Louÿs – Poésies/Poésies diverses 2

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Slatkine reprints (p. 182-183).

BALLADE


À la Louange de mon Amant.


Fichu besoin de voyager !
Fi ! je m’en crache dans la paume.
Avait-il besoin de changer !
Et depuis lors ma beauté chôme !
C’est en vain que mon corps embaume
Et que pointe mon sein charmant.
C’est à le tromper pour un gnôme !
Mais rien ne vaudrait mon amant.

Je veux bien que du ciel d’Alger
Il puisse préférer le dôme
Au ciel d’ici. Mais que léger
Est tout de même ce jeune homme !
Il doit coucher avec la môme
Zorah, de ces lieux l’ornement.
Il me compte comme un atome.
Mais rien ne vaudrait mon amant.


Ah ! d’ennui c’est à se plonger,
Afin de rimer, dans la Drôme !
Mais de vrai, pour se submerger,
De la Seine aimez-vous l’arôme ?
Si quelqu’un m’apportait un baume
Pour guérir mon cruel tourment,
Je le… hum !… même eût-il un heaume !
Mais rien ne vaudrait mon amant.



Mais rien ne vaudENVOI


Prince, vous m’offrez vainement
Les trésors de votre royaume :
Certe, un palais vaut mieux qu’un chaume ;
Mais rien ne vaudrait mon amant[1].


Mais rien ne vaudraJeudi 16 février 1899.


  1. Cette Ballade fut envoyée à Pierre Louÿs voyageant en Algérie par une maîtresse inconnue. Le poète y répondit par les strophes qui suivent.