Mémoires extraits des recueils de l’Académie royale de Berlin/Théorie de la libration de la Lune
THÉORIE
DE LA LIBRATION DE LA LUNE,
ET
DES AUTRES PHÉNOMÈNES QUI DÉPENDENT DE LA FIGURE NON SPHÉRIQUE DE CETTE PLANÈTE.
de Berlin, année 1780.)
C’est un phénomène reconnu depuis longtemps que la Lune nous présente toujours la même face ; mais ce n’est que depuis l’invention des lunettes qu’on a pu déterminer les lois de la libration, c’est-à-dire de ces balancements que la Lune paraît faire autour de son centre, et par lesquels, dans le cours de chaque mois, elle nous cache et nous découvre alternativement, vers ses bords, quelque partie de sa surface. Galilée est le premier qui ait observé la libration, mais il paraît n’en avoir bien connu qu’une partie, celle qui se fait perpendiculairement à l’écliptique, et qu’on nomme libration en latitude. Hévélius découvrit ensuite la libration en longitude ; mais il était réservé à Dominique Cassini de donner une explication générale et complète de ce phénomène. Il trouva qu’on pouvait satisfaire à toutes les apparences de la libration, en supposant : 1o que la Lune tourne uniformément autour d’un axe dont les pôles, fixes sur sa surface, soient constamment élevés sur l’écliptique de et sur le plan de l’orbite, de et soient toujours sur un grand cercle du globe de la Lune, parallèle au grand cercle qui passe par les pôles de l’orbite et par ceux de l’écliptique ; 2o que la rotation de cette Planète autour de son axe s’achève dans l’espace de jours et heures, par une période égale à celle du retour de la Lune au nœud de son orbite avec l’écliptique.
Cette Théorie ne parut qu’après la mort de Cassini. Son fils Jacques Cassini la donna, en 1721, dans les Mémoires de l’Académie des Sciences de Paris, mais sans aucun détail des observations qui avaient servi à l’établir. Elle avait donc besoin d’être vérifiée par de nouvelles observations, et c’est de feu Tobie Mayer qu’elle a reçu la perfection qui lui manquait encore. Cet Astronome publia en 1750, dans les Kosmographische Nachrichten de Nuremberg, la première Partie d’un Traité sur la rotation de la Lune et le mouvement apparent de ses taches, destiné à servir de base à une nouvelle Sélénographie. On doit regretter que l’Auteur ne l’ait pas achevé ; mais ce qu’il nous en a laissé peut être regardé comme un Ouvrage complet sur la Théorie astronomique de la libration.
Par une suite d’observations de plusieurs taches de la Lune, faites avec soin pendant les années 1748 et 1749, et calculées avec toute la précision et l’élégance qu’on peut désirer, Mayer trouve que le plan de l’équateur lunaire est incliné sur le plan de l’écliptique de degré et minutes, que la section de ces deux plans est toujours à peu près parallèle à la ligne des nœuds moyens de l’orbite de la Lune, en sorte que le plan de l’écliptique tombe entre les deux plans de l’équateur et de l’orbite de la Lune, et que la Lune tourne sur l’axe de son équateur, d’Occident en Orient, de manière que chaque point de cet équateur revient au point équinoxial lunaire dans un temps précisément égal à celui dans lequel la Lune revient au nœud par son mouvement moyen, c’est-à-dire dans l’espace de mois draconitique, lequel est, comme on sait, de Ces déterminations s’accordent avec celles de Cassini, à l’exception de l’inclinaison de l’équateur lunaire, que Cassini a faite de degrés et demi, et que Mayer a diminuée de degré. Cela pourrait faire croire que cette inclinaison est variable et va en diminuant ; mais Mayer prétend qu’on peut prouver, par des observations faites du temps de Gassini, que cet Astronome s’est en effet trompé de degré dans la détermination de l’inclinaison de l’équateur lunaire, et il promet d’en donner la démonstration dans une autre Partie de son Ouvrage. Enfin les déterminations de Mayer se trouvent confirmées par les observations que M. de la Lande a faites en 1763, et dont il a donné les détails et les résultats dans les Mémoires de l’Académie des Sciences de Paris pour il est vrai que M. de la Lande trouve degré et minutes pour l’inclinaison de l’équateur lunaire ; mais cette différence pouvant être attribuée aux erreurs des observations, on n’en saurait encore rien conclure par rapport à la variabilité de cette inclinaison.
Telles sont les lois de la rotation de la Lune qu’on a déduites des observations, et qui étant combinées avec celles du mouvement de cette Planète autour de la Terre suffisent pour déterminer à chaque instant la position apparente du disque lunaire ; mais si la connaissance de ces lois suffit pour les besoins de l’Astronomie, l’Astronomie physique exige de plus la connaissance de leurs causes ; et cette dernière connaissance est d’autant plus intéressante qu’elle peut fournir les moyens non-seulement de constater et de rectifier les lois déjà connues, mais encore d’en découvrir de nouvelles. L’accord des nœuds de l’équateur de la Lune avec ceux de son orbite, et l’égalité entre la révolution de l’équateur de la Lune par rapport à ses nœuds et la révolution de cette Planète dans son orbite par rapport aux nœuds de cette orbite, sont peut-être les phénomènes les plus singuliers du Système du monde. Il résulte de leur combinaison que la durée de la rotation entière de la Lune doit être parfaitement égale à celle du temps périodique de cette Planète ; et cette égalité est évidemment une suite nécessaire de ce que la Lune nous montre toujours la même face ; phénomène qui pour être connu depuis longtemps n’en est pas moins extraordinaire, quoique d’ailleurs il ne paraisse pas unique dans le Système du mbnde. En effet il semble qu’on puisse conclure quelque chose de semblable, à l’égard du premier satellite de Saturne et du quatrième satellite de Jupiter, des observations faites par Cassini et Maraldi sur les taches de ces satellites (voyez l’Histoire de l’Astronomie moderne, livre X, § XIII, et livre XI, § XVI) ; ce qui porterait à regarder cette égalité entre la rotation et la révolution comme une loi générale des Planètes secondaires.
Quoi qu’il en soit, comme le système de l’attraction universelle ne rend jusqu’à présent aucune raison de la rotation des Planètes autour de leurs axes, il n’en peut rendre aucune de l’égalité dont il s’agit. Le mouvement de rotation d’un corps est indépendant de son mouvement de translation ; ces deux mouvements résultent d’une impulsion primitive et arbitraire, et peuvent être par conséquent entre eux dans tel rapport que l’on veut. Si donc la rotation de la Lune est uniforme et parfaitement égale à sa révolution autour de la Terre, il est nécessaire de supposer que la vitesse de rotation primitive, imprimée à cette Planète, est exactement égale à sa vitesse moyenne de translation autour de la Terre ; et il est clair que cette égalité doit être tout à fait rigoureuse ; autrement la différence entre les angles décrits par les méridiens de la Lune autour de son axe et les angles parcourus en même temps par le centre de la Lune autour de la Terre irait continuellement en augmentant ; d’où il s’ensuivrait que cette Planète devrait à la longue présenter successivement ses faces à la Terre. Mais cette égalité rigoureuse n’est plus nécessaire si l’on suppose que le mouvement de rotation de la Lune soit sujet à quelques inégalités dépendantes de l’attraction de la Terre sur cette Planète supposée non sphérique. Il suffit en ce cas que la Lune ait reçu une vitesse de rotation primitive peu différente de sa vitesse moyenne de translation, et qu’ensuite l’action de la Terre détruise l’effet de cette petite différence, en empêchant le côté de la Lune qui est tourné vers la Terre de s’en écarter au delà d’un certain terme, à peu près comme l’action de la gravité retient autour de la perpendiculaire un pendule qui n’a reçu qu’une impulsion assez petite.
Cette manière d’expliquer pourquoi la Lune nous montre toujours à peu près la même face est assez simple et naturelle ; je l’avais déjà proposée dans mes Recherches sur la libration de la Lune présentées à l’Académie des Sciences de Paris en 1763 [voyez le tome IX des Prix de cette Académie[1]]. M. d’Alembert l’a confirmée depuis par une analyse encore plus exacte de ce Problème ; et elle ne paraît rien laisser à désirer sur le phénomène de l’égalité entre la révolution de la Lune autour de son centre, et sa révolution autour de la Terre, du moins en tant que l’atfraction universelle peut en rendre raison.
Mais, si l’on est parvenu à trouver une explication satisfaisante de ce phénomène, il paraît qu’on n’a pas été si heureux à l’égard de l’autre phénomène de la rotation de la Lune, qui concerne l’égalité entre le mouvement des nœuds de l’équateur lunaire et celui des nœuds de l’orbite de la Lune. En considérant cette Planète comme non sphérique, il est clair que l’action de la Terre doit continuellement changer la position de son équateur, comme l’action de la Lune et celle du Soleil déplacent à chaque instant l’équateur de la Terre ; mais le mouvement des points équinoxiaux de la Terre est très-lent (n’étant que de 50 par an) et paraît n’avoir aucun rapport aux mouvements du Soleil et de la Lune ; il n’y a que l’inégalité périodique de ce mouvement, qu’on appelle l’équation de la précession des équinoxes, et la petite variation de l’obliquité de l’écliptique, qu’on nomme la nutation de l’axe de la Terre, qui dépendent du mouvement des nœuds de la Lune. Aussi M. d’Alembert, qui s’est occupé le premier de la Théorie physique de la libration de la Lune, en appliquant à cette Planète les formules qu’il avait données pour la Terre, a d’abord trouvé des résultats peu conformes aux observations (voyez le XVme Mémoire de ses Opuscules, tome II). Je tâchai dans mes Recherches sur la libration de suppléer ce qui manquait à cet égard à la Théorie de M. d’Alembert, en faisant voir que la circonstance de l’égalité entre le temps de la rotation de cette Planète et celui de sa révolution autour de la Terre empêche que les formules du mouvement de l’axe de la Terre ne puissent avoir lieu par rapport à celui de la Lune, et en donnant les véritables équations qui doivent servir à déterminer le vrai mouvement de cet axe ; mais voyant que ces équations, qui sont au nombre de deux, et du second ordre, étaient trop compliquées pour pouvoir être intégrées rigoureusement par les méthodes connues, je me contentai de les traiter comme M. d’Alembert avait fait celles du mouvement de l’axe de la Terre, en les réduisant au premier ordre par l’omission des termes qui contiennent les différences secondes des variables, et que je supposai pouvoir être négligés sans erreur sensible. J’obtins de cette manière de nouvelles formules pour les mouvements de l’axe lunaire, mais dans lesquelles le mouvement des nœuds de l’orbite de la Lune n’avait aucun rapport au mouvement des nœuds de son équateur ; l’égalité de ces deux mouvements étant ensuite supposée, je trouvai qu’il résultait de là que l’axe de la Lune devait s’approcher insensiblement du plan de l’écliptique, ce qui paraît contraire aux observations. M. d’Alembert ayant repris cette matière dans les Mémoires de l’Académie des Sciences de Paris pour 1768, et l’ayant discutée avec beaucoup plus de profondeur et de détail qu’on n’avait encore fait, est parvenu à des résultats analogues aux miens, mais plus généraux ; il a déterminé de plus, par des équations et des constructions géométriques fort simples, les cas où les mouvements des points équinoxiaux lunaires et des nœuds de l’orbite de la Lune doivent être égaux, et ceux où leur plus grande différence en longitude peut être égale ou, moindre que la circonférence, mais toujours dans la supposition que les équations différentielles des mouvements de l’axe de la Lune puissent être regardées et traitées comme des équations différentielles du premier ordre.
On voit par là que le Problème des mouvements de l’axe lunaire n’a été résolu jusqu’ici d’une manière satisfaisante ni du côté de l’Analyse, ni par rapport à l’observation ; et que le système de la gravitation universelle, qui a si bien rendu raison des différents mouvements de la Lune autour de la Terre, n’a pas encore expliqué le point le plus remarquable de la Théorie de cette Planète, la coïncidence des nœuds de l’équateur lunaire avec ceux de l’orbite de la Lune. J’ai donc cru devoir revenir sur cette question et la traiter avec toute l’exactitude et tout le détail qui sont dus à son importance et à sa difficulté ; et, pour ne rien laisser à désirer sur les phénomènes qui peuvent dépendre de l’attraction de la Terre sur la Lune supposée non sphérique, je me suis proposé d’examiner nonseulement ceux qui ont rapport à la rotation de cette Planète, mais aussi ceux qui regardent le mouvement de translation de la Lune autour de la Terre.
Tel est l’objet des Recherches que j’ai l’honneur de présenter à l’Académie elles sont partagées en cinq Sections.
La première est destinée à l’exposition d’une méthode générale et analytique pour résoudre tous les Problèmes de la Dynamique. Cette méthode, que j’ai employée le premier dans ma Pièce sur la libration de la Lune ; a l’avantage singulier de ne demander aucune construction ni aucun raisonnement géométrique ou mécanique, mais seulement des opérations analytiques assujetties à une marche simple et uniforme. Elle n’est autre chose que le principe de Dynamique de M. d’Alembert, réduit en formule au moyen du principe de l’équilibre appelé communément loi des vitesses virtuelles. Mais la combinaison de ces deux principes est un pas qui n’avait pas été fait, et c’est peut-être le seul degré de perfection qui, après la découverte de M. d’Alembert, manquait encore à la Théorie de la Dynamique.
Dans la seconde Section, je considère, en général, le mouvement d’un corps de figure quelconque, et je donne les formules nécessaires pour déterminer ce mouvement. J’indique ensuite une transformation très-utile pour faciliter le calcul, dans le cas où le mouvement de rotation se fait autour d’un axe fixe dans le corps et mobile dans l’espace, mais qui demeure toujours à peu près perpendiculaire à un plan immobile ; ce qui est le cas de la Lune par rapport à l’écliptique. On pourrait aussi s’en servir pour déterminer les oscillations d’un pendule de figure quelconque, lorsque l’axe du pendule ne s’écarte que très-peu de la verticale, et que le pendule a en même temps un mouvement quelconque de rotation autour de l’axe ; Problème jusqu’ici non résolu.
Dans la troisième Section, j’applique les formules au mouvement de la Lune, en tant qu’elle est attirée par la Terre et par le Soleil, et je parviens directement à six équations différentielles du second ordre, dont trois donnent le mouvement du centre de gravité de la Lune autour de la Terre, et les trois autres donnent son mouvement de rotation autour de ce centre. Ces équations sont présentées sous la forme la plus simple, et les trois dernières ont surtout l’avantage que les variables n’y sont que linéaires ; à l’égard des trois premières, elles sont analogues à celles que M. Euler a employées dans sa nouvelle Théorie de la Lune, mais elles contiennent de plus les termes dus à la non-sphéricité de cette Planète et que M. Euler a négligés, Je termine cette Section par des considérations sur la figure de la Lune, que je regarde d’abord pour plus de simplicité comme un sphéroïde elliptique homogène dont l’équateur et les méridiens seraient des ellipses très-peu excentriques ; je prouve ensuite que cette figure est en effet celle que la Lune aurait dû prendre, en vertu de la force centrifuge de ses parties, combinée avec l’attraction de la Terre, si elle avait été primitivement fluide, et je détermine dans cette hypothèse les véritables dimensions de cette figure par une méthode et des formules plus simples à quelques égards que celles qu’on avait déjà données pour cet objet il en résulte que la Lune devrait être élevée sous son équateur, mais quatre fois plus dans le sens du diamètre de cet équateur qui est dirigé vers la Terre, et qui passe par conséquent par le centre apparent de la Lune, que dans le sens du diamètre perpendiculaire à celui-ci et qui passe par les bords apparents de cette Planète.
Dans la quatrième Section, je traite en particulier des mouvements de la Lune autour de son centre ; ces mouvements se réduisent à la rotation de la Lune autour d’un axe fixe dans l’intérieur de cette Planète, et aux mouvements de cet axe, ou du plan de l’équateur lunaire qui liai est perpendiculaire, par rapport au plan de l’écliptique. Suivant la Théorie de la libration donnée par Mayer, le lieu moyen de la Terre vue du centre de la Lune et rapportée à l’équateur de cette Planète doit toujours répondre à un même point de cet équateur ; et le méridien lunaire qui passe par ce point est celui que Mayer prend pour le premier méridien de la Lune, et auquel il rapporte les longitudes sélénographiqucs de ses taches. Mais cette Théorie suppose l’uniformité du mouvement de rotation de la Lune ; si donc ce mouvement n’est pas uniforme, le lieu moyen de la Terre rapportée à l’équateur de la Lune ne répondra pas toujours à un méridien fixe ; mais il y aura une petite différence qui exprimera la libration réelle et physique de la Lune ; cette petite quantité est une des variables du Problème et se trouve déterminée par une équation différentielle linéaire du second ordre dont l’intégration est trèsfacile. Intégrant donc cette équation, on a directement la valeur de a libration réelle de la Lune, toute séparée de sa libration optique ; et cette valeur contient un terme proportionnel au sinus d’un angle qui croît très-lentement, dont l’effet est analogue au mouvement d’un pendule qui fait de très-petites oscillations. Ce terme ayant un coefficient arbitraire sert à expliquer commuent la Lune peut nous présenter toujours à peu près la même face, sans qu’on soit obligé de supposer que la vitesse primitive de rotation, imprimée à cette Planète, soit exactement égale à sa vitesse moyenne de translation autour de la Terre. Je fais d’ailleurs plusieurs remarques importantes sur la nature et la quantité de cette partie de la libration, la seule qui soit l’effet de la non-sphéricité de la Lune ; l’autre partie de la libration, c’est-à-dire la libration optique, n’a par elle-même aucune difficulté, n’étant produite que par le mouvement non uniforme de la Lune autour de la Terre.
Je considère ensuite les mouvements de l’axe lunaire, et pour cela j’intègre les deux équations différentielles qui renferment la loi de ces mouvements. Cette intégration y introduit quatre constantes arbitraires ; et l’on voit d’abord qu’en supposant ces constantes nulles, ce qui est le cas le plus simple du Problème, les nœuds de l’équateur lunaire doivent coïncider exactement avec les nœuds moyens de l’orbite de la Lune ; mais rien n’oblige à regarder ces constantes comme tout à fait nulles ; je suppose donc qu’elles aient seulement une valeur fort petite, et je trouve qu’alors les nœuds de l’équateur lunaire peuvent s’écarter des nœuds moyens de l’orbite d’un angle plus ou moins grand, mais qui sera toujours au-dessous de degrés, en sorte que leur mouvement moyen sera néanmoins exactement égal au mouvement moyen des nœuds de l’orbite ce qui est parfaitement conforme aux observations.
À l’égard de l’inclinaison de l’équateur lunaire sur l’écliptique, elle serait constante dans le cas de la coïncidence exacte des nœuds de l’équateur et de l’orbite de la Lune, mais dans l’autre cas elle est sujette à quelques variations périodiques ; ce qui paraît s’accorder aussi avec les observations, et ce qui étant en même temps contraire aux résultats des autres Théories, données jusqu’ici, prouve l’insufnsancé de ces Théories et la nécessité où l’on était de traiter le Problème de la libration de la Lune par des méthodes nouvelles et plus rigoureuses.
Comme la valeur moyenne de l’inclinaison de l’équateur lunaire est à peu près connue par les observations, je m’en sers pour déterminer à très-peu près une des constantes qui dépendent de la figure de la Lune, laquelle, dans le cas où cette figure est supposée elliptique, exprime précisément l’allongement de la Lune dans le sens du diamètre de l’équateur qui est dirigé vers la Terre. Je trouve que cette quantité est nécessairement renfermée entre ces limites le demi-axe de la Lune étant pris pour l’unité ; mais la supposition de la fluidité primitive de la Lune donne pour la même quantité une valeur beaucoup plus petite ; d’où il suit, ou que la Lune n’est pas homogène, ainsi qu’on l’a supposé, ou que sa figure actuelle n’est pas celle qu’elle devrait avoir si ayant été originairement fluide elle eût conservé, en se durcissant, la figure qu’elle aurait dû prendre par les lois de l’Hydrostatique. Il n’y a au reste à cela rien de surprenant ; car M. d’Alembert a trouvé aussi par rapport à la Terre que les phénomènes de la précession des équinoxes et de la nutation ne peuvent s’accorder avec l’hypothèse de l’homogénéité de la Terre et de sa figure elliptique telle qu’elle résulte de la Théorie.
La dernière Section est destinée à l’examen des inégalités que la nonsphéricité de la Lune peut causer dans le mouvement de cette Planète autour de la Terre. Je fais abstraction dans cette recherche des quantités qui ne produiraient que des inégalités de la forme de celles qu’on connaît déjà, parce qu’il ne pourrait résulter de là que des corrections presque insensibles dans les formules du mouvement de la Lune, lesquelles sont encore trop éloignées d’avoir la précision nécessaire pour demander de pareilles corrections ; et je me borne à avoir égard aux termes qui peuvent donner des inégalités nouvelles et d’une forme particulière. Je trouve que les inégalités qui altèrent le mouvement de la Lune autour de son centre peuvent influer aussi dans son mouvement autour de la Terre ; je détermine l’effet de ces inégalités tant dans la longitude que dans la latitude de la Lune ; mais je démontre que cet effet ne peut qu’être insensible, et qu’il est impossible d’expliquer par là, comme on pourrait d’abord le croire, l’accélération que feu M. Mayer a supposée dans le mouvement de la Lune, pour satisfaire à la fois aux observations anciennes des Chaldéens, et à celles des Arabes, faites dans le ixe siècle. J’ai fait voir ailleurs que cette accélération ne pouvait être produite par la non-sphéricité de la Terre ; mais il était nécessaire d’examiner en particulier l’effet de la non-sphéricité de la Lune, à cause de la circonstance de l’égalité entre la rotation et la révolution de cette Planète et cet examen achève de prouver l’impossibilité d’expliquer l’équation séculaire de la Lune par la Théorie de la gravitation.
de dynamique.
1. Le principe donné par M. d’Alembert réduit les lois de la Dynamique à celles de la Statique ; mais la recherche de ces dernières lois par les principes ordinaires de l’équilibre du levier, ou de la composition des forces, est souvent longue et pénible. Heureusement il y a un autre principe de Statique plus général, et qui a surtout l’avantage de pouvoir être représenté par une équation analytique, laquelle renferme seule les conditions nécessaires pour l’équilibre d’un système quelconque de puissances. Tel est le principe connu sous la dénomination de loi des vitesses virtuelles ; on l’énonce ordinairement ainsi : Quand des puissances se font équilibre, les vitesses des points où elles sont appliquées, estimées suivant la dilection de ces puissances, sont en raison inverse de ces mêmes puissances. Mais ce principe peut être rendu très-général de la manière suivante.
2. Si un système quelconque de corps, réduits à des points et tirés par des puissances quelconques, est en équilibre, et qu’on donne à ce système un petit mouvement quelconque en vertu duquel chaque corps parcoure un espace infiniment petit, la somme des puissances multipliées chacune par l’espace que le point où elle est appliquée parcourt suivant la direction de cette puissance est toujours égale à zéro.
D’où il suit que si sont les masses des corps, les forces accélératrices qui sollicitent le corps vers des centres quelconques dont les distances soient et de même les forces qui sollicitent le corps vers des centres dont les distances soient et ainsi de suite ; et qu’on suppose que les lignes
deviennent
par une variation quelconque infiniment petite dans la position des corps ; on aura pour l’équilibre cette équation générale
3. Pour avoir les valeurs des variations ou différences
on différentiera à l’ordinaire les expressions des distances mais en regardant les centres des forces comme fixes, et en faisant varier seulement les quantités relatives à la position de chaque corps dans l’espace, et l’on marquera les différentielles par la caractéristique pour les distinguer des différentielles ordinaires. On réduira ainsi les valeurs de toutes ces différences à un certain nombre de pareilles différences qui dépendront uniquement du changement de position du système, et qui demeureront par conséquent indéterminées ; et comme l’é-
quation précédente doit avoir lieu quel que puisse être ce changement, il faudra la vérifier indépendamment des différences indéterminées dont il s’agit, et par conséquent égaler séparément à zéro la somme des termes multipliés par chacune de ces indéterminées ; ce qui donnera précisément autant d’équations particulières et finies qu’il en faudra pour la détermination de l’équilibre du système proposé.4. Supposons maintenant que le même système de corps soit en mouvement, et que soient les coordonnées rectangles de la courbe décrite par le corps les coordonnées rectangles de la courbe décrite par le corps et ainsi de suite ; ces coordonnées étant rapportées à trois axes fixes dans l’espace, et ayant une origine commune. Il est clair que le mouvement ou la vitesse du corps dans l’instant peut être regardée comme composée de trois autres vitesses exprimées par
et dirigées parallèlement aux axes des Il est de plus évident que si le corps était libre et qu’aucune force étrangère n’agît sur lui, chacune de ces trois vitesses demeurerait constante ; mais dans l’instant suivant elles se changent réellement en celles-ci
donc, si l’on regarde les vitesses précédentes comme composées de ces dernières et des vitesses
ou bien (en prenant constant)
il s’ensuit que celles-ci doivent être détruites par l’action des forces qui
agissent sur les corps. Mais ces vitesses sont dues à des forces accélératrices égales àet dirigées parallèlement aux axes des (en exprimant, suivant l’usage reçu, la force accélératrice par l’élément de la vitesse divisé par l’élément du temps), ou, ce qui revient au même, à des forces égales à
et dirigées en sens contraire, c’est-à-dire suivant les lignes mêmes donc il faudra que ces forces, étant supposées appliquées au corps soient détruites par l’action de toutes les autres forces du système. Il faudra par la même raison que les forces
étant supposées appliquées au corps suivant les lignes soient aussi détruites ; et ainsi de suite. D’où il suit qu’il doit y avoir équilibre entre ces différentes forces et les autres forces qui sollicitent les corps, et qu’ainsi les lois du mouvement du système se réduisent à celles de son équilibre ; c’est en quoi consiste le beau principe de Dynamique de M. d’Alembert.
5. Donc, pour avoir les équations du mouvement du système proposé, il n’y aura qu’à chercher celles de l’équilibre des corps sollicités par les forces
suivant les lignes
comme dans le cas du no 2, et de plus par les forces
Ainsi il ne faudra qu’ajouter au premier membre de l’équation générale du numéro cité les termes dus à ces dernières forces.
Or les lignes étant toujours parallèles entre elles, on peut les regarder comme concurrentes à un point infiniment éloigné et prendre ce point pour le centre des forces Soit la distance infinie de ce point au plan auquel les lignes sont terminées et qui les rencontre à angles droits, on aura pour la distance du corps au centre des forces dont il s’agit, et sera la variation de cette distance, en supposant que la position du corps varie et que celle du centre demeure fixe, parce qu’à cause de la perpendicularité de la ligne sur le plan, la variation de cette ligne est nulle. Donc le terme dû à la force agissant suivant la ligne sera et ainsi des autres.
Ainsi il faudra ajouter au premier membre de l’équation du no 2 les termes suivants
Et l’on aura cette équation générale pour le mouvement du système
6. Pour en faire usage, on remarquera d’abord que, si l’on dénote par les coordonnées rectangles qui déterminent la position du centre des forces par celles du centre des forces par celles du centre des forces et ainsi des autres, ces coordonnées étant rapportées aux mêmes axes que les coordonnées des corps, on aura
de sorte qu’en différentiant on aura les valeurs de exprimées en Et l’on trouvera de même celles de exprimées en et ainsi de suite.
De plus, en ayant égard à la disposition mutuelle des corps, on aura une ou plusieurs équations de condition entre les variables par le moyen desquelles on pourra exprimer toutes ces variables par quelques-unes d’entre elles, ou bien par d’autres variables en moindre nombre et telles, qu’elles soient entièrement indépendantes et répondent aux différents mouvements que le système peut recevoir. Nommant donc ces variables indépendantes on aura, par la substitution et la différentiation, les différences exprimées par celles-ci et l’équation générale du numéro précédent prendra cette forme
Or les variables étant (hypothèse) indépendantes les unes des autres, leurs différences seront absolument indéterminées ; donc pour satisfaire, en général, à l’équation précédente il faudra faire séparément
Ces équations particulières étant en même nombre que les variables in-
déterminées serviront à déterminer ces mêmes variables, et par conséquent le mouvement de tout le système.7. Telle est la méthode générale ; mais elle est susceptible de différentes simplifications que nous exposerons ailleurs. Nous nous contenterons ici de montrer comment on peut abréger le calcul nécessaire pour réduire les quantités
en fonctions de
Pour cet effet je remarque que, puisque les deux caractéristiques et représentent des différences ou variations indépendantes entre elles, toute quantité affectée de ces deux caractéristiques à la fois doit avoir la même valeur, dans quelque ordre qu’elles soient placées, ce qui est facile à démontrer et forme le principe fondamental du Calcul des variations. Ainsi sera la même chose que la même chose que et ainsi du reste.
Il s’ensuit de là que la quantité
sera la même chose que celle-ci
de sorte qu’il ne s’agira que de trouver la valeur des deux quantités
en et leurs différences, et de différentier ensuite la premières par et la seconde par c’est-à-dire en afiectant les différences des caractéristiques ou
8. Or étant une fonction de on aura
Donc
et ainsi des autres quantités semblables
Ainsi la quantité
sera de la forme
étant des fonctions connues des variables finies et de même la quantité
sera de la forme
Donc, en différentiant la première de ces quantités par on aura
et en différentiant la seconde par on aura pareillement
Retranchant donc la quantité précédente de cette dernière, en se souvenant que est la même chose que on aura la valeur de
laquelle sera exprimée ainsi
Cette quantité résulte évidemment de celle qui exprime la valeur de
si l’on y change les signes de tous les termes qui contiennent des différences affectées de la simple caractéristique et que, dans les autres termes où se trouvent les différences affectées de la double caractéristique on efface la après la et qu’on l’applique aux quantités par lesquelles ces différences sont multipliées.
Ainsi l’on changera le terme en le terme en et ainsi des autres.
Cette règle est, comme on voit, très-simple, et facilite extrêmement le mécanisme du calcul que notre méthode demande. On pourrait la démontrer à priori ; mais nous avons préféré la démonstration précédente, comme étant plus sensible et plus convaincante.
9. À l’égard des termes
et de leurs semblables, on remarquera que dans le cas de la nature les forces sont ordinairement des fonctions des distances en sorte que les termes dont il s’agit sont tous intégrables ; ce qui fournit aussi un moyen de simplifier beaucoup le calcul de ces termes ; car il n’y aura qu’à intégrer d’abord à l’ordinaire la quantité
et la redifférentier ensuite relativement à la caractéristique
Dans le Système du monde on a
étant des constantes ; donc on aura dans ce cas
10. De ce que nous venons de démontrer résulte une méthode fort simple pour transformer l’équation générale du no 5 par la substitution d’autres variables quelconques à la place de
Soit, pour abréger,
Et supposons exprimées par d’autres variables quelconques On substituera les valeurs données de en dans les deux quantités et on différentiera ensuite suivant en regardant et comme des variables particulières ; et l’équation générale deviendra
en entendant par le coefficient de dans la différentielle de par le coefficient de dans la même différentielle ; et ainsi du reste.
11. Si les variables sont indépendantes entre elles (et l’on peut toujours les prendre telles, qu’elles le soient), on aura sur-lechamp (6), pour le mouvement du système, ces équations particulières
Mais, si ces variables ne sont pas indépendantes, alors il faudra réduire les différences au plus petit nombre possible, et, égalant ensuite à zéro le coefficient de chacune de celles qui resteront, on aura les équations du Problème.
12. Si l’on multiplie les équations précédentes respectivement par qu’ensuite on les ajoute ensemble, on aura une équation intégrable. En effet, puisque
l’équation dont il s’agit sera
Or, étant une fonction finie de on aura
mais
ce qui est évident par la nature du Calcul différentiel. Donc on aura aussi
On démontrera de même que, puisque est une fonction des quantités finies et de leurs différences premières en regardant comme autant de variables indépendantes les unes des autres, on aura
Ainsi l’équation précédente prendra cette forme
dont l’intégrale est
Je remarque maintenant que par la nature de la quantité on a nécessairement
Car étant une fonction homogène de deux dimensions des différences (10), elle sera aussi une pareille fonction des différences donc, regardant ces différences comme des variables particulières, on aura par la propriété connue de ces sortes de fonctions
ou, ce qui revient au même,
L’intégrale trouvée deviendra donc
équation qui n’est autre chose que celle qui renferme le principe connu de la conservation des forces vives ; car il est visible que exprime la somme des forces vives actuelles de tous les corps du système, et que
est égal à la valeur de ces forces en supposant les corps libres et isolés (numéro cité).Notre méthode donne ainsi une démonstration directe et générale de ce fameux principe, mais on aurait tort de la confondre pour cela avec ce même principe ; car ce principe ne donne de lui-même qu’une seule équation, et ne suffit seul que pour résoudre les Problèmes qui ne demandent qu’une seule équation ; au lieu que notre méthode donne toujours toutes les équations nécessaires pour la solution du Problème.
On aurait pu au reste déduire immédiatement le principe de la conservation des forces vives de l’équation générale du no 5, en y changeant la caractéristique en (ce qui est évidemment permis, puisque les différences marquées par sont indéterminées et arbitraires) et intégrant ensuite ; mais nous avons cru qu’il n’était pas inutile de faire voir comment les différentes équations différentielles du mouvement du système fournissent toujours une équation intégrable, qui n’est autre chose que celle de la conservation des forces vives.
13. Si le système donné était composé d’une infinité de particules animées par des forces quelconques proportionnelles à des fonctions des distances ; nommant, en général, la masse de chaque particule, les forces qui la sollicitent vers des centres donnés et qu’on suppose proportionnelles à des fonctions des distances à ces centres, les coordonnées rectangles qui déterminent la position de cette particule dans l’espace ; et dénotant par le signe des intégrations relatives à la somme de toutes les particules du système ; il est clair que les quantités et du no 10 deviendront
Et l’on pourra après les substitutions faire sortir hors du signe les variables qui sont censées ne dépendre que de la position du système en général.
Dans le Système du monde on aura
donc
14. Il faut commencer par chercher les conditions qui résultent de la solidité du corps ; or ces conditions consistent évidemment en ce que les distances mutuelles de tous les points du corps demeurent invariables. Nommant donc, en général, les coordonnées rectangles d’un point quelconque du corps, et les coordonnées rectangles d’un autre point du même corps, il faudra que la quantité
soit toujours la même, et soit par conséquent indépendante du mouvement du corps.
Cela posé, soient les coordonnées d’un autre point du corps pris à volonté et que nous appellerons dans la suite le centredu corps, et soit, en général,
il est visible que seront les coordonnées du même élément du corps auxquelles appartiennent les mais rapportées à des axes passant par le centre du corps et parallèles aux axes des Si donc sont les valeurs de pour l’élément qui appartient aux coordonnées on aura aussi
sera exprimée par
De sorte que les conditions provenantes de la solidité ne pourront regarder que les coordonnées et nullement les coordonnées lesquelles demeureront par conséquent indéterminées. C’est ce qui est d’ailleurs évident de soi-même, puisque ces dernières coordonnées se rapportent à un point déterminé de la masse du corps, dont la position dans l’espace peut être quelconque.
15. Toute la difficulté se réduit donc à déterminer la forme des quantités en sorte qu’elles satisfassent aux conditions de la solidité. Or je remarque, en général, que si l’on imagine dans l’intérieur du corps trois axes fixes et pèrpendiculaires entre eux qui se coupent dans le centre du corps, et qu’on rapporte à ces axes la position de chaque point du corps par de nouvelles coordonnées rectangles ces coordonnées serviront à déterminer la position et la distance mutuelle de tous les points du corps ; de sorte que le corps sera solide lorsque ces coordonnées seront constantes pour chaque point du corps, et par conséquent indépendantes du temps ; mais si elles peuvent varier ’un instant à l’autre, le corps changera alors de figure, comme les corps flexibles ou fluides. Il n’y aura donc qu’à chercher les valeurs des premières coordonnées exprimées par les dernières et les conditions de la solidité seront remplies en regardant ces dernières comme constantes.
Or, comme ces différentes coordonnées se rapportent aux mêmes points du corps, et ont d’ailleurs leur origine dans le même point qu’on prend pour le centre du corps, mais ne diffèrent que par la position de leurs axes, il n’est pas difficile de trouver les valeurs dont il s’agit, soit à l’aide de la Trigonométrie, ou par des constructions géométriques, ou, ce qui est encore plus simple, par la Théorie connue de la transformation des coordonnées ; nous les donnerons plus bas, et nous commencerons ici par faire des remarques générales sur les expressions de ces valeurs.
16. Sans chercher ces expressions on peut d’abord conclure, soit de la Théorie de la transformation des coordonnées, soit de cette considération qu’en supposant ou ou constantes (ce qui donne des plans perpendiculaires aux axes de ces mêmes coordonnées) on doit avoir toujours des équations linéaires entre on peut, dis-je, conclure de là que les valeurs de en ne peuvent être que de la forme suivante
les quantités étant les mêmes pour tous les points du corps et dépendant uniquement de la position de ses axes par rapport aux axes fixes des coordonnées
Or les conditions de la solidité du corps consistent en ce que la distance entre deux points quelconques doit être constante, et par conséquent indépendante des quantités donc, si l’on suppose que les coordonnées et répondent à un point du corps, et que pour un autre point elles deviennent il est clair que la distance entre ces deux points sera exprimée également par
et par
en sorte qu’il faudra qu’on ait cette équation identique
Mais il est visible que pour avoir il n’y a qu’à changer en dans les expressions précédentes de et qu’ainsi pour avoir il n’y aura qu’à mettre dans les mêmes expressions au lieu de
Substituant donc ces valeurs dans l’équation précédente et comparant les termes semblables, on aura ces six équations de condition
entre les neuf variables en sorte que ces variables se réduiront à trois indéterminées.
17. Si l’on voulait avoir les valeurs de en il suffirait d’ajouter ensemble les trois équations ci-dessus
après avoir multiplié respectivement ces équations par par et par car en vertu de ces six équations de condition trouvées on aura sur-le-champ
Or, comme ces expressions de doivent satisfaire également à l’équation identique
en les substituant dans cette équation et comparant les termes homologues, on aura ces six autres équations de condition
lesquelles doivent être une suite nécessaire de celles qu’on a trouvées ci-dessus, puisqu’elles résultent de la même équation identique.
18. Substituons maintenant dans les expressions de et du no 13, pour leurs valeurs (14). On aura d’abord
multipliant par et intégrant par rapport à la caractéristique laquelle ne regarde que la variabilité des coordonnées contenues dans les valeurs de puisque ces coordonnées sont les seules quantités qui varient d’un point du corps à l’autre, on aura
et il ne restera plus qu’à substituer les valeurs de
Or, étant égal à on aura, en regardant comme constantes dans la différentiation de et ensuite comme seules variables dans l’intégration marquée par on aura, dis-je,
et l’on aura de même les valeurs de en changeant dans la précédente la lettre en ou
19. Mais je remarque que, si l’on suppose (ce qui est permis et même très-naturel) que le point que nous avons pris pour le centre du corps (14) en soit le véritable centre de gravité, les valeurs des intégrales
qui expriment les sommes des moments de chaque particule du corps par rapport à trois axes passant par son centre, seront nulles par les propriétés connues du centre de gravité. De sorte qu’on aura dans cette hypothèse
ce qui simplifie beaucoup la valeur de et la réduit à
Cette expression de est, comme on voit, composée de deux parties, dont la première dépend uniquement des variables qui se rapportent au centre de gravité du corps, et dont la seconde dépend seulement des variables qui donnent la position de toutes les particules du corps autour de ce centre ; ainsi ces deux parties sont indépendantes entre elles et peuvent être traitées séparément. La première n’est autre chose que la valeur de qui aurait lieu dans le cas où l’on supposerait tout le corps, dont la masse est concentré dans son centre de gravité, et où l’on chercherait le mouvement de ce centre ; la seconde partie exprime au contraire la valeur de qui aurait lieu dans le cas où l’on supposerait le centre du corps fixe (soit que ce centre soit celui de gravité ou non), ce qui donnerait
et où l’on chercherait seulement le mouvement de tous les autres points du corps autour de ce centre.
20. Je désigne la valeur de ou la masse du corps par Ainsi la première partie de la quantité sera représentée par
Comme cette expression ne contient que les variables qui sont (hypothèse) indépendantes tant entre elles que des autres variables du Problème, elle n’a pas besoin d’autre préparation ; ainsi, en l’employant à la place de dans les équations du no 11 et prenant pour on aura les trois équations nécessaires pour le mouvement du centre du corps.
Mais, si au lieu des coordonnées de l’orbite projetée on veut employer à l’ordinaire le rayon vecteur et l’angle parcouru par ce rayon, on fera
et l’on aura, en substituant,
Cette dernière manière de représenter l’orbite du corps est surtout utile lorsqu’elle est peu différente d’un cercle et en même temps peu inclinée au plan des coordonnées comme cela a lieu à l’égard de toutes les Planètes par rapport à l’écliptique ; car alors est une quantité à peu près constante, est à peu près proportionnel au temps, et est toujours une quantité très-petite, ce qui fournit des moyens d’approximation pour la détermination du mouvement du corps.
Si l’on veut éviter les angles, on considérera qu’en représentant, pour plus de simplicité, le temps par l’angle du mouvement moyen, c’est-à-dire par la valeur moyenne de la différence sera toujours un angle fort petit dans l’hypothèse précédente ; d’où il s’ensuit que sera une quantité fort petite et une quantité peu variable.
Faisons donc
on aura
et de là on tirera
Il est aisé de voir que les variables introduites à la place de ne sont autre chose que de nouvelles coordonnées rectangles ayant la même origine que celles-ci, et couchées sur le même plan, mais placées de manière que l’axe des soit mobile et passe toujours par le lieu moyen du corps, et que l’axe des soit toujours perpendiculaire à celui-là. C’est ainsi que M. Euler a représenté le mouvement de la Lune dans sa nouvelle Théorie de cette Planète ; et notre méthode donnera immédiatement les mêmes équations que M. Euler n’a trouvées qu’à l’aide de plusieurs substitutions et réductions.
En employant d’autres substitutions on trouvera des formules différentes, et l’on sera assuré d’avoir toujours par cette méthode les équations les plus simples dont chaque manière de représenter le mouvement du corps est susceptible ; ce qui n’est pas un des moindres avantages de notre méthode.
21. Venons maintenant à l’autre partie de la valeur de laquelle contient les quantités relatives au mouvement de rotation du corps autour de son centre de gravité, et qui est représentée par la formule
On y substituera donc à la place de leurs valeurs tirées des expressions du no 16. Mais je remarque qu’on rendra les résultats beaucoup plus simples, si à la place de la quantité
on prend celle-ci
qui lui est équivalente en vertu des équations de condition du no 17.
En effet, puisque
si l’on fait, pour abréger,
et qu’on ait égard aux équations de condition du no 16 différentiées, on trouvera
Ajoutant ensemble les carrés de ces trois quantités, on aura donc
Ainsi la quantité
deviendra
en faisant, pour abréger,
Ces intégrations sont relatives à toute la masse du corps, en sorte que doivent être maintenant regardées et traitées comme des constantes données par la figure du corps.
22. Il est à présent nécessaire de réduire les neuf variables à trois indéterminées, ce qu’on peut obtenir par le moyen des six équations de condition du no 16, ou plus simplement encore en cherchant directement les valeurs de ces mêmes variables par la méthode connue de la transformation des coordonnées.
En effet, puisque sont les coordonnées rectangles d’un point quelconque de la masse du corps par rapport à trois axes passant par son centre et parallèles aux axes fixes des coordonnées et que sont les coordonnées rectangles du même point par rapport à trois autres axes passant par le même centre, mais fixes au dedans du corps et par conséquent variables à l’égard des axes des il s’ensuit que pour avoir les expressions de en il n’y aura qu’à transformer de la manière la plus générale ces dernières coordonnées dans les autres.
Pour cela nous nommerons l’angle que le plan des fait avec celui des et l’angle que l’intersection de ces deux plans fait avec l’axe des enfin nous désignerons par l’angle que l’axe des fait avec la même ligne d’intersection ; ces trois quantités serviront, comme on voit, à déterminer la position des axes des coordonnées relativement aux axes des coordonnées par conséquent on peut par leur moyen exprimer ces dernières par les autres.
Il est clair que, si l’on imagine que le corps proposé soit la Terre, que le plan des soit celui de l’équateur, et que l’axe des passe par un méridien donné ; que de plus le plan des soit celui de l’écliptique, et que l’axe des soit dirigé vers le premier point d’Aries ; il est clair, dis-je, que sera l’obliquité de l’écliptique, la longitude de l’équinoxe d’automne ou du nœud ascendant de l’équateur sur l’écliptique, et sera la distance du méridien donné à cet équinoxe. Mais, si l’on transporte ces dénominations à la Lune, en prenant cette Planète pour le corps dont il s’agit, on aura pour l’inclinaison de l’équateur lunaire sur l’écliptique, pour la longitude du nœud ascendant de cet équateur, et pour la distance d’un méridien lunaire à ce nœud.
En général sera l’angle que le corps décrit en tournant autour de l’axe des coordonnées axe qu’on pourra appeler, à cause de cela, axe de rotation du corps, sera l’angle d’inclinaison de cet axe sur le plan fixe des coordonnées et et sera l’angle entre la projection de ce même axe et l’axe des coordonnées
23. Cela posé, supposons d’abord qu’on change les deux coordonnées et en deux autres placées dans le même plan, mais telles, que l’axe des tombe dans l’intersection des deux plans et celui des soit perpendiculaire à cette intersection ; on aura
Supposons ensuite que les deux coordonnées et soient changées en deux autres dont l’une soit toujours perpendiculaire à l’intersection des plans, mais soit placée dans le plan des et et dont l’autre soit perpendiculaire à ce dernier plan ; on trouvera de la même manière
Enfin supposons encore qu’on change les coordonnées et qui sont déjà dans le plan des et en deux autres placées dans ce même
plan, mais telles, que l’axe des coïncide avec l’axe des on trouvera pareillementEt il est visible que les trois coordonnées seront la même chose que les puisqu’elles sont rapportées aux mêmes axes ; de sorte qu’en substituant successivement les valeurs de on aura les expressions cherchées de en lesquelles se trouveront de la même forme que celles du no 16, en supposant
Ces valeurs satisfont aussi aux six équations de condition du même numéro, ainsi qu’à celles du no 17, et résolvent ces équations dans toute leur étendue, puisqu’elles renferment trois variables indéterminées
Si maintenant on fait ces substitutions dans les valeurs de du no 21, on trouvera, après quelques réductions, ces expressions fort simples
24. Puisque les variables sont indéterminées et indépendantes entre elles, il ne s’agira donc plus que d’avoir les quantités et en fonctions de ces variables ; ensuite, différentiant par rapport à la caractéristique on aura trois équations de la forme de celles du no 11, lesquelles serviront à déterminer ces variables par le temps et par conséquent à connaître les lois de la rotation du corps.
Si l’on développe ces équations, on les trouvera analogues à celles que j’ai données autrefois dans ma pièce sur la Libration ; mais elles se présenteront ici sous une forme encore plus simple, ce qui est dû à la manière dont nous avons exprimé la quantité
par le moyen des trois quantités Mais quoique ces équations aient peut-être toute la simplicité que la nature du sujet peut comporter, elles sont néanmoins, comme toutes celles qu’on avait déjà trouvées, peu propres pour la solution du Problème de la libration de la Lune, à cause des sinus et cosinus d’angles qui se trouvent mêlés avec les différentielles de ces angles, et qui rendent l’intégration fort difficile et l’approximation peu exacte.
25. Comme ce Problème ne peut être résolu que d’une manière approchée, on doit s’appliquer principalement à donner aux équations différentielles la forme la plus convenable pour l’approximation, et il n’est pas difficile de se convaincre que les formules les plus propres à cela seraient celles qui ne contiendraient aucun sinus ou cosinus, du moins dans les termes différentiels et indépendants des forces perturbatrices, et dans lesquelles ces termes seraient des fonctions de quelques variables, qui par la nature de la question devraient demeurer très-petites ; en sorte que dans la première approximation on pût réduire ces fonctions à la forme linéaire, qui est, comme on sait, la seule susceptible d’intégration, en général, et quel que soit le nombre des variables et l’ordre de leurs différences. Or, s’il est possible de remplir ces conditions, ce ne peut être qu’à l’aide de quelques substitutions convenables ; mais il serait peut-être difficile de découvrir ces substitutions à posteriori d’après les équations différentielles déjà trouvées ; heureusement notre méthode fournit pour cette recherche des moyens directs ils dépendent des considérations suivantes.
26. On voit, par la forme des équations du no 11, que les termes différentiels et indépendants des forces perturbatrices viennent uniquement de la quantité ainsi la difficulté se réduit à faire en sorte que cette quantité soit elle-même exprimée par des fonctions sans sinus et cosinus de quelques variables, qui doivent rester très-petites ; pour cela il faudra que la quantité et par conséquent chacune des trois quantités soit de la forme dont il s’agit. Or je remarque qu’en appliquant à la Lune les formules du no 23, l’angle qui exprime l’inclinaison de l’équateur lunaire sur le plan de l’écliptique sera toujours très-petit et au-dessous de degrés d’après les observations ; d’où il s’ensuit que, si l’on prenait pour inconnues à la place de deux des trois angles les deux quantités ou les deux ces nouvelles variables auraient la condition demandée, et il ne resterait plus qu’à faire en sorte que les sinus et cosinus du troisième angle disparaissent entièrement des trois quantités
Il est vrai que si l’on voulait appliquer les mêmes formules à la Terre, à l’égard de laquelle serait égal à l’obliquité de l’écliptique, qui est de les quantités ne seraient plus si petites, par conséquent la première approximation ne serait pas à beaucoup près aussi exacte que pour la Lune ; mais il n’y aurait alors qu’à pousser l’approximation plus loin par les méthodes connues.
Quant à l’autre condition qui regarde l’évanouissement des sinus et cosinus, pour peu que l’on considère nos formules, on s’apercevra aisément qu’elle se trouvera remplie en prenant pour inconnues les deux quantités
avec la somme des deux angles et car il arrivera nécessairement que les sinus et cosinus de s’en iront des expressions de
Mais au lieu de prendre pour inconnues les deux quantités et il vaudra mieux, pour éviter les radicaux, prendre ces deux-ci
27. Je ferai donc
et, substituant d’abord dans les formules du no 23
à la place de ensuite à la place de et à la place de on aura
28. Substituant ensuite ces valeurs dans les expressions de du no 21, on aura, après les réductions, celles-ci
lesquelles ne contiennent, comme on voit, ni sinus ni cosinus d’angles, mais seulement les variables finies avec leurs différentielles premières et la différence de l’angle
29. Il ne restera plus qu’à faire les mêmes substitutions dans-la quantité V, laquelle dépend des forces particulières qui agissent sur le corps (13) ; mais ce calcul n’ayant par lui-même aucune difficulté, nous remettrons à la Section suivante à le développer relativement à la Lune, en tant qu’elle est attirée par la Terre et par le Soleil.
30. Mais avant de terminer celle-ci, nous croyons devoir faire remarquer que l’axe autour duquel nous avons considéré la rotation du corps (22), et qui est fixe dans l’intérieur du corps, mais mobile dans l’espace, n’est pas le vrai axe autour duquel le corps tourne à chaque instant et qu’on peut nommer axe spontané de rotation. Celui-ci est mobile tant à l’égard du corps que dans l’espace, et sa position dans le corps dépend des trois quantités En effet la formule
du no 21 fait voir que si l’on prend les coordonnées proportionnelles respectivement à la quantité
devient nulle pour tous les points qui répondent à ces coordonnées ; de sorte qu’il y a par rapport au centre du corps une suite de points en
repos, formant une ligne droite qui passe par ce centre et fait avec les axes des coordonnées des angles dont les cosinus sont respectivementc’est l’axe spontané dont il s’agit. On peut démontrer aussi que
exprimera la vitesse de rotation autour de cet axe, et que
seront les vitesses particulières de rotation que le corps peut être supposé avoir à la fois autour des axes des coordonnées et qui par leur composition donnent la vitesse
autour de l’axe spontané.
31. Nous venons de donner les formules qui renferment la solution générale de ce Problème ; ainsi il ne s’agit que d’appliquer ces formules au cas particulier de la Lune, en tant qu’on la regarde comme non sphérique, et que chacune de ses particules est attirée par la Terre et par le Soleil en raison inverse des carrés des distances.
32. Quelle que soit la manière dont on représente le mouvement d’un corps de figure quelconque, nous avons vu que ce mouvement dépend de six variables, dont trois déterminent la position d’un point quelconque donné du corps (point que nous appelons en général le centre du corps) et dont les trois autres déterminent la position même du corps autour de son centre ; et nous avons montré que chacune de ces variables fournit pour le mouvement du corps (11) une équation de la forme
étant une de ces six variables, et des fonctions de ces mêmes variables ainsi tout se réduit à déterminer ces fonctions.
33. La fonction ne dépend que des forces accélératrices qui proviennent de l’inertie du corps, et la fonction dépend uniquement des forces accélératrices extérieures qui sont supposées agir sur le corps.
En nommant le temps dont l’élément est supposé constant, les trois coordonnées rectangles du centre du corps, qu’on suppose être son centre de gravité (ces coordonnées étant rapportées à des axes fixes dans l’espace), les coordonnées rectangles de chaque particule du corps par rapport à trois axes passant par son centre et parallèles aux mêmes axes fixes, les distances rectilignes de la particule au centre des forces on a trouvé, en général, (13, 19)
la caractéristique dénotant des intégrales totales et relatives à la masse entière du corps.
Examinons successivement les différents termes de ces formules et voyons ce qu’ils deviennent par rapport à la Lune.
34. Nous regarderons la Terre comme en repos, et nous prendrons pour les coordonnées de l’orbite décrite par le centre de gravité de la Lune autour de la Terre ; les deux premières seront prises dans le plan de l’écliptique, l’axe des étant dirigé vers le premier point d’Aries, et l’axe des vers le point qui répond à degrés de longitude ; et l’axe de la troisième coordonnée sera perpendiculaire à l’écliptique et dirigé vers son pôle boréal.
Comme la latitude de la Lune est toujours assez petite, il est clair que la variable sera aussi très-petite ; mais il n’en est pas de même des deux autres variables cependant si l’on considère que le mouvement de la Lune autour de la Terre est à peu près circulaire et uniforme, on verra qu’en introduisant à la place de ces coordonnées le rayon vecteur de l’orbite projetée sur l’écliptique et l’angle de la longitude vraie, on aura
expressions dans lesquelles sera presque constant et à peu près proportionnel au temps.
Supposons pour plus de simplicité que la distance moyenne de la Lune à la Terre soit représentée par l’unité, et que le temps soit représenté par l’angle du mouvement moyen, c’est-à-dire par la longitude moyenne de la Lune ; on aura
et étant des quantités fort petites.
Mais au lieu de ces substitutions il vaudra mieux employer celles que nous avons indiquées dans le no 20, et qui consistent à faire
où est, comme on voit, une quantité fort petite et une quantité peu différente de l’unité. De cette manière on aura
et de là on tirera
35. Nous mettrons pour plus de simplicité à la place de à la place de et à la place de Ainsi les trois coordonnées rectangles et de l’orbite du centre de gravité de la Lune autour de la Terre seront représentées par
et l’on aura
expressions dans lesquelles les trois variables seront toujours fort petites ; et ces trois variables seront les mêmes que M. Euler a employées et désignées par les mêmes lettres dans sa Nouvelle Théorie de la Lune.
Nous adoptons ici cette manière de représenter le mouvement de la Lune d’autant plus volontiers qu’on trouve dans cet Ouvrage de M. Euler les valeurs des quantités en tant qu’elles dépendent de l’action de la Terre et du Soleil sur la Lune, regardée comme un point, déjà exprimées par les mouvements moyens et calculées avec une grande précision et nous ferons usage de ces valeurs dans nos recherches sur l’effet de la non-sphéricité de la Lune.
36. Ainsi la première partie de l’expression de celle qui se rapporte au mouvement progressif du centre de la Lune, sera (en nommant la masse de la Lune)
Je dénoterai dans la suite cette quantité par
37. Pour représenter le mouvement de rotation de la Lune autour de son centre de gravité, on imaginera dans l’intérieur de la masse de cette Planète trois axes fixes, perpendiculaires entre eux, qui passent par ce centre et qui demeurent toujours fixes au dedans du corps ; et l’on rapportera à ces trois axes la position de chaque particule de la masse de la Lune par le moyen de trois coordonnées On aura (ainsi qu’on l’a vu dans la Section précédente, no 16) pour les coordonnées de cette particule les formules
dans lesquelles sont indépendantes de la position de cette particule dans l’intérieur du corps, et sont uniquement des fonctions des variables qui déterminent la position du corps autour de son centre.
38. Maintenant je regarde le plan qui passe par les deux axes des coordonnées et comme l’équateur de la Lune, et par conséquent le troisième axe des coordonnées comme l’axe de rotation de cette Planète. Je nomme l’inclinaison de l’équateur lunaire sur l’écliptique, la longitude du nœud ascendant de cet équateur, lequel est en même temps le nœud descendant de l’écliptique par rapport au même équateur, c’est-à-dire l’équinoxe d’automne de la Lune, cette longitude étant vue du centre de la Lune et prise à l’ordinaire sur l’écliptique, ou sur un plan parallèle à l’écliptique et passant par le centre de la Lune ; enfin je nomme la distance du point de l’équateur lunaire, par lequel passe l’axe des abscisses au nœud ascendant de cet équateur, c’est-à-dire l’angle formé au pôle de la Lune par le méridien fixe qui passe par cet axe, et par le méridien mobile qui passe par le nœud ascendant de l’équateur, et qui est par rapport à la Lune le colure de l’équinoxe d’automne. Il est visible que ces trois angles suffisent pour déterminer dans un instant quelconque la position du corps de la Lune par rapport à l’écliptique ; ainsi l’on pourrait les prendre pour les variables dont nous avons parlé plus haut, et réduire par conséquent la détermination du mouvement de la Lune sur son centre à trois équations entre ces variables, comme on en a usé jusqu’ici dans toutes les recherches de ce genre. Mais nous avons déjà indiqué les inconvénients auxquels les équations trouvées de la sorte sont sujettes, et nous avons donné dans le no 26 un moyen de les éviter, lequel consiste à employer au lieu des angles les fonctions
39. À l’égard de l’angle son emploi a aussi un avantage particulier par rapport à la Lune ; en effet, puisque est la longitude moyenne de la Lune (34), sera la longitude moyenne de la Terre vue du centre de la Lune, et retranchant l’angle on aura pour la longitude moyenne de la Terre comptée depuis le nœud ascendant de l’équateur lunaire ; donc sera cette longitude comptée depuis le nœud descendant de cet équateur, c’est-à-dire depuis l’équinoxe du printemps de la Lune. Or il résulte des observations exactes de la libration de la Lune faites par Mayer que, si l’on transporte cette longitude sur l’équateur lunaire en partant du même équinoxe lunaire, elle doit répondre toujours à un même point de cet équateur, en sorte que le méridien lunaire qui passera par ce point sera fixe sur la surface de la Lune. Mayer prend ce méridien pour le premier méridien de la Lune, et y rapporte les longitudes sélénographiques des taches de la Lune ; nous le nommerons aussi d’après lui le premier méridien lunaire, et nous supposerons, ce qui est permis, qu’il coïncide avec le méridien fixe par lequel passe l’axe des coordonnées et qui fait avec le colure de l’équinoxe d’automne de la Lune l’angle or nous venons de voir que le premier méridien fait avec le colure de l’équinoxe du printemps l’angle ainsi il fera avec celui de l’équinoxe d’automne l’angle donc on aura et de là
Cette détermination est fondée sur le phénomène connu de la non-rotation apparente de la Lune, et sur l’hypothèse de l’uniformité de la rotation réelle de cette Planète autour de son axe, et du mouvement des nœuds de l’équateur lunaire sur l’écliptique ; si ces mouvements sont sujets à quelques inégalités, alors la distance du premier méridien à l’équinoxe du printemps ne sera plus exactement égale à mais elle sera étant une quantité dépendante de ces inégalités, et par conséquenttrès-petite, puisque jusqu’ici les observations n’ont pu la faire connaître. Dans ce cas la valeur de ou de deviendra
40. De cette manière donc le mouvement de la Lune autour de son centre sera déterminé par les trois variables très-petites de même que celui de son centre autour de la Terre l’est par les trois variables aussi fort petites. Mais les trois premières sont beaucoup plus petites que ces dernières, et l’on pourra les regarder comme des quantités très-petites du premier ordre, vis-à-vis desquelles il sera permis de négliger celles des ordres suivants ; cependant il faudra tenir compte des quantités du second ordre dans les expressions de et de parce que celles de se trouveront rabaissées au premier.
41. Nous avons déjà donné dans la Section précédente (27) les valeurs exactes des quantités en fonctions de ainsi il ne s’agira que d’y substituer pour sa valeur et par conséquent pour
et pour
et de négliger les termes où les quantités formeraient ensemble des produits de plus de deux dimensions, en mettant pour cet effet à la place de et leurs valeurs approchées et
Nous donnerons d’abord les expressions des valeurs dont il s’agit en y conservant les et parce que nous pourrons avoir occasion d’en faire usage sous cette forme ; on aura ainsi, en négligeant les dimensions de et au-dessus de la seconde,
42. Substituant maintenant à la place de et à la place de et négligeant toujours les produits de