Mémoires (Saint-Simon)/Tome 7/2

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CHAPITRE II.


Retour des princes à la cour. — Mécanique de chez Mme de Maintenon et de son appartement. — Réception du roi et de Monseigneur à Mgr le duc de Bourgogne et à M. le duc de Berry, à qui ensuite Mgr le duc de Bourgogne parle longtemps et bien. — Apophtegmes peu discrets de Gamaches. — Citadelle de Lille rendue. — Honneurs infinis faits au maréchal de Boufflers. — Retour et réception du duc de Vendôme à la cour. — Retour et réception triomphante du maréchal de Boufflers à la cour ; fait pair, etc. — Extrême honneur que je reçois de Mgr le duc de Bourgogne. — Retour du duc de Berwick à la cour. — Beau projet de reprendre Lille. — Boufflers renvoyé en Flandre. — Tranchée ouverte à Gand ; La Mothe dedans. — Soirée du roi singulière.


Mme la duchesse de Bourgogne étoit dans une grande agitation de la réception que recevroit Mgr le duc de Bourgogne, et de pouvoir avoir le temps de l’entretenir et de l’instruire avant qu’il pût voir le roi ni personne. Je lui fis dire de lui mander d’ajuster son voyage de façon qu’il arrivât à une ou deux heures après minuit, parce que de la sorte, arrivant tout droit chez elle, et ne pouvant voir qu’elle, ils auroient tout le temps de la nuit à être ensemble seuls, les premiers [instants] du matin avec le duc de Beauvilliers, et peut-être avec Mme de Maintenon, et l’avantage encore que le prince salueroit le roi et Monseigneur avant que personne fût entré chez eux, et que personne n’y seroit témoin de sa réception, à très peu de valets près, et même écartés. L’avis ne fut pas donné, ou, s’il le fut, il ne fut pas suivi. Le jeune prince arriva le lundi 11 décembre, un peu après sept heures du soir, comme Monseigneur venoit d’entrer à la comédie, où Mme la duchesse de Bourgogne n’étoit pas allée pour l’attendre. Je ne sais pourquoi il vint descendre dans la cour des Princes, au lieu de la grande. J’étois en ce moment-là chez la comtesse de Roucy, dont les fenêtres donnoient dessus. Je sortis aussitôt, et, arrivant au haut du grand degré du bout de la galerie, j’aperçus le prince qui le montoit entre les ducs de Beauvilliers et de La Rocheguyon, qui s’étoient trouvés à la descente de sa chaise. Il avoit bon visage, gai et riant, et parloit à droite et à gauche. Je lui fis ma révérence au bord des marches. Il me fit l’honneur de m’embrasser, mais de façon à me marquer qu’il étoit encore plus instruit qu’attentif à ce qu’il devoit à la dignité, et il ne parla plus qu’à moi un assez long bout de chemin, pendant lequel il me glissa bas qu’il n’ignoroit pas comment j’avois parlé et comment j’en avois usé à son égard. Il fut rencontré par un groupe de courtisans, à la tête desquels étoit le duc de La Rochefoucauld, au milieu duquel il passa la grande salle des gardes, au lieu d’entrer chez Mme de Maintenon par son antichambre de jour et par les derrières, bien que son plus court, et alla, par le palier du grand degré, entrer par la grande porte de l’appartement de Mme de Maintenon. C’étoit le jour ordinaire du travail de Pontchartrain, qui, depuis quelque temps, avoit changé avec Chamillart du mardi au lundi. Il étoit alors en tiers avec le roi et Mme de Maintenon, et le soir même il me conta cette curieuse réception, qu’il remarqua bien et dont il fut seul témoin. Je dis en tiers, parce que Mme la duchesse de Bourgogne alloit et venoit ; mais pour le bien entendre, il faut un moment d’ennui de mécanique.

L’appartement de Mme de Maintenon étoit de plain-pied et faisant face à la salle des gardes du roi. L’antichambre étoit plutôt un passage long en travers, étroit, jusqu’à une autre antichambre toute pareille de forme, dans laquelle les seuls capitaines des gardes entroient, puis une grande chambre très profonde. Entre la porte par où on y entroit de cette seconde antichambre et la cheminée, étoit le fauteuil du roi adossé à la muraille, une table devant lui, et un ployant autour pour le ministre qui travailloit. De l’autre côté de la cheminée, une niche de damas rouge et un fauteuil où se tenoit Mme de Maintenon, avec une petite table devant elle. Plus loin, son lit dans un enfoncement. Vis-à-vis les pieds du lit, une porte et cinq marches à monter, puis un fort grand cabinet qui donnoit dans la première antichambre de l’appartement de jour de Mgr le duc de Bourgogne, que cette porte enfiloit, et qui est aujourd’hui l’appartement du cardinal Fleury. Cette première antichambre ayant à droite cet appartement, et à gauche ce grand cabinet de Mme de Maintenon, descendoit, comme encore aujourd’hui, par cinq marches dans le salon de marbre contigu au palier du grand degré du bout des deux galeries, haute et basse, dites de Mme la duchesse d’Orléans et des Princes. Tous les soirs Mme la duchesse de Bourgogne jouoit dans le grand cabinet de Mme de Maintenon avec les dames à qui on avoir donné l’entrée, qui ne laissoit pas d’être assez étendue, et de là entroit, tant et si souvent qu’elle vouloit, dans la pièce joignante, qui étoit la chambre de Mime de Maintenon, où elle étoit avec le roi, la cheminée entre deux. Monseigneur, après la comédie, montoit dans ce grand cabinet, où le roi n’entroit point, et Mme de Maintenon presque jamais.

Avant le souper du roi, les gens de Mme de Maintenon lui apportoient son potage avec son couvert, et quelque autre chose encore. Elle mangeoit, ses femmes et un valet de chambre la servoient, toujours le roi présent, et presque toujours travaillant avec un ministre. Le souper achevé, qui étoit court, on emportoit la table ; les femmes de Mme de Maintenon demeuroient, qui tout de suite la déshabilloient en un moment et la mettoient au lit. Lorsque le roi étoit averti qu’il étoit servi, il passoit un moment dans une garde-robe, alloit après dire un mot à Mme de Maintenon, puis sonnoit une sonnette qui répondoit au grand cabinet. Alors Monseigneur, s’il y étoit, Mgr et Mme la duchesse de Bourgogne, M. le duc de Berry, et les dames qui étoient à [Mme la duchesse de Bourgogne], entroient à la file dans la chambre de Mme de Maintenon, ne faisoient presque que la traverser, précédoient le roi, qui alloit se mettre à table suivi de Mme la duchesse de Bourgogne et de ses dames. Celles qui n’étoient point à elle, ou s’en alloient, ou, si elles étoient habillées pour aller au souper (car le privilège de ce cabinet étoit d’y faire sa cour à Mme la duchesse de Bourgogne sans l’être), elles faisoient le tour par la grande salle des gardes, sans entrer dans la chambre de Mme de Maintenon. Nul homme, sans exception que de ces trois princes, n’entroit dans ce grand cabinet. Cela expliqué, venons à la réception et à tout son détail, auquel Pontchartrain fut très attentif, et qu’il me rendit tète à tête très exactement une demi-heure après qu’il fut revenu chez lui.

Sitôt que de chez Mme de Maintenon on entendit la rumeur qui précède de quelques instants ces sortes d’arrivée, le roi s’embarrassa jusqu’à changer diverses fois de visage. Mme la duchesse de Bourgogne parut un peu tremblante, et voltigeoit par la chambre pour cacher son trouble, sous prétexte d’incertitude par où le prince arriveroit, du grand cabinet ou de l’antichambre. Mme de Maintenon étoit rêveuse. Tout d’un coup les portes s’ouvrirent : le jeune prince s’avança au roi, qui, maître de soi plus que qui que ce fût, perdit à l’instant tout embarras, fit un pas ou deux vers son petit-fils, l’embrassa avec assez de démonstration de tendresse, lui parla de son voyage, puis, lui montrant la princesse : « Ne lui dites-vous rien ? » ajouta-t-il d’un visage riant. Le prince se tourna un moment vers elle, et répondit respectueusement, comme n’osant se détourner du roi, et sans avoir remué de sa place. Il salua ensuite Mme de Maintenon, qui lui fit fort bien. Ces propos de voyage, de couchées, de chemins, durèrent ainsi, et tous debout, un demi-quart d’heure ; puis le roi lui dit qu’il n’étoit pas juste de lui retarder plus longtemps le plaisir qu’il auroit d’être avec Mme la duchesse de Bourgogne, et le renvoya, ajoutant qu’ils auroient loisir de se revoir. Le prince fit sa révérence au roi, une autre à Mme de Maintenon, passa devant le peu de dames du palais qui s’étoient enhardies de mettre la tête dans la chambre au bas de ces cinq marches, entra dans le grand cabinet, où il embrassa Mme la duchesse de Bourgogne, y salua les dames qui s’y trouvèrent, c’est-à-dire les baisa, demeura quelques moments, et passa dans son appartement, où il s’enferma avec Mme la duchesse de Bourgogne.

Leur tête-à-tête dura deux heures et plus ; tout à la fin Mme d’O y fut en tiers ; presque aussitôt après la maréchale d’Estrées y entra, et peu de moments après Mme la duchesse de Bourgogne sortit avec elles, et revint dans le grand cabinet de Mme de Maintenon. Monseigneur y vint à l’ordinaire au sortir de la comédie. Mme la duchesse de Bourgogne, en peine de ce que Mgr le duc de Bourgogne ne se pressoit point d’y venir saluer Monseigneur, l’alla chercher, et revint disant qu’il se poudroit ; mais remarquant que Monseigneur n’étoit pas satisfoit de ce peu d’empressement, elle envoya le hâter. Cependant la maréchale d’Estrées, folle et étourdie, et en possession de dire tout ce qui lui passoit par la tête, se mit à attaquer Monseigneur de ce qu’il attendoit si tranquillement son fils, au lieu d’aller lui-même l’embrasser. Ce propos hasardé ne réussit pas : Monseigneur répondit sèchement que ce n’étoit pas à lui à aller chercher le duc de Bourgogne, mais au duc de Bourgogne à le venir trouver. Il vint enfin. La réception fut assez bonne, mais elle n’égala pas celle du roi à beaucoup près. Presque aussitôt le roi sonna, et on passa pour le souper. Vers l’entremets, M. le duc de Berry arriva, et vint saluer le roi à table. À celui-ci, tous les cœurs s’épanouirent. Le roi l’embrassa fort tendrement. Monseigneur le regarda de même, n’osant l’embrasser en présence du roi. Toute l’assistance le courtisa. Il demeura debout auprès du roi le reste du souper, où il ne fut question que de chevaux de poste, de chemins et de semblables bagatelles. Le roi parla assez à table à Mgr le duc de Bourgogne ; mais ce fut d’un tout autre air à M. le duc de Berry. Au sortir de table, ils allèrent tous dans le cabinet du roi à l’ordinaire, au sortir duquel M. le duc de Berry trouva un souper servi dans la chambre de Mme la duchesse de Bourgogne, qu’elle lui avoit fait tenir prêt de chez elle, et que l’empressement conjugal de Mgr le duc de Bourgogne abrégea un peu trop. Le lendemain se passa en respects de toute la cour. Ce lendemain mardi 11, le roi d’Angleterre arriva à Saint-Germain, et vint voir le roi le mercredi avec la reine sa mère.

Je témoignai au duc de Beauvilliers, avec ma liberté accoutumée, que j’avois trouvé Mgr le duc de Bourgogne bien gai au retour d’une si triste campagne. Il n’en put disconvenir avec moi, jusque-là que je le laissai en dessein de l’en avertir. Tout le monde en effet blâma également une gaieté si peu à propos. Le mardi et le mercredi, occupés les soirs par le travail des ministres, se passèrent sans conversation ; mais le jeudi, qui souvent étoit libre, Mgr le duc de Bourgogne fut trois heures avec le roi chez Mme de Maintenon. J’avois peur que la piété ne le retint sur M. de Vendôme, mais j’appris qu’il avoit parlé à cet égard sans ménagement, fortifié par le conseil de Mme la duchesse de Bourgogne, et rassuré sur sa conscience par le duc de Beauvilliers, avec qui il avoit été longtemps enfermé le mercredi. Le compte de la campagne, des affaires, des choses, des avis, des procédés, fut rendu tout entier. Un autre peut-être, moins vertueux, eût plus appesanti les termes ; mais enfin tout fut dit, et dit au delà des espérances, par rapport à celui qui parloit et à celui qui écoutoit. La conclusion fut une vive instance pour commander une armée la campagne suivante, et la parole du roi de lui en donner une. Il fut ensuite question d’entretenir Monseigneur : cela vint plus tard de deux jours ; mais enfin il eut une assez longue conversation avec lui à Meudon, et avec Mlle Choin, à laquelle il parla encore davantage tête à tête. Elle en avoit bien usé pour lui auprès de Monseigneur. Mme la duchesse de Bourgogne la lui avoit ménagée. La liaison entre cette fille et Mme de Maintenon commençoit à se serrer étroitement. La Choin n’ignoroit pas la vivacité que l’autre avoit témoignée pour le jeune prince ; son intérêt n’étoit pas de se les aliéner tous, dont Mgr le duc de Bourgogne recueillit quelque fruit en cette importante occasion.

Gamaches et d’O avoient suivi les princes. Ce dernier, entièrement disculpé par eux, rapproché déjà par les manèges de sa femme et par la constante protection du duc de Beauvilliers, fut reçu comme toutes choses non avenues. L’autre, bavard et franc Picard, eut le bon sens de s’en aller aussitôt chez lui, pour éviter les questions importunes. Peu capable de conseiller Mgr le duc de Bourgogne, il n’avoit pu se contraindre de reprendre en face et en public les enfantillages qui échappoient à Mgr le duc de Bourgogne, et, sur son exemple, à M. le duc de Berry. Il leur disoit quelquefois qu’en ce genre ils auroient bientôt un plus grand maître qu’eux, qui seroit Mgr le duc de Bretagne.

Revenant une fois de la messe à la suite de Mgr le duc de Bourgogne, dans des moments vifs où il l’auroit mieux aimé à cheval : « Vous aurez, lui dit-il tout haut, le royaume du ciel, mais pour celui de la terre, le prince Eugène et Marlborough s’y prennent mieux que vous. »

Ce qu’il dit, et tout publiquement encore, aux deux princes sur le roi d’Angleterre, fut admirable. Ce pauvre prince vivoit sous son incognito dans le même respect avec les deux princes que s’il n’eût été qu’un médiocre particulier. Eux aussi en abusoient avec la dernière indécence, sans la moindre des attentions que ce qu’il étoit exigé d’eux, à travers tous les voiles, jusqu’à le laisser très ordinairement attendre parmi la foule dans les antichambres, et ne lui parloient presque point. Le scandale en fut d’autant plus grand qu’il dura toute la campagne, et que le chevalier de Saint-Georges s’y étoit concilié l’estime et l’affection de toute l’armée par ses manières et par toute sa conduite. Vers les derniers temps de la campagne, Gamaches, poussé à bout d’un procédé si constant, s’adressant aux deux princes devant tout le monde : « Est-ce une gageure ? leur demanda-t-i1 tout à coup ; parlez franchement ; si c’en est une, vous l’avez gagnée, il n’y a rien à dire ; mais au moins, après cela, parlez un peu à M. le chevalier de Saint-Georges, et le traitez un peu plus honnêtement. » Toutes ces saillies eussent été bonnes tête à tête, et fort à propos, mais en public, ce zèle et ces vérités n’en pouvoient couvrir l’indiscrétion. On étoit accoutumé aux siennes, elles ne furent pas mal prises, mais elles ne servirent de rien.

Boufflers, à bout de tout, comme je l’ai dit, ne put différer que de peu de jours à obéir à l’ordre du roi qu’il avoit reçu de capituler. Il fit donc battre la chamade, et il obtint tout ce qu’il voulut par sa capitulation, qui, sans dispute, fut signée le 9, de la meilleure grâce du monde. Le prince Eugène étoit comblé d’honneur et de joie d’être venu à bout d’une si difficile conquête, malgré une armée plus forte que la leur, et commandée par l’héritier nécessaire de la couronne, et par Vendôme, qui en discours l’avoit si peu ménagé en Italie et en Flandre, quoique enfants des deux sœurs.

Un jour avant que la garnison sortît, le prince Eugène envoya demander au maréchal de Boufflers s’il voudroit bien recevoir sa visite, et dès qu’il y eut consenti, Eugène la lui rendit. Elle se passa en forces louanges et civilités de part et d’autre ; il pria le maréchal à dîner chez lui pour le lendemain, après que la garnison seroit sortie, et il fit rendre à Boufflers toutes sortes de respects et tous les mêmes honneurs qu’à soi-même. Lorsque la garnison sortit, le maréchal ne marcha point à sa tête, mais vint se mettre à côté du prince Eugène, que le chevalier de Luxembourg et tous les officiers saluèrent. Après que toute la garnison eut défilé, le prince Eugène fit monter le maréchal et le chevalier de Luxembourg dans son carrosse, se mit sur le devant, et voulut absolument que le chevalier de Luxembourg ; qu’il avoit fait monter devant lui, se mit sur le derrière auprès du maréchal de Boufflers, et donna toujours la main à la porte à tous les officiers françois que Boufflers mena dîner chez lui. Après dîner, il leur donna son carrosse et beaucoup d’autres carrosses pour les mener coucher à Douai, eux et les officiers principaux. Le prince d’Auvergne, et je pense que ce ne fut pas sans affectation, à la tête d’un gros détachement, lui toujours à cheval, les conduisit à Douai. Il eut ordre du prince Eugène d’obéir en tout au maréchal, à qui il le dit, comme à sa propre personne. Le maréchal fit coucher le prince d’Auvergne à Douai cette nuit-là.

Le roi fut un peu choqué de ce que, parmi les trois otages que le prince Eugène voulut retenir dans Lille, à son choix, pour le payement des dettes faites par les François dans la ville, il exigea que Maillebois en seroit un, et ne se cacha pas qu’il le vouloit comme étant le fils aîné de Desmarets. Il lui permit de venir à la cour voir son père et d’y passer quelques jours.

Dans l’intervalle de la capitulation et de la sortie de la garnison, et lors de sa sortie, les ennemis ne se cachèrent point du siège de Gand qu’ils alloient faire. Le duc de Marlborough s’étoit déjà campé tout auprès, et c’est ce qui rendit la séparation de notre armée si surprenante. Mais il n’y avoit plus ni pain ni farines : il fallut céder honteusement et périlleusement à la nécessité. Ils tinrent parole ; Gand fut investi le 11 décembre, par Marlborough, entre le grand et le petit Escaut, et par le prince Eugène, entre la Lys et l’Escaut, après avoir pourvu à Lille, où il laissa une grosse garnison. Le comte de La Mothe commandoit dans Gand, où il avoit vingt-neuf bataillons, plusieurs régiments de dragons, abondance de vivres, d’artillerie, de munitions de guerre, et devant les yeux le grand exemple du maréchal de Boufflers.

M. de Vendôme arriva à Versailles le matin du samedi 15 décembre, et salua le roi comme il sortit de son cabinet pour venir se mettre à table pour dîner à son petit couvert. Le roi l’embrassa avec une sorte d’épanouissement qui fit triompher sa cabale. Il tint le de pendant tout le dîner, où il ne fut question que de bagatelles. Le roi lui dit qu’il l’entretiendroit le lendemain chez Mme de Maintenon. Ce délai, qui lui étoit nouveau, ne lui fut pas de bon augure. Il alla faire la révérence à Mgr le duc de Bourgogne, qui l’accueillit bien, malgré tout ce qui s’étoit passé. Vendôme fut faire sa cour à Monseigneur chez Mme la princesse de Conti, à son retour de la chasse : c’étoit là surtout qu’il se tenoit dans son fort. Il fut reçu au mieux et fort entretenu de riens ; il voulut en profiter et engager un voyage d’Anet. Sa surprise fut grande et celle des assistants, à la réponse incertaine de Monseigneur, qui fit pourtant entendre, et sèchement, qu’il n’irait point. Vendôme parut embarrassé, et il abrégea sa visite. Je le rencontrai dans le bout de la galerie de l’aile neuve, comme je sortois de chez M. de Beauvilliers, qui tournoit au degré du milieu de la galerie. Il étoit seul, sans flambeaux ni valets, avec Albéroni, suivi d’un homme que je ne connus point ; je le vis à la lueur des miens ; nous nous saluâmes poliment de part et d’autre ; je n’avois aucune habitude avec lui. Il me parut l’air chagrin et en chemin de chez M. du Maine, son conseil et son principal appui.

Le lendemain, il ne fut pas une heure avec le roi chez Mme de Maintenon. Il demeura huit ou dix jours à Versailles ou à Meudon, et ne mit pas le pied chez Mme la duchesse de Bourgogne : ce n’étoit pas pour lui une chose nouvelle. Le mélange de grandeur et d’irrégularité qu’il avoit dès longtemps affecté l’avoit, ce lui sembloit, affranchi des devoirs dont on se dispense le moins. Son abbé Albéroni se montroit à la messe du roi, en courtisan, avec une effronterie sans pareille. Enfin ils s’en allèrent à Anet. Dès avant que d’y aller, il s’étoit aperçu de quelque décadence, puisqu’il s’abaissa jusqu’à convier le monde de l’y venir voir, lui qui, les autres années, faisoit grâce d’y recevoir, y regorgeoit de tout ce qu’il y avoit de plus grand et de plus distingué, et ne s’y daignoit apercevoir du médiocre. Dès ce premier voyage, il sentit sa diminution par celle de sa compagnie. Les uns s’en excusèrent, d’autres manquèrent à l’engagement qu’ils avoient pris d’y aller. Chacun se mit à tâter le pavé sur un voyage de quinze lieues, qui se mettoit, les années précédentes, pour le moins à côté de ceux de Marly. Vendôme se tint à Anet jusqu’au premier Marly, où il vint le jour même. Il en usa de la sorte, toujours à Marly et à Meudon, jamais à Versailles, jusqu’au changement dont j’aurai bientôt lieu de parler.

Le roi avoit dépêché au maréchal de Boufflers, à Douai, pour le presser de revenir. Il arriva le dimanche 15 décembre, le lendemain du duc de Vendôme, héros factice de faveur et de cabale, sans que pas un des siens même le crût tel ; l’autre, héros malgré soi-même, par l’aveu public des François et de leurs ennemis. Jamais homme ne mérita mieux le triomphe, et n’évita avec une modestie plus attentive, mais la plus simple, tout ce qui pouvoit le sentir. Sa femme fut au-devant de lui dès le matin, à quelques lieues de Paris, l’y amena dîner chez lui à huis clos, et sans qu’on sût son arrivée, et de là à Versailles à la nuit, droit à leur appartement et sous clef.

Aussitôt il manda au duc d’Harcourt, en quartier de capitaine des gardes, qu’il le prioit de faire dire au roi qu’il étoit arrivé, et qu’il attendoit le moment de lui aller faire sa révérence. Le roi, qui venoit de finir l’audience de M. de Vendôme, lui fit dire sur-le-champ de venir le voir chez Mme de Maintenon. En voyant ouvrir la porte, le roi fut au-devant de lui, et dans la porte même l’embrassa étroitement à deux et trois reprises, lui fit des remerciements flatteurs et le combla de louanges. Pendant ces moments, ils s’étoient avancés dans la chambre, la porte s’étoit fermée, et Mme de Maintenon étoit venue féliciter le maréchal, qui suivoit le roi, lequel aussitôt, se tournant à lui, lui dit : « Qu’ayant aussi grandement mérité de lui et de l’État qu’il venoit de faire, c’étoit à son choix qu’il en mettoit la récompense. » Boufflers s’abîma en respects, et répondit que de si grandes marques de satisfaction le récompensoient au-dessus de ce qu’il pouvoit non seulement mériter, mais désirer. Le roi le pressa de lui demander tout ce qu’il voudroit, et d’être sûr de l’obtenir à l’heure même ; et le maréchal toujours retranché dans la même modestie. Le roi insista encore pour qu’il lui demandât, pour lui et pour sa famille, tout ce qu’il pouvoit désirer, et le maréchal persista à se trouver trop magnifiquement payé de ses bontés et de son estime. « Oh bien ! monsieur le maréchal, lui dit enfin le roi, puisque vous ne voulez rien demander, je vais vous dire ce que j’ai pensé, afin que j’y ajoute encore quelque chose, si je n’ai pas assez pensé à tout ce qui peut vous satisfaire : je vous fais pair, je vous donne la survivance du gouvernement de Flandre pour votre fils, et je vous donne les entrées des premiers gentilshommes de la chambre. » Son fils n’avoit que dix ou onze ans. Le maréchal se jeta aux genoux du roi, comblé de ses grâces pardessus toutes espérances ; il eut aussi en ce même moment la survivance pour son fils des appointements du gouvernement particulier de Lille. Le tout ensemble passe cent mille livres de rente.

Ces trois grâces, si bien méritées, étoient uniques alors, chacune dans leur genre. Celle à laquelle le maréchal fut le plus sensible, quoique touché de toutes au point où il devoit l’être, fut la première.

La porte en étoit fermée depuis longtemps ; le roi s’étoit repenti de ces quatorze pairs qu’il avoit faits en 1663 [1], tous ensemble, qui l’engagèrent aux quatre qu’il ajouta en 1665. Il s’étoit déclaré qu’il n’en feroit plus. De là les ducs vérifiés ou héréditaires qu’il fit depuis, que les ignorants ont crus de son invention, et qui sont de toute ancienneté, mais dont il n’y avoit plus [2]. Bar n’a jamais été autre, les trois Nemours, Longueville, Angoulême, Étampes et je ne sais combien d’autres. L’archevêque de Paris, par sa faveur et par sa parole, et le duc de Béthune, par le billet qu’il avoit de sa main, comme je l’ai dit ailleurs, la lui forcèrent encore, et avec nouvelle protestation qu’il n’en feroit plus. Dégoûté aussi des survivances, par le peu de satisfaction qu’il avoit éprouvée de jeunes gens comblés avant l’âge, et qui, n’avant plus rien de solide à prétendre, ne se soucioient plus de rien mériter, il s’étoit si nettement expliqué sur cela depuis bien des années que personne n’osoit plus y songer. C’étoit une grâce réservée aux seuls secrétaires d’État, parce qu’il n’en put jamais refuser à ses ministres, et qu’il se complaisoit à se servir de jeunes gens dans ces places si importantes, pour montrer qu’il gouvernoit seul et qu’il les formoit, bien loin d’être gouverné par eux, quoique jamais prince ne le fût tant que lui.

Les grandes entrées, depuis la mort du père de La Feuillade, M. de Lauzun étoit le seul homme qui les eût sans charge qui les donnât. Outre la distinction et la commodité, cette grâce étoit regardée comme principale, par la facilité qu’elle donnoit de parler au roi sans témoins et sans audiences, rares et difficiles à obtenir, et qui toujours faisoient nouvelles, et de lui parler tous les jours et en différentes heures avec toute liberté.

Boufflers eut la satisfaction qu’il ne se trouva qui que ce soit, parmi une cour si envieuse et dans toute la France, qui n’applaudit à ce que le roi fit pour lui, et qui ne trouvât également juste et séant qu’il fût récompensé par une dignité la première du royaume, dont l’éclat passoit à sa postérité, par une privante également flatteuse par sa familiarité et sa singularité, enfin par la conservation dans sa famille, même sur la tête d’un enfant, d’un gouvernement qu’il avoit si dignement défendu, presque malgré le roi, et sans aucun besoin de le faire, ni par son devoir d’y aller, ni pour sa réputation tout acquise, ni pour sa fortune si grandement dès lors achevée.

On remarqua à sa gloire la différence de la défense de Namur, avec une excellente garnison, mais sous la tutelle de l’ingénieur Mesgrigny, quoique cette défense eût été fort belle, d’avec celle de Lille, qui avoit roulé sur lui seul, presque sans garnison, que de milices et de troupes nouvelles qui ne valoient pas mieux, des munitions de guerre et de bouche très-médiocres, encore moins d’argent, et de l’avoir fait durer plus de six semaines au delà de ce que le célèbre Vauban, qui avoit construit la place à plaisir, avoit dit qu’il la pourroit défendre, munie de tout ce qu’il auroit désiré.

Mais ce qui mit le comble à la gloire de Boufflers, et tout le monde à ses pieds, fut cette rare et vraie modestie de laquelle rien ne le put ébranler, et qui lui fit constamment rapporter à sa garnison toute la réputation qui l’environnoit, et à la pure bonté du roi l’éclat nouveau dont il brilloit par des grâces si distinguées et si complètes. À le voir, on eût dit qu’il en étoit honteux ; et, à travers la joie qu’il ne cachoit pas, on étoit saisi d’une vérité et d’une simplicité si naturelles qui sortoient de lui et qui relevoient jusqu’à ses moindres discours. Il le détournoit toujours de ses louanges par celles de sa garnison, et il avoit toujours quelque action de quelqu’un à raconter toute prête pour fermer la bouche sur les siennes.

Ce contraste avec Vendôme, arrivé de la veille, se fit bien remarquer : l’un, élevé à force de machines et entassant les montagnes comme les géants, appuyé du vice, du mensonge, de l’audace, d’une cabale ennemie de l’État et de ses héritiers, un héros factice, érigé tel par volonté, en dépit du vrai ; l’autre, sans cabale, sans appui que de sa vertu, de sa modestie, du soin de relever les autres et de s’éclipser derrière eux, vit les grâces couler sur lui de source jusqu’à l’inonder, et les applaudissements des ennemis suivis des acclamations publiques jusqu’à changer la nature des courtisans, qui s’estimèrent comblés eux-mêmes de ses récompenses.

N’oublions pas qu’il fit donner six mille livres d’augmentation de pension au chevalier de Luxembourg, qui en avoit déjà autant, et qui avoit été fait lieutenant général, comme je l’ai dit, pour être entré dans Lille avec le secours et les poudres qu’il y jeta.

Peu de jours après le retour de Mgr le duc de Bourgogne, Cheverny, sortant d’avec lui tête à tête, et qui étoit homme très-véritable, me fit un récit que je ne puis me refuser de mettre ici, et que toutefois je n’y puis écrire sans confusion. Il me dit que, lui parlant avec liberté des propos tenus sur lui pendant la campagne, le prince lui dit qu’il savoit comment et avec quelle vivacité j’en avois parlé, et qu’il étoit instruit aussi de la manière dont M. le prince de Conti s’en étoit expliqué, et ajouta que, lorsqu’on avoit la voix de deux hommes semblables, on avoit lieu de se consoler des autres. Cheverny, qui en étoit plein, me le vint raconter à l’instant. Je le fus de confusion d’être mis à côté d’un homme plus supérieur encore à moi en ce genre qu’il ne l’étoit en rang et en naissance ; mais je sentis avec complaisance combien M. de Beauvilliers m’avoit effectivement tenu parole lorsque je voulus aller à la Ferté.

Le duc de Berwick arriva à la cour le dimanche 23 décembre. Il ne se contraignit ni en particulier ni en public sur M. de Vendôme, ni sur tout ce qui s’étoit passé en Flandre. À son exemple, presque tout ce qui en étoit revenu commença à parler. Les manèges sur le secours de Lille, les mensonges de Pont-à-Marck et de Mons-en-Puelle, celui sur les retranchements de Marlborough, le passage de l’Escaut, furent dévoilés et mis au clair ; l’ignorance où la retenue d’écrire en avoit laissé le gros du monde y causa un étonnement étrange, puis une indignation à quoi la cabale de Vendôme ne put opposer que des verbiages entortillés et des menaces secrètes, qui démontrèrent encore plus manifestement les vérités si longuement suffoquées. Cette cabale commençoit à être embarrassée du succès si différent de l’arrivée de son héros, du peu de gens qui alloient à Anet, et du bruit fort répandu que Mgr le duc de Bourgogne serviroit la campagne suivante, et n’auroit que des maréchaux de France sous lui. L’air de disgrâce commençoit à se faire sentir ; elle ne tarda pas à se déclarer tout entière.

Chamillart, pénétré de l’importance de la perte de Lille, amoureux du bien de l’État et de la gloire personnelle du roi, avoit conçu le dessein de le reprendre incontinent après la séparation de l’armée des ennemis, et le départ du prince Eugène et du duc de Marlborough de Hollande. Son projet étoit fait, beau, bien conçu, bien digéré ; il y avoit mis la dernière main à son dernier voyage en Flandre, et tous ses arrangements faits, jusqu’à des troupes de l’armée qui avoit servi en Dauphiné et en Savoie, qu’il faisoit venir en Flandre. Il vouloit faire marcher le roi pour donner vigueur aux troupes, et à lui seul l’honneur de la conquête ; mais comme l’argent étoit difficile, et que ce siège seroit cher, il avoit résolu que les équipages seroient courts, et surtout que les dames ne seroient pas du voyage, qui ne causent que beaucoup de dépense et d’embarras à mener sur la frontière.

Pour s’en mieux assurer, il falloit cacher ce projet en entier à Mme de Maintenon, et obtenir du roi d’y consentir et de lui en garder le secret jusqu’au bout. Chamlay, à qui Chamillart le confia, et avec qui il acheva de prendre les plus justes mesures, approuva fort cet excellent projet, mais en ami il avertit Chamillart qu’il jouoit à se perdre ; que Mme de Maintenon ne le lui pardonneroit point ; qu’un semblable dessein pour Mons, où Louvois ne vouloit point mener les dames, l’avoit perdu sans ressource, quoique plus ancré et plus établi que lui ; que tout cela avoit passé sous ses yeux ; qu’il se fît sage par un si funeste exemple, et qui avoit suivi la conquête de Mons de si près, puisque lui-même ne pouvoit avoir oublié qu’il savoit par le roi même que si Louvois ne fût pas mort le jour qu’il mourut si subitement, il étoit arrêté le lendemain même ; et il est vrai que Chamillart me l’a conté et m’a dit qu’il l’avoit appris du roi.

Chamillart sentit tout le danger, mais il étoit courageux, il aimoit l’État, et je puis dire le roi comme on aime une maîtresse. Il le compta pour tout, soi pour rien, et passa outre. Tout bien mâché et bien préparé, il communiqua son projet au roi, qui fut charmé de l’ordre, de la facilité, de la beauté.

Là-dessus le maréchal de Boufflers, destiné à faire ce siégé sous le roi, eut communication de tout, et fut renvoyé en Flandre sous prétexte d’y donner divers ordres pendant une partie de l’hiver, en effet pour disposer tout sur les lieux et y attendre le roi. Mais pour ne donner point d’ombrage, on se contenta pour lors de laisser en Flandre les officiers généraux nommés dès avant la fin de la campagne, pour y servir l’hiver, sans leur rien communiquer du secret ; on ne voulut pas même renvoyer aucun colonel, ni aucun des officiers particuliers qui étoient revenus.

Le roi, engoué de ce projet, et qui n’avoit pas accoutumé de rien cacher à Mme de Maintenon, importuné sans doute de ne travailler à cela que chez lui avec Chamillart, à des heures rompues, ne put tenir plus longtemps à se mettre au large, se promettant bien qu’il rendroit Mme de Maintenon capable des solides et pressantes raisons qui devoient la faire demeurer à Versailles avec Mme la duchesse de Bourgogne et toutes les dames. Il lui confia donc cet admirable projet. Mme de Maintenon eut l’adresse de cacher sa surprise et la force de dissimuler parfaitement son dépit ; elle loua le projet, elle en parut charmée, elle entra dans les détails, elle en parla à Chamillart, admira son zèle, son travail, sa diligence, et surtout d’avoir conçu un si beau et si grand exploit, et de l’avoir rendu possible.

Boufflers partit le 26 décembre, et le même jour Berwick eut une longue audience du roi chez Mme de Maintenon, où il parla en toute liberté, malgré toute sa timide politique. Mais il étoit à bout des procédures et des procédés. Les régiments des gardes françaises et suisses eurent ordre le même jour de se tenir prêts à marcher le ter février. On verra dans les commencements de l’année prochaine, le succès de ces grands préparatifs.

La tranchée fut ouverte à Gand la nuit du 24 au 25 décembre où le comte de La Mothe avoit pour deux mois de vivres, tant pour la garnison que pour les habitants, qui étoient quatre-vingt mille ; beaucoup de canon et de mortiers, et quatre cent milliers de poudre. Mme de Ventadour, qui s’obstinoit à le vouloir voir maréchal de France, lui procura encore cette défense, pour effacer le funeste succès de ce grand convoi des ennemis qu’il vouloit enlever, et qui le battit si vilainement, par où s’acheva la perte de Lille.

La dernière soirée de cette année fut fort remarquable, parce qu’elle n’avoit point eu d’exemple. Le roi étant entré, au sortir de son souper, dans son cabinet avec sa famille, à l’ordinaire, Chamillart y vint sans être mandé. Il dit au roi, à l’oreille, qu’il lui apportoit une grande dépêche du maréchal de Boufflers. Aussitôt le roi donna le bonsoir à Monseigneur et aux princesses, qui sortirent avec tout ce qui étoit dans les cabinet, et le roi travailla une heure avec son ministre avant de se coucher, tant il étoit épris du grand projet de la reprise de Lille.




  1. Voy., sur cette création de pairs, t. Ier, p. 449.
  2. Voy., sur les ducs vérifiés, t. Ier, p. 129, note.