Mémoires de la ville de Dourdan/Jean Duc de Berry

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Iean Duc de Berry.

Si la maiſon d’Eureux a eu vne particuliere inclination pour Dourdan en ſuite de ſes ayeuls Roys de France, ce n’a point eſté par habitude ny par autre conſideration que de la beauté & bonté du pays : puiſque tous ceux qui depuis en ont eſté Seigneurs & qui en ont peu joüir ont eu les meſmes affections & l’ont eu en pareil eſtime : Le Duc de Berry n’en fut pas pluſtoſt Seigneur, qu’il y transfera & ſon habitation & ſes affections, comme on peut juger de ce que dés le mois de Feurier 1400. Incontinent apres la mort de Loüis Comte d’Eſtampes, il decerna ſes lettres patentes données à Dourdan au profit du Prieur de ſainct Germain, deux ans apres confirma le droict qui luy auoit eſté donné dans la foreſt : & en fin feit deux teſtaments à Dourdan, l’vn du 2. Iuillet 1408. paſſé pardeuant Simon Bonnet Tabellion à Dourdan, par lequel il nomma pour executeur ce Prieur, & luy donna le jardin qui eſtoit deuant le chaſteau (au lieu duquel eſt à preſent la place dont a eſté parlé cy-deſſus) & l’autre du 17. Ianuier 1412. paſſé pardeuant Loüis le Ricordeau auſſi Tabellion à Dourdan, par lequel il donna au meſme Prieur le jardin qui ſe trouue encores aujourd’huy ſur le rempart dependant du Prieuré : & en furent executeurs Guillaume Beaumaiſtre Eueſque de Conſerant & Iean Dauid Chancelier du Duc d’Orleans, & Bailly de Dourdan. Il eſt bien vray que ie n’ay pas encores peu voir ny les deux lettres patentes, ny les deux teſtaments, mais ie les ay trouué enoncez dans l’inuentaire des tiltres de ſainct Cheron lez Chartres : C’eſt pourquoy ie les puis alleguer hardiment.

Peu de temps apres la tranſaction cy deſſus le Duc de Berry qui n’auoit aucuns enfans maſles, feit vne remiſe generale au Roy Charles VI. ſon nepueu de tous ſes biens, meſmes des villes d’Eſtampes & Dourdan, en cas qu’il decedaſt ſans enfans : à la charge que le Roy donneroit cent mille liures à Bonne ſa fille Comteſſe de Sauoye & ſoixante mil à Marie femme du fils du Comte de Blois ſon autre fille (mariée en ſeconde nopce à Iean de Bourbon Comte de Clermont) mais depuis il obtint ceſte grace du Roy que de pouuoir (nonobſtant la remiſe) diſpoſer d’Eſtampes, Gien, & Dourdan, & en conſequence de ce les donna (l’vſufruict toutesfois reſerué ſa vie durant) à ſon frere Philippes le Hardy Duc de Bourgongne en faueur de ſon fils aiſné, duquel il eſtoit parrain (diſent les Memoriaux de la Chambre des Comtes au liure E. fueillet 77.)

Donation du Duc de Berry.

Iean fils de Roy de France, Duc de Berry & d’Auuergne, Comte de Poictou : ſçauoir faiſons à tous preſents & auenir, que comme nous ayons acquis par certains & juſtes tiltres les Comtez, chaſtel, ville & Chaſtellenie d’Eſtampes, & les chaſteaux, ville & Chaſtellenie de Gien & de Dourdan, enſemble leurs appartenances & dependances, & en ayons eſté receus en foy & hommage de Monſieur le Roy, reſerué le viaige de noſtre tres-cher couſin Meſſire Loüis Comte d’Eſtampes. Et il ſoit ainſi que nous n’ayons qu’vn ſeul fils & deux filles qui ſont mariées, & que noſtre tres-chier & tres-amé frere Philippe Duc de Bourgongne ait pluſieurs enfans maſles & femelles, & ſoit diſpoſé au plaiſir de Dieu d’en auoir encores d’autres, Et pour la tres-parfaicte amour que nous auons à noſtredit frere & à ſes enfans, tant pour raiſon naturelle comme pour les tres-grands biens, honneurs, prouffits & plaiſirs que noſtredit frere nous a faits toute ſa vie & fait chacun iour, Nous voudrions plus (ou cas que nous treſpaſſerions ſans hoir maſle procreé de noſtre corps en loyal mariage) que leſdits Comtez, chaſteaux, villes & Chaſtellenies veinſſent & eſcheuſſent à noſtredit frere à ſes enfans maſles, & à leurs ſucceſſeurs maſles procréez en droite ligne qu’à nos filles ne autres perſonnes quelſconques. Nous (pour les conſiderations deſſuſdites & autres juſtes & raiſonnables qui à ce nous meuuent, euë ſur ce grand & meure deliberation de noſtre certaine ſcience auons donné, cedé & tranſporté, donnons, cedons & tranſportons par donation irreuocable faite entre vifs ou cas que nous treſpaſſerions de ce ſiecle ſans hoir maſle procreé de noſtre cors en loyal mariage, à noſtredit frere & à ſes enfans & leurs ſucceſſeurs maſles procréez en ligne directe leſdits Comté, chaſtel, ville & Chaſtellenie d’Eſtampes & leſdits chaſteaux, villes & chaſtellenies de Gien & de Dourdan, enſemble toutes leurs appartenances & dependances tant en juſtices hautes, moyennes & baſſes, reſſorts & juriſdictions, comme fiefs & arrieresfiefs hommes & femmes de corps, patronages & collations de benefices, bois, eaux, garennes, terres, rentes, reuenus, profits & eſmoluments quelſconques ſans y rien retenir, reſerué le viage de noſtredit couſin : & ſe au temps de noſtre decès il eſtoit treſpaſſé, nous voulons que ledit vſufruict ſoit conſolidé auec la proprieté deſdictes Conté, Chaſteaux, villes, Chaſtelleries & appartenances, au profit de noſtredit frere & de ſes enfans maſles, comme dit eſt, que tantoſt apres noſtre decés, ſe lors n’auions hoir maſle procreé de noſtre corps, comme deſſus eſt dit, noſtredit frere & ſes enfans maſles puiſſent pranre & aprehander la poſſeſſion & ſaiſine corporelle deſdits Conté, Chaſteaux, villes, & Chaſtelleries, & en leuer & perceuoir les fruicts, proufis & eſmolumens, & que deſmaintenant noſtredit frere en puiſſe entrer en foy & hommage, à la charge & par les formes & conditions deſus declarées : & ou cas que noſtredit frere, ou les enfans maſles, treſpaſſeroient en quelque temps que ce fuſt, ſans hoir maſle procreé de leur corps, & que d’eux ne ſeroient trouuez aucuns hoirs maſles deſcendens d’eux par droicte ligne en loial mariage, leſdits Conté, Chaſteaux, Villes & Chaſtelleries, appartenances & appendances, retourneroient de plain droict ſans difficulté à nos filles, ou aus deſcendens d’elles en droicte ligne, ou à celuy ou ceulx qu’il appartiendra de raiſon : Promettans en bonne foy, & par noſtre ſerment, & ſoubs l’obligation de tous nos biens, auoir ferme & eſtable ceſte preſente donation, ſans iamais venir à l’encontre : & que ce ſoit choſe ferme & eſtable à touſiours, nous auons fait mettre noſtre ſeel à ces lettres. Donné à Paris le xxviij. iour de Ianuier, l’an de grace mil trois cens quatre vins & ſept. Ainſi ſigné par Monſieur le Duc, vous & le Conte de Sanxerre, preſens Gontier, &c.