L’Encyclopédie/1re édition/PAN

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PAN, s. m. (Mythol.) le dieu des bergers, des chasseurs & de tous les habitans des champs ; il étoit fils de Mercure & de Pénélope. Mercure se métamorphosa en bouc pour plaire à Pénélope. Voilà l’origine de ses cornes & de son pié fourchu ; & la naissance du chef de toute la famille des faunes & des satyres. L’accouplement de l’homme avec la chevre ne produit rien ; il n’y a pas d’apparence que celui du bouc avec la femme soit moins stérile : ainsi il est à présumer que tout ceci est purement fabuleux. Il s’appella Pan, à ce que dit un ancien mythologue, parce que Pénélope, moins chaste qu’on ne l’a fait, rendit heureux tous ses amans dans l’absence d’Ulysse, & que cet enfant fut le fruit de ce libertinage. Epimenide fait naître Pan de Jupiter & de Caliste, & lui donne Arcas pour frere jumeau ; d’autres le croient fils ou de l’air & d’une néréide, ou du ciel & de la terre. Ce dieu n’est pas beau : mais s’il n’est pas le symbole de la beauté ; barbu, chevelu, velu, cornu, fourchu ; il l’est bien de la force, de l’agilité & de la lasciveté. On le représente communément avec la houlette & la flûte à plusieurs tuyaux. On le regarde comme le dieu des chasseurs, quoique son histoire nous le montre plus âpre à la poursuite des nymphes que des animaux. Les Arcadiens le révéroient particulierement ; il rendit parmi eux des oracles. Ils lui offroient du lait de chevre & du miel ; ils célébroient en son honneur les lupercales. Evandre l’Arcadien porta son culte & ses fêtes en Italie. Les Egyptiens ont eu des idées toutes différentes de Pan. Selon eux, ce fut un des généraux d’Osiris ; il combattit Typhon. Son armée ayant été enfermée dans une vallée, dont les avenues étoient gardées ; il ordonna pendant la nuit à ses soldats de marcher en poussant de grands cris, que les échos multiplierent encore. L’horreur de ce bruit inopiné saisit l’ennemi, qui prit la fuite ; de-là vient ce qu’on appelle terreur panique. Polien attribue à Pan l’invention de l’ordre de bataille, de la phalange, de la distribution d’une armée en aîle droite, en aîle gauche ou cornes, & prétend que c’est de-là que ses cornes lui viennent. Hygin dit que ce fut Pan qui conseilla aux dieux dispersés par les géans, de se métamorphoser en animaux, & qu’il leur en donna l’exemple en prenant la forme de la chevre. Il ajoute que les dieux le récompenserent de son avis en le plaçant au ciel, où il fut la constellation du capricorne. On l’honora tellement en Egypte, qu’on lui bâtit dans la Thébaïde la ville appellée Chemnis ou ville de Pan. On voyoit sa statue dans tous les temples. Le nom de Pan qui signifie tout donna lieu à l’allégorie où ce dieu est pris pour le symbole de la nature. Ses cornes sont les rayons du soleil ; l’éclat de son teint désigne celui du ciel ; la peau de chevre étoilée dont sa poitrine est couverte, le firmament ; le poil de ses jambes & de ses cuisses, la terre, les arbres, les animaux, &c. Quant à la fable du grand Pan, voici ce qu’on en lit dans l’ouvrage de Plutarque, intitulé des oracles qui ont cessé : le vaisseau du pilote Thamus étant un soir vers certaines îles de la mer Egée, le vent cessa tout-à-coup. L’équipage étoit bien éveillé, partie buvoit, partie s’entretenoit ; lorsqu’on entendit une voix qui venoit des îles, & qui appelloit Thamus : Thamus ne répondit qu’à la troisieme fois, & la voix lui commanda, lorsqu’il seroit entré à un certain lieu, de crier que le grand Pan étoit mort. On fut saisi de frayeur ; on délibéra si l’on obéiroit à la voix. Thamus conclut que s’il faisoit assez de vent pour passer l’endroit indiqué, il se tairoit ; mais que si le vent venoit à cesser, il s’acquitteroit de l’ordre qu’il avoit reçu. Il fut surpris d’un calme au lieu où il devoit crier ; il le fit, & aussi-tôt le calme cessa, & l’on entendit de tout côté des plaintes & des gémissemens, comme d’un grand nombre de personnes affligées & surprises. Cette aventure eut pour témoins tous les gens du vaisseau ; bien-tôt le bruit s’en répandit à Rome. Tibere voulut voir Thamus ; il assembla les savans dans la théologie payenne. Ils répondirent au souverain, que ce grand Pan étoit le fils de Mercure & de Pénélope. Celui qui fait ce conte dans Plutarque, ajoute qu’il le tient d’Epithersès, son maître d’école, qui étoit dans le vaisseau de Thamus quand la chose arriva. Je dis, ce conte ; car si ce Pan étoit un démon, quel besoin avoit-on de Thamus pour porter la nouvelle de sa mort à d’autres démons ? Pourquoi ces mal-avisés révelent-ils leurs foiblesses à un homme ? Dieu les y forçoit. Dieu avoit donc un dessein ! Quel ? De désabuser le monde par la mort du grand Pan ? ce qui n’eut pas lieu : d’annoncer la mort de J. C ? personne n’entendit la chose en ce sens : au second siecle de l’église, on n’avoit pas encore imaginé de prendre Pan pour J. C. Les payens crurent que le petit Pan étoit mort, & ils ne s’en mirent guere en peine.

PAN, s. m. (Arch.) c’est le côté d’une figure, rectiligne, réguliere ou irréguliere. C’est aussi le nom d’une mesure du Languedoc ou de Provence. Voyez Palme.

Pan coupé. C’est l’encoignure rabattue d’une maison pour y placer une ou deux bornes, & faciliter le tournant des charrois. C’est aussi dans une église à dôme, la face de chaque pilier de sa croisée où sont les pilastres ébrasés, & d’où prennent naissance les pendentifs.

Pan de bois. Assemblage de charpente qui sert de mur, de face à un bâtiment ; on le fait de plusieurs manieres, parmi lesquelles la plus ordinaire est de sablieres, de poteaux à plomb, & d’autres inclinés & posés en décharge.

Il y a deux assemblages qu’on appelle pan de bois. L’un qu’on nomme assemblage à brins de fougere, est une disposition de petits potelets assemblés diagonalement à tenons & mortoises, dans les intervalles de plusieurs poteaux à plomb, laquelle ressemble à des branches de fougere, dont les brins font cet effet. L’autre assemblage est dit à losanges entrelacés. C’est une disposition de pieces d’un pan de bois, ou d’une cloison posées en diagonales, entaillées de leur demi-épaisseur & chevillées. Les panneaux des uns & des autres sont remplis ou de briques, ou de maçonnerie enduite d’après les poteaux, ou recouverte & lambrissée sur un lattis.

On arrête les pans de bois, des médiocres bâtimens, avec des tirans, ancres, équerres, & liens de fer à chaque étage. On appelloit autrefois les pans de bois cloisonnages & colombages. Voyez l’art de la Charpenterie de Mathurin Jousse.

Pan de comble. C’est l’un des côtés de la couverture d’un comble. On appelle long pan le plus long côté.

Pan de mur. C’est une partie de la continuité d’un mur. Ainsi, on dit, quand quelque partie d’un mur est tombée, qu’il n’y a qu’un pan de mur de tant de toises, à construire ou à reparer. (D. J.)