisier mangeoit sa soupe un jour ;
Un sien ami l’apperçoit et l’en blâme.
Eh qui pourroit s’attendre à pareil tour.
Comment, chez toi, point de table, compère,
Un menuisier ? pourquoi donc t’étonner,
Dit l’artisan, voici tout le mystère :
Dès que j’ai fini de dîner,
Je n’ai plus que la nappe à lever,
Et je fous la table par terre.



Dandin, allant faire un voyage,
Laissa son épouse à Paris ;
Elle, usant des droits du veuvage,
Pour un, retrouva dix maris.
A son retour en homme sage,
Dandin, loin de faire tapage,

Comme tant d’époux convaincus
Par leur faute de cocuage,
Dit : l’exploitant d’un grand courage,
Ah ! que je fais-là de cocus !



Par un matin, d’une jeune dévotte,
Frère Richard, le petit cas oyoit,
Et par un trou, promenoit sous sa cotte
Sa douce main, dont il la chatouilloit ;
De quoi la niaise, en larmes, lui disoit :
Priez pour moi, mon père, je suis morte,
Le diable m’entre au corps par cette porte
Que vous savez : gardez de résister,
Dit le frater, il faudra bien qu’il sorte,
Quand dans tel lieu sera las d’habiter.



Brûlé du feu de la concupiscence,
Frère Thibaud, vint trouver son gardien,
Jeûnez, mon fils, lui dit sa révérence ;
Thibaud jeûna, le jeûne n’y fit rien.
Lors de rechef Thibaud se plaint : eh bien ?
Joignez au jeûne et discipline et haire,
Dit le vieillard : mais las, le pauvre hère
Sentit sa chair encor plus regimber.
Vertu du froc ! succombez-y donc frère,
Tant que d’un an, n’y puissiez retomber.


Colin, pressé d’humeur folâtre,
Caressoit à son aise, un jour,
Les jambes, plus blanches qu’albâtre,
De Lise, objet de son amour.
Tantôt il s’adresse à la gauche,
Tantôt la droite le débauche ;
Je ne sais plus, dit-il, laquelle regarder,
Une égale beauté fait un combat entr’elles.
Ah ! dit Lise, ami, sans plus tarder,
Mettez-vous entre deux pour finir les querelles.



Un capucin, malade de luxure,
Montroit son cas, de virus infecté.
Et pour cacher du mal la source impure,
La rejettoit sur son austérité :
Ah ! disoit-il, au suppôt de saint Côme,
Voyez un peu, madame André, voyez comme
Elle me l’a tout du long écorché :
Qui ? cette robe, oui-dà, frère miché ;
Oh ! votre robe est donc, sur ma parole,
Une putain : et gare la vérole.



Un couple amoureux s’exerçoit
Au jeu d’amour, dans un bosquet,
Croyant n’avoir que les driades,
Pour témoins de ses accolades :

Au plus fort du trémoussement,
Quelqu’un paroît. Ah ! dit l’agent !
Fuyons : nenni, répond la belle,
Vas ton train : mais on nous verra :
Eh ! qu’importe, répliqua-t-elle,
Je ne connois point ces gens là.



Un compagnon, que les turcs avoient pris,
A son retour, merveille racontoit :
En récitant, comme il fut surpris ;
Et ses tourmens à deux dames contoit ;
Celle des deux qui plus s’attendrissoit,
Lui demanda : que font les turcs aux femmes ?
Hélas ! dit-il, ces malheureux infâmes,
Leur font cela, tant qu’il les font mourir.
Ah ! plût à dieu dit l’une de ces dames,
Que pour la foi, je puisse ainsi souffrir.



Un jour, auprès d’un aveugle en prière,
Au coin d’un bois, Jean, du matin pressé,
Mit bas Alix, gentille chambrière,
Et l’exploitoit sur le bord d’un fossé.
L’aveugle écoute, et d’un ton plus baissé,
Va, marmottant l’avé de Notre-Dame.
Ah ! je me meurs, dit Alix, qui se pâme,
Et moi, dit Jean, me voilà trépassé.

Les pauvres gens ! dieu veuille avoir leur ame,
Répond l’aveugle, et les mettre in pace.



En plein chapitre, un moine à son retour,
Rendoit compte des frais de son voyage,
Tant pour le coche, tant pour le séjour,
Tant pour le vin, et tant pour autre usage ;
Puis, quand ce vint, aux frais du cultage,
Le papelard mit cent livres tournois.
Lors le prieur lui dit : père François ?
C’est trop payé : trop payé, dit le drôle,
Je l’ai tant fait, morbleu ! que chaque fois,
Ne coûte pas au couvent une obole.



A deux genoux, une gente pucelle,
Se confessoit auprès d’un cordelier,
Et lui montroit par dessous sa dentelle,
L’échantillon d’un téton régulier :
Lors de la chair, le démon familier,
Se fit sentir : sur quoi, l’homme d’église,
Lui mit en main, son joyeux aiguillon.
Oh ! qu’est-ce ceci ? dit la fille surprise !
Prenez, prenez, reprit le pénaillon,
C’est le cordon de saint François d’Assise.


Certains hussards, usant du droit de guerre,
Chez un meunier, entrèrent sans pitié.
Puis à ses yeux, levant leur cimeterre,
Bien enfiloient sa dolente moitié.
La ménagère, en signe d’amitié,
Du croupion remuoit la charnière :
Mais le mari lui dit : ah ! boucannière !
Je suis cocu, tu prens plaisir au cas.
Mon bon ami, repartit la meunière ;
C’est pour sortir plus vîte d’embarras.



Un cavalier, de Landau, revenant,
Et sans le soin, chopinoit chez un carme ;
En chopinant, vit sur son bras charnu,
Toile de lin, dont la beauté le charme :
Par la morbleu ! s’écria le gendarme,
Nul tisserand, ne sçût, avec tel art,
Filer chemise : ami, dit le frapart,
Troussant sa robe, il n’est que d’être habile ;
Vois-tu bien , messire Jean Choüart,
C’est la quenouille avec quoi je file.



Un villageois, menoit sur son grison,
Dame Babet, bourgeoise, jeune et drue.
Où mènes-tu cette dame ? répond,
Dit un sergent, qui menoit en recrue :

Messieurs, dit-il, à la troupe bourrue,
Elle est ma femme : on va le voir. Eh bien !
Puisqu’ainsi va, fais-lui donc un chrétien.
Bastien, mon fils, dit la dame Babiche,
Ne mets qu’auprès : pas si sot, dit Bastien,
Ils me tueront, ventre-bleu, si je triche.



Maître Martin, ayant chez soi,
La fine fleur de haute pruderie ;
Venez, dit-il, mesdames, suivez-moi,
Voyez donner l’avoine, je vous prie,
A mes mulets : On va dans l’écurie.
Et qui voit-on ? vingt gaillards arborant,
De priapus l’étendard conquérant.
Ma chère, dit l’une des héroïnes,
A sa compagne attentive au plus grand,
Allons nous-en, car on nous fait des mines.



Une nonain, par un moine requise,
Du jeu d’amour, lui dit : père Cordon,
Je voudrois bien d’abord, peur de surprise,
Par la chatière aulner votre bourdon.
Venez ce soir, pendant notre oraison :
L’autre n’étant sûr de son allumelle,
Le soir venu, fait à la jouvencelle,
Au lieu de lui tâter son compagnon ;

Nenni, nenni, je le connois, dit-elle,
C’est sur mon dieu, celui de frère Ognon.



Après leur mort, où vont les pucelages ?
En paradis. — Ils tenteroient les saints.
Descendent-ils sur les sombres rivages ?
Si bon morceau n’est pour esprit malins.
En purgatoire ? ils l’ont fait dès ce monde.
Dessous les mers ? ils dessècheroient l’onde.
Où vont-ils donc ? limbes sont leur séjour,
Des innocens ces lieux sont la patrie :
Quand pucelage abandonne le jour,
A peine il sait ce que c’est que la vie.



Lise, pour porter un poulet,
Appelle en hâte son valet,
Quand demi nud, vint à sa porte,
Jean, qui montre tout ce qu’il porte.
Ça, dit-il, que me voulez-vous ?
Soudain, faignant d’être en courroux,
Fuis d’ici, coquin, répond-elle,
J’aurois trop peur de ton caquet :
Tu n’es pas messager fidel,
Puisque tu montres ton paquet.


Bélise, prête à faire un long voyage,
Où je devois accompagner ses pas,
Me dit : ami, faisons un bon repas,
Mangeons un succulent potage ;

Quelques bonnes perdrix : pour moi lorsque je sors,

Et que pour quelque tems je demeure dehors,
J’aime un morceau qui tient long-tems au ventre.
Prenez du foutre, dis-je alors,
Il tient neuf mois dans le corps,
Encor sort-il plus gros qu’il n’entre.



A deux heures de relevée,
Après bonne digestion,
Mère Anne, veut donner au père Hilarion,
Certaine manière élevée ;

Mais voyant que ses yeux, ses discours et ses mains,

Ne faisoient que des efforts vains ;
La voilà qui jure et qui gronde ;
Je n’ai plus de ressource en ton piteux état,
Que d’entonner, d’icelle, un grand magnificat,
Car il fait lever tout le monde.


Un bègue, vouloit d’une dame,
Les bannes graces acquérir,
Et lui procurer l’ardente flamme,
Dont l’amour le faisoit mourir.
Etant au bout de sa harangue,
Ne pouvant plus mouvoir sa langue,
Il eut recours à son outil :
Puis le montrant et des yeux et du geste,
Madame, excusez moi, dit-il,
Le porteur vous dira le reste.



Le grand Colin, conduisit une nuit,
Devers sa chambre une garce dodue.
Quand tout-à-coup, son père oyant du bruit,
Accourt : Colin se sauve dans la rue.
Donc le barbon sur le tendron se rue
Tant, qu’il en prend plus que sa bonne part.
Le lendemain le suranné paillard
Tança son fils, et lui fit laide chère :
Le train, dit-il, que tu mènes, pendard,
Fera bientôt mourir ton pauvre père.



Une fille, accorte et bien apprise,
En pleine rue, un jour se laissa choir.

Grand vent souffloit, dont sa blanche chemise,
De voltiger, fit fort bien son devoir,
Tant que, chacun, sans lunette put voir,
A découvert sa gentille chapelle.
Lors, un dévot pour cacher à la belle,
Ce que savez, mit son chapeau dessus :
Chapeau à moi ! tirez, tirez, dit-elle,
C’est bien assez d’une main tout au plus.



Auprès d’un vieil époux, au lever de l’aurore,
La jeune Iris, apperçut un moineau.
Caresser sa moitié sur le bord d’un ruisseau,
Et pour recommencer encore,
Voler au sommet d’un berceau.
Pour voir le tendre amour de ce couple fidèle,
Iris, en soupirant, éveille son époux :
Mais au lieu d’écouter les desirs de la belle,
Laissez-là, vos moineaux, lui dit-il, en courroux,
Aimerez-vous toujours la bagatelle.



LES CAPRICES DE M. Y…
OU LE TAPE-TAPE.

Septième manière.

Deux hommes et deux femmes s’unissent par la manière accoutumée. Les hommes se mettent dos à dos ; alors ils se courbent en même-tems, avec assez de promptitude, pour que les culs puissent se toucher fortement, et produire par la réaction, un frappement très-distinct. Les femmes suivent l’impulsion que l’homme leur donne par l’inclination du corps, et se relèvent avec lui.

Cette manière demande, de la part des femmes, une grande élasticité dans les reins, et beaucoup de nerfs et d’agilité dans celle des hommes.

Le lubrique M. Y… paroît avoir quelques prédilections pour cette méthode, dont il est l’inventeur.



LA NOUVELLE ÉBAUCHÉE.

Huitième manière.

Le fouteur se couche de toute sa longueur sur le dos ; deux femmes se placent de la même façon à ses côtés ; il les branle avec le doigt du milieu de chaque main. Une femme est couchée sur ses cuisses, de sorte qu’avec sa bouche, elle lui suce le vit, pendant qu’elle a un doigt au cul, et l’autre dans la matrice.

Cette manière de foutre est de l’invention d’un quinze-vingt, assisté d’un borgne.


LA PRÉCAUTION NON-INUTILE.

Neuvième manière.

Lorsque, comme cela arrive souvent, vous avez affaire à une déité qui a quelque maladie anti-sociale, et que vous n’avez point envie d’acquérir en propre une partie du virus qu’elle vous communiqueroit avec toute la bonhommie possible, vous ne lui mettez pas dans la forme prescrite par les us ordinaires ; vous vous contentez seulement de vous faire branler debout, en lui passant un bras sur le con, pendant que vous promenez la main de l’autre bras sur sa gorge, en la faisant passer successivement d’un sein à l’autre.

La femme, dans la position où elle est, semble inviter votre bouche à se coller sur la sienne, en vous fournissant les moyens de la becqueter à votre aise.

Cette attitude est une des plus gracieuses qu’il y ait, quand l’homme excède la femme de huit ou dix pouces. Les têtes, pour se rapprocher, font alors un mouvement différent ; la contexture des parties du corps, le moëlleux enlacement de ce groupe, le plus propre à développer les graces, est un tableau du pinceau libertin des Bouchers et Fragonard, etc.


LA POUSSE-POUSSE,
OU
MOUVEMENT PERPÉTUEL.


Dixième manière.

Deux nerveux athlètes prennent, l’un par-devant, l’autre par-derrière, une femme de la plus grande souplesse dans les reins. Celui de devant l’enconne fortement, pendant que l’autre lui met la verge dans l’orifice du cul ; ensuite par un mouvement alternatif, l’un pousse quand l’autre cède, et toujours de même.

La femme doit se prêter à ces différentes impulsions, par une flexion moëlleuse et mesurée.

Le fouteur de devant peut, pour couronner l’œuvre, enclaver par la méthode usitée, la langue dans la bouche de la lubrique nymphe. Les concurrens la tiennent par les mains, et forment une circonférence brakiale dans laquelle la femme est contenue.

Je ne conseille pas à ceux qui sont foibles du jarret d’essayer cette méthode, qui demande la plus grande force dans les muscles.

On doit la laisser pratiquer à ces hommes que la nature a doués d’un tempérament de fer, et ne pas se hasarder dans une entreprise au-delà des facultés communes.

Cette manière de foutre est de l’invention de deux porte-faix et d’une poissarde ; on doit juger par-là, combien elle est susceptible d’énergie.


LA PYRAMIDE.

Onzième manière.

On fait asseoir une femme ; on lui passe les jambes sur les deux épaules, et, dans cette position, on lui insinue la verge dans la bouche, le plus avant qu’il est possible ; elle vous chatouille incontinent l’anus avec le doigt, pour vous provoquer à des secousses violentes.

Une autre femme est debout derrière la première, et s’approche assez près du fouteur, pour qu’il puisse la gamahucher à son aise.

C’est ce qu’on appelle la pyramide : on peut l’exhausser à volonté, en répétant toujours les mêmes attitudes, jusqu’à la concurrence des forces de la femme qui lui sert de base.


LA BONNE MANIÈRE.

Douzième manière.

Il faut sacré nom d’un million de cons vérolés, pour foutre à la bonne manière, empoigner par la cotte une garce à cul, et lui ouvrir, sacré triple nom d’une vieille tétasse, sa vilaine foutue fressure de vache, en écartant avec le pouce et les autres doigts, les sacrées babines de sa poche à poulains, sans oublier surtout, de faire bâiller le cardinal.

Ensuite on cherche, par forme de conversation, dans le fond de sa culotte, un vieux sacré vit tout biscornu, foutu comme un casse-noisette, et ridé comme le cul de la fée Urgelle. On le tire de sa niche par les vieux crins de sa perruque ; on tâche de faire bander le sacré bout de Belzébuth, en lui foutant trois ou quatre coups de poignet, et on prie le mâtin d’entrer en danse.

Quand il commence à lever sa sacrée vénérable tête cicatrisée par la pierre infernale, le bistouri et le scalpel, on dit à la sacrée garce : — A ça, fais belle motte, putain, c’est le M… qui va te foutre une culotte à la bonne manière : entends-tu — Si je ne te fouts pas un vit fabriqué comme le tuyau du poêle des Invalides, je te permets de m’appeller le plus grand bande-à-l’aise.

La garce alors vous fout en avant sa boîte au mercure ; on lâche la bride au père calteau, et le mâtin s’en va branlant la tête comme ces pagodes de cheminée qu’on fait aller avec la main. Quand il est une fois dans la sacrée vessie au foutre, on travaille la chair humaine, et l’on pousse le docteur vers les pays-bas. Ce n’est pas tout, on prend ensuite par la peau du cul la maquerelle de la garce qui a le vit au con, et on la fout proprement sur le ventre de celle qui est en position ; alors on porte la bouche vers son sacré jean-foutre de bavard, et on lui fout et refout, jusqu’à la triple octave, un morceau de langue de la longueur d’un cervelas de quatre sols ; on la gamahuche ensuite avec toute la lascivité possible, à-peu-près comme fait un veau, quand il tient le pis de sa mère.

Quand vous avez assez pollué par tous les bouts, et que la motte de la princesse est bien barbouillée de foutre, on lui dit poliment (parce qu’il faut sacre dieu de l’honnêteté par-tout) de se relever, et d’aller s’éponger le cul, après lui avoir fait sucer sa pine pour la dégraisser.

La sacrée prostituée vous dit alors dans son langage : — Mon petit ami, tu vas me faire ton cadeau, n’est-ce pas. — On répond à cela : me prends-tu, vingt-cinq mille couilles de récollets, pour un débarqué de province ? crois-tu, sacré nom d’un prépuce de mahométan, que le père M… n’est pas au fait du commerce ? tu penses sans doute avoir affaire à un blanc-bec ? apprends, sacrée graine du diable, que je fouts toujours gratis, et que depuis que je fais le métier de fouteur, il ne m’en a pas coûté un seul denier pour le logement de mon vit : Adieu.

Cette nouvelle manière de foutre, est un des articles de la convention le plus difficile à établir, les putains n’entendent pas, de cette oreille-là ; et elles vous répondent, qu’il leur faut autre chose que du foutre pour qu’elle puissent subsister.

L’abbé T… a déjà monté différentes fois à la tribune de l’assemblée nationale des garces de la rue Saint-Honoré ; mais il emploie vainement les discours les plus éloquens ; on réfute tous ses argumens, et les vrais partisans de son systême, qui sont en grand nombre, désespèrent beaucoup de la réussite d’un projet aussi hasardé.



LES PLAISIRS DU CARNAVAL.

Treizième manière.

Je sortois de Venise où les plaisirs du carnaval m’a voient harassé. Une Laïs de Véronne me donne à coucher ; je trouve sous des formes ravissantes un levain de cet infernal poison qui nous parvint avec l’or du Mexique ; je bandois comme l’incestueux Œdipe, lorsqu’il rentra dans le sein dont il étoit sorti. Foutre, savez-vous bien que toutes les véroles du monde chrétien sont peu de chose, lorsque le nerf érecteur est excité par de jolis tétons.

C’est donc sur les tétons que je jette mon dévolu ; je vous renverse ma guenuche, et comprimant ses deux globes sur mon scrotum, je lui fous ma décharge dans sa gueule. Avis aux zélateurs du cul…te de Vénus. On ne gagne pas la chaude-pisse, en frottant sa couille sur les clavicules.


LE BONHEUR INATTENDU.

Quatorzième manière.

J’arrivais à Milan, et j’étois logé chez madame Licoboni ; elle me fait conduire dans un appartement assez richement meublé, et me dit : voilà ta chambre, M. l’officier. — Et mon petit frère, lui dis-je, où vas-tu le mettre. — Ah ! ah ! il est beau ton frère. Tiens, mon choux, voici un cabinet assez sombre, mais s’il se plaît à l’étroit, il ne sera pas mal. Et voilà ma marquise qui se trousse et me montre un ventre saillant et couvert d’une toison d’ébène qui m’électrise. Je prends possession de mon petit habitacle ; j’y étois coussi, coussi, mais à le quatrième poste, la Licoboni m’ayant fait tourner le port-face, et se pinçant les nymphes, me fit faire une émission terrible ! Je lui mordois le cul, les genoux, les pieds, tout son corps fut dans un instant couvert de mes baisers brûlans.



L’ANNEAU DE SATURNE.

Quinzième manière.

Ah ! monsieur le président, vous vous en foutez là avec ma Louison ! ah ! ah ! Eh bien ! vous allez, s’il vous plaît, me prêter votre anneau de Saturne, ou je vous fais avaler un saucisson de matière fécale, de dix pouces de long. Ah ! monsieur le bougre, vous aimez les digressions ; eh bien ! je vais vous en faire une, dont le plus déterminé jésuite auroit à se louer. Allons, allons, culotte bas, foutre, que je voye votre vieille image de Sardanapale, et sur-tout, de la douceur, ou la perruque sautera.



CONCLUSION.

Eurystée, par les conseils de Junon, suscita à son frere Hercule, douze travaux dans lesquels il croyoit le faire succomber, mais dont ce demi-dieu sortit couvert de gloire. Aujourd’hui sans être aussi exigeant, je prescris à quiconque veut s’illustrer dans la carrière de la galanterie, douze manières de foutre, qui rappellent les douze travaux du grand Alcide, sans être, comme lui, muni d’un instrument dont Déjanire, Jole, Omphale et Hébé ont ressenti toute l’énergie, on peut cependant essayer les différentes manières que j’ai décrites, et, avec un peu de nerf, s’élever au-dessus de chacune d’elles.


LA PIQÛRE D’ÉPINGLE,

Conte
du même auteur.

Si tu savois, disoit Lise à Glicère,
Quel accident m’arriva l’autre jour !
J’étois sur la fougère,
Et je jouois au jeu d’amour
Avec Colin, ce garçon du village,
Quand tout-à-coup une épingle peu sage
Contre un endroit… rempli de sentiment,
Fit un légère blessure.
Je voulus voir l’égratignure,
Pour en tirer tout le venin ;
Mais aussi-tôt que j’y portai la main,
Le mal grossit d’une telle manière,
Qu’il me fit craindre pour Colin…
Je pressai tant, tant qu’à la fin,
Il en sortit de la matière,
Et son mal désenfla soudain.


VOILA LA CLEF… MAIS IL A
TROUVÉ LA SERRURE.

Historiette.

Blaise amant favorisé de la jeune Isabelle, lui demande un rendez-vous nocturne. L’embarras d’une réponse positive ; la timidité d’accorder une chose où il y a tant de danger à courir, ajoutent encore aux charmes de sa figure ; une rougeur enfantine pare son front des roses de la candeur : elle hésite, dans la crainte d’être surprise avec son amant, mais l’amour l’emporte sur la prévoyance ; elle oublie tout, pour ne songer qu’au plaisir d’une entrevue, qui doit satisfaire à-la-fois et sa vanité et son cœur.

Blaise obtient le rendez-vous, après lequel il attend depuis si long-tems, et l’amante et l’amant délibèrent sur les moyens de se mettre à l’abri de la surveillance paternelle.

L’heure est fixée, le lieu est désigné ; on aspire après le moment de la jouissance : il arrive enfin, ce moment tant desiré. Blaise, exact à sa parole, pénètre sans bruit dans l’appartement de l’aimable enfant, qui doit être la récompense de sa fidélité.

Isabelle l’apperçoit, veut sauter à bas de son lit, pour lui ôter les moyens de profiter de sa situation, en lui en fournissant de nouveaux : il arrive assez tôt pour l’en empêcher ; elle veut repousser une main fourvoyée, en présentant le bras le plus séduisant. Son esprit n’est pas assez maître de son cœur, pour réprimer les licences de son amant, sa modestie combat foiblement son amour ; sa vertu effrayée du risque qu’elle court, est prête à succomber par la crainte qu’elle a d’être séduite ; elle devient foible, son amant entreprenant ; Isabelle est sans secours, Blaise a la force en partage : il profite de l’ascendant qu’il a sur elle pour lui montrer sa foiblesse : la crainte se mêle au sentiment de la volupté ; la beauté qu’on intimide, et le premier pas qui conduit au plaisir est bientôt suivi d’un second qui mène au bonheur.

Blaise est heureux, les dieux vont jalouser son sort ; il égale celui de la divinité ; l’amour le couvre de fleurs, et le plaisir tient la corbeille : il touche à ce moment qui précède celui de la jouissance ; il est heureux, parce qu’il n’a pas fait d’efforts pour le devenir. Mais il est un terme à la volupté, comme il en est un aux douleurs.

Blaise, fatigué du poids de sa félicité, s’endort au sein des plaisirs. La nature n’est pas infaillible, elle est chez tous les hommes bien au-dessous des desirs ; mais l’art vient à l’appui de sa foiblesse ; Blaise a besoin d’un expédient qui laisse jouir son amante de la douce illusion des sens ; il emploie ce merveilleux secret, et prolonge ainsi, par un stratagême innocent, la douce erreur d’une sensation délicieuse : Isabelle ferme ses beaux yeux, et se prête autant qu’il est possible à la douceur d’un songe qui ressemble tant à la réalité, et cherchant à se tromper soi-même, parvient à faire croire à son amant, qu’elle n’est pas instruite de la ruse.

Philémont, éveillé par un léger bruit, vient avec Beaucis, son épouse, à l’appartement de leur fille ; il voit la porte entr’ouverte, et témoignant sa surprise, Beaucis croit le rassurer en lui montrant la clef. — Vous avez la clef, lui dit-il, mais il a trouvé la serrure.



DISSERTATION
FOUTROMANIQUE.

Sur les plaisirs des chanoines de la
collégiale de B…

L’art de la fouterie, qui passe pour être à son période dans la capitale, n’est encore qu’ébauché, en comparaison de l’acte de perfectibilité où il est poussé dans quelques villes de la province, et particulièrement à B… Les femmes y ont plus de tempérament qu’à Paris ; le genre nerveux y est moins exposé aux influences journalières de ce venin destructeur, qui réduit, dans l’âge le plus tendre, les deux sexes à l’impuissance de faire rien qui soit digne de la mâle virilité ; on y connoît cependant les maladies syphilitiques, les gonorrhées virulentes, les crêtes, les exostoses, etc. mais elles sont moins fréquentes, relativement à la population, et à l’exception de quelques chanoines ; et de sept à huit mille putains qui ont toute l’année, à commencer du mois de Janvier, jusqu’au mois de Décembre inclusivement, le jardin potager le mieux assorti en porreaux, fleurs-blanches, et autres légumes de cette espèce, on n’auroit pas la plus petite idée de ces maladies ; mais graces aux honnêtes ecclésiastiques qui prennent chez eux, par amour pour leur prochain, toutes les bougresses atteintes du virus, la société est délivrée de ces fléaux de l’humanité. Si je voulois citer ceux qui montrent journellement ce zèle vraiment chrétien, je n’en finirois pas, la quantité en est innombrable ; aussi ne suffit-il pour être convaincu de ce que j’avance, que de se trouver à la sortie de leur office. Vous les voyez paroître, le front ceint d’une vieille peau de zibeline, de chat ou de mouton, les uns avec des visages rubiconds et enluminés d’un rouge incarnat, surchargés de dartres, de boutons et d’échauffures. Les autres, sous les traits livides d’une indolente momie, les yeux mornes et caverneux, les paupières allongées, les joues creuses, la langue surchargée de vapeurs méphitiques, les dents décharnées, le virus prêt à expirer sur les lèvres, la démarche incertaine et chancelante, le buste courbé, les épaules hautes et la tête baissée, enfin, avec tous les symptômes de la débauche et de l’incontinence, de la lubricité et des maladies qui en résultent.

C’est sous ces masques hideux, que chaque jour, appelés par leur état, ils vont dans le sanctuaire de la divinité porter indolemment les restes dégoûtans d’un corps cacochyme et plein de défectuosités.

On les voit dans des jours de solemnité, traîner, sous le cilice de la religion, les vestiges languissans de leur machine épuisée ; ils font ainsi le tour d’une vaste église, entre les femmes qui alimentent leur débauche, et qui ne se rendent dans un lieu destiné à sanctifier l’éternel que pour voir des monstres qui sont l’opprobre de la nature et les victimes du libertinage.

C’est ainsi que l’on rend l’hommage, dans ce réceptacle de vices, à des dieux tutélaires et bienfaisans ! Mais écartons toute idée de religion, dans un ouvrage qui ne respire que la licence, et contentons-nous, en passant, de donner quelques notions sur les vices habituels de ces créatures hypocrites, qui affectent, par des dehors apprêtés, l’air de la candeur et de la modestie, qui devroit distinguer les hommes, d’un état qui fait tant d’honneur à celui qui l’exerce dignement.

Par un des statuts de l’ordre, ces messieurs ont juré d’observer le plus scrupuleux célibat, en se contentant toutefois, pour adoucir les rigueurs de la règle, de chacun trois ou quatre dondons, pleines de suc et d’embonpoint, pour l’usage quotidien, sous le nom spécieux de cuisinière, ou d’ouvrières en linge.

Les demoiselles ou putains, comme vous voudrez les nommer, après quelques années d’un service fatiguant, ne manquent pas d’user, sur ces êtres méprisables, d’un pouvoir illimité : elles s’emparent de la conduite de la maison, de leur ci-devant maître, régissent leurs revenus, règlent la dépense sur leurs plaisirs, et, comme vous devez bien le penser, se procurent toutes les jouissances de la vie ; elles ont aussi de leur côté, outre les amoureux externes, un valet affidé, qui coopère avec son maître à leur entière satisfaction, pendant que celui-ci est en ville à faire quelques cures clandestines, et va sur les brisées d’un époux complaisant.

Quelques-uns d’entre eux ont des petits jardins, des boudoirs élégans, hors l’enceinte de la ville, et dans lesquels se rendent mystérieusement, sur le déclin du jour, de jolies grisettes, qui viennent leur confier le soin de leur réputation, et leur offrir les prémices de la virginité. Il faut convenir que ce sont de paillards bien heureux !

En sortant des bras d’une jolie femme, ils volent incontinent chez eux, se font préparer, par des valets soumis, un repas splendide, où l’abondance des viandes les plus succulentes, égale celle des vins les plus exquis. Ils mangent alors avec la voracité d’un homme qui a besoin d’alimenter des forces épuisées : ils font une digestion laborieuse et complète, et si la nature montre quelques besoins urgens, aussi-tôt la maîtresse du logis les satisfait.

C’est ainsi que, livrés continuellement au même genre de vie, ils passent des jours filés par le plaisir, et sèment de fleurs, les chemins qui conduisent aux délices de la félicité éternelle.


SONNET.

Un jour dom Hape-con, plus arrogant qu’un roc,
Las de sentir son vit aussi droit qu’une quille,
Sortit de son couvent enfoncé dans son froc,
Et fut chez la Dupré demander une fille.

Le pâter, qui jamais ne foutoit qu’en escroc,
Pour qui cinq à six coups n’étoient qu’une vétille,
Crut qu’il ne s’agissoit que d’en venir au choc,
Et tira son engin de dessous sa mandille.

Tout beau ! dit la putain, rengaîne l’instrument ;
Avant de commencer, parlons un peu d’argent ;
De foutre on vit ici comme au palais d’épices.

Le pâter, étonné de ce foutu cartel,
Quitta, faute d’argent, ce pilier de bordel,
Et fut, de desespoir, enculer deux novices.


AUTRES CONTES.

Certain nigaud, grand faiseur de neuvaines,
Contoit son cas, aux pieds d’un franciscain ;
Puis, quand il eut nombré quelques fredaines,
Il s’accusa qu’une jeune nonain,
L’avoit prié de l’amoureuse affaire.
Le fîtes-vous ? nanni, de par saint Pierre,
Jamais ne fut souillé de tels forfaits.
Dieu d’Israël ! dit le révérend père !
Conduis un peu tel gibier dans mes rets,
Puis tu verras si je n’ose le faire.



Un capucin, ardent et plein de feu,
Dans un bordel, excitoit une nonne
Au jeu d’aimer, mais pour l’amour de dieu,
Gratis s’entend ; non pas dit la friponne,
Laissez-donc, père Zorobabel !
Je vis du con, comme Vous de l’autel.
Tirez de l’or, autrement point d’affaires.
De l’or à nous ! répond le bouc sacré,

Las, par nos vœux nous l’avons abjuré,
Mais je dirai pour vous quatre rosaires.



Le médecin d’un écolier malade,
Recommanda qu’on gardât de son eau ;
On en serra : mais la garde maussade,
L’ayant fait cheoir, à son propre tonneau,
Vîte en retire, et remplit le vaisseau.
Le docteur vient et dit : ce sont eaux claires
De femme grosse ; on ne m’y trompe guères,
La garde rit, le docteur se défend ;
Lors l’écolier : je l’ai bien dit aux pères
Qu’ils me feroient tôt où tard un enfant.



Ah ! Zizi, ma chère merveille !
Sur mon honneur je ne mens pas,
Quand je vous dis que vos appas
Font que jamais je ne sommeille.
Que si malgré tous les propos,
Témoins de mon peu de repos,
Vous croyez que je dissimule ;
Couchez cette nuit avec moi,
Et vous verrez, belle incrédule,
Combien je suis digne de foi.


Des jeunes gens, filles craignez l’abord,
Disoit en chaire, un curé de village.
N’éveillez pas chez eux le chat qui dort,
De peur, chez vous, qu’il ne courre au fromage.
Voyez la vierge, elle qui fut si sage !
Elle ne fut que le tems d’un ave,
Avec un ange honnête et réservé.
Non, qu’elle eut tort et que moins je l’en prise ;
Mais après tout qu’en est-il arrivé ?
Et concepit ! elle-même y fut prise.



Certain novice, auprès d’un Loyoliste,
Se confessoit d’être entiché d’orgueil,
Et cependant le vilain sodomiste,
Au jouvenceau faisant joyeux accueil,
Brûloit tout vif en son sacré fauteuil.
Tant qu’à la fin, sous l’ardente gouttière,
Approchant vîte une des mains du frère,
Et l’inondant : tiens, dit l’humble profès,
Regarde, enfant d’orgueil et de misère,
Ex quo luto, nascentur homines.



Lise, en son lit, lutoit contre la parque,
La faculté la laissoit sans espoir.

L’époux voulut lui donner une marque,
Même en mourant du conjugal devoir.
Lise revint, surpris de la revoir,
Son médecin dit : quel est ce mystère !
Quelle recette ! ah ! que j’ai de regret !
Reprit l’époux : quand je perdis mon père,
De n’avoir pas employé ce secret.



Le frère Luc, ayant mis bas bissac,
Froc et manteau, pour dame de Cussec ;
Bien l’exploitoit au fond d’un cul-de-sac,

Mains sur les tétons, œil contre œil, langue en bec.

Puis, tout-à-coup, Luc, d’un goût un peu grec,
La vire droit, fiche où savez son pic.
Pour l’en ôter, sifflant comme un aspic,
La dame alloit et de taille et d’estoc
Se remuant : sacré froc d’abacuc !
Trop bien allez, lui dit le porte froc,
Mieux qu’un prélat vous traitez frère Luc.



Grand magistrat, qui par ta vigilance,
Des filles de Paris, trouble les plus beaux jours.
En ma faveur laisse agir ta clémence,

Lorsque tout rit, pleurerai-je toujours.
Sur moi jette un regard propice ;
Ne m’oublies point en ces lieux.
Souvent on corrige le vice
En pardonnant aux vicieux.
Mais quand même il seroit possible
Que l’on me revit à Cypris,
Quand je serois incorrigible !…
Qu’est-ce qu’une putain de plus dans un Paris.



Frère Frapart, en un réduit bien clos,
Par un matin, à gentille tourière,
En vrai béat, refait par le repos,
Insinuoit sa cheville ouvrière.
On sonne alors : ah ! contretems maudit !
Foin de la cloche, et de qui la fondit,
S’écrie Agnès, en doublant la croupière.
Le pénaillon, qui plus fort se raidit,
Piquant des deux pour finir sa carrière,
Serre la sœur, et prêt à faire feu :
Parbleu, dit-il, tu t’étonnes de peu,
Laisse sonner et répond du derrière.


Un mousquetaire, aux pieds d’un vieux billette,
Son cas joyeux déduisoit clair et net.
J’ai, dit-il, avec un tendre objet,
Depuis long-tems, une intrigue secrette :
Ce n’est le tout : item, je suis sujet…
A quoi ? voyons : à le faire en levrette.
D’où vient cela, reprit père Ségain ?
C’est que j’y trouve un pouce au moins de gain :
Ah ! mon enfant, dit le saint personnage
Pour ton salut, reviens à l’avant-main ;
L’esprit pervers, avec ce beau ménage,
Ma fourvoyé cent fois de mon chemin.



Bonjour, ma belle mignonne,
Disoit Lucas, l’autre jour ;
Que mon aventure est bonne
De vous trouver de retour :
Ça, permettez-moi, de grace,
De vous rendre un petit soin ;
Il n’est rien qui tant délasse,
Et vous arrivez de loin.
Alix, sans être intriguée,
Répond, grand merci Lucas,

Je ne suis point fatiguée,
Mais mon pauvre âne est bien las.



Aux pieds d’un vieil hermite, un jeune adolescent,

Le carême passé, dit, en se confessant,
Que par un accident sinistre,
Dont il avoit bien du regret,
Il avoit trois fois, en secret,
Baisé la femme d’un ministre.
Alors le bon hermite, homme plein de savoir,
Dit : baiser une femme est un crime bien noir,
Quand c’est celle d’un catholique :
Et que de fois j’en ai frémi !
Mais pour celle d’un hérétique,
Bon ! c’est autant de pris sur l’ennemi.



Jean, quatre mois après sa noce,
Se trouva père : il s’en fâcha.
Au beau-père il le reprocha.
Lequel lui dit : D’un fruit précoce,
Ma femme ainsi me régala :
J’eusse fait du bruit plus que trente :
Par un contrat de mille écus de rente

Mon beau-père me consola ;
Ce même contrat le voilà :
Il doit rester dans la famille,
A votre gendre il conviendra,
Si vous mariez votre fille.



Gage un écu, je mets le double,
Que tu ne me dis pas pourquoi
Toutes les femmes pissent trouble,
Disoit, au médecin le Roi,
Une dame alerte et gaillarde.
Le disciple de Gallien,
Avec surprise, la regarde,
Et ne pouvoit répondre à rien.
Va, ne cherches point, c’est folie,
Mais apprens de moi le secret :
Tonneau percé, près de la lie,
Ne donne point de vin clairet.



Jeune blondine, aimoit jeune garçon,
Mais un vieillard l’obtint en hyménée.
Pour ses écus, et par force menée
Au sacrement ; elle eut longue leçon
Sur ses devoirs. Il falloit voir le prêtre

La sermonner : aimez bien votre maître,
C’est à lui seul que vous joint l’éternel,
Par un saint nœud, par un nœud solemnel,
Un nœud divin, le plus grand nœud du monde.
Elle en pâlit ; encor plus son amant.
Mais en sortant, lui dit tout bas la blonde :
Consoles-toi, ce n’est qu’un nœud coulant.



Un gros manant, maltraitoit fort sa femme,
Après soupé la pauvrette ayant peur
Qu’il n’achevât de lui chanter sa gamme,
Courut d’abord au pacificateur
Et se coucha. L’homme d’humeur sournoise,
Restoit assis sur un banc près du feu,
Tout en chemise, et d’apaiser la noise
Par un baiser, s’embarassoit fort peu.
Survint un chat, qui, comme une furie,
S’alloit jetter sur un met délicat.
L’épouse au guet, par charité, s’écrie :
Batteur de femme ! ah ! prens donc garde au chat.



La femme d’un cavalier
Vivandier,
Par les hussards pillée et sa charrette prise,

Revenoit au camp en chemise.
Comment, morbleu, dit le mari !
Tu n’a donc rien sauvé ? nous voilà sans ressource,
Si fait, dit-elle, mon ami,
J’ai sauvé la tasse et la bourse.
A ce discours le mari radouci :
La bourse ? où l’as-tu donc cachée ?
Où vous savez, dit-elle, la voici.
Et pourquoi reprit-il, t’es tu pas avisée
D’y fourrer les chevaux et la charrette aussi.



Mon cher frère, disoit Julie,
Si tu quittois le jeu que je serois ravie !
Ne le pourras-tu point abandonner un jour ?
Oui, ma sœur, j’en perdrai l’envie
Quand tu ne feras plus l’amour.
Vas, méchant ! tu joueras toute la vie.


VOYAGE

DANS LES DÉPARTEMENS.

Vous voulez charmante Julie,
Parcourir les départemens,
Mais de peur d’évènement,
Songez qu’il vous faut compagnie.
Vous me direz qu’en même tems
Femme jolie, à tresse blonde,
Aux yeux bleus, au regard fripon,
Quand elle veut courir le monde,
Ne peut manquer de compagnon.
Eh bien ! prenez-moi pour le vôtre,
Car si quelqu’un de vos amis,
Doit vous faire voir du pays,
Autant que ce soit moi qu’un autre.
Livrez-moi donc sans balancer
Ce joli bras, cette main blanche,
Et parcourons pour commencer
Le département de la Manche.
Ce pays a bien des beautés !

Mais aux confins de ces lieux enchantés,
Heureux, qui par degrés s’avance,
Car je soutiens et je suis franc,
Oui, je soutiens, que malgré l’apparence
Il est plus voisin qu’on ne pense
Du département du Mont-blanc.
Charmant pays ! heureux qui le découvre ;
Son sol flatteur au voyageur friand,
Malgré la neige qui le couvre,
Offre des fraises en tout tems,
C’est le sol des enchantemens.
Car moi, qui n’ai jamais l’œil trouble,
Qui boit du vin modérément,
Dans ce joli département.
Eh bien ! moi j’ai toujours vu double,
Fixons-nous y quelques instans ;
Des voyageurs, c’est-là le privilège,
Et je ressemble en ce point aux enfans,
J’aime beaucoup les pelotes de neige.
Delà, par un circuit, sans doute,
Mais que je fais en moins d’un tour de main,
Nous nous trouvons sur la route
Du département du Bas-Rhin.
Parcourons ces vastes campagnes ;

Mais non, c’est un sol montagneux.
J’apperçois deux coteaux. — Tant mieux,
J’aime la croupe des montagnes.
Mais faisons encore un circuit,
Gagnons pays à petit bruit :
Et du Département de l’Aine,
En prenant un léger essor,
Nous pourrons nous fixer sans peine
A celui de la Côte-d’Or.

FIN.