Mémoires historiques et physiques sur les tremblemens de terre/Mémoire 4

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Rélation des tremblemens de terre observés en Suisse
depuis le 9 Décembre 1755.



QUATRIEME MEMOIRE.


RÉLATION DES TREMBLEMENS DE TERRE OBSERVÉS EN SUISSE DEPUIS LE 9. DECEMBRE 1755. AVEC QUELQUES DÉTAILS DES AUTRES PAYS QUI SE RAPORTENT A CES PHÉNOMENES.




Tremblement du 9. Décembre 1755.On avoit encore l’imagination frapée & le cœur touché des malheurs de Lisbonne, lorsque, le mardi neuvième Décembre 1755, on ressentit à Berne un tremblement, qui n’étoit peut-être pas plus violent que celui de mille-sept-cent-vingt & neuf, mais qui a été plus général. Toute la masse énorme des Alpes & de celle du Jura ont été ébranlées & bien au-delà tout autour. Dans le fond des Vallées les plus profondes, comme sur le sommet des montagnes les plus élevées on a aperçu des secousses, plus ou moins fortes. Le même jour Lisbonne éprouva des nouvelles secousses très-effraïantes. Les côtes maritimes semblent être plus sujettes à ces sortes d’accidens, mais les montagnes mêmes n’en sont pas exemptes h. Nous entrerons dans quelque détail sur la manière dont ces secousses ont été aperçues-en Suisse.

Effets de ce tremblement à Berne dedans le Canton.Ce fut à deux heures & trente-deux minutes qu’on sentit ces secousses à Berne. Nous avons déja parlé de leur direction & de leur nombre, & cette observation n’a été contredite de nulle part, mais confirmée de plusieurs endroits ; les trois secousses n’ont pas duré plus d’un tiers ou d’une demi-minute. La cloche du grand horloge sonna quelques coups, & une piramide de pierre fut renversée de dessus la grande Eglise. Il se fit deux fentes légères dans l’Eglise Françoise, mais elles se font à peu près refermées dans la suite. Il y a eu quelques Châteaux du pays, qui ont été un peu plus ébranlés & où il s’est fait aussi quelques légères fentes, comme à ceux de Lucens & de Nidau. On dit qu’un moment avant le tremblement l’Aare étoit couverte dans quelques endroits d’une sorte de vapeur & sembloit bouillonner. Près de la digue, elle parut suspendre, ou arrêter, son cours. Quelques personnes sentirent peu à près une odeur de souffre & le soir il y eut des brouillards fort épais.

Température de l’air au 9. Decembre 1755.L’air étoit fort serein & tranquille, on avoit peine à appercevoir le vent qui étoit Sud-Ouest. Le Baromètre étoit à vingt & six pouces sept lignes. Le matin à six heures le thermomètre avoit été à zero : à deux heures & demi il étoit à un dégré & demi au-dessus du zero. Le jour précédent il avoit été à six heures du matin à huit dégrés trois quarts au-dessous du zéro, ça été le jour le plus froid de cet hyver. Dès lors le temps a été assez doux, souvent pluvieux, toujours humide, pendant tout le Mois de Decembre, & une partie de Janvier 1756.

A la même heure on éprouva les mêmes sécousses à Zoffingen. Des livres de la Bibliothèque publique furent renversés de dessus leurs tablettes. La plus haute des Cloches de la tour de l’Eglise fut ébranlée.

Quelques secousses du 9. Decembre & subséquentes.A Langenthal, à Brugg & dans les Bailliages voisins d’Arbourg, de Kœnis-felden, de Wildestein, on a eu la même épouvante., Nulle part aucun mal. A Brugg & dans tout le bas Argeu on a senti de nouvelles secousses le 17. Decembre 1755. & le 26. de Janvier 1756. sur les onze heures du soir. Quelques personnes croyent en avoir aperçu à Berne le 24. de Janvier 1756. On aprend qu’il y en a eu de violentes à Démont en Piémont ce même jour-là le 24. Le 2. Février on a senti quelques légères sécousses à Arau. Le même jour on en a apperçu dans divers endroits de la Suisse & de l’Italie.

Observations dans le Pais-de-Sand du 9. Décembre.Tout le Pays-de-Vaud & tout le Canton de Fribourg ont essuyé le même tremblement & les mêmes allarmes, à la même heure, le 9. Décembre 1715.

Les Villes qui sont proche des eaux ont été, ce semble, plus ébranlées, comme, Yverdun, Morges, Rolle, Vevay, Nion. A Yverdun en particulier on a senti une odeur de souffre, pendant plusieurs heures. IL y a une source souffrée & tiede, près de la Ville.

A Vevey les ruës le long du Lac ont été plus agitées. Les Cloches ont donné du Son. Quelques vases ont été renversés. Des portes ont été ouvertes. Des tuiles sont tombées des toits. Quelques personnes qui étoient à la campagne & qui ne sentirent point le tremblement de Terre, assurèrent avoir ouï comme le bruit d’une grosse grêle, quoiqu’il n’y eût dans l’air aucune agitation sensible. On remarquera dans la suite de ce Mémoire que ce bruit dans l’air, s’est fait entendre d’une manière très sensible dans un grand nombre d’endroits, où le tremblement s’est fait sentir.

Ni à Vevey, ni ailleurs, sur les bords du Lac Leman on n’a aperçu aucune hausse de ses eaux. Il est bien remarquable que les Lacs de la Suisse ayent été plus émus du tremblement de terre du premier Novembre que de celui du neuvième Décembre, quoique le premier ne se soit fait sentir dans les terres que légèrement & dans un petit nombre d’endroits, aulieu que le dernier a sécoué tout le terrein, sans émouvoir les eaux. Pourquoi cette différence dans les effets ?

Tremblement du 9. Décembre dans le Comté de Neufchâtel.Dans tout le Village du Locle on aperçut des secousses du Sud au Nord. Du côté du bas du Village elles furent assez fortes, surtout proche du Marais. Là une maison, bâtie sur pilotis, a un peu souffert & s’est abaissée de plus d’un pouce ; sans doute par l’affaissement du terrein. Les mêmes Phénomènes ont été observés dans tout le Vallon ; dans celui de La Sagne, de la Chaux-de-fond & de la Brévine, dans le Comté de Neufchâtel. On a fait les mêmes observations à Morteau, dans la Comté de Bourgogne. Ce qu’il y a de particulier dans ces quartiers-là, c’est que les lieux les plus élevés de ces environs n’ont point ressenti de tremblement, ou l’ont beaucoup moins aperçu. Le 20. Décembre on en a encore éprouvé au Locle un troisième, pendant la nuit. Dans toutes ces Vallées, il est tombé beaucoup de neige, dès le mois d’Octobre, sans qu’il y fit froid. Elle fondoit & il en tomboit de la nouvelle, avec un air plus chaud, que le temps & la saison ne le permettoient. A ces alternatives succéda une pluye violente, qui fit de ces vallons autant de lacs, ce qui auroit causé les mêmes dommages que dans le Languedoc & le Comtat d’Avignon, si un vent du Nord, froid, & violent, n’avoit arrêté le cours des debordemens, qui ont causé des vives allarmes jusques à Neufchâtel.

Augmentation des eaux depuis ce tremblement.Par-tout les lacs, les rivières, les sources, peu après le tremblement de Décembre, ont excessivement haussé. La pluye, qui est tombée, n’a pas été la seule cause. Il faut qu’il se soit fait quelques éruptions des eaux soûterraines. Les inondations affreuses de quelques provinces de France l’indiquent assez. Depuis trois ans le Pays-de-Vaud étoit exposé à une sécheresse fâcheuse. Dès le milieu de Décembre il a regorgé d’eau, & bientôt de toutes parts les lieux bas ont été exposés à des inondations. Jamais on n’avoit vû d’aussi grosses eaux dans les Montagnes de l’Evéché de Bâle, que sur le milieu du mois de Janvier 1756. i & jamais de vents aussi impétueux que le 13. de Janvier & le 19. de Février.

Depuis le neuvième de Décembre la source salée du Fondement, dans le Canton de Berne, a augmenté en quantité ; c’est un mêlange d’eau douce, chargé d’un peu de Sel ; on tire un neuvième de Sel de plus, ou à peu près k.

Observations sur l’aiguille aimantée & les aimans.On a observé à Morat que l’aiguille aimantée de la boussole a déclinée à l’Ouest, au moment du tremblement, du neuvième Decembre de cinq douzièmes d’un degré ou de vingt & cinq minutes. L’instrument est placé au haut d’une Tour.

On écrit aussi des frontières de la Suisse, que le neuvième Decembre de la limaille de fer suspenduë par sa pointe à un aimant s’appliqua en se colant contre l’aimant, ou son armure, & qu’elle se remit ensuite dans la situation verticale.

Quelque chose de singulier a été apperçu à un aiman, suspendu chez un Curieux à Hohen-Ems. C’est un Château, situé sur une montagne, un peu au dessus du lieu, où le Rhin entre dans le lac de Constance, dans la Souabe. Cet aiman, du poids de douze onces & demi, n’est point armé. Il est suspendu à un cordon de onze pouces. A la prémière sécousse du tremblement du neuvième Décembre, le cordon & l’aiman se tournèrent du côté du Sud, & formèrent avec la perpendiculaire, qu’ils marquoient auparavant, un angle de quarante & quelques dégrés. Ils restèrent dans cette situation pendant la durée des sécousses du tremblement. A la dernière l’aiman retomba du côté du Nord, & balança par plusieurs vibrations, qui diminuèrent peu à peu. Tandis que la pierre d’aiman demeura ainsi élevée au Sud, la limaille, qui étoit ordinairement sur les deux poles, dressée comme des aiguilles, s’étoit abaissée & s’étoit ferrée, ou appliquée, contre le Pole du Nord. Il en tomba aussi quelques parcelles à terre. Quelques petits morceaux de fer restèrent, pendant le même tems, fortement attachés & de bout sur le Pole du Sud. Dès que les balancemens du cordon suspensoir eurent cessé, les poles de l’aiman reprirent leur direction, selon le méridien, & les morceaux de fer étaient dressés sur les poles, comme auparavant. Le tremblement a duré dans ce lieu-là à peu près une minute, de même que la position extraordinaire de la pierre d’aiman l. Le pole septentrional de la terre s’est-il approché du pole du Nord de l’aiman, pour le pousser vers le Sud ; ou l’angle formé par l’axe du globe & celui de l’aiman a-t-il changé ? Cela n’est point apparent. Y a-t-il eu quelque changement dans le cours de la matière magnétique, qui environne le globe ? la chose n’est pas impossible.

Tremble-
ment du 9. Decembre à Genève & aux environs.
A Genève on a essuyé les mêmes sécousses, à la même heure qu’à Berne. Les ruës le long du Rhône ont été plus ébranlées que les autres. Les montagnes voisines dans le pays de Gex, la Savoye, le Piémont, le Lionois, le Bugey & autres lieux ont aussi éprouvé les mêmes agitations, à la même heure m. On annonce la même chose de divers endroits de France & d’Italie. La différence de l’heure peut aisément venir de celle de la marche des horloges. Quelques personnes croyent d’avoir ressenti à Genève de nouvelles secousses le deuxième Janvier.

Tremble-
ment d’Aix en 1755 & 1756.
Dés le 18. & le 19. Novembre 1755. ou avoit essuyé des secousses, à Aix en Savoye. On sçait qu’il y a des bains chauds, & des eaux d’alum & de souffre. Le 9. Decembre la commotion fut plus violente, accompagnée de bruit, suivie d’une odeur de souffre. Le 27. du même mois revint un nouveau tremblement. On l’éprouva dans le même tems dans une partie de la Suisse, dans l’Italie, le long du Rhin, & aux pieds des Pyrénées. Dans le dernier de ces quartiers on avoit aperçu dès le 23. une grande clarté rougeâtre, qui duroit chaque nuit plusieurs heures. Le 27, cette clarté ne paroissant plus, on entendis sur les trois heures & demi du matin un bruit souterrain, qui fut suivi d’une secousse. Dans l’espace de moins de deux heures ce bruit se fit enrendre jusqu’à six fois, & chaque fois il fut suivi de balancemens de la terre. Le 18. Février 1756, nouveau tremblement à Aix. Ce même tremblement s’est fait sentir tout le long du Rhin & de la Meuse, en Allemagne, en Flandre, & dans quelques endroits de la France, de l’Italie. Il a été aperçu aussi en Écosse. A Chauni, Laru, & la Fère, Villes de France, on ressentit jusqu’à 8 Secousses. La seconde fut la plus violente, accompagnée d’éclat. Depuis ce tems-là on n’a plus aperçu d’ébranlemens à Aix : mais on a observé que pendant plusieurs mois les sources minérales ont été plus abondantes & plus chargées.

Tremblemens du côté d’Aigle, à Noville & aux environs, le 9. & 27 Decembre 1755.Les tremblemens ont aussi été fort sensibles à Aigle, à Noville & aux environs, le neuvième Décembre 1755, à deux heures & demi après midi, avec quelque bruit dans l’air. Ils sont revenus à diverses reprises. Le vingt & septième du même mois, à huit heures du soir, les secousses ont été aussi violentes que les premières n. Les Alpes voisines ont été ébranlées.

Rapport du 27 entre les Alpes & les Pyrenées.Le même jour les environs de la montagne de Canigau, & divers endroits du Rousillon, ont aussi été secoués. Ce tremblement avoit dès le 23 été précédé d’un météore ignée extraordinaire comme nous venons de le dire. Un bruit semblable à celui du Tonnerre dévançoit immédiatement chaque secousse. Quelques maisons en ont été renversées dans un village nommé Ria. Tout le long de la rivière de Tret, en remontant à l’ouest, on a senti des agitations effrayantes & entendu un bruit souterrain. Les murs de Villefranche en ont été endommagés. Je ne fais ces remarques que pour faire appercevoir la communication singulière de ces mouvemens d’un pays à l’autre.

Retour des secousses à Aigle.On pretend, dans les environs d’Aigle, avoir ressenti de ces agitations de tems en tems, depuis le neuvième & le vingt & septième Décembre, & que le troisième Janvier en particulier on en a eu une, à cinq heures du matin. Le premier de Février de l’année 1756. nouvelles secousses à deux heures & à cinq heures du matin. La direction des secousses du tremblement du vingt & septième a été la même que celle du neuvième, du Sud au Nord. Quelques rochers sont tombés çà & là des montagnes de ce Gouvernement, pendant le cours de l’année 1756.

Tremblement du Comté de Chiavenne.Par des rélations du Comté de Chiavenne on a appris que tous les environs du lac de Constance avoient aussi été fortement sécoués le 9. Décembre, & que ce lac dès le lendemain avoit paru fort enflé, aussi bien que celui de Chiavenne. Quelques rochers se sont détachés & sont tombés dans une vallée inculte. Un accident pareil & plus funeste ensevelit le vingt & cinquième Août mille-six-cent-dix huit le Bourg de Pleurs. Il fut en partie englouti, en partie couvert par la chûte du mont Conto & en partie détruit par l’inondation de la rivière Maira, Le pays le long de cette rivière semble encore ménacé par des pointes de montagnes élevées. Au mois de Juillet mille-sept-cent & cinq une portion de la Furcula tomba avec plus de fracas que de dommage : c’étoit le mont Alschinsch. Roncaglia a été fortement sécoué & l’eau de la Maira troublée.

Tremblement à Zuric le 9. Decembre 1755. & aux environs.C’est à deux heures & trois quarts qu’on place le tremblement de terre qu’on a ressenti à Zuric, le 9. Décembre. On fait durer les secousses presqu’une minute. La frayeur peut avoir fait paroître le tems plus long. Le tremblement étoit accompagné d’un vent violent, que quelques personnes ont apperçû dès le commencement, d’autres à la fin des ébranlemens. Tous les bâtimens ont été secoués ; les cloches ont sonné ; des portes ont été ouvertes ; des tuilles ont été détachées des toits. Plusieurs personnes, qui ignoraient la cause de leur balancement, ont crû être frapées d’apoplexie. Dans le quartier de la prison & de l’Eglise de Notre Dame les mouvemens ont été plus violens. Les couvertures de quelques cheminées de l’Einsidler-Hoff & du Linden-Hoff & d’autres bâtimens ont été jettés en bas. Les sécousses finies, on a senti dans ces environs-là une odeur de soufre. Il est même des quartiers ou elle a été accompagnée d’une vapeur ou d’un brouillard épais. Quelques personnes ont crû que cette vapeur venoit du mont Hütli.

Dans le Collège o on s’est apperçu, un peu avant les sécousses, d’un bruit sourd & souterrain, comme celui d’un vent renfermé. Ailleurs le bruit a été entendu dans l’air.

La violence du tremblement s’est fait apercevoir dans les lieux bas, par le mouvement des bancs de la boucherie & par du vin troublé dans les lieux élevés, par les balancemens ou les vibrations des pointes du clocher de l’Eglise de Notre-Dame.

Ce tremblement s’est fait sentir à peu près de même dans tout le Canton de Zuric : les relations d’Ottembach, d’Affolteren, de Marchwanden, de Mettmestätten, de Regensberg, de Kibourg, se ressemblent toutes p.

A Knonau, l’étang du château, qui étoit couvert de glace, s’est ouvert tout à coup avec éclat, par le tremblement, & l’eau a été soulevée à la hauteur de près de trois pieds.

A Nestembach, on doit avoir senti trois tremblemens de terre dans le même jour. Le premier à huit heures du matin ; le second à dix heures; le troisième environ à trois heures de l’après midi.

Le tremblement a rompu aussi avec violence & avec éclat la glace de l’étang qui entoure une partie de la ville de Winterthur. L’eau dans son émotion s’est élevée jusques aux jardins, qui l’environnent.

A Eglisau, les sécousses furent encore plus violentes, à deux heures & demi comme à Berne. On distingua trois sécousses, qui durèrent près d’une minute. L’air étoit tranquile. Un bruit éclatant se fit entendre de toutes parts, & au même instant toutes les maisons furent ébranlées. L’une & l’autre rive du Rhin, sur lequel cette ville ancienne est bâtie, ont ressenti la même commotion. Elle s’est fait appercevoir sur tout le Ratzerfeld, comme à Rass, à Weil, à Hüntwangen, à Glattfelden & même dans quelques endroits plus fortement qu’en d’autres.

A Rieden, ce tremblement a été plus sensible sur les hauteurs que dans le bas. Si les maisons eussent été bâties de pierres il est apparent qu’elles auroient été renversées.

A Kirch-Uster, à Werikon & dans les neuf Villages, qui composent cette paroisse, ce tremblement a été plus ou moins violent. Le ruisseau appellé Uster-hach a été fort ému. L’eau d’une fontaine a été poussée avec violence à deux ou trois pieds au-delà du bassin : elle est demeurée trouble quelques heures.

A Kindhausen, dans le Comté de Bade, lieu situé dans les environs de Diétikon, où, l’année 1728. une portion de terre s’est enfoncée dans un abîme, que l’on n’a point encore pu sonder, le tremblement du 9. Décembre doit avoir duré une heure entière, à diverses reprises.

Dans la plupart des lieux ces ébranlemens se sont moins fait apercevoir dans les maisons situées sur les hauteurs que dans celles qui l’étoient dans les fonds.

Dans un même lieu, & à de fort petites distances, les secousses, ont été plus ou moins aperçuës. Il ne paroît pas même que cela vienne du plus ou moins de courage des Observateurs. La position des murs rélativement à la direction des secousses semble y avoir plus contribué. Il paroît aussi qu’il y ait à cet égard plus ou moins de sensibilité dans les hommes. Dans la même chambre on a ressenti différemment ces ébranlemens.

Il semble que tous les lieux situés le long des rivières & des lacs ont été les plus agités ; du moins ceux dont le terrein n’est pas graveleux, ou sabloneux.

On a écrit de Stein, sur le Rhin, qu’on avoit compté, comme à Berne trois secousses distinctes, dont la dernière avoit été la plus forte. Si les allées & les venuës n’avoient pas été égales, uniformes dans le balancement & la direction, il y auroit eu de la subversion. L’eau du Rhin étoit agitée comme elle l’est par un vent médiocre. Les balancemens étoient aussi du Sud au Nord.

La maison de Cure de Gottlieben a été très-fortement ébranlée. Elle est située dans le même endroit, où, il y a soixante-ans, une maison fut entièrement abimée, ou enfoncée en terre.

On mande d’Einsidlen, ou Notre-Dame-des-Hermites, Couvent du Canton de Schweitz, que ce même tremblement a fait du mal à l’Eglife, & entr’autres dommages gâté la belle peinture du chœur.

Tremblement du 9 Decembre à Bâle & aux environs.On sentit à Bale, entre deux heures & demi & deux heures & trois quarts, trois ébranlemens q, toutes les maisons de la ville & de la campagne ont été agitées. Ce fut l’affaire d’une demi-minute. Quelques cheminées & quelques pans de mauvaise muraille ont été renversé. Le soir auparavant le thermomètre y étoit à six dégrés au-dessous du zéro, dans le moment du tremblement il étoit à un dégré & demi au-dessus. Le baromètre étoit à vingt & sept pouces quatre lignes & demi r.

Dans le même instant, suivant les rérations de Bâle, Mulhouse, tout le Marquisat, les montagnes de l’Evêcbé de Bâle & tous les pays voisins éprouvèrent les mêmes secousses. Les ébranlemens du château de Wallenbourg, du Canton de Bâle, & de celui de Gillenberg, du Canton de Soleure, furent plus violents encore.

Tremblement à Bienne.Immédiatement avant le tremblement du 9 Décembre on entendit à Bienne un murmure dans l’air, comme celui d’un vent du Sud, & sous la terre un bruit sourd. Après cela vinrent les sécousses. Les fenêtres opposées au Sud se courbèrent intérieurement. Bientôt après les fontaines jettèrent une eau trouble, mais moins chargée qu’elle ne l’étoit au premier de Novembre.

Tremblement du 9 Decembre à Lucerne & aux environs.A Lucerne on s’aperçut à une heure & demi d’une légére sécousse de trembement de terre ; mais à deux heures & demi revinrent des mouvemens tout-autrement violents. Les cloches donnèrent du son. Une cheminée du Couvent des P. Franciscains fut jettée en bas, & il se fit diverses crevasses dans le plâtre de l’Eglise & de la maison. Le tremblement a été plus sensible dans la Petite-ville. Les balancemens venoient du côté du Sud. L’air étoit devenu chaud tout à coup ce jour-là. La veille, le lac étoit gelé assez avant. Peu après le tremblement la glace fut dissipée par un vent chaud, qui tourna au Sud-Ouest. Les Magistrats ordonnèrent d’abord pour le onzième, à huit heures du matin, une procession à St. Xavier. Le lac a été beaucoup moins émû que le premier Novembre.

A Schaf house.C’est à trois heures moins un quart qu’on fixe le tremblement à Schafhousen. Tout le long du lac de Constance en remontant & en descendant le Rhin on l’a plus ou moins ressenti.

A Donaw-Eschingen dans le Fürstemberg on a senti le tremblement à dix heures du matin & point à deux heures & demi.

A St. Gall.On a écrit de St. Gall, du Rheintal, d’Appenzell, de Zug, du Toggenbourg, que le même tremblement avoit plus ou moins ébranlé tous les bâtimens de ces diverses contrées. A Lichtenteig, capitale du Toggenbourg, on entendit un frémissement après les sécousses & on sentit une odeur de souffre.

A Egrach, dans le Turgau, on dit y avoir ressenti huit secousses assez fortes. La rivière du Thur fut émuë, & un peu troublée.

A GlarisOn a mandé de Glaris que le tremblement y avoit été très-sensible ; mais plus violent encore à Näfels, Bourg près de la Lint. Le Couvent des Capucins fut violemment secoué.


h. Maritima maxime quatiuntur, nec montosa tali malo carem. Plin. Hist. lib. II. Cap. LXXX.

i. Rélation de M. Gagnebin de la Ferrière.

k. Cette augmentation d’eau vient d’une sorte de marais, qui s’est formé sur la croupe de la montagne, où l’on a fait tant de travaux ruineux. Ce Marais est né, ou est l’égout d’une fontaine qui a augmenté en quantité par les pluyes de 1755 & de 1756. Ce Marais étoit immédiatement au dessus de la source salée. Ces eaux, en se filtrant dans les diverses galeries, ont dissout un peu de ce sel cristallisé dans les fissures du rocher. Bientôt cette eau douce a détérioré la source salée. Les Employés continuoient leur travail, & avec plus de dépense n’avoient pas plus de sel. Monsieur le Directeur Herbort, plus attentif que ceux qui étoient payés pour l’être journellement, a connu le mal, détourné l’égout, & la source de sel, dechargée de ce surcroit d’eau douce, a repris sa qualité ordinaire. Voilà tout le fait selon la rélation de Mr. Knecht, Inspecteur dans les mêmes salines. Post hoc ergo propter hoc. Voilà le raisonnement qu’on avoit fait. On cherchoit dans le sein de la terre ce qui venoit de la surface. Mr. Knecht a découvert une nouvelle source salée dans ces contrées-là, à Chamosaire. Le célèbre Mr. de Haller y a été envoyé. Il a vérifié la découverte & son importance, & il l’a constatée dans le Conseil-Souverain, dont il est Membre.

l. Relation Allemande imprimée à Zuric chez Jean Gaspar Ziegler. 1755.

m. Rélation de Mr. Jalabert.

n. Relation de Mr. le Min. de Coppet.

o. In Collegio Alumnorum.

p. Lettres particulières, & relations allemandes imprimées.

q. Mr. le V. Pasteur Buxtorf, dans sa rélation ne compte que deux secousses.

r. Rélation de Mr. Baviere.