Lettres à la princesse/Lettre036

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Lettres à la princesse, Texte établi par Jules TroubatMichel Lévy frères, éditeurs (p. 46-47).

XXXVI


Ce 19 mars.

J’écoute et ne dirai rien, Princesse ; hier l’indignation vous a donné d’éloquentes paroles, pardonnez ce témoignage tout littéraire à travers une passion qui chez vous est si vraie.

Hélas ! l’expérience et l’étude nous ont forcé à admettre bien des combinaisons qui ne sont pas toujours telles qu’on le souhaite et qu’on le rêve. Mirabeau n’était pas une vierge ; était-il un honnête homme dans le sens le plus général et le plus extensible du mot ? On n’oserait le soutenir. Et cependant l’intelligence et le talent ont éclaté dans sa personne.

Croyez, Princesse, que tout ce que vous voudrez bien laisser déborder de mon côté sera reçu et compris comme il doit l’être.

Vous voulez bien me demander de mes nouvelles ; je me sens un peu en train de me détraquer. Je vais y pourvoir en me ménageant. — J’ai écrit tout à l’heure à M. Taine pour le prévenir de votre flatteuse attention et de votre invitation pour mercredi.

Agréez, Princesse, l’expression de mon profond et respectueux attachement.


Mignet a été des plus sensibles à votre souvenir : il a retrouvé à l’instant le charmant sourire de ses belles années et tout son visage s’est éclairé d’amabilité et de bienveillance.