Les vies des plus excellents peintres, sculpteurs, et architectes/Notes du Traducteur

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Traduction par Weiss, Charles (18...-19...; commandant).
DORBON-AINÉ (1, ).

L’ouvrage de Vasari est la source à laquelle il faut nécessairement recourir, quand on étudie la Renaissance italienne et ses origines. — Violemment attaqué dès le xvie siècle, entre autres par Condivi, auquel Vasari répondit (voir la Vie de Michel-Ange) et par Federigo Zucchero[1], il renferme incontestablement bien des erreurs de dates et de faits, bien des récits fantaisistes. Mais comme l’a dit Eugène Müntz, malgré tous ces défauts, Vasari passe à bon droit non seulement pour l’historien par excellence de l’art italien, mais encore pour le créateur de l’Histoire de L’Art[2].

Éditions successives :

Publiées par Vasari : A, en mars 1551 chez Lorenzo Torrentino à Florence ; — B, en janvier 1568, chez les Giunti., à Florence, toutes deux avec une dédicace à Cosme Ier duc de Florence.

Éditions suivantes : xviie siècle  : Bologne 1648.

xviiie siècle : édition corrigée et annotée par Mgr Giovanni Bottari, trois volumes in-4o, Rome 1759 — Éditions P Della Valle, Sienne, 1790-1794, Il volumes in-8 .

xixe siècle : édition Lemonnier, Florence, 1846-1847, treize volumes, notes Pini, Carlo et Gaetano Milanesi, P. Marchese et Selvatico. — Édition Sansoni, annotée par Gaetano Milanesi, Florence, 1878-1885, neuf volumes, comprenant toutes les annotations précédentes. — Édition Salani, Florence, sans date, très abrégée.

La présente traduction a été faite sur l’édition Sansoni, en se servant de la traduction antérieure de Leclanché (Paris 1839-1842), qui a été entièrement refondue. Les notes très succinctes qui l’accompagnent sont tirées de l’édition Sansoni, des livres de Milanesi, Perkins, Müntz, de Crowe et Cavalcaselle, du Cicerone de Burckhardt, et des ouvrages récents de MM. Bode, Supino, Ridolfi, Corrado Ricci, Marcel Reymond et autres.

L’Introduction aux Trois Arts du Dessin, les proemii ou discours préliminaires sont traduits pour la première fois ; les Vies principales sont données in extenso. Toutefois, et pour alléger cet ouvrage, quand il s’agit d’œuvres qui n’existent plus, leur description, quelquefois très longue dans le texte a été supprimée dans la traduction, mais la mention faite par Vasari a été soigneusement conservée. N’ont pas été traduites les Vies des artistes de second ordre ou de moindre notoriété. Pour se rendre compte de ce travail d’élagage, il est nécessaire de parcourir la liste de ces Vies placée avant la Table des matières. On verra que, si la première et la deuxième parties sont presque complètes (c’est-à-dire celles relatives aux artistes des xiiie, xive et XIXe siècles, il n’en est pas de même des contemporains et des successeurs de Raphaël et de Michel-Ange. La critique actuelle est sévère pour ces artistes, et l’on considère généralement la date du sac de Rome, en 1527, comme le début de la décadence des arts en Italie[3].

Pour bien comprendre certaines particularités de l’histoire artistique de Florence, entre autres tout ce qui concerne la décoration extérieure d’Or San Michele, il faut savoir comment la ville et le peuple étaient divisés. Varchi, dans la Storia fiorentina, livre III, chap. XX, nous donne d’intéressants détails à ce sujet.

Florence était divisée en quatre quartiers, et chaque quartier en quatre gonfalons désignés suivant les animaux ou les objets peints sur leurs enseignes. Voici leurs noms en italien et en français :

Quartier de Santo Spirito ou d’Oltr’Arno :

La Scala,

Il Nicchio,

La Sferza,

Il Drago,

L’Échelle.

La Coquille.

Le Fouet.

La Chimère.

Quartier de Santa Croce :

Il Carro,

Il Bue,

Il Lion d'Oro,

Le Ruote,

Le Char.

Le Bœuf.

Le Lion d’Or.

Les Roues.


Quartier de Santa Maria Novella : :

La Vipera,

L’Unicorno,

Il Lion rosso,

Il Lion bianco,

La Vipère.

La Licorne.

Le Lion rouge.

Le Lion blanc.

Quartier de San Giovanni :

Il Lion nero,

Il Drago,

Le Chiavi,

Il Vaio,

Le Lion noir.

Le Dragon.

Les Clefs.

Le Petit Gris.

Quant au peuple, il était divisé en sept Arts majeurs el quatorze Arts mineurs, savoir :


Arts majeurs :

1 Giudici e Notai,,

2 Mercatanti[4],

3 Cambio,

4 Lana,

5 Seta[5],

6 Medici e Speziali[6],

7 Viaia,

Juges et Notaires.

Marchands drapiers.

Banquiers.

La Laine.

La Soie.

Médecins et Pharmaciens.

Fourreurs.


Arts mineurs :

1 Beccai,

2 Calzolai,

3 Fabbri,

4 Rigattieri e Linaiuoli,

5 Maestri [muratori] e Scarpellini,

Bouchers.

Cordonniers.

Forgerons.

Fripiers et Marchands de lin.

Maçons et Tailleurs de pierre.

6 Vinattieri,

7 Albergatori,

8 Oliandoli e Pizzicagnoli e Funaiuoli,

9 Calzaiuoli,

10 Corazzai,

11 Chiavaiuoli,

12 Careggiai,

13 Legnaiuoli,

14 Fornai,

Marchands de vin.

Hôteliers.

Vendeurs d’huile, Charcutiers et Cordiers.

Bonnetiers.

Fabricants de cuirasses.

Serruriers.

Bourreliers.

Menuisiers.

Boulangers.

Tout citoyen florentin, qu’il exerçât ou non une profession, devait choisir un Art dans lequel il se faisait inscrire : c’est ainsi que Dante Alighieri, pour être apte à remplir des charges publiques, se fit inscrire dans l’Art des Médecins et Pharmaciens.

La forme du gouvernement varia trop souvent pour qu’il soit possible d’en donner ici une notion succincte. Qu’il suffise de savoir qu’avant la chute de la République, la plus haute magistrature était la Seigneurie, composée des Prieurs des Arts et de la Liberté, en nombre variable, à l’origine six Prieurs, plus le Gonfalonier de justice, tous représentants des Arts majeurs et élus pour deux mois. Le" Podestat, "ou chef suprême de la justice, créé en 1207, était généralement un étranger [7].

Toutes les dates portées dans ce livre sont comptées en style ordinaire, ou romain, l’année commençant au premier janvier ; mais ce n’était pas l’usage en Toscane, où l’année en style pisan commençait le 25 mars. Il faut donc généralement majorer d’un an les dates données par les textes de l’époque.

En italien, le mot da, placé entre deux noms propres, indique la patrie ; Lionardo da Vinci (né à Vinci), tandis que le mot di indique la filiation : Giovanni di Pietro, Jean fils de Pierre. Les Italiens se désignaient généralement entre eux par le nom du père et celui du grand-père ; Andrea di Pietro di Giovanni, André fils de Pierre, petit-fils de Jean.

Vasari indique toujours expressément si une peinture est faite sur bois (tavola, quadro), ou bien sur toile (tela), ou encore à fresque. Dans les notes de ce volume, la mention « peinture détruite » s’applique toujours à ce dernier genre ; « peinture disparue ou perdue » à un tableau portatif. Ceux-ci étaient généralement peints sur bois : on n’a donc indiqué la matière employée, que lorsqu’il s’agit d’une peinture sur toile.

Il n’est pas facile de se rendre compte de la valeur de l’argent du XIIe au XVIe siècles. Toutes proportions gardées avec l’époque actuelle, on peut assigner au florin, sequin ou ducat d’or une valeur d’environ cinquante francs. À Florence, le florin d’or valait 6 livres 6 deniers, le florin di suggello 4 livres.

Enfin, comme l’impôt sur le revenu existait, les citoyens florentins étaient tenus de déclarer la valeur de leurs biens à époque fixe (déclaration au Catasto, avec leur âge, le nom et l’âge de leurs enfants. Il devrait donc en résulter que les renseignements donnés par les déclarations sont exacts, particulièrement en ce qui concerne les dates de naissance. Mais les chiffres varient d’une déclaration à l’autre, en sorte que, le plus souvent il a fallu prendre des moyennes. Voir à ce sujet les livres de Milanesi, de Gaye ( Carteggio), etc.

Le plan de Florence, qui se trouve dans ce volume, est reproduit d’après une gravure unique du Cabinet des Estampes de Berlin, et dont un fac-similé nous a été gracieusement envoyé par M. Lehrs, directeur de ce cabinet. Il doit dater de la fin du XVe siècle, si l’on en juge par l’aspect de la coupole et la vue du palais Pitti, dont la construction ne fut commencée que vers 1440.

  1. La Bibliothèque Nationale de Paris possède un exemplaire de Vasari, dans lequel la Vie de Taddeo Zucchero porte, en marge, des notes manuscrites et virulentes de la main de Federigo Zucchero.
  2. Voir l’Histoire de l’Art pendant la Renaissance, tome III, p. 178-183 (Hachette), qui renferme un jugement complet sur l’auteur et sur son œuvre.
  3. Exception faite pour l’école vénitienne — Sur un total de 826 pages (édition française), le Cicerone ne consacre que 55 pages à l’histoire de la peinture depuis cette époque jusqu’à la fin du XVIIIe siècle.
  4. Appelé communément l’Arte di Calimala.
  5. Appelé communément l’Arte di Porta Santa Maria.
  6. Dans lequel s’inscrivaient les peintres.
  7. Comme dans la plupart des petites républiques d’Italie.