Les filles de Loth et autres poèmes érotiques/40
LA GRISETTE ET L’ÉTUDIANT
L’ÉTUDIANT.
LA GRISETTE.
LA VOIX DE M. PRUDHOMME.
entre 1830 et 1840.)
« …Mardi, à midi, je serai chez toi, plutôt avant qu’après. Aime-moi toujours comme je t’aime. Sois bien sage et bien raisonnable, mais pas trop cochon. Si nous voulons, nous ferons des bêtises. » (Parlé.) Onze heures dix… Elle ne viendra pas. (Relisant.) « …Mardi, à midi… » (Parlé.) Elle n’est pas en retard… Mettons sa chaise… Onze heures et demie ! (Relisant.) « …Je serai chez toi plutôt avant qu’après… » (Parlé.) Onze heures trois quarts !… (On entend toc, toc, à la porte.) Qui est là ?…
Moi !
Qui çà, vous ?
Moi ! !…
Bonjour, mon chien. Comment ça va ?… Dieu, que c’est haut ! Je suis essoufflée… Et ta portière qui me demande toujours où je vais, comprends-tu ça ?… Elle me fait répéter pour me faire endêver… aussi, je l’abomine, cette vieille bosco-là ! M’embrasses-tu ?… Laisse-moi ôter mon chapeau.
Donne-le-moi, mon ange.
Tiens… M’aimes-tu, tit chat ?… Viens m’embrasser.
Oui…
Nous serons bien sages, par exemple !
Oui…
Ah ! pas comme ça, tit chat, pas comme ça… Ah ! t’es cochon !… Pas la langue, non, t’en prie, pas la langue… Devine ce que j’ai sous mon châle ?
Des bretelles brodées par toi !…
Non… Dans un pot ?…
Des bretelles… dans un pot ! ! !…
T’es bête ! Dans un pot… c’est du raisiné que maman m’a envoyé, pour mon hiver… Tu l’aimes, le raisiné, n’est-ce pas, gros minet ? Nous le mangerons.
Oui…
Tiens ! où est donc la pendule ?…
Chez l’horloger.
Et le verre aussi, n’est-ce pas ? Elle est chez ma tante !
J’en ai peur…
Ah ! oui, je sais… C’est pour l’autre jour, avec ta Mme Machin, que vous avez été à Meudon, me faire des queues… (Avec élan.) J’avais justement de l’argent, vingt-cinq francs !… Je te les aurais prêtés !…
T’es bête, va !…
Baisez-moi vite, mauvais sujet… Baisez-moi !… (Il lui fait une langue prolongée.) Non… pas comme ça. mon chien, pas comme ça… t’en prie !… Recommencez… Pas de bêtises, tit chat, t’en prie !… (Il lui pince amoureusement le cul.) Je ne veux pas… non… travaille ! (Il lui patine la poitrine.) Non… laisse-moi… te dis… Je viens ici pour que tu travailles… Je vais me mettre à côté de toi… (Elle saute sur une chaise voisine.) C’est ça… sois bien gentil ! Y a-t-il longtemps que je t’ai vu !… Baisez-moi, vilain méchant… baisez-moi mieux que çà… Dis donc, a-t-elle autant de gorge que moi, ta madame ?…
Hou !… Hou !…
Je suis sûre qu’elle ne se tient pas comme la mienne… C’est que tu n’en trouveras pas comme çà tous les deux jours, sais-tu, tit chat, non !… Elle est mieux mise… ta dédame, mais elle n’a pas mon corps… Tiens, vois mes nénets comme ils sont engraissés. (Elle les met à la fenêtre de son corsage.) Les aimes-tu, mes pommes ? (Il les branle du doigt et de la langue.) Oh ! non, n’y touchez pas, monsieur !… Je veux les conserver longtemps… non, t’en prie… ah !… non… tit chat… non… Travaille… ah !… cochon !…
Mais je travaille aussi.
Pas ce travail-là… Je veux que tu sois raisonnable… (Il lui écarte les cuisses.) Eh bien !… Eh bien ! où vas-tu comme çà ?… Qu’est-ce que tu fourrages là-dedans ?… Ah ! comme t’es cochon ! comme t’es cochon !… Je ne veux pas, non, je te connais… quand tu l’as fait, tu me renvoyes… Non… t’en prie !… Non… te dis… tit chat… Non !… non !… pas comme çà… ça me tire l’estomac. (Il la branle.) Laisse mon bouton… mon tit bouton… Bien !… ah !… oui !… (D’une voix languissante.) Travaille…
Je travaillerai après…
Non… tit chat… Sais bien ce que ça t’a fait l’autre fois… Non… oh ! non !… Faut donc toujours vous céder ?… Oui… tu veux le faire… Ah !…
Oui…
Sur le lit, mon chien… sur le lit… On est mieux pour faire çà… (Il la porte sur le lit et commence l’assaut avec une certaine furie.) Attends… attends donc que je relève ma robe dessous… Tu veux donc tout me déchirer !… Tiens… me voilà… Va… Pas comme ça, donc ! tu vas chez le voisin… Laisse-moi te conduire… Na !… Attends mon petit homme… Oh !… attends !… Faisons-le longtemps, bien longtemps ; n’est-ce pas, tit chien ?… Tu y es… Me sens-tu ?…
Oui…
(Jouissant et ne pouvant retenir ses soupirs de bonheur, qui ressemblent au cri du geindre.)
Han !… han !… han !… Que c’est bon !… Je jouis… Va !… Han !… Ah ! que c’est bon !…
Cher ange !… Je t’aime !…
Tu… m’ai…meras… tou… toujours ?…
Oui !…
Va !… va !… va !… petit homme… Pas tout de suite… Pas encore… Ah ! cela vient !… Tu me mouilles… Ah ! comme je jouis, mon Dieu, comme je jouis !… Ça me va dans la plante des cheveux… Ah ! oui !… tue-moi ! Ah ! tue-moi !… ah ! tue-moi !…
Pas d’assassinat dans la maison, s’il vous plaît !… Eh ! là-bas, avez-vous bientôt fini vos turpitudes ?
Qu’est-ce qu’est donc là, à côté ?
Vous allez me porter à de regrettables attentats sur ma personne…
Qu’est-ce qu’est donc là, à côté ?
Une vieille bête !…
Nous le faisions si bien !… Je voudrais recommencer !… Et toi… tit chat ?…
Moi aussi…
Pas comme çà ! Polyte, mon Lilyte, ôte ta main, ôte ta main… Non ! Veux pas… ôte ta main… t’en prie !
Hippolyte, ôtez donc votre main !
Vous n’allez pas nous foutre la paix, vous ?
Très bien, monsieur… Vous me faites sortir de mon lit. J’abandonne la place… Je vais achever ma sieste dans une chambre voisine, pendant que vous achèverez vos impudicités dans la vôtre…
Enfin, il est parti, cet imbécile… Qu’est-ce que nous disions déjà ?
Nous disions, tit chat, que nous faisions des bêtises… Je voudrais bien vous embrasser… Donnez-moi votre petit bécot… (Lui pelotant les couilles et lui chatouillant la pine.) Je veux voir si vous êtes en bon état. (S’apercevant qu’il bande.) Oui, vous êtes en état, cochon !… (Avec admiration et voulant profiter de l’occasion.) Il est plus fort qu’il n’était tout à l’heure… Et dur ! on dirait du fer !… Comment une si grosse affaire ne vous crève pas le ventre quand elle entre ?… (Elle s’en empare avidement et se l’introduit.) Attends, mon chien, attends… Ça y est bien, à présent… Va !… ah ! maman… ah !… maman !… maman !…
Ah ! cher ange !… cher ange !…
Oh ! va, va !… Mais va donc !… Pousse, tit homme !… pousse !… mais pousse donc !… Ah ! comme je te sens bien !… Ah ! maman, maman ! que c’est bon !… Comme tu fais bien ça, mon chéri !… As-tu autant de bonheur que moi ?… Parle-moi, t’en prie… Ah ! que c’est bon !… Dis que tu m’aimes bien !… Mais, là, bien !…
Oui…
Dis-le toi-même !…
Je t’aime bien.
Donne-moi ta langue… ta chère bonne petite languette… (Impérieusement.) Ta langue ! Ta langue ! Ah ! mon minet !… ah !… ah !… ah !…
Ma poulette !…
Ta poulette, oui… Ta petite poule chérie… Ta… ta… poule… chérie…
Oui…
Sens-tu comme je te serre ?… Va au fond !… bien au fond… Pousse, mon petit homme, pousse… Tu me diras quand ça viendra…
Oui…
Pas sans moi ! pas sans moi !… Ensemble !… jouis… jouissons… ensemble… bien… Ensemble !… Oh !… maman !… maman !… maman !… que c’est bon !… Tue-moi !… tue-moi !… tue-moi !… Oui… oh !…
Tiens, prends le tout dans ton cul ! !…
Ah !… ah !… ah !… j’ai bien joui !… oui !… Et toi, tit chat ?… Et toi ?…
Moi aussi…
Ah ! tu te retires !… Pourquoi ne l’as-tu pas laissée dans mon cul ?… Je ne l’aurais pas mangée, va !… Reste encore comme avant… là… ventre contre ventre… Déjà fini ! Ah ! c’est bête !… Ça devrait durer toute la vie… (Silence… Les deux amants, toujours entrelacés, se becquètent tendrement encore, mais sans jouer des reins. La grisette serre avec énergie l’étudiant contre sa poitrine, en soupirant et en tressaillant sous les derniers frissons de la jouissance. Pour un peu, elle recommencerait. Déjà, même, sa main se faufilant sous les couilles de son amant, s’apprête à les chatouiller et à réveiller en elle le sperme qui dort ; mais l’étudiant, qui n’a que deux coups à son arc, se soustrait brusquement à cette invitation, en sautant à bas du lit.)
Est-ce que je ne t’ai pas dit que j’avais à sortir ?
Non… Vois comme tu es cochon… Quand tu l’as fait, tu me renvoies !… C’est toujours la même chanson.
Puisque j’ai à sortir.
Hi ! hi ! hi !… Hi ! hi !…
Ah ! si tu pleures, nous allons joliment nous amuser.
Moi qui comptais tant que nous sortirions ensemble !… hi !… hi !… hi !…
Puisque je te dis que j’ai une commission pour ma mère !
Elle vient donc d’arriver, ta mère ?
Je ne te l’ai pas dit ?
Tu me l’as dit la dernière fois !… Ah ! je suis pas heureuse ! moi ! non !… j’ai pas de chance… C’est comme la robe que tu m’avais promise…
Tu l’auras !…
Quand ?… La semaine des quatre jeudis, n’est-ce pas ?
Tiens, la voilà, ta robe ! (Il lui jette avec colère une pièce de vingt francs.)
C’est pas comme cela que je la voulais… C’est pas comme ça !… oh ! mon Dieu !… mon Dieu !… (Elle sanglote et se pâme.)
Eh bien ! quoi ! tu vas te trouver mal, à présent !… Fanny !… Fanny !… Pauvre chatte chérie… Réponds-moi ! Fanny… Fanny !… Je t’en prie !… (Il la prend dans
ses bras et la caresse tendrement.) Tu pleures !… Fi ! que c’est vilain !… Voulez-vous bien vite essuyer ces vilaines larmes !…
Non ! je pleure plus !… je ris ! tiens !… Et toi aussi, t’as pleuré. Baise-moi et sois plus méchant, tit chat !… T’en veux plus, mais plus du tout !…