Lettres à la princesse/Lettre219

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Lettres à la princesse, Texte établi par Jules TroubatMichel Lévy frères, éditeurs (p. 300-301).

CCXLX

Ce 8 septembre.
Princesse,

J’ai lu ces charmants vers, où respire le parfum et comme la bouffée du printemps de la vie. La sève découle du jeune arbre en fleurs. — Il y a un vif sentiment d’harmonie. Il n’y a plus qu’à appliquer à quelque sujet cette jeune poésie encore errante. Ces sujets se rencontreront bien d’eux-mêmes. Je complimente l’aimable jeune homme dont le talent prend des ailes.

Je suis charmé de la réponse du chevalier de G… Oh ! si dans tout ce que nous désirons il nous en arrivait seulement la moitié, que nous aurions de grâces à rendre ! Je vois quelquefois ce bon M. Giraud, à qui il n’arrive rien et qui me semble avoir repris toute sa vivacité sociale et son entrain affectueux.

L’histoire vaut mieux que le roman, même pour l’amusement. Nous disions cela l’autre jour avec M. Benedetti. Il y a un livre assez curieux à lire et à avoir : Maurice, comte de Saxe[1], par le comte Vitzthum d’Eckstaedt ; cela se trouve chez le libraire Klincksieck, rue de Lille, 11. C’est en français et d’une lecture très-agréable, en même temps que neuf. On y a les lettres mêmes du maréchal de Saxe, sauf l’orthographe.

À force de vivre tranquille et sur place, j’ai la pensée bien stagnante ; je réfléchis, mais je n’ai pas de moi-même le mouvement. Je m’accoutume à cet état mélancolique et philosophique. Quand je me retrouve cependant en votre présence, Princesse, je m’aperçois que je voudrais mieux rendre.

Je mets à vos pieds l’hommage de mon tendre et inviolable attachement.

  1. M. Sainte-Beuve a publié une étude sur cet ouvrage (Nouveaux Lundis, tome XI).