Lettres à la princesse/Lettre261

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Lettres à la princesse, Texte établi par Jules TroubatMichel Lévy frères, éditeurs (p. 363-364).

CCLXI

Ce 22 septembre 1868.
Chère Princesse,

L’heureuse visite m’avait remonté pour un temps, mais peu à peu je suis revenu à mon niveau et à cette disposition habituelle qui est peu variée et sans mouvement. Il est inconcevable comme l’idée et la certitude qu’on ne fera plus jamais certaines choses, certains voyages, certaines promenades, des choses même qu’on n’eût peut-être jamais faites, vous calme au fond jusqu’au point de vous glacer et de produire une mortification profonde dans toutes les joies de l’esprit, qui ne sont le plus souvent que des désirs. Mais je ne viens pas prêcher sur ce ton d’ennui. M. Giraud m’a rapporté des échos de Saint-Gratien, il est amoureux de la statuette. — M. Benedetti doit en savoir un peu plus long qu’un autre sur ces bruits de guerre qui finissent par devenir harcelants : je serais étonné qu’il fût d’avis de la faire. — Je rumine comme les solitaires. — Le sort de Dalloz se décide après-demain, le mien aussi en quelque sorte et en tant que passager.

Une pétition a été adressée à Son Altesse de la part d’une Mme Krohm. On m’a demandé de vous assurer, Princesse, qu’elle est très-digne d’intérêt personnellement ; et le roi Jérôme avait honoré son père, le capitaine de vaisseau Krohm, d’une marque d’estime particulière.

J’ai (ceci bien bas) mes petits ennuis domestiques qui tirent à leur fin, mais qui jusqu’au terme ne laissent pas de me donner souci et inquiétude.

Je voudrais bien que rien ne changeât au dedans, car cet humble intérieur, ainsi arrangé, me donnait les moyens de recevoir, — de ne pas traiter trop indignement d’illustres et bien chers visiteurs et hôtes.

Je mets à vos pieds, Princesse, l’hommage de mon tendre et respectueux attachement.