Les Vingt-huit Jours d’une Française aux Indes/Préface

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PRÉFACE



À une époque où il est de règle de tout savoir sans avoir jamais rien appris, écrire un livre est chose banale. Il est à croire que je ne suis pas de mon temps, car je tremble en paraphant le dernier de ces feuillets d’épreuves et, en lisant mon nom imprimé sur la couverture, je ne puis m’empêcher de penser, moi aussi, que ce qui m’étonne le plus, c’est de l’y voir.

Qu’on ne s’imagine pas que ce n’est là que pure phraséologie, modestie d’exorde. Non. Fille et sœur d’écrivains, élevée à l’Institut, dans le sanctuaire des Lettres, initiée, dès mon enfance, aux difficultés de l’art d’écrire, j’en connais les écueils et je ressens toute mon insuffisance.

Aussi bien, lorsque je griffonnais mon carnet de route, étais-je loin de penser qu’un jour il serait publié. Je ne m’y suis décidée que sur les instances d’amis à qui j’en avais lu les principaux passages.

Ce voyage aux Indes n’a d’ailleurs été pour moi qu’un « accident ». Accident heureux, je m’empresse de le dire, car il m’a fait vivre des heures inoubliables.

Mon mari m’avait demandé de l’accompagner dans un voyage que ses affaires l’obligeaient à entreprendre en Australie, au Canada et aux États-Unis. A business trip round the world. Encore que le temps dont il disposait fût limité, je n’eus pas grand’peine à le convaincre — car il ne demandait qu’à l’être — de la nécessité de modifier son itinéraire primitif, pour faire un pèlerinage dans l’île où la Légende place le Paradis terrestre et dans la presqu’île que l’Histoire considère comme ayant été le berceau de l’humanité.

Je ne me flatte pas d’avoir découvert les Indes, inventé Brahma ou mis à jour aucun cénotaphe. Je conte simplement ce que j ai vu, imparfaitement mais avec sincérité.

Je remercie par avance de leur bienveillance ceux qui me liront, et je n’en saurais es mieux reconnaître le prix qu’en usant d’une brièveté souvent difficile pour celui qui écrit, mais toujours agréable pour le lecteur.