Les veillées d’un fouteur/17
LE VIEUX RENTIER,
Te souviens-tu, disait à sa servante,
Un vieux rentier jadis grand libertin,
Comme autrefois ma mie était piquante,
Mon jarret ferme et mon regard malin,
De la beauté séducteur intrépide,
Je courtisais le maigre et le dodu,
Et sur l’article, oh ! que j’étais solide,
Dis-moi Marton ! dis moi t’en souviens-tu !
Alors aussi ta mine était drolette,
Tes tétons fermes et ton teint satiné,
Ton cul surtout en forme rondelette,
Par les amours paraissait dessiné,
Plus d’une fois ma main dessous ta cotte
Tandis que l’autre écartait ton fichu,
Je caraissais, je brandouillais ta motte,
Dis-moi, Marton ! dis-moi, t’en souviens-tu.
Branlant alors, d’une ardeur libertine
Partout j’aimais à te prouver mes feux,
Et le grenier, la cave, la cuisine,
Furent les témoins de nos ébats joyeux,
Comme fouteuse et bonne cuisinière,
Tu savais bien, sans en perdre un fétu,
Tourner la sauce et tourner le derrière ;
Dis-moi, Marton, dis-moi, t’en souviens-tu.
Soit sur le dos, soit à la paresseuse,
Je t’enfilais le matin et le soir,
Sur mes genoux, de ma flamme amoureuse,
En tricottant lu sentais l’arrosoir,
Quand devant moi, tu levais la croupière
Pour enfiler un beau pigeon pattu
Au même instant je t’enfilais, ma chère ;
Dis-moi ; Marton, Dis-moi t’en souviens-tu !
Quand tu venais de frotter ma chambrette,
Moi, je frottais tout tes appas secrets ;
Savonnais-tu ta fine collerette,
Pour t’imiter, moi, je te repassais.
Quand tu venais d’épouster ma culotte,
Tu te sentais trousser à l’impromptu,
Pour mieux pouvoir te caresser la motte,
Dis-moi, Marton, dis-moi t’en souviens-tu !
Ce temps heureux, plaisir que l’on adore,
Vous avez fui : je ne peux plus baiser
En vain ta main veut m’enflammer encore,
Mon pauvre enfant il faut y renoncer,
De rajeunir vainement on se flate,
Et malgré tout l’elixir que j’ai bu,
Lorsque je veux t’enfiler, je le ratte,
Hélas, Marton ! pourquoi t’en souviens-tu.