Lettres à la princesse/Lettre263
CCLXIII
Quinze jours se sont écoulés[1].
J’ai beau chercher et m’interroger, je ne puis découvrir que j’aie eu aucun tort personnel envers Votre Altesse.
Vous m’aviez accoutumé, Princesse, à une amitié toute différente, — si différente, que je n’ai pu considérer l’entrevue de lundi que comme un accident extraordinaire, quelque chose qui n’était pas de vous, mais d’un autre.
Pour moi, j’ai mis le signet après la visite du dimanche. Le livre se ferme pour moi ce jour-là à cinq heures et demie du soir : se rouvrira-t-il jamais un jour ?
Je sais ce que je dois à tant de bontés, à tant de souvenirs, à tant d’avances d’amitié dont les témoignages m’environnent et ne cesseront de m’entourer. L’étonnement dont j’ai été saisi lundi et dont j’ai eu peine à revenir passera. Tout ce qui a précédé vit et vivra. En ceci du moins je garderai la foi qui me manque si souvent ailleurs : même lorsque je ne pourrai plus espérer, j’attendrai encore, et une voix du dedans murmurera tout au fond de moi : Non, ce n’est pas possible !
— Je mets à vos pieds, Princesse, l’hommage de mon respectueux et invariable attachement.
- ↑ Lettre à la Princesse après sa visite au sujet de mon entrée au Temps. (Note de M. Sainte-Beuve sur la minute de cette lettre.)