L’Encyclopédie/1re édition/MAGNÉTISME

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Magnétisme, s. m. (Phys.) c’est le nom général qu’on donne aux différentes propriétés de l’aimant ; ces propriétés, comme l’on sait, sont au nombre de trois principales ; l’attraction ou la vertu par laquelle l’aimant attire le fer ; la direction ou la vertu par laquelle l’aimant se tourne vers les poles du monde, avec plus ou moins de déclinaison, selon le lieu de la terre où il est placé ; enfin l’inclinaison ou la vertu par laquelle une aiguille aimantée suspendue sur des pivots, s’incline vers l’horison en se tournant vers le pole : ses différentes propriétés ont été détaillées aux articles Aimant, Aiguille, Boussole, & nous y renvoyons le lecteur, ainsi qu’aux mots Déclinaison, Variation, Compas, &c. Il s’agit maintenant de la cause de ces différens phénomenes, dont nous avons promis au mot Aimant, de parler dans cet article. Les Philosophes ont fait là-dessus bien des systèmes, mais jusqu’ici ils n’ont pu parvenir à rien donner de satisfaisant : ceux de nos lecteurs qui voudront connoître ce qu’on a dit sur ce sujet de plus plausible, pourront lire les trois dissertations de Mrs Euler, Dufour, & Bernoulli, qui ont remporté le prix de l’académie en 1746 ; ils y trouveront des hypotheses ingénieuses, & dans celles de M. Dufour plusieurs expériences curieuses. Nous nous contenterons de dire ici que chacun de ces auteurs, ainsi que tous les Physiciens qui les ont précédés, attribuent les effets de l’aimant à une matiere qu’ils appellent magnétique. Il est difficile en effet, quand on a examiné les phénomenes, & sur-tout la disposition de la limaille d’acier autour de l’aimant, de se refuser à l’existence & à l’action de cette matiere : cependant cette existence & cette action a souffert plusieurs difficultés : on peut en voir quelques-unes dans l’histoire de l’académie des Sciences de l’année 1733 ; on peut en voir aussi beaucoup d’autres dans l’Essai de physique de M. Musschenbroeck, §. 587. & suiv. contre les écoulemens qu’on attribue à la matiere magnétique ; nous renvoyons le lecteur à ces différens ouvrages, pour ne point trop grossir cet article, & aussi pour ne point paroître favoriser une des deux opinions préférablement à l’autre, car nous avouons franchement que nous ne voyons rien d’assez établi sur ce sujet pour nous décider.

Au défaut de la connoissance de la cause qui produit les propriétés de l’aimant, ce seroit beaucoup pour nous que de pouvoir au-moins trouver la liaison & l’analogie des différentes propriétés de cette pierre, de savoir comment sa direction est liée à son atraction, & son inclinaison à l’une & à l’autre de ces propriétés. Mais quoique ces trois propriétés soient vraisemblablement liées par une seule & même cause, elles paroissent avoir si peu de rapport entre elles, que jusqu’à présent on n’a pû en découvrir l’analogie. Ce qu’il y a de mieux à faire jusqu’à présent, est d’amasser des faits, & de laisser les systèmes à faire à notre postérité, qui vraissemblablement les laissera de même à la sienne.

M. Halley, pour expliquer la déclinaison de la boussole, a imaginé un gros aimant au centre de la terre, un second globe contenu au-dedans d’elle comme dans un noyau, & qui par la rotation sur un axe qui lui est propre, entretienne la déclinaison de l’aiguille dans une variation continuelle. M. Halley employoit encore ce globe d’aimant à l’explication de l’aurore boréale ; il supposoit que l’espace compris entre la terre & le noyau étoit rempli d’une vapeur légere & lumineuse, qui venant à s’échapper en certain tems par les poles du globe terrestre, produit toutes les apparences de ce phénomene ; mais outre que toutes ces suppositions sont purement hypothétiques, on ne verroit pas encore comment ce gros aimant produiroit l’attraction du fer, ni comment il agiroit sur les petits aimans qui se trouvent sur ce globe, & dont il est si éloigné.

Le résultat de cet article est que les phénomenes de l’aimant sont vraissemblablement produits par une matiere subtile, différente de l’air ; nous disons différente de l’air, parce que ces phénomenes ont également lieu dans le vuide ; mais nous ignorons absolument la maniere dont cette machine agit. C’est encore une question non moins difficile que de savoir s’il y a quelque rapport entre la cause du magnétisme & celle de l’électricité, car on ne connoît guère mieux l’une que l’autre. Voyez Électricité, Conducteur, Coup foudroyant, Feu électrique, &c. (O)