Les principaux monuments funéraires/Decrés

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DECRÈS.




Decrès (Denis, duc), vice-amiral de France, grand-cordon de la Légion-d’Honneur, ministre de la marine sous l’Empire, naquit à Chaumont (Haute-Marne), le 22 juin 1761.

Son goût passionné pour le service de mer, et les exemples de la famille distinguée à laquelle il appartenait, le firent entrer à dix-huit ans dans cette périlleuse carrière où il ne tarda pas à se faire remarquer.

Dans la malheureuse bataille que la flotte du comte de Grasse livra, le 12 avril 1782, dans la mer des Antilles, plusieurs de nos vaisseaux étaient déjà au pouvoir de l’ennemi, d’autres étaient désemparés ; l’un de ceux-ci allait être capturé, lorsqu’un garde-marine osa se jeter dans un canot, et, sous le feu de toute la flotte anglaise, alla porter à ce vaisseau (nommé le Glorieux) un câble, à l’aide duquel une frégate le prit à la remorque et le sauva. Ce garde-marine était le jeune Decrès : cette action héroïque lui valut un avancement rapide.

En 1786, il devint lieutenant de vaisseau, et servit dans l’Inde, au commencement de la révolution, en qualité de major d’une division navale.

De retour en France à l’époque de 1793, il fut immédiatement arrêté, puis relâché et fugitif ; il erra pendant trois ans, jusqu’au moment où l’appareil d’une expédition à jamais illustre lui offrit l’occasion de s’associer aux conquérans de l’Égypte. Il commandait, comme contre-amiral, l’escadre d’observation au combat d’Aboukir.

Quelque temps après, Decrès, entré à Malte, coopéra avec son escadre, pendant dix-sept mois, à la défense de cette place, et se détermina à en sortir pour ne pas épuiser les ressources d’une vaillante garnison.

Il appareilla sur le Guillaume-Tell à la vue de l’ennemi, et, déjà canonné, bombardé, désemparé avant d’avoir quitté le port, il se précipita au milieu de l’escadre anglaise : cependant, entouré et foudroyé de toutes parts, il fut pris ou plutôt sauvé par les Anglais, après avoir sauté sur la dunette de son vaisseau. Cette action de vigueur, à laquelle l’ennemi rendit hommage, reçut la récompense qui était, à cette époque, l’ambition des braves : Decrès fut décoré d’un sabre d’honneur.

À son retour en France par suite d’échange, il fut nommé préfet maritime à Lorient, et, peu de temps après, le 1er octobre 1802, il reçut le portefeuille de la marine.

Les honneurs vinrent en foule s’accumuler sur la tête du nouveau ministre : en 1804, il fut nommé grand-officier de la Légion-d’Honneur, chef de la 10e cohorte ; en 1805, inspecteur général des côtes de la Méditerranée, fonction du premier ordre. Il fut en outre décoré du grand-cordon de la Légion-d’Honneur, en 1806. On ne sait par quelle bizarre négligence de la fortune, Decrès ne fut créé duc qu’en 1813.

Decrès était doué d’un esprit fin, éclairé, fertile en à-propos, en saillies, et appuyé sur des connaissances solides.

Un événement, dont il n’a pas été possible de découvrir le mystère, a terminé misérablement la vie du duc Decrès : trois paquets de poudre introduits entre les matelas de son lit, auxquels communiquait une mèche qui s’étendait à l’extérieur de sa chambre à coucher, firent explosion pendant la nuit, et lui causèrent plusieurs blessures auxquelles il succomba le 7 décembre 1821.

Il a été inhumé au cimetière du Père-Lachaise.

Le monument du duc Decrès, quoique construit tout en pierre, est remarquable par son élévation et la sculpture dont il est richement orné. Il se compose d’un soubassement sur lequel s’élève un stylobate flanqué de quatre pilastres, surmonté d’un cénotaphe décoré de guirlandes de laurier supportées aux angles par des figures allégoriques. Sur la façade, le sabre d’honneur et les armes du duc sont sculptés en relief. Au-dessous on lit cette inscription :

Dis duc DECRÈS,
Gd croix d. l. lég.-d’honneur,
ancien ministre de la marine.
décédé le vii décembre
m.dccc.xxi.

Sur la partie latérale de droite est un vaisseau sculpté en bas-relief, au-dessous duquel on lit :

remorque portee au glorieux,
combat du xii avril m.dcc.lxxxii.

Sur la partie latérale de gauche est sculpté un autre vaisseau, avec cette inscription au-dessous :

combat du guillaume tell
devant malte, le xxx mars m.dccc

Ce beau monument a été construit sur les dessins de M. Visconti, architecte.