Lettres patentes pour le privilège de la compagnie Dagincourt, 23 octobre 1702

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LETTRES PATENTES portant Privilege excluſif de la Manufacture Royale des Glaces en faveur d Antoine Dagincourt, du 23, Octobre 1502.

Louis, par la grace de Dieu Roy de France et de Navarre, A tous ceux qui ces presentes Lettres verront, Salut.

Les avantages que les Etablissemens de la Manufacture des Glaces à miroirs ont produit dans notre Royaume sont si considérables, soit par l’argent comptant qui y reste et qui en sortoit auparavant pour y faire entrer des Glaces des Pais Estrangers, soit par le bon marché des Glaces dont l’abondance sert d’ornement dans nos Palais et dans les principales Maisons de nos Sujets, soit par le débit et commerce qui s’en fait hors du Royaume et par la subsistance que ces Etablissemens ont procuré à un grand nombre de personnes qui y sont employés, que Nous avons trouvé dignes de connnoissance des progrez de cette Manufacture et de la beauté de ses ouvrages qui ont surpassé toutes les esperances que Nous avions pû en attendre ; mais comme toutes les grandes entreprises ne subsistent que difficilement par les changemens qui arrivent dans les Compagnies qui les ont commencées, quoy que nous eussions réuny les deux Manufactures en une seule sous le nom de François Plastrier par nos Lettres Patentes du premier May mil six cent quatre-vingt quinze, avec exclusion à qui que ce soit de fabriquer des Glaces ny d’en faire entre dans nôtre Royaume, et que Nous luy eussions attribué plusieurs Privileges et exemptions, Nous avons neanmoins esté pleinement informés que les Interessez en cette Manufacture ne pouvoient en continuer les travaux ordinaires à causes des emprunts qu’ils ont faits dans le public, et que nonobstant la surceance que leur avoins accordée pour satisfaire leurs Creanciers, ils avoient éteint les fournaux de leur fabriques de S. Gobin et de Tourlaville, et congédié la plus grande partie de leurs Ouvriers, qui venant à sortir de notre Royaume eussent favorisé de pareils Etablissemens dans les Païs Estangers, et en ruinant cette Manufacture de France mis les Interessez hors d’estat de payer ce qu’ils doivent, d’autant plus que Nous aurions mesme recû plusieurs plaintes du préjudice que la surceance que Nous leur avions accordée apportoit au Commerce et dans les Bureaux de nos Recettes, où les billets desdits Interessez estoient dispersés, ce qui Nous auroit porté à révoquer cette surceance et de donner nos Ordres pour rechercher promprement les moyens de rétablir et soutenir ladite Manufacture, en sorte que de tous ceux qui Nous ont esté proposés n’ayant rien trouvé de plus convenable ny de plus avantageux que le proposition qui Nous a esté faite par une Compagnie de personnes accréditées et experimentées dans la Fabrique et le Commerce des Glaces, qui auroit offert de payer entierement les Creanciers de ladite Manufacture à la charge de devenir proprietaire incommutables de tous les effets et immeubles en dépendans, Nous en aurions renvoyé l’examen et de toutes les autres propositions et difficultez à nôtre amé et feal Conseiller en nos Conseils, Maître des Requestes ordinaire de nôtre Hôtel et Lieutenant-Civil en nôtre Châtelet de Paris, le Sieur le Camus, pour après avoir entendu les Interessez en la Compagnie, en dresser son procès verbal et Nous donner son Avis, lequel ayant fait encore examiner en nôtre Conseil, ensemble toutes les raisons et moyens de part et d’autre, Nous avons consideré que Nous devions procurer le plus promptement qu’il Nous seroit possible le payement des Creanciers de cette Manufacture à qui ils ont presté leurs deniers sur le foy du Privilege que Nous avions accordé sous le nom dudit Plastrier, et cet effet par Arrest de nôtre Conseil du vingt-trois Octobre de la présente année, Nous y estant, avons accepté les offres de la Compagnie formée par nos ordres sous le nom d’Antoine Dagincourt, et ordonné la révocation du Privilège dudit Plastrier, ensemble de tous ceux accordées pour la fabrication des Glaces, réglé toutes les conditions sur lesquelles les nouveaux Interessez en ladite Compagnie entreroient en possession de ladite Manufacture, et entr’autre chose ordonné qu’il seroit expédié un nouveau Privilège exclusif pendant trente années avec plusieurs autres dispositions, pour l’éxécution desquelles toutes Lettre nécessaires feroient expédiées, et désirant favorablement traiter ladite Compagnie dudit Dagincourt, luy marquer nôtre entière confiance, et la mettre en estat de rétablir ladite Manufacture, de la soûtenir et en perfectionner les ouvrages.

A ces causes et autres à ce que Bous mouvans, de l’avis de nôtre Conseil qui a vû ledit Arrest rendu en notre Conseil, Nous y estant, le vingt-trois Octobre de la présente année, cy-attaché sous le Contre-scel de nôtre certains science, pleine puissance et autorité Royals, avons dit, déclaré et ordonné, disons, déclarons et ordonnons, voulons et Nous plaît, qu’en conséquence du désistement du seize Septembre dernier fait par nos biens amez Begon, Guymont, Courcelles, du Rouvre représentant la veuve Pocquelin sa belle-mère, Dautherive ayant part dans l’intérest de Beauregard, de Bachelier Interessez en ladite Manufacture, et faute par nos bien amez Pecqot, de Bernay, Chennevelle, Beauregard pour ce qui luy restoit d’intérest, Montois, Jourdan, Radix, Renouard et Paris, d’avoir fait le fond nécessaire pour payer les Créanciers de ladite Société, l’Arrest rendu en nôtre Conseil d’Estat le vingt-deux Aoust dernier soit éxécuté pour l’exclusions desdits Intéressez et le choix d’une nouvelle Compagnie ; ce faisaient, avons cassé, révoqué et annullé, cassons, révoquons et annullons le Privilège accordé sous le nom dudit François Plastrier le premier May mil six cent quatre-vingt-quinze, et les Sociétez, Baux, Conventions, marchez, de quelque nature et qualité qu’ils soient, Traitez, Conventions pour pensions, Charges et autres Actes ou engagemens que lesdits Interessez audit Privilege peuvent avoir faits, tant entr’eux que comme Cautions dudit Plastrier et autres leurs Commis et préposez, avec telle personne que ce soit, pour raison ladite Manufacture, notamment les Traitez faits avec Jallot et Lapostre au moyen du remboursement qui leur fera fait des cent cinquante mil livres à eux dûs sur les effets cy-après abandonnez par la Compagnie de Plastrier, à la réserve des Baux et traitez faits pour les terres de la Belliere et pour les bois des Forest de Coucy et de S. Gobin. Avons ordonné que sans avoir égard aux Ventes faites par lesdits de Bernay et Chennevelle d eleur intérest à Montois fils et Godemel, la Compagnie formée par nos Ordres sous le nom d’Antoine Dagincourt fera et demeurera seule propriétaire incommutable pendant trente ans de ladite Manufacture des Glaces, dans nôtre Royaume, Païs, Terres et Seigneuries de notre obéissance, en payant la somme de dix-neuf cent soixante mil livres, tant pour acquitter les Créances de la Compagnie Plastrier et de Thevart, que pour le remboursement et dédommagement desdits Interessez, à raison de trente mil livres par chacun sol d’interest en ladite Société composé de vignt-deux sols, sçavoir treize cent mil livres d’une part aux Creanciers de la Compagnie de Plastrier, pour les dettes et billets échûs ou à écheoir, sauf à déduire ce qui se trouvera leur avoir esté payé des deniers provenans des effets de ladite Manufacture depuis l’Inventaire et Estat présenté par lesdits Interessez jusqu’au jour de la prise de possession réelle et actuelle dudit Dagincourt, et six cent soixante mil livres d’autre, à quoy se trouve monter le total dudit dédommagement et remboursement des actions desdits Interessez, à raison de trente mil livres avons ordonné et ordonnons qu’il sera payé par ledit Dagincourt aux Créanciers de la Compagnie de Thévart qui avoit esté réunie à celle de Plastrier, la somme de deux cent vingt-un mil cinq cent quarante livres à eux dûë, ce faisant ledit Dagincourt tenu de rapporter des Billets de ladite Compagnie Thevart acquittez pour la susdite somme, sçavoit dans un mois les Billets échûs à compter du jour de la prise de possession actuelle dudit Dagincourt, et les autres huit jours après leur échéance.

Et quant aux quatre cent trente huit mil quatre cent soixante livres restans desdits six cent soixante mil livres revenans aux Interessez desdites Compagnie de Thevart et Plastrier, avons ordonné et ordonnons qu’elle sera payée par ledit Dagincourt en quatre payemens égaux de six mois en six mois, dont le premier payement se fera six mois après la prise de possession réelle et actuelle dudit Dagincourt et les autre successivement sans interest attendu l’augmentation de dix mil livres par sol au de là des vingt mil livres portés par ledit Arrest du Conseil du vingt-deux Aoust dernier et Avis dudit Sieur Lieutenant Civil du vingt-deux Aoust dernier et Avis dudit Sieur Lieutanant Civil du vingt-huit Septembre suivant, en rapportant par lesdits Interessez de Thevart et Plastrier main-levée des saisies, si aucunes ont esté faites ès mains dudit Daguncourt sur le restant dudit dedommagement, et retenant préalablement par ledit Dagincourt toutes les sommes deuës par lesdits Interessez en particulier à la Compagnie dudit Plastrier, attendu que ces dettes font partie des effets cedez et delaissez par ledit Plastrier audit Dagincourt, et que sans ce payement privilégié ledit Dagincourt n’eut point accordé lesdits dix mil livres d’agmentation par fol au de-là desdits vingt mil livres, et en consequence avons ordonné et ordonnons que lesdites sommes consignées par lesdits Interessez en la Compagnie de Thevart et Plastrier ou leur prétendus cessionnaires en éxécution dudit Arrest du Conseil du vingt-deux Aoust dernier leur seront rendues par ledit Geoffrin, Caissier après néanmoins ladite prise de possession et reception des effets, à ce faire contraint comme dépositaire, quoy faisant déchargé.

Ordonnons que les Billets desdites Compagnies de Thevart et Plastrier feront payés des interests desdits Billets à raison de l’Ordonnance, sçavoir par les Interessez desdites Compagnie de Thevart et de Plastrier à compter du jour de leur échéance jusqu’au premuer May mil sept cent deux que commencera la jouissance jusqu’au jour de l’actuel payement desdits Billets, au moyen desqules payement et remboursement appartiendront à la Compagnie dudit Dagincourt le fond et bâtimens de la Manufacture du Faubourg S. Antoine de la Ville de Paris avec les fonds nouvellement acquis et autre dépendans ; les fonds qui sont dans et hors l’enceinte de l’ancien Château de Saint Gobain acquis de notre Domaine, et aux conditions portées par la Société Plastrier du cinq May mil six cent quatre vingt quinze, ensemble les bâtimens qui y ont esté construits, ceux de Tourlaville, de Lezines, Rougefossé près Montmirel et autres dépendans, et tous autres immeubles généralement quelconques, comme aussi les Glaces, Bandes, Moulures ; Doucies et Brutes, Miroirs, Bordures, ornemens, Cristaux, ouvrages de grosse et menue verrerie, Glaces picardes, Verres à Lunettes, Grofils, Peccabilles et Etain, bois, matières, soudes, ustancils contenus dans les Inventaires, et qui se trouveront dans lesdits Etablissemens et dans les autres Magazins des Provinces du Royaume, et la part qu’ils ont dans les Glaces et autres effets envoyez à Constantinople ou autres endroits, en quelques lieux qu’ils ayent esté transportez, ensemble tous les billets, Contracts, Obligations qui peuvent ès les mains des Sieurs Hallot et Lapostre, du Caissier et des Commis de la Manufacture, ou autre reliquats des Comptes, et generalement tous autre effets de quelque nature et espece que ce puisse estre, specifiez ou non desdits Inventaires, et en quelque lieu que ce soit, appartenant à la Compagnie dudit Plastrier, sans aucune chose en retenir ny reserver, mesme les cent cinquante mil trois cent quatre vingt dix sept sols six deniers d’effets mentionnez en l’Estat particulier du six Juin mil sept cent deux, remis audit Sieur Lieutenant Civil, lesquels cent cinquante mil trois cent quatre vingt dix sept livres cinq sols six denier d’effets avoient esté donnez en nantissement par ladite Compagnie de Plastrier ausdits Jallot et Lapostre pour seureté desdits cent cinquante mil livre qui leur seront payés par la Compagnie dudit Dagincourt indépendamment de la susdite somme de treize cent mil livres dont cette dette ne fait point partie, et sans que celle dudit Dagincourt puisse estre troublée ny évincée en la jouissance et propriété de tous lesdits immeubles, effets, droits, noms, raisons et actions de ladite Manufacture, rescindans ou rescisoires d’iceux, nonobstant toures dettes, hypotheques, douaires, évictions et actions généralement quelconques, mesmes sous prétexte de minorité des enfants d’aucuns des Interessez décédez ou autrement déchargé et déchargeons ledit Dagincourt et sa Compagnie, ensemble de toutes les saisies faites ou à faire entre ses mains pour raison des susdites sommes de treize cent mil livres d’une part et deux cent vingt un mil cinq cent quarante livres d’autre duës aux Créanciers des dites Compagnies de Plastrier et de Thevart, desquelles Nous avons fait et saisons main-levée audit Dagincourt et sa Compagnie, laquelle en faisant les paiemens auxdits Créanciers en demeurera bien et valablement quitte et déchargée attendu la destination qui en est faite, et que le tout a appartenu et dépend d’un Corps de Manufacture sr la foy de laquelle et du Privilege par Nous accordé, le Public a prêté ses deniers aux Interessez des Compagnis de Thevart et Plastrier, lesquels en consequence du payement des susdites sommes seront et demeureront déchargez, comme Nous les déchargeons, de toutes les dettes et billets qu’ils peuvent avoir contractez pour les deniers par eux empruntez en Compagnie à cause de ladite Manufacture jusques à concurrence des susdites sommes seulement, et dès à present Nous leur avons fait et faisons pleine et entière main-levée de toutes les saisies réelles, exécutions, oppositions et autres empêchemens ou Actes de justice qui pourroient avoir esté faits contr’eux pour raisons desdites dettes et billets, donc les Gardiens, Commissaires et dépositaires seront et demeureront valablement déchargez.

Avoir ordonné et ordonnons que la Compagnie dudit Dagincourt sera mise en possession par ledit Sieur Lieutenant Civil du jour présent Arrest desdites Manufacture, bâtimens, glaces, meubles, ustancils et effets qui en dépendent dont la délivrance luy sera faite par les Interessez en la Compagnie dudit Plastrier et les Commis qui en sont chargez, et en cas de contestation au sujet de ladite délivrance elle sera réglée par ledit Sieur Lieutenant Civil. Ordonnons que lesdits Interessez seront tenus de remettre audit Dagincourt Les Inventaires détaillez de tous leurs effets contenus au Bordereau qu’ils ont donné au Sieur Lieutenant Civiln ensemble tous les Titres, Contracts, Quittances et Actes justificatifs de la propriété d’iceux, comme aussi tous les Registres, Livres journaux, Lettres Patentes, Arrests, Reglemens et autres Enseignemens de ladite Manufacture, à quoy faire ils seront contraints comme dépositaire, pour petre procédé sur le champ et dans délay en présence de tous lesdits effets. Et s’il se trouvoit qu’il eût esté distrait, diverty, détourné ou dissipé quelques-uns de ceux contenus dans lesdits Inventaires donnez udit Sieur Lieutenant Civil depuis le premier May dernier, soit en nature, soit en papiers ou autrement il sera retenu au quadruple sur la somme que ledit Dagincourt doit payer ausdits Intéresser, et ne sera tenu ledit Dagincourt de payer aucune de sommes cy-dessus tant aux Créanciers et Interessez que préalablement il n’ait esté mis en possession de tous lesdits effets tant meubles qu’immeibls, et que la verification n’en ait été faite sur lesdits Inventaires et Registres. Avons ordonné et ordonnons que pour la plus grande seureté dudit Dagincourt il sera dressé des Proces verbaux de la valeur et estimantion desdits immeubles, bâtimens, outils, ustancils, bois, matières, glaces et tous autres meubles et effets appartenans à ladite Manufacture par Experts qui seront nommez d’office à Paris par ledit Sieur Lieutenant Civil, et dans les autres Lieux et Etablissemens par les Juges ordinaires Royaux, sans néanmoins que sous prétexte desdits Procez d’estimation et de ladite prise de possession ledit Dagincourt et sa Compagni puissent êstre tenus directement ou indirectement d’aucuns faits des Interessez aux Privileges desdits Thevart et Plastrier ny du payement de plus grande somme que celles cy-dessus énoncées.

Avons révoqué et révoquons tous autres Privilèges accordez pour la Manufacture des Glaces à Miroirs, que Nous et les Rois nos Prédécesseurs pourroient avoir accordez à quelque personne que ce soit pour Verrerie en ce qu’ils contiendront la faculté de faire les Glaces à Miroirs et à Lunettes, et tous autres ouvrages dépendans de la Manufacture des Glaces dans toute l’étendue de nôtre royaume, Païs, terres et Seigneuries de nôtre obéissance. Voulons, ordonnons et Nous plaît que la seule Compagnie dudit Dagincourt puisse faire fabriquer des Glaces à Miroirs et à Lunettes, bandes, moulures et bordures de tout volume et de toute couleur, unies et figurées, avec faculté audit Dagincourt de faire fabriquer des cristaux, verres blancs et toutes sortes d’ouvrages de grosse et petite verrerie concurremment avec ceux qui en ont obtenu le Privilège, le tout par tels Ouvriers que bon luy semblera, Nobles ou Roturiers à son choix, tant à souffler qu’à couler, et de quelqu’autre manière qu’on puisse les puisse fabriquer, et de faire tailler, doucir et polir lesdites Glaces.

A l’effet dequoy Nous avons Accordé et accordons par ces Presentes signées de nôtre main audit Dagincourt et à sa Compagnie un nouveau Privilège exclusif pendant trente années exempt de toutes charges, avec deffenses à toutes personnes de faire entrer dans le Royaume et d’y faire fabriquer ny vendre des Glaces autres que celles de ladite Compagnie dudit Dagincourt sous quelque prétexte ou occasion que ce soit, à peine de confiscation d’icelles et des matières, outils servans à leur fabrication, démolition des fournaux et de trois mil livres d’amende par chaque contravention, applicable le tiers aux Dénonciateurs, un autre tiers à l’Hôpital General et l’autre tier au profit de la Compagnie Dagincourt, sans que lesdites confiscations et amendes puissent estre modérées et ladite peine estre réputée comminatoire, ny que les Receveurs et Fermiers de nos Domaines y puissent rien prétendre. Et au cas qu’aucun de nos Sujets entreprît d’établir hors du Royaume ou dans les Estats et Souverainetez qui y sont enclavées ou limitrophes, des Manufactures de Glaces pour les introduire en fraude dans nostre Royaume, Nous avons déclaré et déclarons la même amende encourue pour chaque contravention contr’eux solidairement et contre les Conducteurs desdites Glaces qui seront confisquées au profit de ladite Compagnie, ensemble les Batteaux, Charettes, Chevaux et autres Voitures et équipages qui serviront au transport d’icelles, et lesdits Particulier qui en auront fait lesdites entreprises de fabriques déchus pour toujours de pouvoir acquérir aucun interest en ladite Manufacture, à l’effet dequoy ledit Dagincourt, ses Commis et Préposez pourront faire quand bon leur semblera les visites nécessaires en tous lieux, en se faisant assister du Juge de Police du plus prochain lieu. Permettons ausdits Commus de porter armes deffensives de même que ceux employez dans nos Fermes. Voulons et nous plaît que ladite Compagnie dudit Dagincourt jouisse des mêmes Exemptions des Droits de nos cinq grosses Fermes, Doamines, Barrages et autres, même de ceux de Pontage, et nouvel Octroy de Rouen, et genralement de tous autres ont jouy par le passé tant à l’entrée qu’à la sortie de nostre Royaume, dans lesquels Privileges et Exemptions aux précédentes Lettres Patentes, Arrests et Reglements.

Voulons et ordonnons conformément ausdites Lettres Patentes de mil six cent soixante cinq que ledit Dagincourt et les Interessez en sa Compagnie jouissent du droit de Committimus aux Requestes de l’Hôtel ou du Palais, tout ainsi que les Commensaux de nôtre Maison, et qu’en outre lesdits Interessez, Entrepreneurs, leurs Ouvriers, Commis, Gardes, Doucisseurs, Poulisseurs et autres Artisans employez aux choses nécessaire en ladite Manufacture, ensemble leurs serviteurs et Domestiques y demeurans dans leurs Maisons ou en leurs Bureaux ou Fabrique, soient exempts de toutes Tailles et imposition tant ordinaires qu’extraodinaires, Emprunts, Gardes de Villes, Logements de gens de guerre, Tutelle, Curatelle, et généralement de toutes autres contributions et charges de quelque qualité qu’elles puissent estre, tant et si longuement qu’ils seront Interessez et Employez en ladite Manufacture et dans les Bureaux et Magasins, à la charge toutefois qu’ils auront point esté imposez jusques à present au Rôlles des Tailles, et en cas qu’ils se trouvassent compris dans les Rôlles des lieux où ils auroient esté domiciliez, qu’ils continueront d’y estre employez aux mêmes taux sans augmentation.

Ordonnons que les Glaces en autres ouvrages de ladite Manufacture qui auront esté vendues aux Marchands, et dont le prix n’aura pas esté payé, pourront estre réclamées en tout temms, soit qu’elles soient encore en noture ou qu’elles ayent esté mises en œuvre, pourvu qu’elle puissent estre reconnues. Avons permis et permettons aux Interessez en la Compagnie dudit Dagincourt de continuer dans ses Etablissemens de faire battre l’estain en feuille à la manière d’Angleterre, pour employer à mettre au tain les Glaces des tinées pour les Maisons Royales, avec faculté d’en vendre aux Miroitiers et à tous autres Particuliers, comme aussi de prendre en tous les lieux du Royaume les fonds de terre convenables aux Etablissemens de ladite Manufacture, et les matières propres aux ouvrages d’icelle, en dédommageant de gré à gré les Propriétaires ou leur payant ou dire de gens connoissans le prix deddots fonds et matières. Ordonnons qu’en cas de contestation à l’avenir sur l’execution dudit Arrest et des Presentes, circonstances et dependances, les Parties se pouvoirront à Paris pardevant les Sieurs Lieutenants Civils et de Police, conformément au Reglement de mil six cent soixante sept, et dans les Provinces pardevant les Juges de Police des plus prochains lieux, auxquels Nous avons attribué et attribuons toute Cour, Jurisdictions et connoissance et celle inerdisons à toutes nos autres Cours et Juges. Voulons neanmoins que ce qui sera par eux reglé et ordonné soit executé nonobstant oppositions ou appellations quelconques, dont si aucunes interviennent, Nous nous en réservons et à nôtre Conseil la connoissance.

Et pour marquer la protection particulière que Nous voulons donner à ladite nouvelle Compagnie, Ordonnons, Voulons et Nous plaît que le present Privileg que Nous luy accordons pour le temps de trente années, soit executé aux mêmes facultez, Privileges et Exemptions portées que par les précédentes Lettres Patentes obtenues sous les nom de Du Noyer, Bagneux, Thevart et Plastrier, et d’autres clauses que Nous jugerons à propos d’augmenter, qui seront pareillement exécutées, encore qu’elles ne soient cy-exprimées, même l’Arrest rendu en nôtre Conseil d’Estat le neuf Mars mil sept cent contre les Interessez en la Manufacture de Dombes, sans que le Privilege de trente années accordé par ces Presentes audit Dagincourt puisse estre cy-après revoqué pour quelque causes et sous quelque prétexte que ce puisse estre.

Si donnons à nos amez et féaux Conseillers les Gens tenant nôtre Cour de Parlement, Chambre des Comptes, Cour des Aydes à Paris, et tous autres nos Officiers et Justiciers qu’il appartiendra, que ces Presentes ils ayent à faire registrer, du contenu en icellles faire jouir et user ledit Dagincourt et ses ayans cause pleinement et paisiblement, cessant et faisant cesser tous troubles et empêchemens à ce contraires.

Car tel est notre plaisir. En témoin dequoy Nous avons fait mettre nôtre Scel à cesdites Presentes.

Donné à Fontainebleau le vingt troisième jour du mois d’Octobre l’An de grâce mil sept cent deux, et de nôtre Regne lesoixantième.