L’Encyclopédie/1re édition/SPAHIS

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SPAHIS, s. m. (Hist. mod.) chez les Turcs sont les soldats qui composent la cavalerie de leurs armées.

On les nommoit autrefois selictarlis, c’est-à-dire hommes d’épée, mais ayant plié lâchement dans une occasion, Mahomet III. les cassa & leur substitua un nouveau corps qu’il nomma spahis, c’est-à-dire simples cavaliers, & leur donna un étendard rouge. On les tire ordinairement d’entre les baltagis & les ichoglans du trésor & de la fauconnerie, & d’entre les Turcs naturels d’Asie.

Les spahis se servent de l’arc & de la lance plus commodément que des armes à feu. Quelques-uns portent à la main un girit espece de dard de 2 piés de long, qu’ils lancent avec autant de force que d’adresse, mais leur arme la plus redoutable est le cimeterre ; quelques-uns portent aussi pour armes défensives des cottes de mailles, des cuirasses & des casques, mais le plus grand nombre n’a que l’habillement ordinaire des Turcs & le turban.

Autrefois les spahis d’Asie ne paroissoient jamais à l’armée, que suivis de trente ou quarante hommes chacun, sans compter leurs chevaux de main, tentes & bagages : aujourd’hui ils y vont sur le pié de simples soldats. Leur corps n’est pourtant jamais qu’une multitude confuse qui n’est distribuée ni en régimens, ni en compagnies ; ils marchent par pelotons, combattent sans beaucoup d’ordre, s’absentent du camp & quittent le service sans congé. Ils ont cependant quelques capitaines qu’on nomme agas, qui ont cent-cinquante aspres de paye par jour ; celle des spahis est depuis 12 aspres jusqu’à 30 ; mais ceux qui ne se trouvent pas à la paye du mois de Novembre, sont rayés de dessus les registres du grand-seigneur. Cette cavalerie passoit anciennement pour la meilleure de l’Europe, mais depuis qu’on a permis aux domestiques des bachas d’y entrer, elle est devenue molle, vile & libertine : leur général en chef se nomme spahilar-aga. Guer. Mœurs des Turcs, tom. II.