Les Voyages de l’esprit/La Volonté et l’Inspiration

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E. Maillet, libraire-éditeur (p. 1-13).

LA VOLONTÉ ET L’INSPIRATION[1]

À M. ÉMILE MONTÉGUT.

Je ne sais quelle folle ambition m’est venue d’inaugurer ces essais de critique familière par une sorte de polémique avec un adversaire tel que vous. Reprendre un sujet marqué de votre ineffaçable empreinte, le ramener devant le public en manière d’appel et ne le quitter que sur des conclusions divergentes, c’est vraiment de l’imprudence, et toute imprudence doit entraîner un châtiment. Que j’aie à pûtir de mon entreprise, je n’en doute point ; mais je ne crois pas avoir à la regretter. Une question d’art a été soulevée par vous dans la plus récente de vos études et résolue peut-être par une décision exclusive. Permettez-moi, — vous qui êtes un maître, — ce genre de contradiction qui passa toujours pour un hommage. Socrate n’encourageait-il pas les répliques de Cébès, loin de s’offenser chez un disciple d’une humeur belliqueuse excitée par un impérieux amour de la vérité ? C’est d’une passion semblable que naissent tout ensemble et mon audace et mon excuse ; j’ai cru la vérité en péril, et pour elle j’ai fait ce qu’avait entrepris pour Carthage la mystique Salammbô : j’ai osé toucher à votre étude magistrale comme au voile sacré de Tanit. Curiosité qui, pour paraître profane et sacrilége, n’en reste pas moins pieuse dans la forme et dans l’intention salutaire !

De votre étude sur Rossini se dégage une affirmation étrange et propre à porter le trouble dans plus d’une conscience littéraire. C’est une idée toute platonicienne, uniquement faite pour les âges antiques, où le cœur de l’homme était moins vaste, mais plus apaisé, et son intelligence moins profonde, mais plus équilibrée ; où l’art se haussait rarement à l’Expression, mais atteignait sans effort, et comme par un droit, à l’impérissable Beauté. Platon reconnaissait le poëte à des caractères extérieurs ; ainsi, avec une tournure d’esprit et un langage dignes de votre devancier, vous réservez le titre d’homme de génie à ceux qui vous paraissent de la race des dieux. A cette race n’appartiendraient, selon vous, que ces élus de l’inspiration qui, certains de leur privilége, ont exclu de leur vie le rôle du travail et l’action de la volonté.

Rien de surprenant a ce qu’une telle doctrine se produisît en Grèce, après les plus éblouissantes merveilles de l’Inspiration. La Volonté, néanmoins, allait y répondre en suscitant Euripide, et plus tard Ménandre et Théocrite. Au reste, l’heure est mal choisie pour rajeunir cette thèse, quand la Volonté, qui d’âge en âge a fait sentir dans tous les arts son influence toujours accrue, règne sans conteste à côté de l’Inspiration, sa rivale, la supplée parfois sans trop de désavantage, et sur tous les chefs-d’œuvre ne cesse d’imprimer, comme d’une griffe léonine, une marque puissante et furieuse. Le siècle est tout entier à ce magnifique déploiement de la Volonté mettant en œuvre des originalités innées et en tirant des ressources im prévues, tandis que leur trésor natif ne se fût peut-être pas renouvelé. Seriez-vous insensible à ce fréquent spectacle ? Toujours est il que, prenant la Musique pour exemple, vous nous dites : L’Inspiration sans al liage nous a donné Rossini. J’en conviens, et le don n’est pas médiocre.

Mais, avant Rossini, la Volonté, associée à l’Inspiration, avait créé les génies sacrés d’un Mozart et d’un Gluck ; elle a fait successivement surgir Beethoven, Weber, Mcyerbeer, Verdi, Wagner, Félicien David. Et vous, successeurs de ces maîtres que nous promet l’avenir, génies futurs, beaux et sympathiques comme l’espérance, vous ne serez pas à coup sûr des élèves de Rossini ! L’affranchissement artistique de l’Italie, la ferme attitude de l’Allemagne, l’ébranlement de la France, attestent cette victoire définitive de la musique réfléchie. Voilà déjà l’un de vos dieux qui, pour antagonistes, a mieux que de simples mortels. Qui lui as signerez-vous pour compagnons dans votre Olympe bien rétréci ? De notre temps, Lamartine, et par moments, George Sand. Je ne sais aucun autre grand esprit adonné à cette méthode de composition spontanée. La volonté réclame pour elle Gœthe, Châteaubriand, Ingres, Rude, Lamennais, Mérimée, Victor Hugo, A. de Vigny, Henri Heine, Th. Gautier, Balzac.

Cette liste est assez belle et pourrait s’augmenter encore, tandis que la vôtre ne peut s’accroître que de cinq ou six noms. Autant de chefs-d’œuvre et de génies dans notre siècle, autant de manifestations visibles et vivantes de la volonté ! Il est vrai que ces chefs-d’œuvre et ces génies trouveraient difficilement grâce devant vous. J’en appelle à votre définition, qui, précise sous sa forme poétique, est implacable :

Il faut appeler hommes de génie ceux-là seulement que nous reconnaissons pour appartenir à la race des dieux.

Une pareille formule rejette dans l’humanité, c’est-à-dire dans une foule passagère et vouée à l’oubli, tous les grands artistes dont l’inspiration n’a pas visité le berceau. A des facultés mystérieuses et comme impersonnelles, vous attachez la divinité. Libre à vous de la refuser au génie moins inconscient d’un Ingres ou d’un Meyerbeer. Vous n’empêcherez pas une procession fervente de s’éterniser là où ces hommes ont tracé leur route lumineuse ; vous ne leur ravirez pas ce culte incessant des générations, cette apothéose de toutes les heures, qui sontlesigneetla récompense des vrais dieux.

Meyerbeer a plus d’un fidèle, Hugo plus d’un croyant, et les heureux, les ardents, les sages qui, pour la vingtième fois, ont écouté le Prophète ou relu ZimZizimi ont dû se récrier contre votre temple intolérant, où de tels porteurs de foudres et d’auréoles seraient malmenés comme des profanes ou subis comme des intrus. Les Panthéons ne sont pas de votre goût. L’Olympe, je le répète, vous semblerait trop indulgent. Un petit tableau d’intérieur céleste a, du reste, à cet endroit, bien rendu votre pensée. Vous nous avez représenté les dieux autochthones mal à l’aise avec les dieux récents, et l’un de ces premiers-nés du ciel rabattant avec une bonhomie socratique l’orgueil de ceux qu’il estime des parvenus. J’aime à vous suivre sur ce terrain où croissent les fleurs de l’imagination antique. Je rends hommage à votre spécieuse fiction, présentée avec tant de grâce. Je n’attaquerai pas d’une lourde argumentation cette chose fine et frôle, j’userai du même manége ; car je tiens à prouver que la familiarité de Platon peut me fournir aussi un de ces mythes où la vérité se dissimule sous des guirlandes de roses. Fiction contre fiction ! c’est au public de reconnaître où s’insinuera l’insaisissable et fugitive Vérité.

Je reviens à notre Olympe. Votre vieillard si dédaigneux des nouveaux venus a fini sa petite harangue ; le sceptre d’or à la main, il se rassied, satisfait de luimême. Les victimes de ce discours se regardent entre elles, humiliées et froissées, cherchant instinctivement un interprète et un vengeur. Un de ces conquérants du ciel se lève, c’est Hercule tel que l’a vu la terre reconnaissante, d’apparence brusque et quelque peu rustique, simple, franc, et revêtu de je ne sais quelle splendeur qui vient de la force, de je ne sais quel charme qui naît de la bonté. Ce n’est pas un dieu rhéteur ; il se présente sans apprêt, il parle sans façon et dit : « Dans les paroles que vous venez d’entendre, ô dieux anciens et nouveaux ! tout n’est pas juste, tout n’est pas vrai. Si nous avons mérité quelque reproche, il est bon que nous soyons tancés par les plus vieux d’entre nous ; mais rien n’est survenu qui leur permît de nous traiter d’inférieurs et d’étrangers.

« Pour mieux vous défendre, mes amis, je me défendrai moi-même, car ma fortune est la vôtre. Fils de Jupiter, je me croyais dieu de naissance ; mais il paraît que je me*trompais ; faute d’avoir été élevé dans l’Olympe, il paraît que je n’avais pas naturellement les pensées et les énergies d’un dieu, et que tout cela m’est venu, comme aux hommes, d’un travail opiniâtre, d’un effort démesuré, et non comme par un souffle intérieur. Bien habile qui fait ces distinctions sans s’y méprendre ! Qui vous dit que ce souffle, que cette inspiration (1) n’habitaient pas mon âme quand je nie portais sans trêve au secours des malheureux mortels ? Le subtil personnage, qui sépare à tout propos l’Inspiration et la Volonté, comme si dans toutes mes aventures elles n’avaient marché de pair ! L’une me poussait en avant, l’autre me dirigeait. J’ai mené à bonne fin des entreprises infinies, la destruction des monstres, le châtiment des tyrans impies, la délivrance des hommes opprimés sous cette double épouvante. Ce n’était pas l’œuvre d’un jour. Aussi mes victoires ontelles été nommées des travaux. Les dieux anciens, dites-vous, ont dépensé moins de peine et de temps pour leurs ouvrages héroïques. Comparez le nombre de ces ouvrages avec les miens ; comparez aussi leur importance. Ils ont fait facilement peu de chose ; j’ai fait beaucoup avec une facilité presque égale. Sous quel prétexte donc et par quelle mauvaise querelle me donnez-vous le titre d’étranger et de parvenu ? »

Ainsi eût pu parler le bon Hercule ; si les hommes de nos jours l’avaient entendu, soyez sûrqu’ils auraient applaudi leur antique bienfaiteur et l’eussent proclamé plus digne du nom de dieu que ces Apollon et ces Mars qui, comme Almaviva, doivent tout à leur naissance, rien à leur volonté. Redescendons de l’Olympe dans le domaine de l’art. Ici, pour nous autres modernes, quoi que vous en disiez, cher maître, les vrais dieux ne sont plus ceux que vous présentez à notre admiration. Qu’ils soient de la race des dieux, personne ne le nie : ils nous font sentir, rien qu’en se montrant, leurs vertus célestes ; mais à la longue ils nous en dégoûtent en nous imposant comme de droit divin leurs faiblesses, leurs négligences, leurs défauts ; ils cessent de nous plaire parce qu’ils ne cherchent pas constamment à nous plaire. Nos dieux préférés sont également des immortels de naissance, mais qui ne se sont pas contentés des dons attachés à leur berceau ; ils avaient en eux le bien ; ils se sont mis à la poursuite du mieux, et ils l’ont atteint. Leur mérite nous a été plus sensible, plus visible, et par suite plus sympathique que ce génie indolent qui, sublime du premier coup, cesse de l’être en répétant la même note, fût ce une note immortelle, et qui doit arriver a un déclin rapide en passant par des éclipses prolongées. Ces inspirés de parti pris ont laissé tout faire en eux à la nature, sans rien faire par eux-mêmes. « Simples agents d’un maître invisible, » serions-nous tenté de dire devant eux. C’est la muse qui semble parler chez ces élus de l’inspiration pure ; chez leurs rivaux, j’entends le chant de la muse et de plus un accent personnel. Il me semble, d’une part, que c’est un écho qui m’arrive ; de l’autre, que c’est une voix plus distincte, plus nette, et qui s’est formée elle-même. Or, ce travail de formation nous est sympathique, à nous autres, hommes du XIXe siècle, car nous le retrouvons en nous-mêmes. Obligés de nous faire une croyance, des opinions, et de travailler sans cesse notre esprit en dehors de la tradition, nous aimons ces dieux nouveaux, ces dieux dont chaque triomphe a été un combat, chaque succès le prix d’une épreuve ; qui, vainqueurs des hydres et des centaures, martyrs de l’Œta, symbolisent nos combats sans fin avec les ignorances, les préjugés sans nombre, et font pressentir, sous la tunique de Nessus, la flamme intérieure qui nous consume. Nous tous qui vivons dans la lutte, faisons-nous des dieux qui soient des lutteurs comme nous.

Ce goût du jour, — je ne parle pas de l’entraînement de la foule, mais de la conviction des plus éclairés, — justifie à n’en pas douter la doctrine que j’ai soutenue contre vous. Vous allez chercher sur son piédestal un véritable Olympien, Rossini, incarnation de votre thèse, vivante théorie de l’Inspiration irréfléchie et semblable à la grâce. Ce génie de rossignol, cette vocation harmonieuse, ne sont pas à discuter. Rossini peut défier toute critique passagère, car il est immortel. Faut-il croire pourtant qu’avant lui n’aient existé que des dieux imparfaits, qu’après lui ne soient venus que de faux dieux ? Donner des maîtres à Rossini pour le plaisir de vous contredire, ce serait une pure injustice ; mais, sans trop se hasarder, on peut lui assigner des égaux… Or, parmi ces égaux, quelques-uns semblent plus que lui avoir pris possession de l’humanité. Vous jouez vraiment de malheur, cher maître ; au moment où vous proclamez en musique l’excellence de l’art spontané, de toutes parts on le délaisse. L’Allemagne est à Wagner, l’Italie à Verdi, l’Europe à Mcyerbeer. Quand revient-on à Rossini ? Par moments, et comme pour se donner une récréation délicieuse. Mais la grande attention, la sympathie tenace, l’émotion profonde, sont destinées, sont acquises à d’autres qu’à lui. C’est qu’ils ont eu plus de souci du public, plus d’inquiétude de leur œuvre, plus de respect pour l’idée qu’ils traduisaient ; c’est, en un mot, parce que, non contents de pouvoir, ilsontvo « /w.’

Cette préférence du public moderne n’est pas une ingratitude, tant qu’elle ne tourne pas à un inique dédain pour ce père des enchantements et des féeries. Vos aveux mêmes la justifient et la confirment. Comment vous-même jugez-vous les principales merveilles du maître ? Vous nous dites : « Les horreurs de Sémiramis sont à peu près aussi tragiques que l’aimable effroi qu’on éprouve lorsqu’on entre dans une belle église éclairée par un jour crépusculaire, tout odorante des parfums de l’encens et toute mélodieuse encore des prières des prêtres… On pourrait dire de Rossini que tous ses chants religieux ou tragiques ont quelque chose d’heureux et pourraient être transformés en sérénades. »

Sérénades ! ce mot dit tout. Il nous fait comprendre ce désaccord de l’inspiration capricieuse avec les exigences du sujet qui nous choque si souvent dans Rossini ! Chez Meyerbeer, au contraire, nous trouvons les sons dans une conformité incessante avec la situation, l’intelligence absolue des temps et des époques, une sorte de couleur locale obtenue à l’aide des notes, et non plus les.prestiges d’une fantaisie individuelle, mais les beautés sérieuses, solides, saisissables, d’une inspiration née dans la méditation et le recueillement.

J’aborde un point beaucoup plus délicat. Vous qui, l’un des premiers, le premier peut-être, avez prédit avec une sympathie prophétique le réveil de l’Italie, vous semblez regretter l’avénement de Verdi comme une déchéance du génie italien personnifié dans Rossini. Que Verdi soit l’égal de Rossini, je ne soutiendrai pas ce paradoxe contre vous Seulement, de cette vogue qui concourt à la gloire méritée de Verdi, de ce retour d’opinion qui fait disparaître des affiches de la Scala Sémiramis, pour y substituer le Trovatore, on peut tirer un enseignement. Pourquoi ce génie italien incarné dans Rossini a-t-il péri, devait-il périr ? C’est que ce génie, malgré ses charmes et ses grâces, était celui d’un peuple esclave, indolent, sensuel, oublieux, merveilleusement conforme aux exigences des conquérants. O musique enivrante, mais enivrante comme un poison, tu versais le Léthé à cette race asservie, tu lui prodiguais le népenthès ! L’Italie a répudié ce génie de far niante et d’insouciance. Qui l’en blâmera ? Sera-ce vous ? C’est une réaction excessive, mais légitime ; elle a pu confondre avec ses vieilles habitudes serviles le complaisant enchanteur qui les flattait, sans faire aucun appel généreux à l’âme engourdie de ses concitoyens.

Alors l’Italie s’est tournée du côté de Verdi, car dans Verdi elle avait reconnu l’incarnation artistique de son génie nouveau, génie qui doit être mâle, fier et libre, sous peine de rechute dans les hontes du passé. Assez longtemps, comme son Renaud et son Roger, l’Italie s’était assoupie dans les jardins d’Armide et dans le palais d’Alcine ; elle a rompu cet ensorcellement dont Rossini se rendait un peu complice ; elle a écouté ce Miserere où vibraient son désespoir et son espérance, et sur la route que Verdi leur enseignait, elle a été jusqu’à Marsala, jusqu’à Solférino !

Voilà ce qu’en musique a fait la Volonté. Étendronsnous ce parallèle aux autres arts ? En nous bornant à la poésie contemporaine, la double destinée de Lamartine et de Victor Hugo nous démontrerait le triomphe de cette volonté inspirée, qui, des Odes et Ballades, s’est élevée à la Légende des Siècles sur cette inspiration négligente et prolixe qui, dans des poëmes pleins d’harmonie et de grandeur, a multiplié les pages incorrectes, vagues et décidément illisibles.

Un aveu cependant. Nous ne pouvons nier que la prépondérance exclusive de la Volonté ferait courir d’aussi grands dangers à l’art, de plus grands peut-être, si la Volonté se passait de l’Inspiration ; le travail et l’effort, prenant le dessus, imprimeraient à l’œuvre artistique ou littéraire un caractère tourmenté et pénible. Il y aurait là un excès contre lequel, cher maître, vous avez peut-être voulu réagir. Si telle était votre intention, vous auriez mieux fait de l’énoncer clairement que de faire une campagne contre cette Volonté qui a produit de si grandes œuvres et complété de si grands hommes. Laissons les petits versificateurs qui transformeraient la poésie en langue hiéroglyphique, les peintres néo-grecs qui se remettent de tout sur l’archaïsme, les musiciens qui confisquent la mélodie au profit de l’harmonie, et tous ces partisans exagérés d’un art qui ne serait plus seulement réfléchi, mais calculé. Prenons un terme moyen. L’Inspiration pure peut être belle et surprenante comme la Grâce ; la Volonté réduite à elle même peut être belle et attachante comme l’Héroïsme.

Mais ce qui est plus beau, sans contredit, c’est l’union de l’Inspiration et de la Volonté, ces deux sœurs dont vous faites des rivales, et qui plus d’une fois se sont alliées pour donner à l’art ceux que nous appelons des dieux. Un Raphaël, un Shakespeare, un Racine, un Mozart, voilà les représentants de cette éternelle alliance ! Votre goût était digne de la sanctionner, en rendant justice à l’efficacité de la réflexion, à l’intensité de l’effort, par lesquels Mozart, Racine, Shakespeare et Raphaël ont vraiment divinisé une nature déjà surhumaine. Quoi de plus sublime que les scrupules de ces consciences d’artistes ? Vous admirez le génie qui s’ignore ; laissez-moi préférer le génie qui se connaît, en se défiant pourtant de lui-même ; laissezmoi mettre au-dessus de la sécurité littéraire et artistique ce que Platon, que vous ne vous attendiez pas à voir de mon parti, appelle avec enthousiasme Yinquiète poursuite de la Beauté !

  1. En réponse a l’article publié par M. É. Montégut, dans le Moniteur sous ce titre : Du Génie de Rossini.